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Attendu que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges même si leur fondement juridique est différent ; Attendu qu'en l'espèce, la société Bellecour a demandé en première instance la condamnation de M. J... Y..., Mme B... D..., épouse Y..., Mme O... Y... et M. R... Y... à lui payer la somme de 76 406,61 euros à titre de dommages et intérêts en exécution de la convention de garantie du 13 décembre 2011 ; Attendu qu'en cause d'appel, elle demande subsidiairement la condamnation de M. J... Y... et de Mme B... D..., épouse Y..., à lui payer la somme de 70 000 euros de dommages et intérêts sur le fondement du dol commis par ces derniers ; Attendu que les consorts Y... concluent à juste titre que la demande est nouvelle comme ne tendant pas aux mêmes fins que la réclamation formée sur la garantie d'actif et de passif, s'agissant dans un cas pour la société Bellecour d'obtenir une condamnation à l'encontre de ses cocontractants, cessionnaires de la société Toutravo, à savoir M. J... Y..., Mme B... D..., épouse Y..., Mme O... Y... et M. R... Y..., et dans l'autre cas d'obtenir une condamnation à l'encontre des seuls M. J... Y... et Mme B... D..., épouse Y..., du fait des fautes délictuelles commises par ces derniers ; Attendu que la demande de la société Bellecour fondée sur la réticence dolosive de M. J... Y... et de Mme B... D..., épouse Y... est irrecevable ». 1°) Alors que les prétentions ne sont pas nouvelles en appel dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges ; qu'en déclarant irrecevable, comme nouvelle, la demande de la société Bellecour tendant à obtenir la condamnation de M. J... Y... et de Mme B... D..., épouse Y..., à lui payer la somme de 70.000 euros de dommages et intérêts sur le fondement du dol lorsqu'une telle demande tendait aux mêmes fins que celle fondée sur l'exécution de la garantie d'actif et de passif à savoir la réparation du préjudice subi par le cessionnaire à l'occasion de la cession des actions de la société Toutravo, la cour d'appel a violé les articles 564 et 565 du code de procédure civile. 2°) Alors que les prétentions ne sont pas nouvelles en appel dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges, même si leur fondement juridique est différent ; qu'en déclarant irrecevable comme nouvelle la demande de la société Bellecour tendant à obtenir la condamnation de M. J... Y... et de Mme B... D..., épouse Y..., à lui payer la somme de 70.000 euros de dommages et intérêts sur le fondement du dol aux motifs qu'il s'agissait dans un cas d'obtenir la condamnation de ses cocontractants, cédants de la société Toutravo et dans l'autre d'obtenir une condamnation à l'encontre des seuls M. J... Y... et Mme B... D..., épouse Y..., du fait des fautes délictuelles commises par ces derniers, lorsque la différence de fondement juridique des deux prétentions est indifférente, la cour d'appel a violé les articles 564 et 565 du code de procédure civile. 3°) Alors que les prétentions ne sont pas nouvelles en appel dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises aux premiers juges, même si elles ne sont pas dirigées contre les mêmes parties ; qu'en déclarant irrecevable comme nouvelle la demande de la société Bellecour tendant à obtenir la condamnation de M. J... Y... et de Mme B... D..., épouse Y..., à lui payer la somme de 70.000 euros de dommages et intérêts sur le fondement du dol aux motifs qu'il s'agissait dans un cas pour la société Bellecour d'obtenir une condamnation à l'encontre de ses cocontractants, cédants de la société Toutravo, à savoir M. J... Y..., Mme B... D..., épouse Y..., Mme O... Y... et M. R... Y..., et dans l'autre cas d'obtenir une condamnation à l'encontre des seuls M. J... Y... et Mme B... D..., épouse Y..., du fait des fautes délictuelles commises par ces derniers, alors que le fait que la demande ne soit pas dirigée contre les mêmes parties est indifférent et ne permet pas d'en caractériser la nouveauté, la cour d'appel a violé les articles 564 et 565 du code de procédure civile.
Cour d'appel de Lyon 3A, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-14.370 du 04/03/2020, partie 6
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 MARS 2020 M. Q... F... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Basse-Terre, chambre correctionnelle, en date du 12 mars 2019, confirmant l'ordonnance de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité le condamnant à quatre mois d'emprisonnement avec sursis du chef de violences sur conjoint. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Leblanc, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. Q... F..., et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 janvier 2020 où étaient présents M. Soulard, président, M. Leblanc, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision. Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : Après avoir examiné tant la recevabilité du recours que les pièces de procédure, la Cour de cassation constate qu'il n'existe, en l'espèce, aucun moyen de nature à permettre l'admission du pourvoi. EN CONSÉQUENCE, la Cour : DÉCLARE le pourvoi NON ADMIS ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du trois mars deux mille vingt.
décision 19-83.380 du 03/03/2020, partie 1
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 FÉVRIER 2020 M. O... U..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° E 18-25.330 contre l'arrêt rendu le 6 septembre 2018 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre D), dans le litige l'opposant à la caisse de Crédit mutuel de Carnac, société coopérative de crédit, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Martinel, conseiller doyen, les observations écrites de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. U..., de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la caisse de Crédit mutuel de Carnac, après débats en l'audience publique du 22 janvier 2020 où étaient présentes Mme Maunand, conseiller faisant fonction de président, Mme Martinel, conseiller doyen rapporteur, Mme Kermina, conseiller, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision. 1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. 2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi. EN CONSÉQUENCE, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. U... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. U... et le condamne à payer à la caisse de Crédit mutuel de Carnac la somme de 3 000 euros ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept février deux mille vingt. MOYEN ANNEXE à la présente décision Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. U... Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. U... de sa demande de mainlevée de l'hypothèque judiciaire provisoire inscrite par la Caisse de Crédit Mutuel de Carnac sur un immeuble lui appartenant à Laguiole et de sa demande aux fins de voir dire excessive et abusive la garantie de sa créance, AUX MOTIFS QUE sur la prescription de la créance garantie, à l'appui de sa demande de mainlevée, M. U... considère comme acquise au 22 avril 2013 la prescription de la créance de la banque, le délai de deux ans prévu par l'article L. 137-2 du code de la consommation s'étant écoulé avant toute réaction de son adversaire et ce, à compter du 22 avril 2011, date à laquelle la totalité de la somme due était devenue exigible ; que la Caisse de Crédit mutuel conteste le jeu de la prescription au motif qu'il n'y a pas lieu de faire référence à l'article L. 137-2 du code de la consommation, dans la mesure où les emprunteurs, agissant dans le cadre d'une promotion immobilière, ne sont pas des particuliers et que l'application de ce texte a d'ailleurs été expressément exclue dans la rédaction de l'acte notarié ; qu'elle avait expressément indiqué qu'en toute hypothèse, le délai de deux ans n'avait pu s'écouler en raison de la prorogation de l'échéance au 20 avril 2014 par l'effet de l'avenant convenu entre les parties le 22 avril 2011 ; qu'au vu de ce document, versé aux débats par l'établissement financier, et non contesté par l'emprunteur, il convient de confirmer le jugement déféré qui a d'emblée exclu le bénéfice de la prescription biennale invoquée par celui-ci, sans qu'il soit même nécessaire de statuer juridiquement sur le bien fondé de cette référence ; sur le caractère abusif et excessif de l'inscription hypothécaire, à l'appui de sa demande de mainlevée, M. U... excipe du caractère abusif et excessif de l'inscription hypothécaire prise sur des biens situés sur le territoire de la commune de Laguiole, alors que la banque bénéficie déjà d'une garantie hypothécaire sur d'autres biens, bâtis et non bâtis, situés sur le territoire de la commune de la [...], et alors qu'elle a, en recouvrement de sa créance, mis en oeuvre à leur encontre le 23 mai 2015 une procédure de saisie immobilière ; que ces biens, situés [...], et cadastrés section ... d'une superficie totale de 7758 m2 sont constitués d'une parcelle [...] d'une superficie de 532 m2 comprenant deux locaux d'activité, d'une parcelle [...] d'une superficie de 5889 m2, d'une parcelle [...] , d'une superficie de 223 m2 et d'une parcelle [...] d'une superficie de 50m2 ;
Cour d'appel de Montpellier 5A, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-25.330 du 27/02/2020, partie 1
qu'ils sont d'une valeur suffisante, l'appelant produit une offre d'achat d'un promoteur immobilier établie en 2008 pour un montant de 4 100 000 €, une évaluation du service des domaines précisant qu'en février 2010, la valeur du foncier sur la zone concernée s'élève à 500 € le m2, diverses évaluations établies par l'agence immobilière Square habitat indiquant le 7 mars 2007 une valeur vénale de 900 000 € net vendeur pour la parcelle [...] ; que, contestant cette argumentation, la banque se fonde sur un rapport d'expertise établi en 2014 fixant une valeur de 75 000 € ramenée à 50 000 € en cas de saisie ainsi que sur le procès verbal descriptif des biens dressé dans le cadre de la procédure de saisie immobilière ; qu'il apparaît à l'examen de ces divers documents que : -l'offre d'achat d'un promoteur immobilier n'est guère probante, compte tenu de son ancienneté, 2008, et des circonstances de sa formulation, dans le cadre d'un projet de promotion immobilière dont on ignore tout si ce n'est qu'il ne s'est manifestement pas réalisé ; -la rédaction de l'avis émis par le service des domaines pour une valeur de 100 000 € qui ne concerne qu'une partie constructible, soit 200m2, non précisée et non identifiable de l'ensemble des parcelles d'une superficie totale de 7758 m2, ne permet pas de déduire que la valeur du foncier annoncée à 500 € le m2 soit uniformément applicable à la totalité des surfaces concernées ; -l'évaluation par l'agence immobilière Square Habitat indiquant le 7 mars 2017 une valeur vénale de 900 000 € net vendeur pour la parcelle [...] , que cette estimation n'est pas convaincante en considération du rapport d'expertise adverse, qui fait état d'une servitude de voirie, au profit de la commune, nécessitant une démolition partielle des deux locaux ainsi que leur implantation dans un secteur d'inconstructibilité, de l'ordre de 60% du fait d'un fort risque de submersion marine, qui interdit toute nouvelle construction ou installation d'autre part, du procès verbal descriptif dressé par un huissier, qui décrit des espaces commerciaux non exploités, installés dans des bâtiments vétustes et en très mauvais état ; que dès lors, vu le montant de la somme due, il n'y a pas lieu de considérer que par la mise en oeuvre de la mesure provisoire litigieuse le 16 mars 2016, la Caisse de Crédit mutuel a excédé son droit à garantir sa créance ; que quant à la nouvelle inscription prise en 2017, sur deux biens appartenant à l'épouse, situés à B..., en l'état des rares éléments fournis, notamment en l'absence de précision du rang de la sureté, et en présence de simples évaluations faites par le même agent immobilier, il n'est pas possible d'affirmer qu'elle soit désormais suffisante pour couvrir l'intégralité de la dette, et justifier la mainlevée sollicitée ; que le jugement déféré sera également confirmé sur ce point ; 1) ALORS QUE le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; que la cour d'appel, statuant sur la prescription de la créance de la banque, a énoncé qu'il n'était pas nécessaire de statuer juridiquement sur la prescription biennale invoquée par M. U..., qu'en statuant ainsi pour déclarer la créance non prescrite, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile ; 2) ET ALORS QU'en énonçant qu'il n'était pas nécessaire de statuer sur le moyen tiré de la prescription, sans énoncer de motifs à l'appui de cette affirmation, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ; 3) ALORS QUE lorsque la valeur des biens grevés est manifestement supérieure au montant des sommes garanties, le débiteur peut en faire limiter les effets s'il justifie que les biens demeurant grevés ont une valeur double de la somme garantie ; qu'il était constant que la banque bénéficiait d'une garantie hypothécaire sur les biens appartenant à M. U... à la [...], soit un terrain de 7758 m2 en front de mer, évalué par le service des domaines à la somme de 3 879 000 € en 2010, outre une autre hypothèque sur un immeuble de 2015 m2, appartenant à sa femme, à B..., ainsi qu'une hypothèque sur un immeuble lui appartenant à Laguiole ; qu'il est également constant que la créance de la banque s'élevait à la somme de 1 011 613 € ; que la cour d'appel qui, après avoir nié la force probante de l'estimation du service des domaines quant à l'immeuble de la [...] comme des autres évaluations produites, en raison du caractère inondable du terrain, mais qui n'a pas recherché, comme elle y était invitée par M. U... dans ses conclusions, si la valeur cumulée des trois immeubles sur lesquels la banque avait inscrit une hypothèque n'excédait pas le montant, même doublé, de la créance, et qui a refusé de prononcer la mainlevée de l'hypothèque ou d'en limiter les effets a, en statuant ainsi, privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 532-9 du code des procédures civiles d'exécution.
Cour d'appel de Montpellier 5A, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-25.330 du 27/02/2020, partie 2
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 26 FÉVRIER 2020 La société Air France, société anonyme, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° G 18-16.340 contre le jugement rendu le 26 janvier 2018 par le tribunal d'instance de Marseille, dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Havas voyages, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , 2°/ à la société Thomas Cook France, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , 3°/ à M. J... Y..., 4°/ à Mme D... Y..., domiciliés tous deux [...] 5°/ à la société FHB, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , prise en la personne de Mme C... G..., en qualité d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société Thomas Cook, 6°/ à la société Thevenot Partners, société civile professionnelle, dont le siège est [...] , prise en la personne de Mme C... T..., en qualité d'administrateur judiciaire au redressement judiciaire de la société Thomas Cook, 7°/ à la société BTSG, société civile professionnelle, dont le siège est [...] , prise en la personne de M. Q... O..., en qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société Thomas Cook, 8°/ à la société [...], société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , prise en la personne de M. R... P..., en qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la société Thomas Cook, défendeurs à la cassation. Les sociétés Thomas Cook France, FHB, Thevenot Partners, BTSG et [...] ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de la société Air France, de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat des sociétés Thomas Cook France, FHB, Thevenot Partners, BTSG et [...], de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. et Mme Y..., après débats en l'audience publique du 21 janvier 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision. 1. Il est donné acte aux sociétés FHB, Thevenot Partners, BTSG et [...], toutes quatre ès qualités, de leur intervention et reprise d'instance. 2. Il est donné acte à la société Air France de sa reprise d'instance à l'égard des organes de la procédure de redressement judiciaire de la société Thomas Cook. 3. Les moyens de cassation du pourvoi principal annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. 4. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi. EN CONSÉQUENCE, la Cour : REJETTE le pourvoi principal ; Dit n'y avoir lieu de statuer sur le pourvoi incident ; Condamne la société Air France aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille vingt. MOYENS ANNEXES à la présente décision Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Air France. PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR condamné la société Havas Voyages à verser à M. et Mme Y... une somme de 576 € au titre de l'indemnisation de la perte d'une journée de séjour, outre à verser à chacun une somme de 300 € en réparation du préjudice moral subi et d'AVOIR dit en conséquence que la société Havas Voyages est garantie de ces condamnations par la société Thomas Cook et que la société Thomas Cook est elle-même garantie de ces condamnations par la société Air France ;
Tribunal d'instance de Marseille, Cour de cassation Première chambre civile, décision 18-16.340 du 26/02/2020, partie 1
AUX MOTIFS QUE l'article L. 211-16 du code du tourisme prévoit que « Toute personne physique ou morale qui se livre aux opérations mentionnées à l'article L. 211-1 est responsable de plein droit à l'égard de l'acheteur de la bonne exécution des obligations résultant du contrat, que ce contrat ait été conclu à distance ou non et que ces obligations soient à exécuter par elle-même ou par d'autres prestataires de services, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci et dans la limite des dédommagements prévus par les conventions internationales. Toutefois, elle peut s'exonérer de tout ou partie de sa responsabilité en apportant la preuve que l'inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable soit à l'acheteur, soit au fait, imprévisible et insurmontable, d'un tiers étranger à la fourniture des prestations prévues au contrat, soit à un cas de force majeure » ; que l'article L. 211-1 précise : « Le présent chapitre s'applique aux personnes physiques ou morales qui se livrent ou apportent leur concours, quelles que soient les modalités de leur rémunération, aux opérations consistant en l'organisation ou la vente : a) De voyages ou de séjours individuels ou collectifs ; b) De services pouvant être fournis à l'occasion de voyages ou de séjours, notamment la délivrance de titres de transport, la réservation de chambres dans des établissements hôteliers ou dans des locaux d'hébergement touristique et la délivrance de bons d'hébergement ou de restauration ; c) De services liés à l'accueil touristique, notamment l'organisation de visites de musées ou de monuments historiques. Le présent chapitre s'applique également aux opérations de production ou de vente de forfaits touristiques, tels que ceux-ci sont définis à l'article L. 211-2, ainsi qu'aux opérations liées à l'organisation et à l'accueil de foires, salons et congrès ou de manifestations apparentées dès lors que ces opérations incluent tout ou partie des prestations prévues aux a, b et c du présent I ; II. - Les personnes physiques ou morales immatriculées au registre mentionné au I de l'article L. 211-18 peuvent réaliser sous forme électronique les opérations mentionnées au I du présent article dans les conditions prévues par le présent chapitre et par les article 1124-1 à 3 du code civil, L. 121-15-1 à 3 du code de la consommation et la section 2 du chapitre Ier du titre II du livre Ier du même code, à l'exception des dispositions prévues au premier alinéa de l'article L 121-19-4. III.- Les organismes locaux de tourisme bénéficiant du soutien de l'État, des collectivités territoriales ou de leurs groupements peuvent se livrer ou apporter leur concours, dans l'intérêt général, à des opérations mentionnées au I, dès lors que celles-ci permettent de faciliter l'accueil ou d'améliorer les conditions de séjour des touristes dans leur zone géographique d'intervention ; IV.- Les associations et les organismes sans but lucratif ne peuvent réaliser tout ou partie des opérations mentionnées au I qu'en faveur de leurs membres ; V.- Le présent chapitre s'applique aux personnes physiques ou morales qui émettent des bons permettant d'acquitter le prix de l'une des prestations mentionnées au présent article et à l'article L. 211-2 » ; qu'enfin, l'article L. 211-2 du même code précise : « Constitue un forfait touristique la prestation : 1° Résultant de la combinaison préalable d'au moins deux opérations portant respectivement sur le transport, le logement ou d'autres services touristiques non accessoires au transport ou au logement et représentant une part significative dans le forfait ; 2° Dépassant vingt-quatre heures ou incluant une nuitée ; 3° Vendue ou offerte à la vente à un prix tout compris » ; que dès lors, ces dispositions légales instaurent un régime de responsabilité de plein droit de l'agent de voyage en cas d'inexécution du contrat ou de l'un de ses éléments ; que néanmoins, l'agent de voyage peut s'exonérer de sa responsabilité en cas de force majeure ; que l'ensemble de ces dispositions est donc parfaitement applicable à la Société Havas Voyages qui a, suivant contrat du 5 janvier 2016, vendu à Monsieur et Madame Y... un séjour pour deux adultes à destination de l'Ile Maurice du 20 au 30 mars 2016 pour un montant total de 5.183,20 euros, étant précisé que ce séjour était organisé par la Société Jet Tours, fournisseur de voyage qui assurait l'organisation et la prise en charge des vols Marseille-Paris desservis par la compagnie Air France, des vols Paris-Ile Maurice desservis par la compagnie Air Mauritius, des transferts aéroport-hôtel-aéroport, et de la réservation d'une chambre double à l'hôtel en demi-pension ; qu'en l'espèce, tant la société Havas Voyages, que la Société Thomas Cook, appelées par la première en garantie de ses obligations, soulèvent le cas de force majeure pris en la grève des contrôleurs aériens ; qu'il convient de rappeler que la notion de « force majeure » est d'origine jurisprudentielle et connaît donc une constante évolution sous le contrôle de la Cour de cassation ; que c'est donc l'examen au cas par cas des décisions judiciaires qui permet de dégager les grandes tendances et de considérer ou non qu'un type d'événement peut constituer un cas de force majeure ;
Tribunal d'instance de Marseille, Cour de cassation Première chambre civile, décision 18-16.340 du 26/02/2020, partie 2
que les critères traditionnels pour qualifier la force majeure sont au nombre de trois : pour être considéré comme un cas de force majeure, l'événement doit être à la fois extérieur (circonstance étrangère au débiteur de l'obligation), imprévisible, et irrésistible ; que le code civil définit désormais cette notion en son nouvel article 1218, tel qu'il résulte de l'ordonnance du 10 février 2016, qui dispose : « Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur. Si l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l'empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1 » ; que le caractère extérieur signifie que le débiteur ne doit être pour rien dans la survenance de la situation derrière laquelle il se retranche ; qu'il doit donc prouver une circonstance indépendante de sa volonté, et qui n'a pas d'avantage pour origine sa propre négligence ; qu'en outre, il doit s'agir d'un événement présentant un caractère imprévisible lors de la conclusion du contrat ; que les phénomènes climatiques ne rentrent pas forcément dans cette catégorie d'événement imprévisible : ainsi il a été considéré qu'un ouragan au Mexique n'était pas un cas de force majeure dans la mesure où il constituait un risque probable à cette période de l'année ; que de même, un événement peut être considéré comme force majeure la première fois qu'il arrive mais s'il se renouvelle, le critère d'imprévisibilité ne sera plus rempli (ex. une prochaine éruption du volcan islandais Eyjafjöll) ; que les intempéries n'ont un caractère de force majeure que si elles ont une intensité exceptionnelle ; que les juges administratifs affirment régulièrement qu'une violente tempête n'est pas un événement de force majeure surtout lorsqu'il existe des précédents connus dans la région concernée : une comparaison systématique est donc réalisée pour qualifier ou non l'événement de force majeure ; que les grèves, quant à elles, peuvent selon les cas être ou non considérées comme des cas de forces majeures ; que l'effet de surprise sera retenu si, au jour où l'engagement contractuel s'est formé, « le débiteur a entrevu l'éventualité d'un fait pernicieux mais ne pouvait en soupçonner la puissance » ; qu'il se peut ainsi qu'une grève soit prévisible quant à sa naissance (car annoncée) tandis que son ampleur et sa durée demeurent inconnues ; que c'est ce qui s'est produit lors des grèves ayant conduit à des pénuries de carburant durant de nombreux jours ; que dans ces hypothèses, la Cour de cassation a admis la force majeure à propos d'une grève de cheminots décidée avant même la formation du contrat mais dont nul n'aurait pu deviner qu'elle s'éterniserait et prendrait une intensité exceptionnelle paralysant l'activité économique de tout le pays ; qu'en l'espèce, Monsieur et Madame Y... produisent aux débats un document de l'UNSA ICNA Ingénieurs du Contrôle de la Navigation Aérienne daté du 22 février 2016 appelant à « réagir aux conditions de travail et systèmes indemnitaires, à la baisse des effectifs, à la problématique Retraite » « les 20 et 21 mars» ; que force est donc de constater qu'il s'agissait d'une grève annoncée depuis plusieurs semaines et qui concernait spécifiquement les contrôleurs aériens sur deux journées entières, ce que ne pouvaient ignorer les sociétés requises ; que la durée et l'ampleur de la grève étaient donc connus ; qu'il n'est pas démontré que la durée ait été plus longue que celle annoncée ; qu'il en va de même de son ampleur puisqu'il ressort des articles de presse produits par la société Air France qu'un vol sur cinq a été annulé et que la Direction Générale de l'Aviation Civile avait anticipé en demandant aux compagnies aériennes de réduire leurs programmes de vols notamment sur l'aéroport de Marseille ; que par ailleurs, ces articles de presse démontrent qu'en janvier 2016 une grève avait déjà été initiée concernant les mêmes problématiques ce qui démontre que les sociétés requises pouvaient valablement savoir que la grève serait particulièrement suivie ; que les sociétés requises ne démontrent pas avoir été dans l'impossibilité de prendre toutes dispositions nécessaires ; que dès lors, les circonstances de l'espèce ne permettent pas de retenir l'existence de la force majeure ; que les sociétés requises ne seront donc pas exonérées de leur responsabilité ; que Monsieur et Madame Y... sont en droit d'obtenir la condamnation de leur cocontractant, la société Havas Voyages, celle-ci étant garantie par la société Thomas Cook en vertu de l'article 13 du contrat de distribution les liant, et celle-ci étant elle-même garantie par la Société Air France en sa qualité de transporteur dont la responsabilité est engagée en vertu de l'article 5 et de l'article 14 du règlement CE 261/2004 ; qu'au titre du préjudice, il conviendra de relever que Monsieur et Madame Y... sont finalement arrivés à destination 24 heures plus tard ;
Tribunal d'instance de Marseille, Cour de cassation Première chambre civile, décision 18-16.340 du 26/02/2020, partie 3
qu'il sera également relevé qu'ils ont été contraints après avoir attendu à l'aéroport, de retourner à leur domicile, puis le lendemain de prendre un train puis enfin un vol à destination de l'Ile Maurice 24 heures après et qui lui-même présentait un retard d'une heure trente ; que Monsieur et Madame Y... ont donc perdu une journée de leur séjour sur place et ont subi un préjudice moral issu de l'ensemble de ces désagréments ; que par suite, il conviendra de condamner la société Havas Voyages à payer à Monsieur et Madame Y... la somme de 576 euros en indemnisation de la perte d'une journée de séjour, ainsi qu'à payer à Madame Y... la somme de 300 euros et à Monsieur Y... la somme de 300 euros en réparation du préjudice moral subi ; qu'il conviendra de dire que la société Havas Voyages sera garantie pour cette condamnation par la société Thomas Cook et de dire que la Société Thomas Cook sera elle-même garantie par la société AIR France ; qu'aucune condamnation solidaire ne saurait être retenue entre ces trois sociétés comme les requérants le sollicitent, la solidarité devant être expressément prévue au contrat liant les parties, ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisqu'il s'agit bien de recours en garantie ; 1) ALORS QUE le vendeur de forfait touristique peut s'exonérer de sa responsabilité en apportant la preuve que l'inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable à un cas de force majeure ; que l'imprévisibilité constitutive de la force majeure doit être appréciée au jour de la conclusion du contrat ; qu'au cas d'espèce, en repoussant la cause exonératoire de responsabilité soulevée par la société Havas Voyages, vendeur du forfait touristique, tirée de l'existence d'un cas de force majeure résultant de la grève massive des contrôleurs aériens français le 20 mars 2016, motif pris de ce que cette grève avait été annoncée plusieurs semaines à l'avance comme le prouvait notamment un document syndical en date du 22 février 2016, en sorte qu'elle n'était pas imprévisible, quand cette imprévisibilité devait s'apprécier au jour de la conclusion du contrat, soit le 5 janvier 2016, le tribunal d'instance a violé l'article L. 211-16 du code du tourisme (dans sa rédaction issue de la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009, applicable à l'espèce), ensemble l'article 1148 du code civil (dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016) ; 2) ALORS QUE la force majeure s'entend d'un événement extérieur au débiteur, imprévisible dans sa réalisation et irrésistible dans ses effets ; qu'au cas d'espèce, en se bornant, pour considérer que la grève des contrôleurs aériens du 20 mars 2016 ne présentait pas un caractère irrésistible, à énoncer qu'une grève motivée par les mêmes raisons avait déjà eu lieu en janvier 2016 et que les sociétés considérées ne prouvaient pas avoir été dans l'impossibilité de prendre toutes dispositions nécessaires, sans s'expliquer, comme elle y était invitée (conclusions oralement soutenues de la société Air France, p. 3), sur le fait que tous les vols Marseille-Paris du dimanche 20 mars 2016 après 16 h avaient été annulés par décision de la Direction générale de l'aviation civile, à laquelle il n'était pas possible de résister, le tribunal d'instance n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 211-16 du code du tourisme (dans sa rédaction issue de la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009, applicable à l'espèce), ensemble l'article 1148 du code civil (dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016). SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit que la société Thomas Cook est relevée et garantie des condamnations prononcées contre elle par la société Air France ; AUX MOTIFS QU'en l'espèce, Monsieur et Madame Y... produisent aux débats un document de l'UNSA ICNA Ingénieurs du Contrôle de la Navigation Aérienne daté du 22 février 2016 appelant à « réagir aux conditions de travail et systèmes indemnitaires, à la baisse des effectifs, à la problématique Retraite » « les 20 et 21 mars» ; que force est donc de constater qu'il s'agissait d'une grève annoncée depuis plusieurs semaines et qui concernait spécifiquement les contrôleurs aériens sur deux journées entières, ce que ne pouvaient ignorer les sociétés requises ; que la durée et l'ampleur de la grève étaient donc connus ; qu'il n'est pas démontré que la durée ait été plus longue que celle annoncée ; qu'il en va de même de son ampleur puisqu'il ressort des articles de presse produits par la société Air France qu'un vol sur cinq a été annulé et que la Direction Générale de l'Aviation Civile avait anticipé en demandant aux compagnies aériennes de réduire leurs programmes de vols notamment sur l'aéroport de Marseille ; que par ailleurs, ces articles de presse démontrent qu'en janvier 2016 une grève avait déjà été initiée concernant les mêmes problématiques ce qui démontre que les sociétés requises pouvaient valablement savoir que la grève serait particulièrement suivie ; que les sociétés requises ne démontrent pas avoir été dans l'impossibilité de prendre toutes dispositions nécessaires ;
Tribunal d'instance de Marseille, Cour de cassation Première chambre civile, décision 18-16.340 du 26/02/2020, partie 4
que dès lors, les circonstances de l'espèce ne permettent pas de retenir l'existence de la force majeure ; que les sociétés requises ne seront donc pas exonérées de leur responsabilité ; que Monsieur et Madame Y... sont en droit d'obtenir la condamnation de leur cocontractant, la société Havas Voyages, celle-ci étant garantie par la société Thomas Cook en vertu de l'article 13 du contrat de distribution les liant, et celle-ci étant elle-même garantie par la Société Air France en sa qualité de transporteur dont la responsabilité est engagée en vertu de l'article 5 et de l'article 14 du règlement CE 261/2004 ; qu'au titre du préjudice, il conviendra de relever que Monsieur et Madame Y... sont finalement arrivés à destination 24 heures plus tard ; qu'il sera également relevé qu'ils ont été contraints après avoir attendu à l'aéroport, de retourner à leur domicile, puis le lendemain de prendre un train puis enfin un vol à destination de l'Ile Maurice 24 heures après et qui lui-même présentait un retard d'une heure trente ; que Monsieur et Madame Y... ont donc perdu une journée de leur séjour sur place et ont subi un préjudice moral issu de l'ensemble de ces désagréments ; que par suite, il conviendra de condamner la société Havas Voyages à payer à Monsieur et Madame Y... la somme de 576 euros en indemnisation de la perte d'une journée de séjour, ainsi qu'à payer à Madame Y... la somme de 300 euros et à Monsieur Y... la somme de 300 euros en réparation du préjudice moral subi ; qu'il conviendra de dire que la société Havas Voyages sera garantie pour cette condamnation par la société Thomas Cook et de dire que la Société Thomas Cook sera elle-même garantie par la société AIR France ; qu'aucune condamnation solidaire ne saurait être retenue entre ces trois sociétés comme les requérants le sollicitent, la solidarité devant être expressément prévue au contrat liant les parties, ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisqu'il s'agit bien de recours en garantie ; 1) ALORS QU'en cas d'annulation d'un vol, le transporteur aérien effectif peut se dégager de son obligation d'indemniser le passager lorsqu'il prouve que l'annulation est due à des circonstances extraordinaires qui n'auraient pas pu être évitées même si toutes les mesures raisonnables avaient été prises, en application de l'article 5.3 du règlement (CE) n° 261/2004 du 11 février 2004 ; que cette cause d'exonération, propre à cet instrument de droit européen, ne se confond pas avec la notion du droit interne français de force majeure, que ce soit en matière contractuelle ou au regard des dispositions spécifiques de l'article L. 211-16 du code du tourisme (dans sa rédaction issue de la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009); que lorsque le vendeur de forfait touristique condamné à indemniser son acheteur sur le fondement de ce dernier texte prétend exercer son droit de recours contre le transporteur aérien à l'origine de l'annulation d'un vol, ce recours présente une nature subrogatoire dans les droits que détenait l'acheteur du forfait contre le transporteur aérien au titre du règlement (CE) n° 261/2004 ; qu'au cas d'espèce , en se bornant à dire que la responsabilité de la société Air France était engagée en application des articles 5 et « 14 » (sic : lire : « considérant n° 14 ») du règlement (CE) n° 261/2004, sans s'expliquer sur le point de savoir si, abstraction faite de la question du cas de force majeure concernant la responsabilité du vendeur de forfait touristique, les conditions spécifiques d'exonération de responsabilité prévues par l'article 5.3 du règlement, dont la société Air France se prévalait expressément, étaient réunies, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard des articles 5.3 et 7 du règlement (CE) n° 261/2004 du 11 février 2004, ensemble l'article 1251, 3° du code civil (dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016) ; 2) ALORS, subsidiairement, QUE selon l'article 7 du règlement (CE) n° 261/2004 du 11 février 2004, le droit à indemnisation du passager en cas d'annulation du vol est limité à 250 € lorsque le vol est inférieur à 1.500 km ; qu'au cas d'espèce, en condamnant la société Air France à garantir intégralement la société Thomas Cook, elle-même condamnée à garantir intégralement Havas Voyages des condamnations prononcées contre cette dernière, lesquelles totalisaient la somme de 1.176 € (576 + 300 +300), sans s'expliquer sur la limitation du droit à indemnisation de chacun des passagers, dans les droits desquels la société Thomas Cook, et avant elle la société Havas Voyages, étaient subrogées, alors même qu'elle était expressément invoquée par la société Air France, le tribunal d'instance a privé sa décision de base légale au regard de l'article 7 du règlement (CE) n° 261/2004 du 11 février 2004, ensemble l'article 1251, 3° du code civil (dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016).
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2020 M. Q... J..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° E 19-14.248 contre l'arrêt rendu le 13 décembre 2018 par la cour d'appel de Bordeaux (2e chambre civile), dans le litige l'opposant : 1°/ à U... C..., ayant été domicilié [...] , décédé, aux droits duquel viennent ses héritières, 2°/ à Mme N... E..., épouse C..., domiciliée [...] , 3°/ à Mme A... C..., épouse Y..., domiciliée [...] , prises toutes deux à titre personnel et en qualité d'héritières de U... B... C..., 4°/ à M. S... F..., domicilié [...] , 5°/ à Mme P... L..., épouse W..., domiciliée [...] , 6°/ à M. X... I..., domicilié [...] , défendeurs à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Guillaudier, conseiller référendaire, les observations écrites de Me Brouchot, avocat de M. J..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. I..., et l'avis de M. Burgaud, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 14 janvier 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Guillaudier, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Berdeaux, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision. 1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. 2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi. EN CONSÉQUENCE, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. J... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. J... et le condamne à payer à M. I... la somme de 3 000 euros ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize février deux mille vingt. MOYENS ANNEXES à la présente décision Moyens produits par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour M. J.... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré éteint le droit de préférence institué par acte authentique en date du 12 août 1968 et d'AVOIR débouté M. Q... J... de l'ensemble de ses demandes tendant à voir déclarer nulles, pour défaut de publication au service de la publicité foncière, les promesses de vente conclues les 7 septembre et 3 octobre 2011 et 10 et 12 janvier 2012, et par voie de conséquence la vente intervenue, par acte notarié du 29 février 2012 établi par Me I..., entre les consorts C..., vendeurs, et M. F..., acquéreur de parcelles contiguës à celles précédemment acquises par son auteur, M. R... J..., et à voir dire non purgé le pacte de préférence contenu dans l'acte du 12 août 1968 ; AUX MOTIFS QUE M. J... soutient que les promesses de vente n'ayant pas été publiées alors que la rencontre des consentements vaut vente et donc obligation de publicité foncière s'agissant de la mutation de droits réels immobiliers, ces promesses de vente seraient nulles entraînant la nullité de l'acte du 29 février 2010, ces actes étant interdépendants et indivisibles ; que cependant, si une promesse de vente vaut vente, encore faut-il que celle-ci ne soit pas assortie de conditions suspensives ; qu'or, en l'espèce, outre l'existence d'une condition suspensive liée à l'obtention d'un prêt par l'acquéreur, la promesse de vente était soumise à la condition que M. J... ne demande pas l'application du pacte de préférence existant à son profit ; qu'en conséquence, les différentes promesses de vente n'avaient pas à faire l'objet d'une publicité foncière en raison de l'existence de ces conditions suspensives ; 1) ALORS QUE sont obligatoirement publiés au service chargé de la publicité foncière tous actes, même assortis d'une condition suspensive portant ou constatant entre vifs la mutation ou la constitution de droits réels immobiliers ;
Cour d'appel de Bordeaux 1B, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 19-14.248 du 13/02/2020, partie 1
que, dans ses conclusions d'appel, M. J... avait soulevé la nullité, pour défaut de publication au service de la publicité foncière, des promesses de vente conclues les 7 septembre et 3 octobre 2011 et 10 et 12 janvier 2012 entre les consorts C... et M. F..., objet des notifications par notaire, ayant abouti à la vente, par acte du 29 février 2012, des parcelles contiguës aux siennes, en méconnaissance de son droit de préférence contractuellement prévu dans l'acte de vente de son père, bénéficiaire, en date du 12 août 1968 ; qu'en écartant ce moyen de nullité motif pris que des promesses de vente n'avaient pas à être publiées dès lors qu'elles comportaient des conditions suspensives liées à l'obtention d'un prêt par l'acquéreur, M. F..., d'une part, et à la purge du droit de préférence de M. J..., d'autre part, la cour d'appel a méconnu le principe susvisé et violé les articles 710-1 du code civil tel qu'issu des dispositions de l'article 9 de la loi n° 2011-311 du 28 mars 2011 dite « loi de modernisation des professions juridiques et judiciaires », 29 de la loi n° 55-22 du 26 décembre 1969 et 28 du décret n° 55-22 du 24 janvier 1955 ; 2) ALORS QUE le dernier avenant à la promesse de vente en date du 12 janvier 2012 notifié par Me I..., notaire, à M. J..., bénéficiaire d'un pacte de préférence, stipulait que « l'acquéreur dispose de la totalité des fonds pour la régularisation de l'acte authentique, qui est financé au moyen d'un emprunt privé » ; qu'en affirmant dès lors que la promesse de vente comportait une condition suspensive liée à l'obtention d'un prêt par l'acquéreur, M. F..., la cour d'appel a méconnu le principe édictant l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; 3) ALORS QUE le juge ne doit pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'en affirmant que la promesse de vente était soumise à la condition que M. J... ne demande pas l'application du pacte de préférence existant à son profit, la cour d'appel, qui a ajouté une condition à la loi des parties qui ne la comportait pas, a violé le principe susvisé. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR déclaré éteint le droit de préférence institué par acte authentique en date du 12 août 1968 et d'AVOIR débouté M. Q... J... de l'ensemble de ses demandes tendant à voir déclarer nulles, pour défaut de publication au service de la publicité foncière, les promesses de vente conclues les 7 septembre et 3 octobre 2011 et 10 et 12 janvier 2012, et par voie de conséquence la vente intervenue, par acte notarié du 29 février 2012 établi par Me I..., entre les consorts C..., vendeurs, et M. F..., acquéreur de parcelles contiguës à celles précédemment acquises par son auteur, M. R... J..., et à voir dire non purgé le pacte de préférence contenu dans l'acte du 12 août 1968 ; AUX MOTIFS QUE suivant acte authentique du 12 août 1968, M. C..., auteur des consorts C..., a vendu à M. et Mme R... J..., auteurs de M. Q... J..., un ensemble immobilier, sis [...] cadastré section [...] , [...] et [...] ; que cet acte prévoyait un pacte de préférence rédigé ainsi : Par les présentes, M. U... C... comparant, concède à M. et Mme J... qui acceptent, un droit de préférence pour l'acquisition de tout ou partie des immeubles contigus de quelle que nature qu'ils soient et ce sous les conditions suivantes : M. U... C... s'interdit et interdit à ses héritiers et représentants d'aliéner tout ou partie desdits immeubles contigus à ceux présentement vendus, sous quelque forme que ce soit, sauf à titre gratuit, sans préalablement mettre M. et Mme J... ou leurs ayants droit à même de les acquérir à conditions égales par préférence à tous autres. M. C... ne sera tenu d'accorder la préférence à M. et Mme J... que si ceux-ci acceptent toutes les conditions, sans exception, qui auraient été acceptées par les autres amateurs, auxquels M. C... aurait été disposé à vendre tout ou partie des immeubles dont il s'agit. En conséquence Si M. C... était disposé à accepter des propositions d'achat desdits immeubles, il ne pourra traiter, avec l'auteur de ces propositions sans avoir préalablement fait connaître cette intention à M. et Mme J... par lettre recommandée avec avis de réception contenant les nom, qualité et domicilie de l'amateur, le prix offert, les conditions de paiement et celles particulières de la vente et une élection de domicile dans le ressort du tribunal de grande instance d'Angoulême. Dans les trente jours de la mise à la poste de la lettre recommandée, M. et Mme J... devront faire connaître à M. C... au domicile élu par eux par lettre recommandée avec avis de réception leur intention d'user du droit de préférence à eux concédé et s'obliger à réaliser la vente dans les quinze jours qui suivront, moyennant le prix et sous les charges et conditions à eux notifiés.
Cour d'appel de Bordeaux 1B, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 19-14.248 du 13/02/2020, partie 2
Si M. et Mme J... n'ont pas déclaré dans le délai ci-dessus leur intention d'user du droit de préférence, ils en seront déchus et M. C... pourra librement vendre l'immeuble dont il s'agit à l'amateur lui ayant fait les propositions d'achat non acceptées par M. et Mme J.... Cependant, si les propositions faites par le tiers amateur n'étaient pas suivies d'une vente à ce dernier aux conditions indiquées dans les six mois de l'avis donné à M. et Mme J..., le droit de préférence de ceux-ci ne serait pas éteint. Le tiers qui aurait réalisé l'acquisition aux conditions non acceptées par M. et Mme J... sur le refus de ceux-ci d'user de leur droit de préférence, pourra librement disposer de l'immeuble par lui acquis, ledit droit se trouvant définitivement éteint. Ainsi qu'il a été dit, M. C... pourra disposer à son gré à titre gratuit de tout ou partie des immeubles dont il s'agit, mais à charge d'imposer au donataire l'engagement résultant des présentes dans le cas où ce donataire voudrait disposer de tout ou partie des immeubles à titre onéreux avant l'expiration du droit concédé à M. et Mme J.... En cas de décès de M. C..., ses héritiers et représentants fussent-ils mineurs ou autrement incapables seront tenus d'exécuter les engagements résultant des présentes. L'attribution des immeubles en cause, par partage ou licitation à un héritier ou représentant de M. C..., ne donnera pas lieu à l'exercice du droit de préférence mais l'attributaire sera tenu d'observer la présente mention dans le cas où il voudrait aliéner lesdits immeubles à titre onéreux » ; qu'il y a lieu de relever que ce pacte de préférence est soumis à la seule loi des parties laquelle ne subordonnait pas l'obligation du promettant à la conclusion préalable d'une vente avec un tiers acquéreur auquel le bénéficiaire se substituerait mais seulement à permettre au bénéficiaire d'acquérir aux mêmes conditions que le tiers ; qu'il convient de relever que s'il est exact que plusieurs notifications ont été faites à M. J... concernant la vente litigieuse notamment par Me I..., ces différentes notifications ne sont que la conséquence des revendications de M. J... concernant l'exercice de son droit de préférence ; que ce dernier ne peut valablement invoquer une faute liée à ces notifications dans la mesure où elles ont eu pour conséquence de prolonger d'autant son temps de réflexion puisque chaque nouvelle notification lui ouvrait droit à un nouveau délai d'un mois ; que l'examen de la dernière notification fait par Me I... en date du 12 janvier 2012 démontre que les formes prévues ont été respectées à savoir l'envoi d'une lettre recommandée avec avis de réception mentionnant les nom, qualité et domicilie du tiers acquéreur, la mention du prix offert avec la ventilation de celui-ci selon les parcelles pour tenir compte du caractère contigu de celles-ci avec la propriété de M. J..., les conditions de paiement, les conditions particulières de la vente et la précision de l'élection de domicile ; que cette lettre reprenait en outre intégralement la clause concernant ce pacte de préférence et rappelait qu'il appartenait à M. J... de faire connaître sa volonté d'exercer son droit de préférence dans les trente jours de la mise à la poste de la lettre recommandée ; que cette notification est parfaitement conforme aux termes du pacte de préférence tel que convenu contractuellement entre les auteurs des consorts C... et de M. J... ; qu'il n'est pas contesté par M. J... que dans le délai de trente jours, il n'a pas fait connaître sa volonté de bénéficier de ce droit de préférence ; que de plus, contrairement à ses affirmations, M. J... n'était pas fondé à demander la production des différentes promesses de vente qui sont intervenues concernant ces biens, promesses de vente modifiées en raison d'un changement de qualité de l'acquéreur, d'abord une SCI puis M. F... à titre personnel, cette demande ajoutant des conditions au pacte de préférence consenti initialement ; que de même c'est à tort qu'il invoque l'existence d'un prix ne correspondant pas à la valeur réelle des biens en ce qui concerne ceux sur lesquels il pouvait exercer son droit de préférence ; que le pacte de préférence ne permettait pas au bénéficiaire de contester le prix de vente mais seulement d'accepter les conditions du tiers acquéreur ; qu'il ne démontre nullement autrement que par ses affirmations, l'existence d'une fraude, étant constaté que l'acte authentique a repris la ventilation du prix de vente indiqué à M. J... dans la notification adressée par Me I... ; 1) ALORS QUE le pacte de préférence est défini comme le contrat par lequel une partie s'engage à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où elle déciderait de contracter ;
Cour d'appel de Bordeaux 1B, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 19-14.248 du 13/02/2020, partie 3
que le pacte de préférence consenti par M. C... dans l'acte de cession immobilière en 1968 au bénéfice de M. J..., acquéreur, prévoyait qu'il « s'interdit et interdit à ses héritiers et représentants d'aliéner tout ou partie desdits immeubles contigus à ceux présentement vendus, sous quelque forme que ce soit, sauf à titre gratuit, sans préalablement mettre M. et Mme J... ou leurs ayants droit à même de les acquérir à conditions égales par préférence à tous autres » ce qui impliquait que le bénéficiaire devait être informé de tout projet de vente future de la part du promettant ayant l'intention de céder lesdites parcelles contiguës ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'il le lui était clairement demandé, si la notification effectuée par le notaire, Me I..., le 12 janvier 2012, d'un avenant à des compromis de vente en faveur d'un tiers acquéreur, M. F..., ne caractérisait pas une violation flagrante de son pacte de préférence interdisant toute conclusion d'une promesse de vente valant vente avant réception de sa manifestation expresse de volonté de ne pas exercer son droit de préférence, la cour d'appel qui s'est prononcée par des motifs inopérants tirés de la possibilité donnée à M. J... suite à la notification de ces promesses de vente et avenant de se prononcer sur l'exercice de son droit de préférence, a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1134 et 1589 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016 ; 2) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, M. J... avait fait valoir que les notifications effectuées par le notaire, Me I..., étaient entachées de nullité en ce qu'elles portaient sur des actes juridiques, promesses de vente et avenant, visant des parcelles non incluses dans celles faisant l'objet du pacte de préférence ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé les articles 455 du code de procédure civil et 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme.
Cour d'appel de Bordeaux 1B, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 19-14.248 du 13/02/2020, partie 4
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2020 Mme W... B..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° G 19-10.732 contre l'arrêt rendu le 21 novembre 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (14e chambre), dans le litige l'opposant à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhônes, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Coutou, conseiller, les observations écrites de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme B..., de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhônes, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 janvier 2020 où étaient présents M. Prétot, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Coutou, conseiller rapporteur, Mme Vieillard, conseiller, et Mme Szirek, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision. 1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. 2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi. EN CONSÉQUENCE, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme B... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé par M. Prétot, conseiller doyen faisant fonction de président, et par Mme Pontonnier, greffier de chambre présent lors de la mise à disposition de la décision le treize février deux mille vingt. MOYEN ANNEXE à la présente décision Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour Mme B... Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que le malaise mortel de M. B... survenu le 6 mai 2014 ne devait pas être pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie au titre de la législation professionnelle et d'AVOIR débouté Mme B... de ses demandes ; AUX MOTIFS QUE « M. B..., né en [...] qui s'apprêtait à prendre son service le 6 mai 2014 à 8 heures, s'est effondré brutalement, à 7h50, sur le parking de l'entreprise [...], alors qu'il venait de descendre de sa voiture personnelle et se dirigeait vers son camion ; qu'il est décédé sur place après l'arrivée des secours ; que le diagnostic médical porté par le médecin urgentiste assisté d'un représentant de la gendarmerie a été le suivant : « arrêt cardio-respiratoire » ; que le permis d'inhumer a été accordé, mais pas la crémation ; qu'il n'y a pas eu d'autopsie et le défunt est enterré au Maroc ; que l'employeur a immédiatement émis des réserves motivées sur le caractère professionnel de l'accident ; que la caisse a procédé à une enquête administrative et une expertise a été organisée à la demande des ayants droit ; que le protocole d'expertise rédigé les 27 août-9 septembre 2014, contresigné par le médecin conseil de la caisse et le Dr V..., médecin de famille, se conclut ainsi : « compte tenu des étiologies d'un arrêt cardio-circulatoire non traumatique, de l'absence de facteur professionnel quelconque ayant précédé la survenue du malaise mortel il est possible d'affirmer l'absence d'éléments en rapport avec le contexte du travail susceptible d'avoir favorisé ce malaise mortel » ; que le Dr V... a émis un avis réservé « sur la question du risque AT survenu pendant le trajet du domicile au travail, qu'il y ait un lien de causalité direct évident ou non » ; que la caisse a refusé de reconnaître le caractère professionnel au motif que son service médical puis le Dr T..., expert désigné par la caisse dans le cadre des articles L. 141-1 et R. 141-1 du code de la sécurité sociale avaient conclu qu'« il n'est pas possible de dire qu'il existe un lien de causalité par origine ou par aggravation entre le malaise mortel déclaré en AT et les conditions de travail à ce moment-là » ; que Mme B... a communiqué devant la juridiction de sécurité sociale l'avis médical du Dr V..., selon lequel son mari n'était atteint d'aucune maladie contagieuse « cliniquement décelable » et celui d'un autre médecin daté du 29 janvier 2016 attestant qu'« il n'avait pas d'antécédent cardio-vasculaire connu » (pièces 2 et 15) ; qu'elle se prévaut de la présomption d'imputabilité édictée par l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale ;
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 14, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 19-10.732 du 13/02/2020, partie 1
que l'accident du travail se définit comme l'« accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail » ; que l'expert a expressément indiqué que la cause exacte du décès restait inconnue ; que sur le plan médical, le Dr T..., expert, explique clairement qu'il n'est pas possible d'établir un lien de causalité entre l'arrêt cardio-respiratoire et les conditions de travail puisque la victime qui n'avait pas encore commencé sa journée de travail, n'avait subi aucun stress et n'avait fait aucun effort particulier susceptible de provoquer un arrêt cardiorespiratoire ; que l'absence de « maladie contagieuse » n'est pas contestable ; quant au praticien qui a établi le certificat médical en 2016 (pièce 15), il prend soin de préciser « pas d'antécédent cardio-respiratoire connu », confirmant ainsi le caractère aléatoire et imprévisible du malaise cardiaque mortel dès lors qu'aucun stress et aucun fait traumatique n'ont été constatés le 6 mai 2014 avant 7h50 ; que ce malaise mortel doit être considéré comme ayant une cause totalement étrangère au travail et aux conditions dans lesquels il s'exerçait ; que les éléments médicaux permettent d'écarter la présomption d'imputabilité de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale ; que la cour infirme le jugement dont appel » ; 1°) ALORS QUE le juge est tenu de préciser le fondement juridique de sa décision ; qu'en statuant par des motifs qui ne permettent pas de déterminer si elle a jugé que Mme B... ne bénéficiait pas de la présomption d'imputabilité prévue à l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale ou si au contraire la CPAM avait renversé cette présomption en rapportant la preuve de la non imputabilité du décès au travail, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a violé l'article 12 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QU'en toute hypothèse, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise ; qu'il résultait des propres constatations de la cour d'appel que le malaise s'est produit à 7h50 alors que « M. B... [ ] s'apprêtait à prendre son service le 6 mai 2014 à 8 heures, [ ] sur le parking de l'entreprise [...], alors qu'il venait de descendre de sa voiture personnelle et se dirigeait vers son camion » (arrêt p. 3, al. 5) ce dont il résultait que l'accident s'était produit sur le lieu de travail et à l'occasion du travail ; qu'en jugeant que la présomption d'accident du travail n'était pas applicable, la cour d'appel a violé l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale ; 3°) ALORS QU'en toute hypothèse, est également considéré comme accident du travail, l'accident survenu à un travailleur, pendant le trajet d'aller et de retour, entre sa résidence principale et le lieu du travail ; qu'il résultait des propres constatations de la cour d'appel que le malaise s'est produit à 7h50 alors que « M. B... [ ] s'apprêtait à prendre son service le 6 mai 2014 à 8 heures, [ ] sur le parking de l'entreprise [...], alors qu'il venait de descendre de sa voiture personnelle et se dirigeait vers son camion » (arrêt p. 3, al. 5) ce dont il résultait que l'accident constituait, à tout le moins un accident du travail au sens de l'article L. 411-2 du code de la sécurité sociale ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé le texte précité ; 4°) ALORS QU'en toute hypothèse, toute lésion survenant au temps et au lieu du travail doit être considérée comme résultant d'un accident du travail, sauf s'il est rapporté la preuve que cette lésion est dépourvue de tout lien avec le travail ; qu'en jugeant que le « malaise mortel [dont a été victime M. B... devait] être considéré comme ayant une cause totalement étrangère au travail et aux conditions dans lesquels il s'exerçait » (arrêt p. 3, antépénultième al.) quand il résultait de ses propres constatations que le malaise s'est produit à 7h50 alors que « M. B... [ ] s'apprêtait à prendre son service le 6 mai 2014 à 8 heures, [ ] sur le parking de l'entreprise [...], alors qu'il venait de descendre de sa voiture personnelle et se dirigeait vers son camion » (arrêt p. 3, al. 5) ce dont il s'évinçait que l'accident s'était produit sur le lieu de travail de M. B... et à l'occasion du travail et n'était donc pas dépourvu de tout lien avec le travail, la cour d'appel a violé l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale ; 5°) ALORS QU'en toute hypothèse, toute lésion survenant au temps et au lieu du travail doit être considérée comme résultant d'un accident du travail, sauf s'il est rapporté la preuve que cette lésion est dépourvue de tout lien avec le travail ; que cette preuve n'est pas rapportée lorsque les causes du décès sont demeurées inconnues ;
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 14, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 19-10.732 du 13/02/2020, partie 2
qu'il résulte des constatations de l'arrêt que « l'expert [avait] expressément indiqué que la cause exacte du décès restait inconnue » (arrêt p. 3, al. 15) ; qu'en jugeant que les éléments médicaux permettaient d'écarter la présomption d'imputabilité de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale.
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 14, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 19-10.732 du 13/02/2020, partie 3
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 5 FÉVRIER 2020 La société Compagnie du Ponant, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° D 18-24.777 contre l'arrêt rendu le 27 septembre 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (2e chambre), dans le litige l'opposant à la société Latitude Blanche, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations écrites de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Compagnie du Ponant, de la SCP Zribi et Texier, avocat de la société Latitude Blanche, et l'avis écrit de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 10 décembre 2019 où étaient présents M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, Mme Guinamant, avocat général référendaire, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision. 1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. 2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi. EN CONSÉQUENCE, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Compagnie du Ponant aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Compagnie du Ponant et la condamne à payer à la société Latitude Blanche la somme de 3 000 euros ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq février deux mille vingt. MOYEN ANNEXE à la présente décision Moyen produit par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société Compagnie du Ponant Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, confirmant l'ordonnance de référé, ordonné à la société Compagnie du Ponant de restituer à la société Latitude Blanche les trois zodiacs objets de la facture du 27 juin 2017, dans les 48 heures à compter de la signification de la décision, soit chez AS Marine, soit en tous lieux accessibles à Marseille et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 1 000 euros par jour de retard jusqu'au 7 avril 2018 et y, ajoutant, d'AVOIR débouté rejeté la société Compagnie du Ponant de sa demande indemnitaire formée à l'encontre la société Latitude Blanche pour abus du droit d'agir en justice ; AUX MOTIFS QUE les pièces remises aux débats font ressortir que suite aux pourparlers précontractuels intervenus entre la société COMPAGNIE DU PONANT et Madame I... L..., cette société a émis le 27 juin 2017 une facture envers la société LATITUDE BLANCHE d'un montant de 13.560 euros pour la cession des Zodiacs litigieux « d'occasion et en l'état » ; que ces embarcations ont été payées par virement du 13 juillet 2017 ; qu'en août 2017, la société intimée s'est adressée à la société AS MARINE pour la livraison de moteurs et ces deux sociétés ont mis en place le transports des zodiacs et des moteurs à Boulogne sur Mer ; que par courrier recommandé du 7 février 2018, la société COMPAGNIE DU PONANT a notifié une résiliation de la vente des trois zodiacs du fait d'un défaut d'enlèvement de ceux-ci et restituait le montant du prix de vente en déduisant des frais de gardiennage et adressait un chèque de 11 400 euros ; que comme le relève à juste titre le premier juge, le contrat de vente passé entre la société COMPAGNIE DU PONANT et la société LATITUDE BLANCHE ne prévoyait aucun délai pour retirer les zodiacs et aucune condition suspensive était insérée dans l'acte ; que compte tenu de l'accord passé entre les parties sur la chose et le prix, la vente était parfaite au sens de l'article 1583 du code civil ; qu'en outre le paiement du matériel est intervenu ; que la société COMPAGNIE DU PONANT ne peut donc se prévaloir de l'article 1657 du code civil ; que le fait que la société intimée ne soit pas venue chercher les embarcations aux dates envisagées par Mme L... dans deux courriers ne saurait constituer un manquement grave tel que prévu à l'article 1124 du code civil, autorisant la société COMPAGNIE DU PONANT à prononcer la résolution du contrat passé entre les parties et à appréhender les zodiacs dont elle n'était plus propriétaire ;
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 02, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-24.777 du 05/02/2020, partie 1
qu'aucune contestation sérieuse ne peut être invoquée par l'appelante, la société LATITUDE BLANCHE justifiant de l'urgence du fait de son activité de croisiériste et de la proximité du départ du bateau qui devait embarquer les zodiacs litigieux ; qu'en conséquence, la décision attaquée, à laquelle il est référé pour le surplus, doit être confirmée ; qu'il n'appartient pas au juge des référés de donner acte à la société COMPAGNIE DU PONANT qu'elle s'oppose à l'utilisation des Zodiacs déclassés ; que l'exercice d'une action en justice constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages-intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, ou d'erreur grossière équipollente au dol ; que la société intimée sera déboutée de sa demande à ce titre, faute pour elle de rapporter la preuve d'une quelconque intention de nuire ou légèreté blâmable de la part de l'appelant, qui a pu légitimement se méprendre sur l'étendue de ses droits, et d'établir l'existence d'un préjudice autre que celui subi du fait des frais de défense exposés ; ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QU'il ressort des documents produits : - qu'entre le 30 mai 2017 et le 29 juin 2017, la COMPAGNIE DU PONANT a négocié avec Madame I... L... qui intervenait pour le compte de la société LATITUDE BLANCHE, la vente des 3 zodiacs de type MK5 ; - que le 27 juin 2017, la société COMPAGNIE LE PONANT a émis à l'attention de la société LATITUDE BLANCHE, la facture n° 20170603 d'un montant de 13 560 € TTC, relative à la vente « d'occasion et en l'état » des zodiacs MILPRO-MK5 HD n° [...], [...] et [...], faisant l'objet d'un « conditionnement sur palette » ; - que par virement du 13 juillet 2017, la société LATITUDE BLANCHE a payé à la société COMPAGNIE LE PONANT, le prix de vente des 3 zodiacs litigieux ; - que par mail du 16 août 2017, LATITUDE BLANCHE précisé à la société AS MARINE qu'elle va lui commander 3 moteurs neufs F 60 en décembre pour une livraison en mars ; - que par mail du 22 août 2017, la société AS MARINE, lui répond qu'il n'y a pas de problème pour une livraison en mars et qu'elle prépare le devis pour les moteurs F 60 ; - qu'entre septembre, novembre et décembre 2017, des échanges de mails entre la société LATITUDE BLANCHE et la société AS MARINE révèlent que ces deux sociétés mettent en place le transport des trois zodiacs et des trois moteurs pour BOULOGNE SUR MER, où se trouve le navire « [...] » « [...] » ; que dans ces conditions, les allégations de la société COMPAGNIE LE PONANT, relatives au « défaut du retirement » des zodiacs qu'elle a vendus à la société LATITUDE BLANCHE sont à l'évidence dénuées de pertinence, dans la mesure où : - aucun délai de retirement des zodiacs n'a été prévu par les parties ; - que le retirement allégué a été organisé entre la société LATITUDE BLANCHE et la société AS MARINE pour le mois de mars 2018 ; - la société COMPAGNIE LE PONANT, a décidé de procéder à la résolution de la vente des zodiacs le 7 février 2018, soit antérieurement au « retirement » des zodiacs organise par les sociétés AS MARINE et LATITUDE BLANCHE pour le mois de mars 2018 ; qu'ainsi et contrairement à ce que soutient la société COMPAGNIE LE PONANT, cette derrière qui ne conteste pas avoir la qualité de venderesse, n'exerce pas des droits légitimes ; qu'il s'ensuit que la société LATITUDE BLANCHE est fondée à se prévaloir d'un trouble manifestement illicite pour revendiquer la restitution des trois zodiacs que lui a vendus la société COMPAGNIE LE PONANT ; que pour les motifs exposés supra, la société COMPAGNIE LE PONANT ne peut se prévaloir d'une contestation sérieuse pour s'opposer à la mesure sollicitée par la société LATITUDE BLANCHE, puisque en sa qualité de venderesse, la société COMPAGNIE LE PONANT n'établit pas qu'elle a procédé légitimement à la résolution unilatérale et sans préavis de la vente conclue avec la société LATITUDE BLANCHE, laquelle est parfaite depuis juillet 2017, les parties étant d'accord sur la chose et sur le prix, la société COMPAGNIE LE PONANT ayant de surcroit encaissé le prix depuis le 13 juillet 2017 et ayant livré les zodiacs chez la société AS MARINE, qui a son siège à MANDELIEU LA NAPOULE, le transport et les frais de mise sur palette étant à la charge de la société LATITUDE BLANCHE, comme indique par la société COMPAGNIE DU PONANT dans un mail du 31 mai 2017 ;
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 02, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-24.777 du 05/02/2020, partie 2
qu'au surplus et à titre superfétatoire, la COMPAGNIE DU PONANT ne peut se prévaloir d'avoir été « abusée par l'acheteur qui lui a dissimulé l'usage auquel il destinait les trois zodiacs déclassés » pour justifier sa décision de résolution unilatérale de la vente, cette dernière n'ayant pas jugé utile de saisir les juges du fond pour faire trancher un problème relevant des vices du consentement étant noté toutefois, que depuis, juillet 2017, la société LATITUDE BLANCHE « nouvelle compagnie maritime de croisières polaires » a fait l'objet d'un article dans la revue LE MARIN, journal hebdomadaire, spécialisé dans les informations maritimes ; que concernant l'état actuel des zodiacs litigieux, il y a lieu de donner acte à la société LATITUDE BLANCHE de ce que les zodiacs de type MK5, n° [...], [...] et [...], qu'elle a achetés, étaient en parfait état lorsqu'ils ont été livrés fin juillet 2017 chez AS MARINE puisque dans son mail du 31 mai 2017, la société COMPAGNIE LE PONANT a écrit qu'ils étaient dans un « état similaire » à ceux vendus en 2015 « car un peu plus récents » et qu'ils font l'objet d'une « mise en état » ce qui « génère de grands frais » ; - que la société COMPAGNIE LE PONANT ayant pris le soin de mentionner sur sa facture n° 20170603 du 27 juin 2017 qu'il s'agissait d'une vente « d'occasion et en l'état », il y a lieu de lui donner acte de ce que l'identification des trois zodiacs comme annexes du « [...] » relève de la seule responsabilité de LATITUDE BLANCHE qui a prévu une visite technique des zodiacs litigieux chez un chantier agréé « zodiac » à Dunkerque avant leur mise à bord du « [...] » ; qu'en l'état de ce qui précède, il y a lieu, par application des articles 858, 873 et 872 du code de Procédure Civile, d'ordonner à la société COMPAGNIE DU PONANT S.A.S.U. de restituer à LATITUDE BLANCHE les trois unités zodiacs de type MK5, n° [...], [...] et [...], objets de la facture n° 20170603 du 27 juin 2017, dans les 48 heures de la signification de la présente ordonnance, soit chez la société AS MARINE à Mandelieu-la-Napoule, soit en tous lieux accessibles à Marseille et passé ce délai, sous astreinte provisoire de 1 000 € par jour de retard jusqu'au 7 avril 2018 ; 1°) ALORS QUE le juge doit préciser le fondement de sa décision ; qu'en ordonnant à la société Compagnie du Ponant, venderesse, de mettre les embarcations vendues à disposition de la société acheteuse aux motifs qu'aucun délai de retirement des embarcations n'était convenu de sorte que l'article 1657 du code civil ne serait pas applicable (arrêt, p. 4, al. 4 et 5), puis aux motifs que « le fait que la société intimée ne soit pas venue chercher les embarcations aux dates envisagées par Mme L... dans deux courriers ne saurait constituer un manquement grave tel que prévu à l'article 1124 du code civil », par des motifs qui ne permettent pas de déterminer le si la cour d'appel a considéré que l'obligation de retirement n'était pas établie ou si le manquement n'était pas grave, qui font référence à un article du code civil étranger au litige et sans préciser si la mesure d'exécution était ordonnée sur le fondement de l'article 872, de l'article 873 alinéa 1er ou de l'article 873 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour d'appel n'a pas mis en mesure la Cour de cassation d'exercer son contrôle et a violé l'article 12 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 2°) ALORS QU'en toute hypothèse, le juge des référés ne peut ordonner l'exécution d'une obligation lorsqu'elle fait l'objet d'une contestation sérieuse ; qu'en relevant, pour condamner la société Compagnie du Ponant à exécuter la vente, que le contrat ne prévoyait aucun délai pour retirer les biens objets de la vente de sorte que le vendeur n'était pas fondé à invoquer l'article 1657 du code civil (arrêt, p. 4, al. 4 et 5), bien que la venderesse ait produit deux courriels, a priori probants et clairs, dans lesquels la représentante de la société acheteuse affirmait avoir « besoin [des] zodiacs en juillet » et vouloir les « acquérir fin juillet », dont il s'évinçait que le délai de retirement était fixé en juillet 2017 et que la cour d'appel ne pouvait écarter sans trancher une contestation sérieuse, la cour d'appel a violé les articles 872 et 873 alinéa 2 du code de procédure civile ; 3°) ALORS QU'en toute hypothèse une contradiction de motifs équivaut à un défaut de motif ;
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 02, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-24.777 du 05/02/2020, partie 3
qu'en retenant, juger infondée la résolution unilatérale du contrat opposée par l'exposante, que « le contrat de vente passé entre la société Compagnie du Ponant et la société Latitude Blanche ne prévoyait aucun délai pour retirer les zodiacs et [qu']aucune condition suspensive n'était insérée dans l'acte » (arrêt, p. 4, al. 4), tout en relevant que Mme L..., qui agissait pour le compte de la société acheteuse (jugement confirmé, p. 5, dernier al.), avait, lors de la conclusion du contrat, envisagé des dates auxquelles les embarcations devaient être retirées dans deux courriels envoyés à l'exposante (arrêt, p. 4, dernier al.), la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ; 4°) ALORS QU'en toute hypothèse en l'absence de délai exprès pour retirer la chose, l'acheteur doit en prendre possession lors du paiement du prix ; qu'en jugeant que la venderesse ne pouvait se prévaloir de l'article 1657 du code civil pour justifier la résolution du contrat, au motif que le contrat ne prévoyait aucun délai pour retirer les embarcations (arrêt, p. 4, al. 4 et 5), sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions, p. 10 dernier al.), si même en l'absence de délai expressément convenu, le délai de retirement n'était pas présumé fixé au jour du paiement du prix de sorte que la venderesse était fondée à invoquer la résolution du contrat et que son exécution se heurtait à une contestation sérieuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 872 et 873 alinéa 2 du code de procédure civile, ensemble l'article 1657 du code civil ; 5°) ALORS QU'en toute hypothèse le juge des référés ne peut ordonner l'exécution d'une obligation lorsqu'elle fait l'objet d'une contestation sérieuse ; qu'en retenant que la société Compagnie du Ponant ne justifiait pas d'un manquement grave justifiant la résolution unilatérale du contrat de vente bien que la livraison ait été envisagée au mois de juillet 2017 avec la venderesse, la cour d'appel, qui a porté une appréciation sur la gravité du manquement, a excédé les pouvoirs que le juge des référés tient des articles 872 et 873 alinéa 2 du code civil et a violé ces textes ; 6°) ALORS QU'en toute hypothèse, la portée des obligations souscrites par les parties ne peut être déterminée ou modifiée par un accord conclu avec un tiers au contrat ; qu'en retenant, par motifs éventuellement adoptés, que le retirement avait été organisé entre l'acheteuse et la société AS Marine pour le mois de mars 2018 (jugement, p. 6, al. 1er), quand celle-ci était un tiers au contrat de vente et que l'accord éventuellement conclu entre elle et la société acheteuse ne pouvait déterminer ou modifier le délai de retirement des embarcations qui devait être établi en considération de la seule volonté des parties au contrat, la cour d'appel a violé les articles 1103 et 1193 du code civil, dans leur rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ; 7°) ALORS QU'en toute hypothèse, le vendeur est fondé à refuser de vendre un bien dont l'usage envisagé par l'acheteur est susceptible de porter atteinte à la sécurité des personnes ; qu'en retenant que la venderesse ne justifiait d'aucune contestation sérieuse justifiant son refus d'exécuter la vente, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions, p. 12-15), si celle-ci n'était pas fondée à refuser de livrer les embarcations dès lors qu'elle avait appris, après la vente, que leur utilisation projetée par l'acquéreur pouvait porter atteinte à la sécurité des personnes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 872 et 873 alinéa 2 du code de procédure civile ; 8°) ALORS QU'en toute hypothèse le juge des référés ne peut, en présence d'une contestation sérieuse et en cas d'urgence, que prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu'en jugeant que « la société Latitude Blanche [était] fondée à se prévaloir d'un trouble manifestement illicite pour revendiquer la restitution des trois zodiacs que lui a vendus la société Compagnie Le Ponant » (jugement, p. 6, alinéa 1er), sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions, p. 20), si la mesure de restitution sollicitée par la société Latitude Blanche était une mesure conservatoire ou une mesure de remise en état et si elle n'excédait pas les pouvoirs que le juge des référés tient de l'article 873 alinéa 1er du code civil, la cour d'appel a en toute hypothèse privé sa décision de base légale au regard de ce texte.
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 02, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-24.777 du 05/02/2020, partie 4
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 29 JANVIER 2020 La société Formul, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° E 18-23.950 contre l'ordonnance rendue le 22 août 2018 par le conseil de prud'hommes de Martigues, dans le litige l'opposant à Mme J... K..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Cavrois, conseiller, les observations écrites de la SCP Delvolvé et Trichet, avocat de la société Formul, après débats en l'audience publique du 18 décembre 2019 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Cavrois, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision. 1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. 2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi. EN CONSÉQUENCE, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Formul aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Formul ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf janvier deux mille vingt. MOYEN ANNEXE à la présente décision Moyen produit par la SCP Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société Formul Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir ordonné à la société FORMUL de payer à Madame J... K... la somme de 2 782,08 € à titre de provision pour précarité Aux motifs que Madame K... faisait valoir qu'elle avait été engagée le 22 septembre 2015 en qualité de vendeuse par contrat à durée déterminée pour un remplacement et que ce contrat avait été prolongé jusqu'au 5 août 2017 par avenant ; qu'elle n'avait pas perçu la prime de précarité au terme de son contrat ; qu'elle n'avait pas refusé le CDI proposé oralement, mais pas de document proposé ; qu'elle avait retrouvé un emploi ailleurs ; que la société FORMUL défendeur absent à l'audience, sollicitait un renvoi par courrier en date du 7 août 2018 au motif que le refus du CDI non écrit fondant le non versement de la prime de précarité ; qu'il ressortait des éléments et des explications fournis à la formation de référé que la demande remplissait les conditions d'urgence et d'absence de contestation sérieuse prévues par les article R. 1455-5 à R. 1455-7 du code du travail ; que s'agissant d'une créance salariale selon l'article L.1243-8 du code du travail : « Lorsque, à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de contrat destiné à compenser la précarité de sa situation. Cette indemnité est égale à 10 % de la rémunération totale brute versée au salarié » ; qu'il ressortait des éléments produits que Madame K... avait effectivement travaillé pendant la période du 22 septembre 2015 au 5 août 2017 et qu'elle avait perçu 27 820,83 € ; que le montant de sa créance s'élevait à 2 782,08 € au regard de son contrat de travail et des feuilles de paye produites ; que l'employeur ne rapportait aucune preuve d'une volonté d'embaucher en CDI Alors que, en application de l'article L.1243-10 du code du travail, l'indemnité de fin de contrat n'est pas due lorsque le salarié refuse d'accepter la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée pour occuper le même emploi ; que le droit au paiement d'une indemnité de fin de contrat est sérieusement contestable lorsque le salarié reconnaît qu'un contrat de travail à durée indéterminée lui a été proposé et que les parties s'opposent sur le sort réservé à cette proposition par le salarié ; et qu'en accordant néanmoins une provision à ce titre à la salarié, l'ordonnance attaquée a violé les articles R. 1455-5, R.1455-7, L. 1243-8 et L.1243-10 du code du travail.
Conseil de prud'hommes de Martigues, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-23.950 du 29/01/2020, partie 1
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 29 JANVIER 2020 La société Hinterland, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° Q 18-16.001 contre l'arrêt rendu le 8 mars 2018 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale et des affaires de sécurité sociale), dans le litige l'opposant à M. T... C..., domicilié [...] , défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Sommé, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Hinterland, après débats en l'audience publique du 18 décembre 2019 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Sommé, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 8 mars 2018), M. C..., engagé le 24 novembre 2010 en qualité de chauffeur routier par la société Hinterland et désigné délégué syndical le 28 novembre 2013, a saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement notamment à titre d'heures supplémentaires. Examen des moyens Sur le second moyen Enoncé du moyen 2. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié, pour la période du 1er janvier au 30 juin 2015, certaines sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires et de congés payés afférents et, pour la période comprise entre le 1er août 2015 et le 8 mars 2018, les heures supplémentaires majorées à 25 % et 50 % sans substitution possible en repos compensateurs et sans lissage trimestriel, alors « qu'il résulte de l'article L. 3121-24 du code du travail, anciennement L. 212-5 II, dans sa rédaction applicable au litige, que dans les entreprises dépourvues de délégué syndical non assujetties à l'obligation annuelle de négocier, l'employeur peut décider du remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires et de leur majoration par un repos compensateur équivalent, et qu'un tel aménagement du temps de travail est subordonné à l'absence d'opposition du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, lorsqu'ils existent ; que la désignation d'un délégué syndical et l'assujettissement corrélatif de l'employeur à l'obligation annuelle de négocier, s'ils peuvent limiter pour l'avenir la possibilité reconnue à l'employeur de prendre des décisions unilatérales dans les matières traitées au cours de la négociation annuelle obligatoire, ne peuvent en revanche remettre en cause l'application des décisions unilatérales prises par l'employeur, conformément à la loi, antérieurement à cette désignation ; que pour considérer que la décision du 25 janvier 2005 relative au remplacement du paiement de certaines heures supplémentaires et de leur majoration, qui avait été prise par la société Hinterland conformément à l'article L. 212-5 II du code du travail, avait cessé de produire effet à compter du 1er janvier 2015, la cour d'appel s'est fondée sur la seule désignation d'un délégué syndical à compter du 28 novembre 2013, impliquant l'obligation pour l'entreprise de mettre en place une négociation annuelle obligatoire laquelle n'avait pas abouti à un accord ayant le même objet ; qu'en statuant de la sorte, par un motif inopérant, la cour d'appel a violé les articles L. 2242-1 et L. 2242-3 du code du travail par fausse application, ensemble l'article L. 3121-24 [anciennement L. 212-5.II] du même code. » Réponse de la Cour 3. Faute de procurer un avantage aux salariés, la décision par laquelle, en l'absence de délégué syndical, l'employeur instaure le repos compensateur de remplacement prévu à l'article L. 3121-24, devenu L. 3121-37, du code du travail ne constitue pas un acte soumis aux règles de dénonciation des engagements unilatéraux et devient caduque après que, les conditions de son existence ayant disparu par suite de l'assujettissement de l'entreprise à l'obligation annuelle de négocier, il ne lui a pas été substitué un accord collectif dans le délai imparti pour cette négociation. 4. La cour d'appel a constaté qu'il résultait du procès-verbal de réunion du 25 janvier 2005 que le délégué du personnel titulaire de l'entreprise avait été consulté par l'employeur sur la mise en place d'un dispositif de repos compensateur de remplacement et avait donné son accord sur cette décision unilatérale de l'employeur à effet au 1er janvier 2005, que cependant, à la suite de la désignation de M. C... comme délégué syndical à compter du 28 novembre 2013, si l'employeur avait engagé la négociation annuelle obligatoire en 2014, il n'était pas établi que celle-ci ait abouti et prévu la possibilité d'une substitution en tout ou en partie du paiement des heures supplémentaires par des repos compensateurs.
Cour d'appel de Rouen, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-16.001 du 29/01/2020, partie 1
5. La cour d'appel en a déduit à bon droit que l'accord atypique antérieur avait cessé de produire ses effets au 1er janvier 2015, de sorte que le salarié avait droit au paiement des heures supplémentaires accomplies par lui à compter de cette date. 6. Le moyen n'est donc pas fondé. Mais sur le premier moyen Enoncé du moyen 7. L'employeur forme le même grief à l'encontre de l'arrêt, alors « que l'article 4, § 3 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport de marchandises, dans sa rédaction issue de l'article 2 du décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007 (devenu l'article D. 3312-41 du code des transports) prévoit la possibilité pour l'employeur, en l'absence d'accord conclu dans le cadre des dispositions de l'article L. 212-8 du travail (devenu L. 3122-5, puis L. 3121-41), de calculer la durée hebdomadaire du travail des personnels roulants sur une durée supérieure à la semaine, sans pouvoir dépasser trois mois ; qu'en l'espèce, pour faire droit à la demande du salarié, la cour d'appel a considéré que la société Hinterland ne pouvait mettre en place unilatéralement un décompte des heures supplémentaires sur une période de trois mois, "à défaut de convention ou d'accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, d'une convention ou d'un accord de branche " ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé par refus d'application les articles 4, § 3 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 dans sa rédaction issue de l'article 2 du décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007, puis D. 3312-41 du code des transports, et par fausse application les articles L. 3122-5, puis L. 3121-41 et L. 3121- 44, du code du travail, dans leurs rédactions respectives successivement applicables à la période en cause. » Réponse de la Cour Vu l'article 4 § 3 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983, modifié par le décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007, alors applicable : 8. Aux termes de ce texte, en l'absence d'accord conclu dans le cadre des dispositions de l'article L. 212-8 ancien du code du travail, la durée hebdomadaire du travail des personnels roulants peut être calculée sur une durée supérieure à la semaine, sans pouvoir dépasser trois mois, après avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel s'ils existent. 9. Pour condamner l'employeur au paiement, pour la période du 1er janvier au 30 juin 2015, de certaines sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires et de congés payés afférents et, pour la période comprise entre le 1er août 2015 et le 8 mars 2018, des heures supplémentaires majorées à 25 % et 50 % sans lissage trimestriel, l'arrêt retient que la mise en place unilatérale par l'employeur à compter de janvier 2014 d'un lissage par trimestre du temps de travail du salarié à 195 heures forfaitisées mensuellement ne peut être retenu, à défaut de convention ou d'accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, d'une convention ou d'un accord de branche et ce en application des articles L. 3122-5 et L. 3122-6 du code du travail pour la période antérieure à la loi n° 2016-1988 du 8 août 2016 et depuis l'entrée en vigueur des articles L. 3121-41 et suivants de ce même code. 10. En statuant ainsi, alors que l'employeur était fondé à décompter le temps de travail du salarié sur trois mois s'il justifiait avoir consulté pour avis le délégué du personnel de l'entreprise, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Hinterland à payer à M. C... la somme de 1 757,71 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires et celle de 175,77 euros à titre de congés payés afférents pour la période du 1er janvier au 30 juin 2015 et en ce qu'il condamne la société Hinterland à verser à M. C..., pour la période du 1er août 2015 au 8 mars 2018, les heures supplémentaires majorées à 25 % et 50 % sans lissage trimestriel, l'arrêt rendu le 8 mars 2018 par la cour d'appel de Rouen ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Caen ; Condamne M. C... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Hinterland ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf janvier deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Cour d'appel de Rouen, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-16.001 du 29/01/2020, partie 2
Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Hinterland PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Hinterland à payer à Monsieur C... les sommes de 1.757,71 € à titre de rappel d'heures supplémentaires et 175,77 € au titre des congés payés y afférents pour la période du 1er janvier au 30 juin 2015, et d'AVOIR condamné la société Hinterland à verser à Monsieur C... pour la période comprise entre le 1er août 2015 et le 8 mars 2018, les heures supplémentaires majorées à 25 % et 50 %, sans substitution possible en repos compensateurs et sans lissage trimestriel, outre les frais irrépétibles et les dépens ; AUX MOTIFS QUE « L'article L. 3121-24 du code du travail, dans sa rédaction, prévoit que la substitution du paiement des heures supplémentaires par un repos compensateur est possible si elle est prévue par un accord d'entreprise ou d'établissement, ou à défaut par un accord de branche et que dans les entreprises dépourvues de délégué syndical, elle peut être mise en place par l'employeur si le comité d'entreprise ou à défaut les délégués du personnel ne s'y opposent pas ; que cependant, en cas de désignation d'un délégué syndical, l'entreprise se trouve assujettie à l'obligation annuelle de négocier et si aucun accord sur le repos de remplacement n'a été conclu à l'issue du délai imparti pour cette négociation, la décision unilatérale par laquelle l'employeur avait mis en place le système de substitution cesse de produire ses effets à l'issue de ce délai, de sorte que le salarié a alors droit au paiement des heures supplémentaires accomplies après cette date ; Qu'en l'espèce, si l'employeur n'invoque l'existence d'aucun accord d'entreprise, d'établissement ou de branche, il résulte du procès-verbal de réunion du 25/01/2005 que le délégué du personnel titulaire de l'entreprise a été consulté sur la mise en place d'un dispositif de repos compensateur de remplacement et a donné son accord pour l'application du système tel que présenté par le gérant de la société à effet au 01/01/2005, ce qui vaut une absence d'opposition permettant l'application de la décision unilatérale de l'employeur ; que cependant, à la suite de la désignation de M. C... comme délégué syndical à compter du 28/11/2013 par le syndicat CGT, la société Hinterland devait alors négocier ; que si elle soutient, sans être contestée, avoir engagé la négociation annuelle obligatoire en 2014, il ne ressort toutefois ni des débats, ni des pièces versées, que celle-ci a abouti et prévu la possibilité d'une substitution en tout ou en partie du paiement des heures supplémentaires par des repos compensateurs, si bien que l'accord atypique antérieur a cessé de produire ses effets au 01/01/2015 ; Qu'en outre, la mise en place unilatérale par la société employeur à compter de janvier 2014 d'un lissage par trimestre du temps de travail à 195 heures forfaitisées mensuellement pour M. C... ne pourra non plus être retenu, à défaut de convention ou d'accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, d'une convention ou d'un accord de branche et ce en application des articles L. 3122-5 et L. 3122-6 du code du travail pour la période antérieure à la loi n° 2016-1988 du 08/08/2016 et depuis son entrée en vigueur des articles L. 3121-41 et suivants de ce même code ; Qu'en application des règles précitées et des constatations qui précédent, M. C... est donc fondé à revendiquer le paiement de la totalité des heures supplémentaires accomplies par lui à compter du 01/01/2015 ; Qu'il ressort du décompte produit jusqu'en juin 2015, non utilement contesté par la société employeur, la réalisation par l'intéressé de 14,31 heures supplémentaires majorées à 25 % et de 105,49 heures supplémentaires majorées à 50 % ; que compte tenu d'un taux horaire de base de 9,98 euros, il sera alloué à M. C... un rappel de salaire d'heures supplémentaires de 1 757,71 euros et 175,77 euros de congés payés y afférents ; Attendu que pour la période du 01/08/2015 et jusqu'à la date du présent arrêt, à défaut de justification d'un accord collectif quel qu'il soit, M. C... est fondé à percevoir le paiement des heures supplémentaires majorées à 25 et à 50 % sans substitution possible en repos compensateurs et sans lissage trimestriel »; ALORS QUE l'article 4, § 3 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport de marchandises, dans sa rédaction issue de l'article 2 du décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007 (devenu l'article D. 3312-41 du Code des transports) prévoit la possibilité pour l'employeur, en l'absence d'accord conclu dans le cadre des dispositions de l'article L. 212-8 du travail (devenu L. 3122-5, puis L. 3121-41), de calculer la durée hebdomadaire du travail des personnels roulants sur une durée supérieure à la semaine, sans pouvoir dépasser trois mois ;
Cour d'appel de Rouen, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-16.001 du 29/01/2020, partie 3
qu'en l'espèce, pour faire droit à la demande du salarié, la cour d'appel a considéré que la société Hinterland ne pouvait mettre en place unilatéralement un décompte des heures supplémentaires sur une période de trois mois, « à défaut de convention ou d'accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, d'une convention ou d'un accord de branche » ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé par refus d'application les articles 4, § 3 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 dans sa rédaction issue de l'article 2 du décret n° 2007-13 du 4 janvier 2007, puis D. 3312-41 du Code des transports, et par fausse application les articles L. 3122-5, puis L. 3121-41 et L. 3121-44, du Code du travail, dans leurs rédactions respectives successivement applicables à la période en cause. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Hinterland à payer à Monsieur C... les sommes de 1.757,71 € à titre de rappel d'heures supplémentaires et 175,77 € au titre des congés payés y afférents pour la période du 1er janvier au 30 juin 2015, et d'AVOIR condamné la société Hinterland à verser à Monsieur C... pour la période comprise entre le 1er août 2015 et le 8 mars 2018, les heures supplémentaires majorées à 25 % et 50 %, sans substitution possible en repos compensateurs et sans lissage trimestriel, outre les frais irrépétibles et les dépens ; AUX MOTIFS QUE « L'article L. 3121-24 du code du travail, dans sa rédaction, prévoit que la substitution du paiement des heures supplémentaires par un repos compensateur est possible si elle est prévue par un accord d'entreprise ou d'établissement, ou à défaut par un accord de branche et que dans les entreprises dépourvues de délégué syndical, elle peut être mise en place par l'employeur si le comité d'entreprise ou à défaut les délégués du personnel ne s'y opposent pas ; que cependant, en cas de désignation d'un délégué syndical, l'entreprise se trouve assujettie à l'obligation annuelle de négocier et si aucun accord sur le repos de remplacement n'a été conclu à l'issue du délai imparti pour cette négociation, la décision unilatérale par laquelle l'employeur avait mis en place le système de substitution cesse de produire ses effets à l'issue de ce délai, de sorte que le salarié a alors droit au paiement des heures supplémentaires accomplies après cette date ; Qu'en l'espèce, si l'employeur n'invoque l'existence d'aucun accord d'entreprise, d'établissement ou de branche, il résulte du procès-verbal de réunion du 25/01/2005 que le délégué du personnel titulaire de l'entreprise a été consulté sur la mise en place d'un dispositif de repos compensateur de remplacement et a donné son accord pour l'application du système tel que présenté par le gérant de la société à effet au 01/01/2005, ce qui vaut une absence d'opposition permettant l'application de la décision unilatérale de l'employeur ; que cependant, à la suite de la désignation de M. C... comme délégué syndical à compter du 28/11/2013 par le syndicat CGT, la société Hinterland devait alors négocier ; que si elle soutient, sans être contestée, avoir engagé la négociation annuelle obligatoire en 2014, il ne ressort toutefois ni des débats, ni des pièces versées, que celle-ci a abouti et prévu la possibilité d'une substitution en tout ou en partie du paiement des heures supplémentaires par des repos compensateurs, si bien que l'accord atypique antérieur a cessé de produire ses effets au 01/01/2015 ; Qu'en outre, la mise en place unilatérale par la société employeur à compter de janvier 2014 d'un lissage par trimestre du temps de travail à 195 heures forfaitisées mensuellement pour M. C... ne pourra non plus être retenu, à défaut de convention ou d'accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, d'une convention ou d'un accord de branche et ce en application des articles L. 3122-5 et L. 3122-6 du code du travail pour la période antérieure à la loi n° 2016-1988 du 08/08/2016 et depuis son entrée en vigueur des articles L. 3121-41 et suivants de ce même code ; Qu'en application des règles précitées et des constatations qui précédent, M. C... est donc fondé à revendiquer le paiement de la totalité des heures supplémentaires accomplies par lui à compter du 01/01/2015 ; Qu'il ressort du décompte produit jusqu'en juin 2015, non utilement contesté par la société employeur, la réalisation par l'intéressé de 14,31 heures supplémentaires majorées à 25 % et de 105,49 heures supplémentaires majorées à 50 % ; que compte tenu d'un taux horaire de base de 9,98 euros, il sera alloué à M. C... un rappel de salaire d'heures supplémentaires de 1 757,71 euros et 175,77 euros de congés payés y afférents ; Attendu que pour la période du 01/08/2015 et jusqu'à la date du présent arrêt, à défaut de justification d'un accord collectif quel qu'il soit, M. C... est fondé à percevoir le paiement des heures supplémentaires majorées à 25 et à 50 % sans substitution possible en repos compensateurs et sans lissage trimestriel » ;
Cour d'appel de Rouen, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-16.001 du 29/01/2020, partie 4
ALORS QU'il résulte de l'article L. 3121-24 du Code du travail, anciennement L. 212-5 II, dans sa rédaction applicable au litige, que dans les entreprises dépourvues de délégué syndical non assujetties à l'obligation annuelle de négocier, l'employeur peut décider du remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires et de leur majoration par un repos compensateur équivalent, et qu'un tel aménagement du temps de travail est subordonné à l'absence d'opposition du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, lorsqu'ils existent ; que la désignation d'un délégué syndical et l'assujettissement corrélatif de l'employeur à l'obligation annuelle de négocier, s'ils peuvent limiter pour l'avenir la possibilité reconnue à l'employeur de prendre des décisions unilatérales dans les matières traitées au cours de la négociation annuelle obligatoire, ne peuvent en revanche remettre en cause l'application des décisions unilatérales prises par l'employeur, conformément à la loi, antérieurement à cette désignation ; que pour considérer que la décision du 25 janvier 2005 relative au remplacement du paiement de certaines heures supplémentaires et de leur majoration, qui avait été prise par la société Hinterland conformément à l'article L. 212-5 II du Code du travail, avait cessé de produire effet à compter du 1er janvier 2015, la cour d'appel s'est fondée sur la seule désignation d'un délégué syndical à compter du 28 novembre 2013, impliquant l'obligation pour l'entreprise de mettre en place une négociation annuelle obligatoire laquelle n'avait pas abouti à un accord ayant le même objet ; qu'en statuant de la sorte, par un motif inopérant, la cour d'appel a violé les articles L. 2242-1 et L. 2242-3 du Code du travail par fausse application, ensemble l'article L. 3121-24 [anciennement L. 212-5.II] du même Code.
Cour d'appel de Rouen, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-16.001 du 29/01/2020, partie 5
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 JANVIER 2020 Mme S... B... et M. Y... A..., parties civiles, ont formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Chambéry, en date du 13 septembre 2018, qui, dans l'information suivie contre M. M... T... du chef d'homicide involontaire, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction. Des mémoires ont été produits en demande et en défense. Sur le rapport de Mme Chauchis, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gouz-Fitoussi, avocat de Mme S... B... et M. Y... A..., parties civiles, les observations de la SCP Richard et de la SCP Gaschignard, avocats de M. M... T... et M. L... V... et les conclusions de Mme Le Dimna, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 décembre 2019 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Chauchis, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre, et Mme Darcheux, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 221-6 et 121-3 du code pénal et des articles 199, 216, 591 et 593 du code de procédure pénale ; "en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de non-lieu ; "1°) alors que le fait de causer par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, la mort d'autrui ; qu'en se bornant à affirmer, pour confirmer le non-lieu que les causes de la mort de U... n'avaient pas pu être établies avec certitude, sans rechercher si les fautes commises Docteur T... entretenaient un lien direct ou indirect avec le décès de U..., la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision et a violé les textes susvisés ; "2°) alors que les personnes physiques qui n'ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter, sont responsables pénalement s'il est établi qu'elles ont, commis une faute caractérisée qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer ; qu'en se bornant à considérer que le Docteur T... n'avait pas commis une faute caractérisée exposant U... à un risque qu'il ne pouvait ignorer, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la décision d'autoriser la sortie de U... de l'hôpital, alors même qu'elle présentait un état de fatigue inquiétant et une respiration un peu bruyante et rapide alors qu'elle souffrait d'un syndrome de DI George, était constitutive d'une faute caractérisée exposant la patiente à un risque d'une particulière gravité, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision et a violé les textes susvisés". Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que U... A..., née le [...] , a été hospitalisée au centre hospitalier de Chambéry (73) en vue de la réalisation d'une amygdalectomie le 23 novembre 2011 ; que, rentrée au domicile familial le jour même de l'opération, elle est décédée le lendemain après avoir manifesté des difficultés respiratoires ; qu'une information judiciaire a été ouverte contre personne non dénommée du chef d'homicide involontaire ; que M. A... et Mme B..., parents de la victime, se sont constitués parties civiles ; que M. M... T..., chirurgien ayant procédé à l'intervention, a été mis en examen du chef d'homicide involontaire par violation manifestement délibérée d'une obligation de sécurité ou de prudence ; que le juge d'instruction a rendu une ordonnance de non-lieu ; que les parties civiles ont relevé appel de cette décision ; Attendu que, pour dire qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre M. T... d'avoir commis l'infraction d'homicide involontaire par violation manifestement délibérée d'une obligation de sécurité ou de prudence, l'arrêt retient que les médecins légistes ayant pratiqué l'autopsie n'ont pas pu déterminer la cause certaine du décès, indiquant qu'il ne paraissait pas être d'origine traumatique, que les expertises anatomopathologique, bactériologique, toxicologique et virologique n'ont décelé aucune substance ou malformation ou infection à l'origine du décès dans les prélèvements, de sorte que les recherches se sont orientées vers l'opération chirurgicale pratiquée la veille du décès ;
décision 18-86.054 du 28/01/2020, partie 1
qu'ils ajoutent d'une part, après avoir détaillé les résultats des expertises, que les experts concluent à une probabilité de cause à effet entre l'opération et le décès de U... A... en l'absence d'autre cause identifiée, sans toutefois l'affirmer de façon certaine, d'autre part, qu'il ne résulte ni des déclarations de la mère de U..., des infirmières et puéricultrice, des déclarations de l'interne, du mis en examen et du médecin anesthésiste témoin assisté ni des travaux du second collège d'experts que le suivi post-opératoire et la sortie aient été les causes du décès ; que les juges en concluent qu'il n'existe pas d'éléments suffisants quant à l'existence d'un lien de causalité entre les manquements relevés par un collège d'experts dans la prise en charge médicale de l'enfant et sa mort, dont les causes n'ont pu être établies avec certitude, ni de charges suffisantes contre quiconque d'avoir violé délibérément une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, ou commis une faute caractérisée exposant U... A... à un risque qu'il ne pouvait ignorer ; Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui excluent un lien de causalité certain entre les fautes relevées et le décès, la chambre de l'instruction, qui n'avait pas à procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-huit janvier deux mille vingt.
décision 18-86.054 du 28/01/2020, partie 2
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 22 JANVIER 2020 1°/ M. A... C..., 2°/ Mme Q... U..., épouse C..., domiciliés tous deux [...], ont formé le pourvoi n° W 18-21.642 contre l'arrêt rendu le 21 juin 2018 par la cour d'appel de Nîmes (chambre civile, 1re chambre), dans le litige les opposant : 1°/ à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Alpes Provence, société coopérative de crédit, dont le siège est [...] , 2°/ à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (Urssaf) de Marseille, dont le siège est caisse déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants, [...] , prise en la personne de son directeur en exercice domicilié audit siège, et venant aux droits de la Caisse RSI Provence Alpes, venant elle-même aux droits du RSI Auvergne contentieux Sud Est défenderesses à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Barbot, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de M. et Mme C..., et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 26 novembre 2019 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Barbot, conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mme Guinamant, avocat général référendaire, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision. 1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. 2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi. EN CONSÉQUENCE, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. et Mme C... aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme C... ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille vingt. MOYEN ANNEXE à la présente décision Moyen produit par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour M. et Mme C... Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la contestation de déclaration de créance de monsieur A... C..., d'avoir dit et jugé fondée la déclaration de créance de l'Urssaf, venant aux droits de la Caisse RSI Provence Alpes, venant elle-même aux droits du RSI Auvergne Contentieux Sud-Est, fondée et d'avoir fixé son montant à la somme de 62.609,58 euros ; Aux motifs propres que, sur la déclaration de créance, il est constant que 7 contraintes ont été délivrées à monsieur C... entre le 12 juillet 2012 et le 21 juillet 2014 par la Caisse du RSI au titre des cotisations réclamées à monsieur C... du fait de son activité de gérant de l'EURL DP ELEC, société placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce d'Avignon du 11 juillet 2012, puis en liquidation judiciaire le 8 janvier 2014 ; les appelants qui ne contestent pas que monsieur C... soit affilié au RSI es qualités de gérant associé unique non salarié, font grief au premier juge d'avoir retenu que les cotisations dues par monsieur C... en sa qualité de gérant non salarié présentaient un caractère personnel et étaient exonérées de ce fait de toute obligation de déclaration de créance dans la procédure collective de l'Eurl DP ELEC alors qu'il s'agit selon eux d'une dette professionnelle définie par la Cour de cassation comme née pour les besoins d'une activité professionnelle et qui, dès lors, devait donner lieu à une déclaration de créance par le RSI dans la procédure collective dont a fait l'objet l'Eurl DP ELEC ; à défaut de déclaration, les appelants soutiennent que la créance du RSI leur est inopposable ; l'Urssaf considère quant à elle que les cotisations sociales réclamées sont des dettes personnelles liées à la personne du cotisant ; de fait, les dettes de cotisations et contributions sociales réclamées par l'Urssaf sont générées par l'activité professionnelle du gérant et à ce titre revêtent la qualification de dettes professionnelles, la cour de cassation ayant du reste dans son avis nº 16007 du 8 juillet 2016 qualifié de professionnelle la dette de cotisations et contributions d'un gérant majoritaire de Sarl dont le recouvrement est assuré par l'Urssaf ;
Cour d'appel de Nîmes, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-21.642 du 22/01/2020, partie 1
toutefois le patrimoine de l'EURL et de son gérant associé ne se confondent pas et, en matière de procédure collective, les dettes de la société faisant l'objet de la procédure collective doivent être distinguées de celles du gérant majoritaire qui ne sont pas concernées par cette procédure sauf en cas d'extension de la procédure collective au gérant ; en l'espèce, la procédure collective ouverte à l'égard de l'Eurl DP ELEC n'a pas fait l'objet d'une extension au gérant, de sorte que l'Urssaf, n'étant pas créancier de la personne morale, n'avait pas à déclarer sa créance à l'égard de monsieur C... auprès du mandataire judiciaire de l'EURL DP ELEC ; en l'état de la législation actuelle, le gérant majoritaire n'est pas éligible aux procédures collectives du livre VI du code de commerce, et le seul fait dont excipent les appelants que le gérant majoritaire ne puisse se prévaloir d'un effacement de sa dette professionnelle dans le cadre d'une procédure de rétablissement personnel propre à la procédure de surendettement des particuliers, ne saurait justifier l'inclusion de ladite créance au passif de la liquidation judiciaire de l'Eurl ; le jugement entrepris mérite donc confirmation en ce qu'il a écarté la contestation de créance élevée par les époux C... tenant à l'absence de déclaration de créance de l'Urssaf au passif de la liquidation judiciaire de l'EURL DP ELEC ; Sur la demande de licitation partage, les appelants reprochent également au premier juge d'avoir retenu la créance déclarée par l'Urssaf alors que cet organisme ne dispose d'aucun titre exécutoire à l'égard de madame C..., les 7 contraintes n'ayant été délivrées qu'à l'encontre de monsieur C... ; ils considèrent en conséquence que l'Urssaf ne peut solliciter la saisie de l'immeuble commun des époux ; selon l'article 220 du code civil, toute dette contractée par un époux oblige l'autre solidairement à condition que l'opération soit utile à l'entretien du ménage ou à l'éducation des enfants ; il est admis par la jurisprudence que les cotisations dues par un époux au titre d'un régime légal obligatoire d'assurance vieillesse qui ont pour objet de permettre au titulaire de la pension d'assurer, après la cessation de son activité professionnelle, l'entretien du ménage, constituent une dette ménagère obligeant l'autre époux solidairement ; par voie de conséquence, l'Urssaf qui dispose d'un titre exécutoire à l'encontre de monsieur C... résultant de 7 contraintes qui n'ont pas donné lieu à opposition, est fondée en vertu du principe de solidarité entre époux, à recouvrer sa créance au titre des cotisations dues par monsieur C... dans le cadre de la saisie immobilière poursuivie sur le bien commun des époux, sans qu'il y ait lieu de faire précéder la saisie immobilière d'un partage du bien immobilier entre les époux ; le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté la contestation des époux C... et déclaré fondée la déclaration de créance de l'Urssaf dont il convient de fixer le montant à la somme de 62 609,58 € ; Et aux motifs réputés adoptés que, par conclusions déposées le 3 avril 2017, M. A... C..., débiteur saisi, a contesté la déclaration du RSI, créancier inscrit, effectuée le 15 décembre 2016 et portant sur la somme de 62.209,58 euros ; il excipe de deux moyens ; de première part, du caractère professionnel de la dette qui révèlerait de la procédure collective de la personne morale dont il était le gérant ; de seconde part, l'immeuble dépend de la communauté et la dette ne concerne pas son épouse ; vu les conclusions récapitulatives des parties, le RSI sollicitant le rejet de la déclaration ; la question à poser n'est pas celle de la nature de la dette mais celle de l'identité de la personne tenue au paiement ; les contraintes en cause son au nom de M. C... ; il s'agit de cotisations personnelles dues au titre d'une activité de gérant non salarié ; dès lors elles présentent un caractère personnel et étaient exclues de toute déclaration dans la procédure collective de l'Eurl DP ELEC ; les biens communs répondent des dettes professionnelles, personnelles de l'un des époux ; c'est donc à bon droit que Mme C... est dans la cause et qu'il n'y aurait pas lieu de partager l'immeuble, qui constitue le gage des créanciers de M. C... dans intégralité ; la contestation sera donc rejetée et la déclaration du RSI déclarée fondée ; 1°) Alors que les cotisations et contributions sociales destinées à assurer la couverture personnelle sociale d'un gérant non salarié d'une Eurl et versées à l'Urssaf sont des dettes professionnelles nées au titre d'une activité professionnelle ; qu'il s'ensuit que ces dettes professionnelles sont soumises aux règles de la procédure collective ouverte à l'égard de la société et doivent être déclarées dans le cadre de cette procédure ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L.622-17, L.622-21, L.622-24 et L. 622-26 du code de commerce, ensemble l'article D. 632-1 du code de la sécurité sociale;
Cour d'appel de Nîmes, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-21.642 du 22/01/2020, partie 2
2°) Alors que monsieur C... faisait valoir que le gérant d'une Eurl est redevable de cotisations et contributions sociales réclamées par l'Urssaf uniquement en raison de son activité professionnelle et qu'assurant sa protection sociale à ce titre, ces cotisations ont vocation à être prises en charge par la société, ce dont il s'évinçait que les dettes de cotisations et contributions sociales réclamées par l'Urssaf devaient être déclarées à la procédure collective de l'Eurl DP ELEC dont monsieur C... était le gérant ; que, pour écarter la contestation de créance élevée par les époux C... tenant à l'absence de déclaration de créance de l'Urssaf au passif de l'Eurl DP ELEC, la cour d'appel s'est bornée à affirmer que les dettes professionnelles de cotisations et contributions sociales n'étaient pas concernées par la procédure collective ; qu'en statuant ainsi, sans expliquer, comme elle y était invitée (concl. pp. 4 & 5), les raisons pour lesquelles ces cotisations et contributions sociales, qui étaient dues par le gérant non salarié uniquement en raison de son activité au sein de la société et avaient vocation à être prise en charge par celle-ci, n'étaient pas des dettes relevant de la procédure collective, bien que qualifiées de dettes professionnelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 622-17, L. 622-21, L. 622-24 et L. 622-26 du code de commerce, ensemble l'article D. 632-1 du code de la sécurité sociale ; 3°) Alors que, en tout état de cause, chacun des époux a pouvoir pour passer seul les contrats qui ont pour objet l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants ; que toute dette ainsi contractée par l'un oblige l'autre solidairement à la condition que l'opération soit utile ; la cour d'appel s'est bornée à affirmer, de manière générale et impersonnelle, qu'il était admis par la jurisprudence que les cotisations dues par un époux au titre d'un régime légal obligatoire d'assurance vieillesse qui avaient pour objet de permettre au titulaire de la pension d'assurer, après la cessation de son activité professionnelle, l'entretien du ménage, constituaient une dette ménagère obligeant l'autre époux solidairement ; qu'en statuant ainsi, sans préciser, comme elle y était invitée (concl. p. 6), en quoi la pension versée à monsieur C... serait nécessaire à l'entretien du ménage et en quoi le versement de ces cotisations présentait pour madame C... une quelconque utilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 220 du code civil.
Cour d'appel de Nîmes, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-21.642 du 22/01/2020, partie 3
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 23 JANVIER 2020 L'Établissement public foncier de Normandie (EPIC), établissement public à caractère industriel et commercial, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° Z 18-21.300 contre l'arrêt rendu le 20 juin 2018 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale et des affaires de sécurité sociale), dans le litige l'opposant à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Haute-Normandie, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Brinet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de l'Établissement public foncier de Normandie, de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Haute-Normandie, et l'avis de Mme Ceccaldi, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 janvier 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Brinet, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Szirek, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 20 juin 2018), l'établissement public foncier de Normandie (l'établissement public) a fait l'objet d'un contrôle portant sur les années 2010 à 2012 par l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Haute-Normandie (l'URSSAF), ayant donné lieu à deux lettres d'observations du 2 août 2013, concernant notamment l'assujettissement à la contribution d'assurance chômage des rémunérations des fonctionnaires détachés au sein de l'établissement public. Ce dernier a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale. Examen des moyens Sur le second moyen, ci-après annexé 2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Et sur le premier moyen, ci-après annexé Enoncé du moyen 3. L'établissement public fait grief à l'arrêt de le débouter de son recours. Réponse de la Cour 4. En application de l'article 45 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'Etat, le fonctionnaire détaché est soumis aux règles régissant la fonction qu'il exerce par l'effet de son détachement, à l'exception des dispositions relatives aux contrats à durée déterminée et aux indemnités de licenciement, ou de toute disposition législative, réglementaire ou conventionnelle prévoyant le versement d'indemnités de licenciement ou de fin de carrière. Dès lors, la rémunération des fonctionnaires détachés au sein d'un établissement public entrant dans le champ de l'article L. 5424-1, 3° du code du travail est comprise dans l'assiette des contributions d'assurance chômage dues par cet établissement. 5. L'arrêt constate que l'établissement public assure son personnel contre le risque de perte d'emploi au titre de l'assurance chômage. 6. Il en résulte que l'URSSAF était fondée à procéder au redressement des contributions d'assurance chômage dues par l'établissement public en réintégrant dans leur assiette les rémunérations versées aux fonctionnaires détachés en son sein. 7. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par l'article 620, alinéa 1er du code de procédure civile et après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code, la décision déférée se trouve légalement justifiée de ce chef. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne l'Établissement public foncier de Normandie aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé par M. Pireyre, président de chambre, et par Mme Pontonnier, greffier de chambre présent lors de la mise à disposition de l'arrêt le vingt-trois janvier deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour l'Établissement public foncier de Normandie PREMIER MOYEN DE CASSATION
Cour d'appel de Rouen, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-21.300 du 23/01/2020, partie 1
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré fondé le chef de redressement de l'ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER DE NORMANDIE (EPF) relatif à l'assujettissement des fonctionnaires détachés au régime d'assurance chômage, à hauteur des sommes de 15.166 € en cotisations et de 2.760 € en majorations de retard au titre de l'année 2010, et des sommes de 34.448 € en cotisation et de 4.045 € en majoration de retard au titre des années 2011 et 2012 et d'AVOIR débouté les parties du surplus de leurs demandes ; AUX MOTIFS QUE «Sur l'assujettissement à l'assurance chômage des fonctionnaires détachés : L'EPF Normandie conteste le redressement en faisant valoir que les fonctionnaires en détachement ne peuvent bénéficier des prestations du Pôle Emploi dans la mesure où ils réintègrent obligatoirement leur corps d'origine à l'expiration d'un détachement , et que l'assurance-chômage étant par définition une assurance contre le risque de privation d'emploi, le fonctionnaire en détachement qui n'est pas licencié à l'issue de sa mission ne peut en bénéficier. Cependant, aux termes de l'article L. 5422-13 du code du travail, sauf dans les cas prévus à l'article L. 5424-1, dans lesquels l'employeur assure lui-même la charge et la gestion de l'allocation d'assurance, tout employeur assure contre le risque de privation d'emploi tout salarié. Ainsi, lorsqu'une personne ayant le statut de fonctionnaire exerce une activité salariée dans une entreprise relevant du champ d'application du régime d'assurance chômage au titre d'un détachement, celle-ci doit contribuer au régime d'assurance chômage. La somme est due, quelle que soit la probabilité d'occurrence du risque. En conséquence, les rémunérations versées par ces employeurs sont assujetties aux contributions d'assurance chômage et, le cas échéant, aux cotisations AGS. En revanche, ces rémunérations ne sont pas assujetties à la contribution exceptionnelle de solidarité. L'EPF Normandie qui fonctionne comme un Établissement public industriel et commercial entre bien dans le champ d'application du régime d'assurance chômage. Le droit au versement d'une allocation chômage est ouvert aux fonctionnaires même s'ils retrouvent à l'issue de leur mission leur corps d'origine ainsi qu'il ressort de l'article L. 5424-1 du code du travail » ; ET AUX MOTIFS QUE « Sur la bonne foi et la demande de remise des majorations de retard : Hormis l'application de l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution, seul le directeur de l'URSSAF a qualité pour ordonner le sursis à poursuites pour le règlement de cotisations, pénalités et majorations de retard » ; 1/ ALORS QU'en application des articles L. 5422-13, L. 5424-1 et L. 5424-2 du code du travail, le personnel des établissements publics à caractère industriel et commercial des collectivités territoriales ne relève du régime d'assurance chômage obligatoire qu'en cas d'adhésion à ce régime par option irrévocable de l'établissement ; que tel que le soutenait l'EPF NORMANDIE, qui a le statut d'établissement public industriel et commercial, en l'absence d'adhésion de sa part au régime d'assurance chômage obligatoire au titre des fonctionnaires de droit public détachés de manière temporaire en son sein, ces derniers ne relevaient pas de ce régime ; qu'en retenant au contraire que dès lors que le personnel salarié de l'EPF NORMANDIE relevait du champ d'application du régime d'assurance chômage obligatoire, ce régime devait également s'appliquer par principe aux fonctionnaires temporairement détachés au sein de l'établissement, la cour d'appel a violé les articles L. 5422-13, L. 5424-1 et L. 5424-2 du code du travail ; 2/ ALORS QU'en retenant que dès lors que le personnel salarié de l'EPF NORMANDIE relevait du champ d'application du régime d'assurance chômage obligatoire, ce régime devait également s'appliquer par principe aux fonctionnaires détachés temporairement au sein de l'établissement, sans constater que l'URSSAF de Haute-Normandie ait apporté la preuve de l'adhésion de l'EPF NORMANDIE, par option irrévocable, au régime d'assurance chômage obligatoire pour les fonctionnaires détachés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 5422-13, L. 5424-1 et L. 5424-2 du code du travail. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré fondé le chef de redressement de l'ETABLISSEMENT PUBLIC FONCIER DE NORMANDIE (EPF) relatif à l'assujettissement des fonctionnaires détachés au régime d'assurance chômage à hauteur des sommes de 2.760 € en majorations de retard au titre de l'année 2010 et de 4.045 € en majoration de retard au titre des années 2011 et 2012 et d'AVOIR débouté les parties du surplus de leurs demandes ; AUX MOTIFS QUE « Sur la bonne foi et la demande de remise des majorations de retard : Hormis l'application de l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution, seul le directeur de l'URSSAF a qualité pour ordonner le sursis à poursuites pour le règlement de cotisations, pénalités et majorations de retard » ; ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; qu'en vertu des dispositions de l'article R.243-20 du code de la sécurité sociale la demande gracieuse en réduction des majorations et pénalités de retard doit être accordée à l'employeur dès lors qu'il a procédé au règlement de la totalité des cotisations ayant donné lieu à l'application des majorations et que sa bonne foi est démontrée ;
Cour d'appel de Rouen, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-21.300 du 23/01/2020, partie 2
qu'en l'espèce l'EPF NORMANDIE a formulé, par courrier du 27 décembre 2013, une demande de remise des majorations de retard auprès du directeur de l'URSSAF de Seine Maritime (pièce d'appel n° 15) ; qu'elle a indiqué dans ce courrier avoir procédé au règlement des contributions demandées dans le délai de trente jours et a fait valoir la bonne foi de l'EPF NORMANDIE qui n'a pas volontairement méconnu le droit applicable ; qu'en se bornant néanmoins à retenir, pour écarter cette demande de remise de majorations de retard, que « seul le directeur de l'URSSAF a qualité pour ordonner le sursis à poursuites pour le règlement de cotisations, pénalités et majorations de retard », sans précisément vérifier si le directeur de l'URSSAF de Seine Maritime, devenue l'URSSAF de Haute Normandie, avait effectivement pris en compte la demande de remise de majorations de retard présentée par l'EPF NORMANDIE et, à tout le moins, avait motivé un refus d'accorder une telle remise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R.243-20 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige.
Cour d'appel de Rouen, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-21.300 du 23/01/2020, partie 3
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 JANVIER 2020 1°/ La société Brancher Kingswood, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , 2°/ la société PJA, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , prise en la personne de M. L... R..., lui-même pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société Brancher Kingswood, ont formé le pourvoi n° N 18-24.118 contre l'arrêt rendu le 13 septembre 2018 par la cour d'appel de Versailles (6e chambre), dans le litige les opposant : 1°/ à M. H... M..., domicilié [...] , 2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [...] , défendeurs à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Ricour, conseiller, les observations écrites de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Brancher Kingswood, de M. X..., de la SCP Le Griel, avocat de M. M..., après débats en l'audience publique du 3 décembre 2019 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Ricour, conseiller rapporteur, Mme Van Ruymbeke, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision. 1. Par une production de la SCP Célice, Texidor, V..., il est justifié, que par décision du 25 avril 2019, le tribunal de commerce de Chartres a prononcé la liquidation judiciaire de la société Brancher Kingswood. La Selarl PJA a été désignée en qualité de liquidateur judiciaire. Il convient de lui donner acte de sa reprise d'instance. 2. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. 3. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi. EN CONSÉQUENCE, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. R..., ès qualités, aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. R..., ès qualités, à payer la somme de 3 000 euros à M. M... ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille vingt. MOYEN ANNEXE à la présente décision Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Brancher Kingswood et M. R..., ès qualités. Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR dit que la prise d'acte de rupture par Monsieur M... de son contrat de travail, le 15 juillet 2014, devait s'interpréter comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date dudit acte, d'AVOIR condamné la société SASU BRANCHER KINGSWOOD au paiement des sommes de 11.422,75 € à titre d'indemnité de préavis, 15.257 € à titre d'indemnité de licenciement, 38.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif et 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel, et d'AVOIR condamné la société SASU BRANCHER KINGSWOOD à rembourser à Pôle Emploi, dans la limite de 6 mois, les indemnités de chômage éventuellement versées à Monsieur M... ; AUX MOTIFS QUE « - Sur la résiliation judiciaire et la prise d'acte. La prise d'acte de la rupture par le salarié en raison de faits qu'il reproche à l'employeur entraîne la cessation immédiate du contrat de travail en sorte qu'il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de résiliation judiciaire introduite auparavant. Il appartient alors au juge de se prononcer sur la seule prise d'acte en examinant l'ensemble des manquements de l'employeur invoqués par le salarié tant à l'appui de la demande de résiliation judiciaire devenue sans objet qu'à l'appui de la prise d'acte. La cour examinera par conséquent la seule prise d'acte. Il résulte de la combinaison des articles L.1231-1, L.1237-2 et L.1235-1 du code du travail que la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur qui empêche la poursuite du contrat de travail. Le salarié a pris acte de la rupture par lettre du 15 juillet 2014, rédigée en ces termes : « Depuis le début de l'année 2013, il m'a été proposé d'exercer mes fonctions à l'export ce qui supposait l'établissement d'un avenant à mon contrat : définition du poste et des objectifs ; nouvelle rémunération (fixe et commissionnement, moyens pour y parvenir, etc.).
Cour d'appel de Versailles 06, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-24.118 du 15/01/2020, partie 1
Alors même qu'aucun avenant ne m'était soumis, mon secteur en France m'était retiré et je me retrouvais sans mission concrète à accomplir, J'ai alerté l'ensemble de la hiérarchie sur cette situation et le fait que je me retrouvais sans travail à accomplir, pendant des mois'. Le 14 novembre 2013, j'ai cru entrevoir une issue à ce long calvaire, lorsque j'ai accepté la proposition qui m'était faite. En réalité, rien n'a changé puisque les avenants qui m'ont été soumis n'ont jamais été conformes à la proposition acceptée. Dans les faits ma rémunération et les bulletins de salaire n'ont pas davantage étaient modifiés. Le peu de travail qui m'est donné d'accomplir ne correspond ni à mes anciennes fonctions (qui sont encore les miennes), ni aux nouvelles. Je suis mis à l'écart des réunions commerciales. En 18 mois j'ai effectué seulement deux déplacements ; dont un qui a été forcé par le client (qui a dû prendre à sa charge mon billet d'avion). Vous-même n'avez répondu concrètement à aucun de mes mails, me privant de la possibilité de construire aussi bien sur le plan professionnel n'étant pas en mesure d'exercer pleinement mes fonctions ; que sur le plan personnel ne sachant pas de quoi serait fait demain. Je considère donc que vous avez gravement manqué à vos obligations à mon égard.... '.je prends acte de la rupture de mon contrat de travail en considérant que vous êtes le seul et unique responsable ». En cas de prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié, cette rupture produit, soit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission. Il appartient au salarié d'établir les faits qu'il allègue à l'encontre de l'employeur. L'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur ne fixe pas les limites du litige. Le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit. Le salarié fait valoir les éléments suivants : il occupait les fonctions d'Attaché Commercial en France sur les départements 22, 29, 36, 37, 44, 49, 56 et 85. En début 2013, il lui a été proposé les fonctions de Responsable de la zone Export. Il soutient que son contrat de travail a ainsi été modifié. Son activité en France a été redistribuée. Il ajoute que ce n'est que le 14 novembre 2013 qu'une proposition de rémunération et d'objectifs lui a été soumise qu'il a acceptée, sans conduire cependant à l'établissement d'un avenant. Il expose que depuis cette date, son salaire a été maintenu aux conditions précédentes (secteur France), qu'il n'avait jamais eu d'activité réelle, en attesterait son absence de voyages professionnels. Il rappelle, également, qu'à la date de la prise d'acte, la société n'avait toujours pas réglé le rappel de salaires (juin à décembre 2013) dont il a été fait mention précédemment. La société soutient que le contrat de travail du salarié n'a pas fait l'objet d'une modification unilatérale de sa part. Le salarié ne faisait que poursuivre son activité précédente mais en s'adressant à une clientèle implantée à l'étranger. Sa réintégration au secteur export n'aurait entraîné aucune modification ni de sa rémunération de base, ni de sa classification, ni d'aucun élément permettant de caractériser une modification de son contrat travail. La société ne lui a donc pas imposé une modification de son contrat. Elle fait valoir également qu'elle n'a pas commis de manquement dans la mise en place du nouveau système de rémunération (KPI) justifié objectivement compte-tenu de la spécificité de l'activité commerciale au sein du service export. Elle expose que le caractère tardif de la proposition de modification du contrat travail ne lui est pas imputable car il résulte de longues discussions avec l'intéressé. Elle ajoute qu'elle a tenté loyalement de rectifier l'erreur commise au sujet du bonus de 1 000 euros par le versement d'une prime exceptionnelle, que le salarié a refusé. Elle conteste avoir affecté le salarié uniquement à des tâches administratives comme en témoigne plusieurs déplacements effectués à l'étranger. Il résulte des pièces versées aux débats que, dès le 9 janvier 2013 (courriel de Monsieur J... au salarié), la décision d'affecter le salarié à l'export a été entérinée, mais que ce n'est qu'à compter du 1er avril 2013 que le salarié sera reconnu par la société comme effectivement affecté au secteur export après relances du salarié après que son secteur commercial en France a été redistribué le 13 mars 2013 à d'autres commerciaux. Ainsi, à compter du 1er avril 2013, le salarié se voyait privé de commissions sur le chiffre d'affaires en France sans que cette rémunération variable soit remplacée par une nouvelle structure de rémunération. Ces constatations se déduisent notamment du courriel du salarié du 14 mars 2013 adressé à Monsieur J... ( « là ça commençait urger !!! Manu et Y... ont attribué la zone France hier (13/03) aux commerciaux.
Cour d'appel de Versailles 06, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-24.118 du 15/01/2020, partie 2
A la fin de ce mois je n'aurai plus de zones attribuées en France donc plus de comm !!! Tu ne devais pas me proposer qq chose en début de semaine d'ailleurs !! C'est franchement pas sérieux!.. »), ainsi que du courriel du 3 juillet 2013, de Monsieur J..., supérieur hiérarchique du salarié, adressé à la direction, résumant la situation du salarié : « Aucune structure salariale n'a pour l'instant été définie, puisque H... est revenu aux ventes à l'exportation en avril 2013. J'ai proposé la structure salariale dont il bénéficie depuis qu'il est au département exportation et nationale de Brancher : fixe plus commissions (qui est de 1,5 %) sur les ventes d'encre en France de 1 % sur les encres vendues en Chine. Vous avez refusé et m'avez proposé d'élaborer une autre structure salariale. Étant donné que je ne suis pas parvenu à concevoir une nouvelle structure salariale qui vous convienne nous devons nous rencontrer et proposer la structure salariale à H... la semaine prochaine.... la nouvelle structure salariale et un nouveau secteur de vente implique une modification de son contrat travail qu'il doit approuver. C'est pourquoi cela doit être fait pendant que vous serez en France..... ». Il apparaît des éléments communiqués que ce n'est que le 14 novembre 2013 que la société formulera une proposition salariale, conforme à l'activité à laquelle le salarié était supposé avoir été affecté depuis le mois d'avril, soit 7 mois et demi plus tard. Or, la société ne respectera pas les termes de cette proposition pourtant acceptée par le salarié, (rappel de salaires de juin à décembre 2013), faisant état d'une erreur sur le montant du bonus KPI à compter du 1er janvier 2014. Elle formulera le 18 février 2014 une nouvelle proposition salariale qui ne sera pas acceptée par le salarié. A la date de la prise d'acte (14 juillet 2014), les parties n'étaient pas parvenues à un accord sur la rémunération variable. La société ne peut sérieusement soutenir que le contrat de travail n'avait pas été modifié unilatéralement et ne nécessitait donc pas l'accord du salarié, alors que la clientèle à prospecter était différente (de la France à l'étranger) et que la société avait souhaité mettre en place un nouveau système de rémunération variable (KPI). Le courriel précité de Monsieur J... du 3 juillet 2013 à sa hiérarchie, le confirme (« la nouvelle structure salariale et un nouveau secteur de vente implique une modification de son contrat travail qu'il doit approuver. C'est pourquoi cela doit être fait pendant que vous serez en France.....» ). En affectant le salarié, au mois d'avril 2013, à un nouveau secteur, sans prendre la précaution de s'assurer à cette date, de l'accord du salarié sur la nouvelle grille de rémunération qu'elle souhaitait mettre en place, l'employeur a pris le risque d'un refus du salarié sur la rémunération nouvelle. Le retard mis à proposer une nouvelle rémunération (courriel du 14 novembre 2013) ne peut être imputable qu'à l'employeur, retard qui a placé le salarié dans une grande incertitude notamment sur la partie variable de sa rémunération pendant plusieurs mois (d'avril à novembre 2013). Encore faut-il préciser que la société ayant commis, dit-elle, une erreur dans cette proposition, a été à l'origine d'un nouveau retard ne formulant une nouvelle proposition que le 18 février 2014, retard imputable exclusivement à l'employeur du fait cette erreur. Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres manquements allégués de l'employeur, il sera jugé que le salarié rapporte la preuve que la société a gravement manqué à ses obligations, en modifiant, de fait le secteur de prospection du salarié, sans s'assurer de son accord préalable sur la rémunération correspondante, alors qu'il s'agissait d'un élément modifiant le contrat de travail, au surplus en faisant preuve d'atermoiements dans la proposition d'une nouvelle structure de rémunération variable pourtant mise en place à son initiative (KPI). La prise d'acte par le salarié doit être considérée comme un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. Le jugement sera infirmé de ce chef » ; 1. ALORS QUE seul un manquement de l'employeur de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail peut justifier la prise d'acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur ; qu'il appartient au salarié sollicitant la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de prouver son bien-fondé ; qu'en se bornant à relever, pour faire droit à la demande de prise d'acte de la rupture du contrat de travail de Monsieur M..., que la société exposante avait affecté le salarié à un nouveau secteur de prospection en avril 2013 sans s'assurer de son acceptation de sa nouvelle rémunération variable et avait tardé à lui proposer une nouvelle rémunération à la suite du refus de la proposition initiale, sans indiquer en quoi ces manquements, en les supposant avérés, étaient de nature à rendre impossible la poursuite du contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1184 du Code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble les articles L. 1221-1, L. 1231-1, L. 1232-1 et L. 1235-3 du Code du travail ;
Cour d'appel de Versailles 06, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-24.118 du 15/01/2020, partie 3
2. ALORS QUE pour apprécier si les faits invoqués par le salarié justifient la rupture du contrat de travail, le juge doit se placer à la date de notification de la prise d'acte ; qu'en faisant droit à la demande de prise d'acte de la rupture du contrat de travail notifiée le 15 juillet 2014 aux motifs que la société exposante avait affecté le salarié à un nouveau secteur de prospection en avril 2013, sans s'assurer de l'acceptation par ce dernier de sa nouvelle rémunération variable et qu'elle avait attendu le mois de novembre 2013 pour lui proposer une nouvelle rémunération suite au refus de la première proposition, cependant qu'au jour de la prise d'acte de la rupture, ces manquements reprochés à l'employeur avaient disparu puisqu'à cette date le salarié avait fait l'objet de plusieurs propositions salariales conformes restées sans réponse, la cour d'appel a méconnu le principe susvisé et a violé les articles 1134 et 1184 du Code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble les articles L. 1221-1, L. 1231-1, L. 1232-1 et L. 1235-3 du Code du travail ; 3. ALORS QUE sauf à constater le caractère déloyal de cette proposition, le salarié ne peut se prévaloir de son propre refus de répondre à une proposition salariale de l'employeur lors d'une mutation pour invoquer un manquement de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail ; qu'en l'espèce la cour d'appel a constaté que Monsieur M... avait accepté sa mutation à un poste de commercial à l'export ; qu'elle a de même constaté que la société BRANCHER KINGSWOOD lui avait fait plusieurs propositions salariales intégrant le versement rétroactif d'un rappel de salaire afin que le retard pris dans la négociation de son salaire ne lui soit pas préjudiciable ; qu'il ressort également des constatations de l'arrêt attaqué que le salarié a laissé sans réponse la dernière proposition salariale qui lui avait été faite le 18 février 2014 par la société BRANCHER KINGSWOOD ; qu'enfin la cour d'appel n'a pas constaté que ces propositions salariales auraient été déloyales ; qu'en retenant néanmoins que la prise d'acte de la rupture était justifiée, cependant que, sauf proposition déloyale, le propre refus par le salarié des propositions salariales qui lui ont été faites par l'employeur ne pouvait être considéré comme constitutif d'une faute de l'employeur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles 1134 et 1184 du Code civil, dans leurs rédactions antérieures à l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble les articles L. 1221-1, L. 1231-1, L. 1232-1 et L. 1235-3 du Code du travail ; 4. ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE la mise en demeure préalable du débiteur de l'obligation procède de l'exigence de bonne foi et de loyauté du créancier face à la survenance d'une inexécution contractuelle ; qu'en l'espèce, la cour d'appel n'a pas constaté qu'une mise en demeure préalable ait été adressée par le salarié à la société BRANCHER KINGSWOOD de lui faire une proposition salariale autre que celle du 18 février 2014 qu'il a laissée sans réponse ; qu'en statuant ainsi, bien que le contrat de travail soit soumis aux règles de droit commun et aux exigences de bonne foi et de loyauté contractuelles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1, L.1222-1 et L.1231-1 du Code du travail, ensemble les articles 1135, 1139 et 1184 du code civil dans leur rédaction applicable, antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante : Vu le pourvoi formé par : 1°/ Mme W... A..., domiciliée [...] , 2°/ la société Iris, société civile immobilière, dont le siège est [...] , 3°/ la société Uniradio, société civile de moyens, 4°/ la société Erix, société civile immobilière, 5°/ la société Promoloc, société civile immobilière, 6°/ la société Promoven, société civile immobilière, 7°/ la société [...], société d'exercice libéral à responsabilité limitée, ayant toutes les cinq leur siège [...] , contre l'arrêt rendu le 14 décembre 2017 par la cour d'appel de Nîmes (2e chambre, section A), dans le litige les opposant : 1°/ à M. B... F..., domicilié [...] , 2°/ à la société de Saint Rapt-Bertholet, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , prise en sa qualité de liquidateur statutaire de la société Schweitzer, 3°/ à la société Jma, société civile immobilière, dont le siège est [...] , 4°/ à la société Daihel, société civile immobilière, dont le siège est [...] , 5°/ à M. G... Z..., domicilié [...] , pris en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la SA [...] , 6°/ à la société Qualiconsult, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , 7°/ à la société Aviva assurances, société anonyme, dont le siège est [...] , 8°/ à la société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est [...] , 9°/ à la société Mutuelle des architectes français assurances, dont le siège est [...] , 10°/ à la société Toitures Montiliennes, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , représentée par M. O... K..., mandataire liquidateur, domiciliée [...] , 11°/ à Mme V... Q... veuve D..., domiciliée [...] , 12°/ à Mme E... D... épouse R..., domiciliée [...] , défendeurs à la cassation ; M. F... et la société Daihel ont formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 3 décembre 2019, où étaient présents : M. Chauvin, président, Mme Georget, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre ; Vu les observations écrites de la SCP Richard, avocat de Mme A... et des sociétés Iris, Uniradio, Erix, Promoloc, Promoven, [...], de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Allianz IARD, de la SCP Boulloche, avocat de la société Mutuelle des architectes français assurances et des consorts D..., de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Qualiconsult, de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de M. F... et de la société Daihel ; Sur le rapport de Mme Georget, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Vu l'article 1014 du code de procédure civile ; Attendu que les deux moyens de cassation du pourvoi principal et les deux moyens de cassation du pourvoi incident annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ; REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme A... et les sociétés Iris, Uniradio, Erix, Promoloc, Promoven, [...] aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize janvier deux mille vingt. MOYENS ANNEXES à la présente décision Moyens produits par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour Mme A... et les sociétés Iris, Uniradio, Erix, Promoloc, Promoven, [...], demanderesses au pourvoi principal PREMIER MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame W... A..., la Société IRIS, la Société UNIRADIO, la Société ERIX, la Société PROMOLOC, la Société PROMOVEN et la Société [...] de leurs demandes tendant à voir condamner la Société ALLIANZ IARD à les indemniser de leurs préjudices immatériels complémentaires ;
Cour d'appel de Nîmes, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 18-12.794 du 16/01/2020, partie 1
AUX MOTIFS QUE sur les demandes des appelantes à l'encontre de la société Allianz, assureur dommages-ouvrage, le liquidateur statutaire de la SCI Schweitzer, société civile de construction-attribution, maître de l'ouvrage initial, les SCI Iris, Promoven, Promoloc, Erix et JMA, associées de celle-ci, et certains locataires exploitant ou ayant exploité leur activité médicale dans les locaux du centre médical, en l'espèce, Mme W... A..., ophtalmologue, la Selarl de [...] et la SMC Uniradio poursuivent la condamnation de l'assureur dommages-ouvrage à leur payer diverses sommes à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices immatériels (perte de valeur vénale, pertes d'exploitation consécutive à la perte de clientèle ensuite des désordres, pertes de loyer), sous déduction de la somme globale de 391 000 euros transigée de ce chef par la SCI Schweitzer avec la compagnie Aviva, assureur de responsabilité décennale de la société [...] ; que la SCI Dahiel, propriétaire, M. B... F..., locataire, concluent séparément et recherchent également la responsabilité de l'assureur dommages-ouvrage ; que l'assureur dommages-ouvrage leur oppose son plafond de garantie, s'agissant des dommages immatériels à hauteur de 76 224,51 euros ; que la discussion entretenue par les parties sur l'inopposabilité par l'assureur dommages-ouvrage du plafond de garantie en cas de méconnaissance des délais légaux prévus par l'article L. 242-1 du code des assurances est inopérante, dans la mesure où la sanction légale que ce texte attache à cette méconnaissance ne vaut que pour la garantie obligatoire des dommages matériels, alors que seuls les dommages immatériels, qui ne relèvent pas de cette garantie obligatoire, sont en cause dans la présente instance de ce chef ; qu'en réalité les appelantes recherchent, selon le cas, la responsabilité civile contractuelle ou délictuelle de l'assureur dommages-ouvrage pour avoir manqué à son obligation légale de pré-financement, les uns soulignant que le pré-financement proposé a été insuffisant sinon nul (en l'espèce la somme de 15 000 francs le 31 juillet 2002), les autres (la SCI Dahiel et M. C...) non seulement que l'assureur dommages-ouvrage n'a jamais rempli ses obligations de pré-financement, mais qu'il a encore proposé en décembre 2010 et alors que l'expertise touchait à son terme un autre principe réparatoire consistant non pas à remplacer les façades mais à les doubler par d'autres, ce qui n'a fait que retarder les opérations d'expertise ; que la société Allianz, assureur dommages-ouvrage, oppose à ces demandes, d'une part, l'existence du protocole du 1er décembre 2014, d'autre part, la propre attitude de son assurée qui n'est pas en mesure de verser au débat sa réclamation initiale, qui a de son propre chef interrompu la phase amiable et qui a rejeté sans explication son offre d'indemnisation conjointe avec la société Aviva du 9 septembre 2008 ensuite du dépôt du pré-rapport de l'expert à hauteur d'une somme de 1 919 819 euros ; que les appelantes ne répliquent pas à ces moyens ; que le protocole d'accord transactionnel du 1er décembre 2014 a pour objet "l'accord pur et simple et irrévocable sur la demande des SCI Schweitzer et autres relative à la sanction du doublement de l'intérêt au taux légal, pour le dépassement allégué des délais légaux d'instruction qui avait été sollicitée devant les premiers juges et rejetée par ce dernier" ; que son article premier vise encore "la demande qui avait été formée au titre du doublement des intérêts au taux légal pour dépassement des délais légaux d'instruction par application des dispositions de l'article L 242-1, alinéa 5, du code des assurances" et son article 2 est ainsi rédigé : "Du chef dudit versement [la somme de 600 000 euros], la Selarl [...] ès qualités se déclare pleinement et entièrement remplie de ses droits à l'égard de la société Allianz du chef de l'indemnité prévue à l'article 1er du présent acte", les parties ayant expressément conféré à leur accord "valeur de transaction, globale, forfaitaire et définitive, irrévocable entre elles constituant la loi des parties." ; que si l'article 2 dudit protocole précise que la société Allianz n'acquiesce pas aux prétentions de la SCI Schweitzer et autres relativement au dépassement du délai légal de l'article 242-1 du code des assurances et que "La Selarl [...] , ès qualités, pour sa part précise expressément qu'elle ne renonce à aucune de ses autres demandes à l'encontre de la société Allianz", il reste que cette convention a précisément pour objet de transiger sur l'application des sanctions légales prévues par l'article L 242-1, alinéa 5, du code des assurance lesquelles sont limitatives et autorisent alors l'assuré, en cas de méconnaissance des délais par l'assureur ou d'offre d'indemnité manifestement insuffisante, à préfinancer les travaux à ses frais moyennant une majoration de sa créance indemnitaire, de sorte que l'autorité de la chose jugée qui s'y attache par application de l'article 2052 du code civil ne rend recevable une demande d'indemnisation que d'un fait fautif distinct non couvert par la transaction ; que les sociétés appelantes, maître de l'ouvrage initial ou acquéreurs successifs, ne caractérisent au soutien de leurs demandes aucune faute distincte de celles que sanctionne le doublement des intérêts légaux ; qu'il sera relevé en tout état de cause :
Cour d'appel de Nîmes, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 18-12.794 du 16/01/2020, partie 2
- que si le premier juge a exactement constaté qu'il résultait de l'ordonnance de référé-expertise qu'une déclaration de sinistre avait été effectuée le 26 novembre 2000, celle-ci n'est pas versée au débat, de sorte que la nature des désordres alors déclarés et les solutions réparatoires alors envisageables qui seules peuvent déterminer un préfinancement utile, le serait-il à titre provisionnel, demeurent incertaines, - que le rapport préliminaire de l'assureur dommages-ouvrage du 7 mars 2001 comme le rapport ultérieur de l'agence Saretec du 11 mai 2001 ne font état à cette date que de désordres d'infiltrations isolés, pour l'essentiel provoqués par le débordement d'un chéneau (étranger au litige portant sur les panneaux), et un écoulement d'eau par une seule fenêtre, un courrier adressé à l'assureur dommages-ouvrage le 18 mars 2002 ne faisant encore référence à cette date qu'à des infiltrations apparemment cantonnées au niveau des cabinets médicaux du 2e étage, de sorte que l'origine et la cause des désordres et le principe d'une réparation efficace n'étaient pas alors déterminables avec précision, les désordres, qui se révéleront évolutifs, n'étant apparus dans toute leur ampleur qui a permis seule d'en déterminer l'origine, qu'à l'occasion des longues opérations d'expertise judiciaire, - que c'est en cet état que la SCI Schweitzer a pris l'initiative le 18 décembre 2002 d'interrompre la phase amiable de l'expertise diligentée par l'assureur dommages-ouvrage sollicitant une expertise judiciaire au contradictoire de toutes les parties, - que la durée de celle-ci (plus de 8 ans) atteste de la particulière complexité technique à déterminer le facteur causal des désordres qui ne le sera qu'en 2005 (p. 145 du rapport M... faute de production par quiconque du volume 1 du rapport I...), et à arbitrer une solution propre à y mettre fin, de sorte que l'incapacité de l'assureur dommages-ouvrage à déterminer dans les courts délais prévus par la loi l'origine principale des désordres qui ne le sera par l'expert judiciaire que deux ans après sa désignation, n'est pas en elle-même fautive, non plus que la difficulté à proposer un préfinancement utile tant que l'origine des désordres et le principe réparatoire n'étaient pas acquis, - que l'assureur dommages-ouvrage conjointement avec la société Aviva, assureur de H..., a, dès le dépôt du pré-rapport de l'expert judiciaire en avril 2008, fait une offre d'indemnisation au maître de l'ouvrage le 3 octobre 2008 à hauteur du chiffrage retenu par ce dernier, soit la somme de 1 919 819 euros au titre des dommages matériels qui n'a pas été acceptée par la SCI Schweitzer, alors qu'elle sera par elle considérée comme satisfactoire six ans plus tard ensuite du jugement déféré, - qu'en cet état et faute pour le maître de l'ouvrage d'avoir accepté cette proposition d'indemnisation dès le mois d'octobre 2008, le moyen pris de ce que la compagnie Allianz a saisi l'expert judiciaire en décembre 2010 d'une solution réparatoire alternative à celle que ce dernier avait proposée et qui faisait jusqu'alors consensus, à supposer le fait fautif en ce qu'il aurait retardé encore le dépôt du rapport de près d'un an alors que la quasi-totalité des propriétaires et occupants du bâtiment s'y sont finalement ralliés comme le note en conclusion M. I..., est sans incidence sur les termes du litige ; qu'en cet état, aucune faute distincte de celle que sanctionne l'article L 242-1 du code des assurances n'est démontrée ; que s'agissant des tiers à la transaction, en l'espèce les locataires qui recherchent la responsabilité délictuelle de l'assureur dommages-ouvrage au titre des pertes d'exploitation qu'ils imputent à la méconnaissance par ce dernier des délais prévus par l'article L 242-1 du code des assurances, la sanction de ces délais, qui autorise l'assuré à préfinancer les travaux à ses frais moyennant une majoration de sa créance indemnitaire, est limitative et ne se conjugue pas avec une cause de responsabilité ; que pour ces motifs, toutes les demandes dirigées contre l'assureur dommage-ouvrage seront rejetées ; qu'en cet état, les demandes de la société Allianz, qui ne recourt contre les locateurs d'ouvrage ou leurs assureurs qu'au titre des sommes supplémentaires qui pourraient être mises à sa charge par la présente décision, n'ont plus d'objet ; 1°) ALORS QUE la transaction faite par l'un des intéressés ne lie point les autres intéressés et ne peut être opposée par eux ;
Cour d'appel de Nîmes, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 18-12.794 du 16/01/2020, partie 3
qu'en décidant que du fait de l'autorité de la chose jugée attachée au protocole transactionnel du 1er décembre 2014, seule était recevable une demande d'indemnisation par la Société ALLIANZ IARD d'un préjudice résultant d'un fait fautif non couvert par cette transaction, bien que cette dernière ait été conclue entre l'assureur dommages-ouvrage et la seule SELARL DE [...], ès qualités de liquidateur statutaire de la SCI SCHWEITZER, ce dont il résultait que les propriétaires de locaux au sein de l'immeuble étaient recevables à rechercher la responsabilité de la Société ALLIANZ IARD sur le fondement d'un fait fautif couvert par la transaction, la Cour d'appel a violé les articles 2051 et 2052, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, du Code civil ensemble les articles 1134 et 1165 du Code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; 2°) ALORS QU'engage sa responsabilité contractuelle de droit commun, l'assureur dommages-ouvrage qui manque à son obligation de préfinancer des travaux efficaces de nature à mettre fin aux désordres affectant l'immeuble ; qu'en se bornant à énoncer, pour décider que la Société ALLIANZ IARD n'avait pas commis de faute au titre du préfinancement des travaux réparatoires devant être réalisés, que le rapport préliminaire de l'assureur dommages-ouvrage du 7 mars 2001 et le rapport ultérieur de l'agence Saretec du 11 mai 2001 ne faisaient état que de désordres d'infiltration isolés et que, dès le dépôt par l'expert judiciaire de son pré-rapport en avril 2008, la Société ALLIANZ IARD avait, le 3 octobre 2008, conjointement avec l'assureur de la Société CARTEX, fait une offre d'indemnisation au maître de l'ouvrage à hauteur du chiffrage retenu par l'expert, sans rechercher si la faute de l'assureur dommages-ouvrage tenait au fait qu'après avoir proposé un préfinancement dérisoire de 15.000 francs le 31 juillet 2002, il n'avait, jusqu'en octobre 2008, proposé aucun préfinancement ou offre d'indemnisation au fur et à mesure de l'avancement des opérations d'expertise sur l'origine des désordres et la recherche d'une solution pour y remédier, de sorte que l'immeuble s'était considérablement dégradé, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; 3°) ALORS QUE le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ; qu'en déboutant les locataires de l'immeuble de leurs demandes indemnitaires formées l'encontre de la Société ALLIANZ IARD, motif pris que s'agissant des tiers à la transaction du 1er décembre 2014, qui recherchent la responsabilité délictuelle de l'assureur dommages-ouvrage au titre des pertes d'exploitation, la seule sanction résultant du dépassement des délais légaux visés à l'article L 242-1 du Code des assurances était la faculté pour l'assuré de préfinancer les travaux à ses frais moyennant une majoration de sa créance indemnitaire, bien que lesdits locataires aient été en droit de demander réparation des préjudices qu'ils avaient subis en raison de la faute que la Société ALLIANZ IARD avait commise en ne respectant pas le délai de 60 jours visé à l'article L 242-1 du Code des assurances et en ne préfinançant pas les travaux réparatoires, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. SECOND MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir fixé les préjudices immatériels des propriétaires et locataires de l'immeuble à la somme globale 664.049 euros et, après avoir constaté que cette somme excédait celle de 391.000 euros qui avait été déjà versée au maître de l'ouvrage par la Société AVIVA au titre des préjudices immatériels, d'avoir condamné in solidum les consorts U..., ensemble la MAF, cette dernière sous la seule réserve de son plafond de garantie, et la Société QUALICONSULT à leur payer diverses sommes au titre du complément d'indemnisation excédant la somme globale de 391.000 euros ; AUX MOTIFS PROPRES QUE sur les demandes des appelantes dirigées contre les locateurs d'ouvrage (les consorts D..., pris ensemble la Maf et Qualiconsult), les demandes qui sont formulées ne portent que sur les dommages immatériels supérieurs, pris ensemble, à la somme de 391 000 euros qui a été versée de ce chef par la compagnie Aviva, assureur de responsabilité décennale de la société [...], à la SCI Schweitzer et autres ; qu'une telle demande ainsi présentée n'a d'objet que si le cumul des préjudices immatériels revendiqués par les appelantes excède ce plafond ; qu'il a été vu supra que les appelantes ne peuvent agir sur le même fondement, seuls le maître de l'ouvrage et les acquéreurs successifs pouvant rechercher la garantie légale des constructeurs au visa de l'article 1792 du code civil ; que sur ce fondement et au visa de l'article 1792-5 du même code, les ayants droit de M. D... et la Maf ne sont pas fondés à invoquer la clause d'absence de solidarité stipulée au contrat de maîtrise d'oeuvre, dès lors que les fautes des locateurs d'ouvrage ont concouru ensemble au dommage de nature décennale ;
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que Qualiconsult n'est pas davantage fondée à se prévaloir des dispositions de l'article L 111-4 du code de la construction et de l'habitation selon lesquelles le contrôleur technique n'a à supporter la réparation des dommages qu'à concurrence de sa part de responsabilité, ce texte n'étant d'application que dans les rapports entre constructeurs ; qu'en revanche, les locataires dont l'action n'est recevable que sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle, ne peuvent recourir contre les locateurs d'ouvrage ou leurs assureurs qu'à proportion de leur part de faute dans leur préjudice, soit 10 % du total de celui-ci ; que s'agissant de l'examen des postes de préjudice il sera pour l'essentiel fait référence aux estimations de M. M..., sapiteur auquel l'expert judiciaire désigné a fait appel, en rappelant que c'est aux demandeurs qu'il revient d'établir la réalité de leur préjudice ; que compte tenu des observations qui précédent s'agissant de l'offre d'indemnité, que l'expert judiciaire estimait satisfactoire (p. 18 de son rapport), faite par les assureurs Allianz et Aviva le 3 octobre 2008 qui permettait de financer les travaux de nature à mettre un terme définitif aux désordres et d'une durée d'exécution des travaux sur 7 mois, seuls les préjudices ayant couru jusqu'au 1er juin 2009 seront regardés comme imputables aux locateurs d'ouvrages ; que pour des motifs parfaitement exposés par les premiers juges et que la cour fait siens, la perte de valeur vénale de l'immeuble du fait des désordres ne sera pas retenue en l'état de l'indemnité qui a été acceptée sans réserve par les propriétaires au titre de la réparation des préjudices matériels, laquelle a nécessairement vocation à faire disparaître tous désordres et à restituer à l'immeuble son entière valeur vénale ; que les réflexions de l'expert judiciaire sur une éventuelle perte de chance de vendre au prix du marché durant la période du sinistre ne seront pas faites siennes par la cour, aucun élément au débat n' accréditant l'hypothèse d'un projet ou même d'un souhait de la SCI Schweitzer de vendre, moins de quinze ans après l'avoir fait réaliser, l'immeuble qu'elle avait fait construire et aménager en centre médical pour que ses associés y installent leur activité, de sorte que ce poste est purement hypothétique ; [ ] que la SCI IRIS est propriétaire au 1er étage ; que la perte d'exploitation liée à l'impossibilité de relouer le local à compter du départ de son dernier locataire en mai 2006 sera retenue sur une base de 11,40 euros le m² pour une surface de 100 m² jusqu'au 1er juin 2009, soit la somme de : 11,40 X 100 X 37 mois = 42 180 euros ; qu'une perte d'exploitation d'un tel quantum est sans lien démontré avec la nécessité invoquée par la SCI Iris de souscrire un prêt de 170 000 euros pour solder le prêt initial de 270 000 euros à échéance du 30 mai 2009 ni un engagement à hauteur de 20 % dans l'achat d'un appartement par la SCI Mage, de sorte que, faute de lien de causalité établi, les postes de préjudice accessoire liés aux frais financiers du prêt et de l'engagement seront rejetés ; que la SCI Promoven est propriétaire au 2ème étage ; qu'elle n'invoque une perte d'exploitation qu'à compter du départ de sa locataire, Mme N..., le 28 février 2012 ; que cette date étant postérieure au 1er juin 2009, retenue comme date butoir du préjudice indemnisable, le préjudice invoqué de ce chef est nul ; que la SCI Promoven invoque par ailleurs une minoration du loyer et l'absence d'indexation compte tenu de l'état de l'immeuble ; que la minoration du loyer n'est pas établie et le sapiteur a relevé (en page 52 de son rapport) une augmentation des loyers en 2004 (+ 4,25 %) et en 2005 (+ 10,77 %) de sorte que l'absence d'indexation alléguée se trouve démentie avant cette dernière date et, faute de toute explication complémentaire ensuite des interrogations de M. M... dans son pré-rapport, sans lien établi avec les désordres postérieurement à 2005 ; qu'en définitive le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté la SCI Promoven de ses demandes au titre de ses préjudices immatériels ; que la SCI Promoloc est propriétaire au 2ème étage ; qu'elle n'invoque une perte d'exploitation qu'à compter du départ de son locataire, M. T..., le 31 décembre 2011 et l'impossibilité de relouer les lieux ensuite du départ du Dr L... en août 2014 à hauteur des sommes de 53 186 euros et 71 1187 euros pour deux des locaux dont elle est propriétaire ; que ces deux dates étant postérieures au 1er juin 2009, retenue comme date butoir du préjudice indemnisable, le préjudice invoqué de ce chef est nul ; qu'elle invoque encore, s'agissant de ces deux baux, une absence d'indexation constitutive d'un préjudice indemnisable ;
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que M. M... a relevé sur ce point que les justifications manquaient, les loyers ayant subi des hausses et des baisses inexpliquées (page 61 de son rapport) de sorte que ce chef de préjudice ne pouvait être validé, pas plus que celui tenant à la réalisation à compter de la conclusion des baux en octobre 2000 de travaux dans les trois cabinets médicaux pour 85 494 euros, dont aucune pièce n'établit qu'ils l'auraient été en conséquence des désordres affectant alors le bâtiment ; qu'en cet état, le lien entre la baisse de loyer qui a été consentie par la SCI par une clause spéciale du contrat de bail du 12 octobre 2000 durant 36 mois du fait de travaux "d'aménagement" à réaliser et les désordres objets de la présente instance n'est pas établi ; que la modération délibérée des loyers consentis aux occupants n'a pas été soumise à M. M... comme un poste de préjudice distinct, de sorte que ce chef de préjudice, aujourd'hui invoqué, sera rejeté ; qu'en revanche, il est constant qu'un local de 70 m² est demeuré inoccupé à compter de l'an 2000, cette vacance étant regardée comme constitutive d'une perte d'exploitation en lien direct avec les désordres relevés, laquelle sera estimée, sur les bases de calcul du sapiteur, et à raison de la période s' étant écoulée du 1er janvier 2000 au 1er juin 2009, soit 113 mois à : 13 x 70 x 113 = 102 830 euros ; que la SCI Erix est propriétaire au 1er étage ; qu'elle n'invoque qu'une perte de valeur vénale de l'immeuble, chef de préjudice dont elle sera déboutée pour les motifs auparavant exposés ; que la Selarl [...], gérée par des médecins radiologues qui ont constitué entre eux une société civile de moyens Uniradio, est locataire au 1er étage de la SCI Erix, bailleresse, et exploite un centre d'imagerie médicale ; qu'elle invoque à la fois la perte d'exploitation liée à la période de fermeture pour travaux et une perte de clientèle soulignant que le nombre de ses patients est passé de 14 000 en 2008 à 9 700 à 2014, le nombre d'actes sur la même période ayant diminué du tiers (18 000 actes en 2008 , 12 000 actes en 2014) ; qu'il a déjà été dit que faute pour le maître de l'ouvrage d'avoir accepté en octobre 2008 l'indemnité satisfactoire proposée par les assureurs Allianz et Aviva au titre des travaux de remise en état, ce dernier est seul comptable des préjudices immatériels subis postérieurement à la date butoir qui a été fixée au 1er juin 2009, de sorte que la perte de clientèle invoquée, dont le caractère manifeste est largement postérieur à cette date, ne constitue pas un préjudice indemnisable à la charge des locateurs d'ouvrage ; que s''agissant de la perte antérieure au 1er juin 2009, M. M... constate qu'aucune justification du chiffre d'affaires pour les années antérieures à 2004 n'est produite, que le chiffre d'affaires pour les années 2006, 2007 et 2008 est en progression et que l'estimation d'une perte de chiffre d'affaires de 5 % alors invoquée n'est pas vérifiable du point de vue comptable ; qu'il note cependant en conclusion de son rapport qu'une baisse de l'activité a été constatée à compter de 2006 pour le Laboratoire d'analyse médicale et qu'à cette date, le Dr A... a également quitté les locaux, ces éléments suffisant à établir le lien de causalité entre l'état de l'immeuble à cette date et une moindre fréquentation de la patientèle ; que la perte d'exploitation sera par conséquent regardée comme certaine et en lien direct avec les désordres pour les années 2006, 2007 et 2008 à hauteur de 2 % de la marge brute réalisée sur ces trois exercices soit selon les indications du rapport (p.128) la somme de : 2/100 x 2 779 000 (CA de la période considérée) x 92 % (perte de marge brute) = 51 113,60 euros ; que la perte d'exploitation durant le temps des travaux s'élève par ailleurs, sur la base de l'estimation du sapiteur (page 125 de son rapport), à la somme quotidienne de 3 622 euros sur une durée prévisible de travaux retenue de 39 jours, soit la somme de (3 622 x 39) 141 258 euros, justement retenue par le premier juge ; que le poste relatif au préjudice allégué subi par le Dr J... au motif de l'impossibilité lors de son départ à la retraite de valoriser sa clientèle, sera rejeté, se rapportant au préjudice d'un tiers et étant sans lien démontré avec la période retenue au titre des préjudices immatériels, lesquels n'auraient plus été subis si le maître de l'ouvrage avait accepté dès le mois d'octobre 2008 l'indemnité proposée par les assureurs aux fins de réaliser les travaux nécessaires, étant en outre souligné que la date de départ à la retraite du Dr J... "quelques années plus tard" n'est pas indiquée ; qu'en définitive, le préjudice subi par ce locataire est de (51 113,60 + 141 258) 192 371,60 euros ; que pour les motifs qui précédent, ce locataire n'est fondé à recourir contre les locateurs d'ouvrage que dans la mesure de leur part de responsabilité conjointe dans les dommages, soit à hauteur de (10 % x 192 371,60) 19 238 euros ;
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que les Dr A... et P... ont constitué une société civile de moyens qui a pris en charge la location d'un plateau de 100 mètres carrés dans le centre médical dont les murs sont propriété de la SCI Iris constituée par les époux A... ; que Mme A... sollicite à titre de préjudice les sommes de : - 92 000 euros pour perte de marge sur honoraires entre 2001 et 2005, - 42 216 euros au titre des frais de déménagement et de réinstallation, s'étant trouvée contrainte de quitter les lieux en avril 2006, - 54 600 euros au titre du surcoût de loyer d'un nouveau local beaucoup plus grand que celui dont elle avait besoin, - 7 295 euros au titre de son préjudice de jouissance de 2000 à avril 2006 ; que Mme A... a quitté les lieux en avril 2006 pour aller s'installer ailleurs ; que sur la base des constatations de l'expert, le préjudice de jouissance sera arrêté à 20 % du loyer sur la période considérée, soit la somme de 7 295 euros ; que la perte de clientèle imputée à l'état de l'immeuble de 2001 à avril 2006 n'est pas établie à suffisance, étant en outre observé qu'à l'exception des années 2001 et 2002 (page 135 du rapport), les honoraires nets n'ont cessé d'augmenter (+31 % de 2000 à 2005 avec des augmentations annuelles de +12,26 % en 2004 et + 11,38 % en 2005), la seule augmentation des recettes de 2005 à 2006 (+21,70 %), date de son nouveau emménagement ailleurs, ne pouvant, à elle seule, et sans considération pour d'autres facteurs explicatifs (locaux plus vastes, population du quartier, organisation de l'activité médicale) permettre d'imputer à l'état de l'immeuble ancien un gain manqué sur cette période ; qu'enfin, à la différence du centre de radiologie, Mme A... a déménagé à la date à laquelle la moindre fréquentation de la patientèle commençait à se faire ressentir, de sorte que la perte d'exploitation antérieure à 2006, seule invoquée, n'est pas établie ; qu'au titre des frais supplémentaires liés au nouveau local, sur la base de l'attestation de l'expert-comptable de Mme A..., seront seules retenues les sommes de 3 364 euros (banque d'accueil non transposable) et 4 347 euros (frais de réinstallation du réseau informatique), les autres postes insuffisamment justifiés ou explicités (constitution d'une nouvelle SCI et surcoût des investissements liés au surdimentionnement de la surface) étant rejetés, soit en définitive la somme de 7 711 euros ; que le lien de causalité entre le surdimentionnement allégué des nouveaux locaux et les désordres objets de la présente instance n'est pas suffisamment établi et ce chef de préjudice sera par conséquent rejeté ; qu'en définitive, le préjudice global retenu par la présente décision s'élève à (7 295 + 7 711 =) 15 006 euros ; pour les mêmes motifs que précédemment, Mme A... n'est fondée à recourir contre les deux locateurs d'ouvrage qu'à proportion de leur part de responsabilité dans la survenance de son préjudice, soit (10% de 15 006 euros) 1 501 euros ; [ ] qu'en conclusion sur ce point, les préjudices ont été arrêtés comme suit : - SCI JAM 123 800 euros - SCI Iris 42 180 euros - SCI Promoven 0 - SCI Promoloc 102 830 euros - SCI Erix 0 - Selarl Médigrad 19 938 euros - Dr A... 1 501 euros - SCI Dahiel 331 500 euros - Dr F... 42 300 euros Total: 664 049 euros. que compte tenu de l'indemnité déjà versée par l'assureur Aviva au titre des préjudices immatériels aux parties prises ensemble (391 000 euros), celles-ci, qui ne recourent pas contre Aviva, sont fondées en leurs demandes de condamnation in solidum des consorts D..., de la MAF, cette dernière sous la seule réserve de son plafond, et de Qualiconsult à hauteur de la somme totale de (664 049 - 391 000) 273 049 euros à répartir, faute d'autre clé proposée et compte tenu de la présentation des demandes dont est saisie la cour, au prorata de leur part propre dans le total de complément d'indemnisation, soit : - SCI JAM : 18,65 % de 273 049 euros, soit 50 905 euros, -SCI Iris : 6,36 % de 273 049 euros, soit 17 344 euros, - SCI Promoven : 0 - SCI Promoloc : 15,48 % de 273 049 euros, soit 42 282 euros, - SCI Erix 0 - Selarl Médigrad : 3 % de 273 049 euros, soit 8 198 euros, - Dr A... : 0,23 % de 273 049 euros, soit 618 euros, - SCI Dahiel : 49,93 % de 273 049 euros, soit 136 309 euros, - Dr F... : 6,34 % de 273 049 euros, soit 17 393 euros soit au total la somme de 273 049 euros ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE pour aucun des demandeurs, le poste "perte sur la valeur vénale de l'immeuble" ne peut être retenu ;
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qu'en effet la remise en état du bâtiment traitée dans la première partie du présent jugement a justement pour finalité de faire disparaître cette perte en disposant enfin d'un immeuble neuf tel qu'il aurait dû être ; que ce chef de préjudice disparaissant ne peut être indemnisé deux fois, une fois par la remise en ordre et une fois par sa compensation pécuniaire ; que la seule hypothèse dans laquelle ce préjudice aurait pu être réel est celle où l'un des demandeurs aurait volontairement proposé sa propriété à la vente et aurait vu sa valeur s'effondrer en raison du sinistre ; qu'aucun des demandeurs ne soutient s'être trouvé en cette situation ; 1°) ALORS QUE les juges du fond sont tenus, lorsqu'ils écartent l'avis de l'expert judiciaire, d'énoncer les motifs par lesquels ils considèrent que l'avis du technicien n'est pas pertinent et ne peut être suivi ; qu'en écartant les conclusions de l'expert judiciaire sur le chiffrage des préjudices, sans énoncer les motifs par lesquels elle a estimé que les évaluations auxquelles il avait procédé n'étaient pas pertinentes, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ; 2°) ALORS QU'en se bornant à énoncer, pour décider que seuls les préjudices ayant couru jusqu'au 1er juin 2009 seraient regardés comme imputables aux locateurs d'ouvrages, que la Société ALLIANZ et la Société AVIVA avaient fait, le 3 octobre 2008 [lire « le 9 septembre 2008 »], une offre d'indemnité que l'expert judiciaire estimait satisfactoire et qui permettait de financer les travaux, d'une durée d'exécution de sept mois, de nature à mettre un terme définitif aux désordres, sans constater que cette offre indemnisait les dommages immatériels qui avaient été subis par les propriétaires et les locataires de l'immeuble, la Cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs impropres à établir que l'offre d'indemnité des assureurs était satisfactoire, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1382 du Code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; 3°) ALORS QU'en décidant que le préjudice tenant à l'impossibilité pour les propriétaires de lots, de vendre l'immeuble au prix du marché tant qu'il n'avait pas été remédié aux désordres était purement hypothétique, motif pris qu'aucun élément au débat n'accréditait l'hypothèse d'un projet ou même d'un souhait de la SCI SCHWEITZER de le vendre moins de quinze ans après l'avoir fait construire et aménager en centre médical pour que ses associés y installent leur activité, après avoir relevé que l'immeuble présentait des désordres récurrents d'infiltrations, ce dont il résultait qu'il était invendable au prix du marché et que ses propriétaires avaient de ce fait nécessairement subi un préjudice indemnisable tenant à l'impossibilité de céder leur lot, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1147 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. Moyens produits par la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat aux Conseils pour M. F... et la société Daihel, demandeurs au pourvoi incident PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. B... F... et la SCI Daihel de leurs demandes tendant à voir condamner la société Allianz Iard à les indemniser de leurs préjudices immatériels complémentaires ; AUX MOTIFS QUE sur les demandes des appelantes à l'encontre de la société Allianz, assureur dommages-ouvrage, le liquidateur statutaire de la SCI Schweitzer, société civile de construction-attribution, maître de l'ouvrage initial, les SCI Iris, Promoven, Promoloc, Erix et JMA, associées de celle-ci, et certains locataires exploitant ou ayant exploité leur activité médicale dans les locaux du centre médical, en l'espèce, Mme W... A..., ophtalmologue, la Selarl de [...] et la SMC Uniradio poursuivent la condamnation de l'assureur dommages-ouvrage à leur payer diverses sommes à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices immatériels (perte de valeur vénale, pertes d'exploitation consécutive à la perte de clientèle ensuite des désordres, pertes de loyer), sous déduction de la somme globale de 391 000 € transigée de ce chef par la SCI Schweitzer avec la compagnie Aviva, assureur de responsabilité décennale de la société [...] ; que la SCI Daihel, propriétaire, M. B... F..., locataire, concluent séparément et recherchent également la responsabilité de l'assureur dommages-ouvrage ; que l'assureur dommages-ouvrage leur oppose son plafond de garantie, s'agissant des dommages immatériels à hauteur de 76 224,51 € ; que la discussion entretenue par les parties sur l'inopposabilité par l'assureur dommages-ouvrage du plafond de garantie en cas de méconnaissance des délais légaux prévus par l'article L.242-1 du code des assurances est inopérante, dans la mesure où la sanction légale que ce texte attache à cette méconnaissance ne vaut que pour la garantie obligatoire des dommages matériels, alors que seuls les dommages immatériels, qui ne relèvent pas de cette garantie obligatoire, sont en cause dans la présente instance de ce chef ;
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qu'en réalité les appelantes recherchent, selon le cas, la responsabilité civile contractuelle ou délictuelle de l'assureur dommages-ouvrage pour avoir manqué à son obligation légale de pré-financement, les uns soulignant que le pré-financement proposé a été insuffisant sinon nul (en l'espèce la somme de 15 000 francs le 31 juillet 2002), les autres (la SCI Daihel et M. C...) non seulement que l'assureur dommages-ouvrage n'a jamais rempli ses obligations de pré-financement, mais qu'il a encore proposé en décembre 2010 et alors que l'expertise touchait à son terme un autre principe réparatoire consistant non pas à remplacer les façades mais à les doubler par d'autres, ce qui n'a fait que retarder les opérations d'expertise ; que la société Allianz, assureur dommages-ouvrage, oppose à ces demandes, d'une part, l'existence du protocole du 1er décembre 2014, d'autre part, la propre attitude de son assurée qui n'est pas en mesure de verser au débat sa réclamation initiale, qui a de son propre chef interrompu la phase amiable et qui a rejeté sans explication son offre d'indemnisation conjointe avec la société Aviva du 9 septembre 2008 ensuite du dépôt du pré-rapport de l'expert à hauteur d'une somme de 1 919 819 € ; que les appelantes ne répliquent pas à ces moyens ; que le protocole d'accord transactionnel du 1er décembre 2014 a pour objet « l'accord pur et simple et irrévocable sur la demande des SCI Schweitzer et autres relative à la sanction du doublement de l'intérêt au taux légal, pour le dépassement allégué des délais légaux d'instruction qui avait été sollicitée devant les premiers juges et rejetée par ce dernier » ; que son article premier vise encore « la demande qui avait été formée au titre du doublement des intérêts au taux légal pour dépassement des délais légaux d'instruction par application des dispositions de l'article L.242-1, alinéa 5, du code des assurances » et son article 2 est ainsi rédigé : « Du chef dudit versement [la somme de 600 000 €], la Selarl [...] ès qualités se déclare pleinement et entièrement remplie de ses droits à l'égard de la société Allianz du chef de l'indemnité prévue à l'article 1er du présent acte », les parties ayant expressément conféré à leur accord « valeur de transaction, globale, forfaitaire et définitive, irrévocable entre elles constituant la loi des parties » ; que si l'article 2 dudit protocole précise que la société Allianz n'acquiesce pas aux prétentions de la SCI Schweitzer et autres relativement au dépassement du délai légal de l'article 242-1 du code des assurances et que « La Selarl [...] , ès qualités, pour sa part précise expressément qu'elle ne renonce à aucune de ses autres demandes à l'encontre de la société Allianz », il reste que cette convention a précisément pour objet de transiger sur l'application des sanctions légales prévues par l'article L.242-1, alinéa 5, du code des assurance lesquelles sont limitatives et autorisent alors l'assuré, en cas de méconnaissance des délais par l'assureur ou d'offre d'indemnité manifestement insuffisante, à préfinancer les travaux à ses frais moyennant une majoration de sa créance indemnitaire, de sorte que l'autorité de la chose jugée qui s'y attache par application de l'article 2052 du code civil ne rend recevable une demande d'indemnisation que d'un fait fautif distinct non couvert par la transaction ; que les sociétés appelantes, maître de l'ouvrage initial ou acquéreurs successifs, ne caractérisent au soutien de leurs demandes aucune faute distincte de celles que sanctionne le doublement des intérêts légaux ; qu'il sera relevé en tout état de cause : que si le premier juge a exactement constaté qu'il résultait de l'ordonnance de référé-expertise qu'une déclaration de sinistre avait été effectuée le 26 novembre 2000, celle-ci n'est pas versée au débat, de sorte que la nature des désordres alors déclarés et les solutions réparatoires alors envisageables qui seules peuvent déterminer un pré-financement utile, le serait-il à titre provisionnel, demeurent incertaines ; que le rapport préliminaire de l'assureur dommages-ouvrage du 7 mars 2001 comme le rapport ultérieur de l'agence Saretec du 11 mai 2001 ne font état à cette date que de désordres d'infiltrations isolés, pour l'essentiel provoqués par le débordement d'un chéneau (étranger au litige portant sur les panneaux), et un écoulement d'eau par une seule fenêtre, un courrier adressé à l'assureur dommages-ouvrage le 18 mars 2002 ne faisant encore référence à cette date qu'à des infiltrations apparemment cantonnées au niveau des cabinets médicaux du 2ème étage, de sorte que l'origine et la cause des désordres et le principe d'une réparation efficace n'étaient pas alors déterminables avec précision, les désordres, qui se révéleront évolutifs, n'étant apparus dans toute leur ampleur qui a permis seule d'en déterminer l'origine, qu'à l'occasion des longues opérations d'expertise judiciaire ; que c'est en cet état que la SCI Schweitzer a pris l'initiative le 18 décembre 2002 d'interrompre la phase amiable de l'expertise diligentée par l'assureur dommages-ouvrage sollicitant une expertise judiciaire au contradictoire de toutes les parties ;
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que la durée de celle-ci (plus de 8 ans) atteste de la particulière complexité technique à déterminer le facteur causal des désordres qui ne le sera qu'en 2005 (p.145 du rapport M... faute de production par quiconque du volume 1 du rapport I...), et à arbitrer une solution propre à y mettre fin, de sorte que l'incapacité de l'assureur dommages-ouvrage à déterminer dans les courts délais prévus par la loi l'origine principale des désordres qui ne le sera par l'expert judiciaire que deux ans après sa désignation, n'est pas en elle-même fautive, non plus que la difficulté à proposer un préfinancement utile tant que l'origine des désordres et le principe réparatoire n'étaient pas acquis ; que l'assureur dommages-ouvrage conjointement avec la société Aviva, assureur de H..., a, dès le dépôt du pré-rapport de l'expert judiciaire en avril 2008, fait une offre d'indemnisation au maître de l'ouvrage le 3 octobre 2008 à hauteur du chiffrage retenu par ce dernier, soit la somme de 1 919 819 € au titre des dommages matériels qui n'a pas été acceptée par la SCI Schweitzer, alors qu'elle sera par elle considérée comme satisfactoire six ans plus tard ensuite du jugement déféré ; qu'en cet état et faute pour le maître de l'ouvrage d'avoir accepté cette proposition d'indemnisation dès le mois d'octobre 2008, le moyen pris de ce que la compagnie Allianz a saisi l'expert judiciaire en décembre 2010 d'une solution réparatoire alternative à celle que ce dernier avait proposée et qui faisait jusqu'alors consensus, à supposer le fait fautif en ce qu'il aurait retardé encore le dépôt du rapport de près d'un an alors que la quasi-totalité des propriétaires et occupants du bâtiment s'y sont finalement ralliés comme le note en conclusion M. I..., est sans incidence sur les termes du litige ; qu'en cet état, aucune faute distincte de celle que sanctionne l'article L.242-1 du code des assurances n'est démontrée ; que s'agissant des tiers à la transaction, en l'espèce les locataires qui recherchent la responsabilité délictuelle de l'assureur dommages-ouvrage au titre des pertes d'exploitation qu'ils imputent à la méconnaissance par ce dernier des délais prévus par l'article L.242-1 du code des assurances, la sanction de ces délais, qui autorise l'assuré à préfinancer les travaux à ses frais moyennant une majoration de sa créance indemnitaire, est limitative et ne se conjugue pas avec une cause de responsabilité ; que pour ces motifs, toutes les demandes dirigées contre l'assureur dommage-ouvrage seront rejetées ; qu'en cet état, les demandes de la société Allianz, qui ne recourt contre les locateurs d'ouvrage ou leurs assureurs qu'au titre des sommes supplémentaires qui pourraient être mises à sa charge par la présente décision, n'ont plus d'objet ; 1°) ALORS QUE la transaction faite par l'un des intéressés ne lie point les autres intéressés et ne peut être opposée par eux ; qu'en décidant que du fait de l'autorité de la chose jugée attachée au protocole transactionnel du 1er décembre 2014, seule était recevable une demande d'indemnisation par la société Allianz Iard d'un préjudice résultant d'un fait fautif non couvert par cette transaction, bien que cette dernière ait été conclue entre l'assureur dommages-ouvrage et la seule Selarl [...] , ès qualités de liquidateur statutaire de la SCI Schweitzer, ce dont il résultait que les propriétaires de locaux au sein de l'immeuble étaient recevables à rechercher la responsabilité de la société Allianz Iard sur le fondement d'un fait fautif couvert par la transaction, la cour d'appel a violé les articles 2051 et 2052, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016, du code civil ensemble les articles 1134 et 1165 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; 2°) ALORS QU'engage sa responsabilité contractuelle de droit commun, l'assureur dommages-ouvrage qui manque à son obligation de préfinancer des travaux efficaces de nature à mettre fin aux désordres affectant l'immeuble ; qu'en se bornant à énoncer, pour décider que la société Allianz Iard n'avait pas commis de faute au titre du préfinancement des travaux réparatoires devant être réalisés, que le rapport préliminaire de l'assureur dommages-ouvrage du 7 mars 2001 et le rapport ultérieur de l'agence Saretec du 11 mai 2001 ne faisaient état que de désordres d'infiltration isolés et que, dès le dépôt par l'expert judiciaire de son pré-rapport en avril 2008, la société Allianz Iard avait, le 3 octobre 2008, conjointement avec l'assureur de la Société Cartex, fait une offre d'indemnisation au maître de l'ouvrage à hauteur du chiffrage retenu par l'expert, sans rechercher si la faute de l'assureur dommages-ouvrage tenait au fait qu'après avoir proposé un préfinancement dérisoire de 15.000 francs le 31 juillet 2002, il n'avait, jusqu'en octobre 2008, proposé aucun préfinancement ou offre d'indemnisation au fur et à mesure de l'avancement des opérations d'expertise sur l'origine des désordres et la recherche d'une solution pour y remédier, de sorte que l'immeuble s'était considérablement dégradé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; 3°) ALORS QUE le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant : REJET et IRRECEVABILITE sur les pourvois formés par les sociétés Major Cheer Limited et Lamont financière contre l'arrêt n° 12 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 2e section, en date du 17 décembre 2018, qui, dans la procédure suivie des chefs d'escroquerie, fraude fiscale aggravée, blanchiment et abus de biens sociaux, a confirmé l'ordonnance de saisie pénale rendue par le juge des libertés et de la détention . La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 4 décembre 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Planchon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre. Greffier de chambre : Mme Guichard. Sur le rapport de Mme le conseiller PLANCHON, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général VALLEIX. Un mémoire a été produit. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Le procureur national financier a diligenté une enquête préliminaire des chefs de blanchiment en bande organisée, fraude fiscale aggravée, blanchiment de fraude fiscale aggravée, escroquerie et blanchiment d'escroqueries, à la suite d'un article de presse faisant état des investissements chinois dans le vignoble bordelais et d'un rapport de la Cour des comptes chinoise (NAO) relatant des détournements de fonds publics, à hauteur de 32 millions d'euros, en vue de l'acquisition de propriétés viticoles par le groupe Haichang. 3. Le groupe Haichang Group Limited, de droit chinois, dirigé par M. C... , est un conglomérat exerçant des activités diverses et, notamment, la production viticole. 4. Ce groupe détient l'intégralité du capital social des sociétés Lamont, Lamont financière et Laforest qui sont toutes de droit français avec une direction commune représentée par M. Q... L.... 5. En octobre 2012, la société Lamont a souscrit un prêt d'un montant de 30 millions d'euros auprès de l'établissement Industrial and Commercial Bank of China (ICBC) en produisant douze faux actes notariés, ledit prêt étant destiné à l'acquisition de propriétés viticoles dans la région bordelaise sur le territoire français, exploitées par la société Lamont financière. 6. Les investigations ont montré que le rôle de la société Lamont était de dissimuler la véritable identité des acquéreurs des châteaux, soit plusieurs sociétés de droit hong-kongais, ayant toutes pour dirigeante et associée unique Mme K... , épouse de M. C... , laquelle dirige également la société Porthouse Holding Ltd (PHL), créée en 2011 et ayant son siège social aux Îles Vierges britanniques. 7. Sur les 30 millions d'euros ainsi obtenus, la société Lamont a viré 18 millions d'euros sur le compte offshore de la société PHL en produisant à ICBC sept faux actes notariés la faisant apparaître comme acquéreur de propriétés viticoles et débitrice de la société PHL qui était censée lui avoir avancé des fonds nécessaires à ces acquisitions. 8. Par la suite la société Lamont a viré le solde de 12 millions d'euros directement à différents notaires pour financer l'acquisition de propriétés viticoles après avoir produit cinq autres faux actes notariés. 9. Le paiement des acquisitions a été effectué au comptant, avec paiement direct entre les mains des offices notariaux, par des fonds provenant, soit du compte personnel détenu en Chine par M. U... , soit du compte HSBC ouvert à Hong-Kong par la société PHL, soit d'un compte ouvert en Chine et non déclaré à l'administration fiscale dont est titulaire la société Laforest auprès de la banque Bank of Communication, soit enfin du compte ouvert par la société Lamont auprès de la banque ICBC. 10. L'exploitation des comptes sociaux déposés, notamment, par la société Lamont a fait apparaître en 2013, après la souscription du prêt de 30 000 000 euros, des comptes débiteurs d'un montant de 32 000 000 euros qui n'a pas été justifié. 11. La revente, en 2015, des parcelles issues des acquisitions financées par PHL pourrait correspondre à une conversion du produit des infractions au profit de cette société ou de ses ayant droits économiques. 12. Le 12 avril 2018, le juge des libertés et de la détention a ordonné la saisie de la propriété viticole dénommée "château Sogeant", acquise le 28 février 2013 par la société Major Cheer Limited pour une somme de 5 150 000, 43 euros financée par une partie des fonds provenant du prêt de 30 millions d'euros. 13. Les sociétés Major Cheer Limited et Lamont financière, respectivement propriétaire et exploitante de la propriété saisie ont interjeté appel de cette décision. Examen des moyens
décision 19-80.891 du 15/01/2020, partie 1
Sur le premier moyen Enoncé du moyen 14. Le moyen est pris de la violation des articles 706-152, 591 et 593 du code de procédure pénale ; 15. Le moyen critique l'arrêt attaqué "en ce qu'il a déclaré irrecevable l'appel de la société Lamont financière pour défaut de qualité à agir, alors que les tiers ayant des droits sur le bien saisi, au sens de l'article 706-150 du code de procédure pénale, ont qualité pour exercer un recours contre l'ordonnance de saisie immobilière ; qu'il résulte des propres mentions de la décision que le juge autorisant les saisies est compétent pour statuer sur leur exécution ou sur les actes ayant pour conséquence de transformer, modifier substantiellement le bien en cause ou en réduire la valeur ; que l'exploitant d'un bien saisi étant susceptible de subir, du fait même de cette mesure, une perte d'exploitation qui lui confère un intérêt à agir au sens du texte, en jugeant néanmoins, pour déclarer l'appel de la société Lamont financière irrecevable, que les saisies litigieuses ne portent aucunement atteinte au droit de jouissance et encore moins aux droits d'exploitation du locataire, la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations". Réponse de la Cour 16. Pour déclarer l'appel de la société Lamont financière irrecevable, l'arrêt attaqué énonce que celle-ci n'est pas propriétaire du bien objet de la saisie immobilière mais seulement l'exploitante, que la qualité à agir ne se présume pas du seul fait de l'appel et que l'ordonnance de saisie du juge des libertés et de la détention est une mesure provisoire qui a pour seul effet l'interdiction d'aliéner ou de donner en garantie ledit bien, prérogatives appartenant au seul propriétaire. 17. Les juges ajoutent que la saisie pénale immobilière ne porte aucunement atteinte au droit de jouissance et encore moins aux droits d'exploitation du locataire. 18. Ils concluent qu'à défaut de qualité à agir, l'appel de la société Lamont financière doit être déclaré irrecevable. 19. En prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision. 20. En effet, il découle de l'article 706-150 du code de procédure pénale qui régit les modalités de la saisie immobilière que seuls peuvent interjeter appel d'une décision de saisie, soit le propriétaire de celui-ci, soit les tiers ayant des droits sur ce bien. 21. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation (Crim., 13 juin 2019, pourvoi n° 18-84.256) que l'occupant d'un appartement, objet d'une saisie pénale, est sans intérêt à exercer un recours en son nom personnel contre une telle décision dès lors que la saisie du bien est sans incidence sur son statut et qu'il n'est pas démontré, ni même allégué, que cette mesure serait la cause d'un trouble de jouissance. 22. En l'espèce, la société Lamont financière, qui n'est pas propriétaire de la propriété viticole saisie, mais seulement l'exploitante, ne démontre pas en quoi la saisie, qui ne remet pas en cause son statut et n'a pas interdit l'exploitation dudit bien, aurait causé un trouble de jouissance pour elle. 23. L'appel de la société Lamont financière étant irrecevable, son pourvoi l'est également. Sur le second moyen Enoncé du moyen 24. Le second moyen est pris de la violation des articles 6, §1, de la Convention européenne des droits de l'homme, 1er du protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, 706-150, 591 et 593 du code de procédure pénale ; 25. Le moyen critique l'arrêt attaqué "en ce qu'il a confirmé l'ordonnance d'autorisation de saisie pénale immobilière : 1°) alors que le principe du contradictoire implique pour les parties le droit d'accès aux informations et la communication de toutes les pièces de la procédure ; qu'en jugeant que les pièces auxquelles la partie intéressée appelante d'une autorisation de saisie pénale peut prétendre sont complètes, lorsqu'il est constant les éléments de la procédure fiscale, sur lesquels la saisie a été fondée, n'ont pas été joints à la procédure, la chambre de l'instruction a méconnu le droit à un procès équitable tel qu'il est défini par l'article 6, §1, de la Convention européenne des droits de l'homme ; 2°) alors que la chambre de l'instruction ne pouvait se borner à énumérer les pièces versées à la procédure pour juger que le contradictoire a bien été respecté devant elle, sans répondre au moyen péremptoire de défense faisant valoir que, s'agissant d'une enquête préliminaire n'offrant aucun accès au dossier, les exposantes ont été laissées dans l'ignorance de l'ensemble des pièces de la procédure jusqu'à l'audiencement devant la chambre de l'instruction et que ce n'est que quelques jours avant l'audience que certaines pièces pénales ont pu être consultées, cette communication tardive les ayant privées de la possibilité de prendre utilement connaissance des éléments de la procédure et de les discuter d'une manière efficace, en méconnaissance de l'article 6,§1, de la Convention européenne des droits de l'homme ;
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3°) alors que le juge qui prononce une mesure de saisie de tout ou partie du patrimoine doit apprécier le caractère proportionné de l'atteinte portée aux droits de l'intéressé, même lorsque les saisies ne constituent que des mesures conservatoires ; qu'en relevant, pour rejeter le moyen pris de l'atteinte disproportionnée portée au droit de propriété du demandeur, que le principe de proportionnalité ne peut pas s'appliquer à la saisie provisoire aux fins de confiscation d'un bien qui, dans sa totalité, est le produit de l'escroquerie, lorsque, en l'absence de décision définitive, le caractère illicite des fonds ayant servi à financer l'acquisition du bien saisi n'est par hypothèse pas établi et qu'il appartenait ainsi à la chambre de l'instruction, après s'être assuré de son caractère confiscable en application des conditions légales, de préciser la nature et l'origine de ce bien et de s'expliquer sur la nécessité et la proportionnalité de l'atteinte portée au droit de propriété du demandeur, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision". Réponse de la Cour Sur le moyen, pris en ses deux premières branches 26. Concernant la mise à disposition des pièces de la procédure, l'arrêt attaqué énonce qu'en application de l'article 706-150 du code de procédure pénale, en cas de recours contre une décision de saisie pénale immobilière prise dans le cadre d'une enquête préliminaire, le propriétaire appelant ne peut prétendre qu'à la mise à la disposition des seules pièces de la procédure se rapportant à la saisie qu'il conteste, l'accès limité à certaines pièces de la procédure, en l'espèce les pièces se rapportant à la saisie, conciliant de façon satisfaisante le respect du droit de propriété et des exigences liées à la manifestation de la vérité avec l'efficacité des enquêtes pénales. En application de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme et l'article préliminaire du code de procédure pénale, il incombe à la juridiction saisie de veiller au respect du principe du procès équitable qui implique le respect du contradictoire et que l'appelant ait connaissance des pièces susceptibles d'avoir une influence prépondérante sur sa décision et donc d'avoir une incidence sur l'issue du seul litige dont elle est saisie. 27. Les juges ajoutent que figurent au dossier de la procédure, outre l'ordonnance appelée, la requête du procureur national financier et la décision de saisie de ce dernier, diverses autres pièces relatives à la saisie contestée qu'ils énumèrent de façon détaillée avant de souligner que les pièces auxquelles peut prétendre la partie intéressée appelante d'une autorisation de saisie pénale immobilière ordonnée en enquête préliminaire sont complètes et suffisantes et se rapportent directement à la décision contestée. 28. En l'état de ces énonciations, la chambre de l'instruction, qui a répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle, a justifié sa décision. 29. En effet, la restriction apportée à la mise à disposition des pièces du dossier ne méconnaît pas les dispositions de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce qu'elle garantit un juste équilibre entre les droits de la personne concernée par la saisie et la nécessité de préserver le secret de l'enquête et de l'instruction, la jurisprudence de la Cour de cassation favorisant le maintien de cet équilibre. 30. D'une part, sont considérées comme les pièces de la procédure se rapportant à la saisie, la requête du ministère public aux fins de saisie ainsi que l'ordonnance du juge des libertés et de la détention et, antérieurement à la loi n° 2019-221 du 23 mars 2019 relative au renforcement de l'organisation des juridictions, la décision de saisie du ministère public. 31. D'autre part, la chambre de l'instruction, saisie d'un recours formé contre une ordonnance de saisie spéciale au sens des articles 706-141 à 706-158 du code de procédure pénale, qui, pour justifier d'une telle mesure, s'appuie, dans ses motifs décisoires, sur une ou des pièces précisément identifiées de la procédure est tenue de s'assurer que celles-ci ont été communiquées à la partie appelante. 32. Par ailleurs, si la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme est exigeante au regard du respect des droits de la défense, il en découle également que le droit à une divulgation des preuves pertinentes n'est pas absolu en présence d'intérêts concurrents, et notamment la nécessité de garder secrètes les investigations policières, les mesures restreignant les droits de la défense devant être absolument nécessaires (CEDH, M... et autres c. Pays-Bas, 23 avril 1997, § 58) et suffisamment compensées par la procédure suivie devant les autorités judiciaires (CEDH, P... c. Pays-Bas, 26 mars 1996, § 72 ; CEDH, M... et autres c. Pays-Bas, 23 avril 1997, § 54). 33. En conséquence, les griefs ne peuvent qu'être écartés. Sur le moyen, pris en sa troisième branche
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34. Pour confirmer l'ordonnance de saisie pénale immobilière l'arrêt relève, s'agissant de la proportionnalité de cette mesure, que dans le cadre de l'enquête préliminaire, la chambre de l'instruction est saisie d'une dizaine de recours formés contre les autorisations de saisies immobilières de dix propriétés viticoles acquises pour un montant total de 22 672 097,65 euros et dont la valeur a été estimée par le service des domaines à la somme totale de 22 917 000 euros. 35. Les juges soulignent également qu'il n'est pas contesté que la société Lamont a obtenu un prêt d'un montant de 30 000 000 euros de la banque ICBC à Paris en produisant 12 faux actes notariés d'achats de châteaux et que si la somme de 12 000 000 euros a été versée à des études notariales pour des propriétés viticoles, le reliquat de 18 000 000 euros a été transféré par cette société à la société PHL au prétexte d'autres faux achats de propriétés. 36. Les juges constatent que la saisie pénale immobilière a été sollicitée et autorisée au motif que l'immeuble a été acquis le 23 février 2013 par la société Major Cheer Ltd pour un prix de 5 150 000 euros intégralement financé par la société Lamont à l'aide des fonds provenant du prêt de 30 millions d'euros. 37. Ils relèvent qu'il est suffisamment établi que cet immeuble a été financé avec le produit des infractions, objet de l'enquête préliminaire. 38. Ils ajoutent que le bien saisi, qui constitue le produit de l'infraction, est susceptible de confiscation en application de l'article 131-21, alinéa 3, du code pénal, la peine complémentaire de confiscation du produit de l'infraction étant prévue tant par les articles 313-7, 4°, 319-9,131-39, 7°, du même code réprimant l'escroquerie que par les articles 324-7, 8°, 324-9, 131-39 dudit code, s'agissant du blanchiment de ce délit. 39. Ils concluent que le principe de proportionnalité ne peut s'appliquer à la saisie provisoire aux fins de garantir la confiscation d'un bien qui, dans sa totalité, est le produit ou l'objet des infractions d'escroquerie, de blanchiment et d'abus de biens sociaux objet de la poursuite. 40. En conséquence, en prononçant ainsi, et dès lors que la juridiction d'instruction doit apprécier et vérifier, sur la base des indices dont elle dispose, la nature de produit de l'infraction du bien saisi chaque fois qu'elle statue sur cette mesure ou sur une demande de restitution, la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans méconnaître aucun des textes visés au moyen. 41. D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli. 42. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme ; PAR CES MOTIFS, la Cour : I - Sur le pourvoi de la société Lamont financière : Le DÉCLARE IRRECEVABLE ; II - Sur le pourvoi de la société Major Cheer Limited : Le REJETTE Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quinze janvier deux mille vingt. En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par : 1°/ M. Jean-Marc Robert, 2°/ Mme Q... P..., épouse I..., domiciliés tous deux [...], contre l'arrêt n° RG : 14/04342 rendu le 13 juillet 2017 par la cour d'appel de Nîmes (1re chambre), dans le litige les opposant à la société Lyonnaise de banque, société anonyme, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation ; Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 26 novembre 2019, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Vitse, conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara, conseiller, Mme Randouin, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Vitse, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. et Mme I..., de Me Le Prado, avocat de la société Lyonnaise de banque, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur les deux moyens, réunis : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 13 juillet 2017), que, suivant acte notarié du 29 juin 2006, la société Lyonnaise de banque (la banque) a consenti à M. et Mme I... (les emprunteurs) un prêt destiné à l'acquisition de lots de copropriété ; qu'elle a, le 13 juin 2013, fait pratiquer une saisie-attribution, dont les emprunteurs ont contesté la validité devant le juge de l'exécution ; Attendu que les emprunteurs font grief à l'arrêt de valider la saisie-attribution, après avoir écarté la prescription de l'action en recouvrement, alors, selon le moyen : 1°/ qu'est un consommateur au sens de la directive n° 2011/83/UE du 25 octobre 2011 et de la directive 2014/17/UE du 4 février 2014, reprenant les termes des directives antérieures, notamment de la directive 93/13/CEE du 5 avril 1993, une personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ; que, transposant cette directive, l'article 3 de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a inséré un article préliminaire dans le code de la consommation aux termes duquel, au sens du présent code, est considérée comme consommateur toute personne qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ; que ces dispositions sont d'application immédiate ; qu'en considérant que des particuliers qui exercent une activité salariée comme les emprunteurs, et qui agissent à des fins autres tout à fait distinctes du cadre de cette activité professionnelle en faisant l'acquisition à l'aide de prêts, à des fins fiscales et patrimoniales d'un immeuble de rapport loué temporairement en meublé, activité totalement étrangère à leur activité professionnelle, ne peuvent être considérés comme des consommateurs car ils exerceraient de ce fait une activité professionnelle « accessoire », ce qui supposerait en droit qu'elle fût indissociable de leur activité « principale » ou du moins liée à cette activité, ce qui n'est pas le cas des emprunteurs, pas plus que le statut de loueur ne constitue nécessairement une activité professionnelle au sens de la loi, la cour d'appel a violé l'article liminaire du code de la consommation transposant la directive 2011/83/UE et la directive 2014/17/UE, ainsi que la directive 93/13/CEE du 5 avril 1993 sur les clauses abusives ; 2°/ qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que la définition du consommateur en droit communautaire reposait sur deux critères, un critère finaliste correspondant à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de l'activité professionnelle de la personne concernée mais aussi une finalité personnelle du contrat permettant de savoir si on est en présence d'un consommateur nécessitant d'être protégé ou d'un professionnel avisé ; qu'en s'abstenant de rechercher si, dans les faits, les emprunteurs pouvaient sérieusement être considérés comme des professionnels avisés de l'immobilier et non comme de simples consommateurs au sens du droit communautaire, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des dispositions précitées de l'article liminaire du code de la consommation et des directives 2011/83/UE, 2014/17/UE et 93/13/CEE ainsi que des règlements de Bruxelles n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 portant refonte du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000, entrée en vigueur le 10 janvier 2015, et de Rome n° 598/2008 du 17 juin 2008 ;
Cour d'appel de Nîmes, Cour de cassation Première chambre civile, décision 17-27.073 du 08/01/2020, partie 1
3°/ que, par une décision n° 2017-689 QPC du 8 février 2018, le Conseil constitutionnel a jugé contraire à la Constitution les dispositions de l'article 151 septies du code général des impôts réservant certains avantages fiscaux aux contribuables exerçant une activité de location d'appartements meublés à titre professionnel dès lors qu'elles subordonnaient la reconnaissance de la qualité de loueur en meublé professionnel à l'inscription au registre du commerce et des sociétés ; le Conseil constitutionnel a en effet considéré, dès lors que l'activité de location de biens immeubles ne constituait pas un acte de commerce au sens de l'article L. 110-1 du code de commerce, que les personnes physiques exerçant cette activité ne pouvaient avoir la qualité de commerçant conférée exclusivement à « ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle » aux termes de l'article L. 121-1 du même code et être inscrites au registre du commerce et des sociétés en application de l'article L. 123-1 du même code ; que, dès lors, en déduisant de l'inscription au registre du commerce et des sociétés de l'un des emprunteurs le caractère professionnel de l'activité de loueur en meublé qu'il aurait exercée à titre accessoire et en excluant ainsi du champ d'application des dispositions du code de la consommation le prêt souscrit pour financer le bien donné en location quand les personnes physiques qui exercent cette activité n'ont pas la qualité de commerçant et ne peuvent légalement être inscrites au registre du commerce et des sociétés, la cour d'appel a violé les articles L. 110-1, L. 121-1, L. 123-1 du code de commerce, ensemble les articles L. 312-3, L. 312-4 et L. 137-2 du code de la consommation ; 4°/ que l'article L. 137-2 du code de la consommation dispose que l'action des professionnels pour les biens et services qu'ils fournissent aux consommateurs se prescrit par deux ans ; que les crédits immobiliers consentis aux consommateurs par des organismes de crédit constituent des services financiers fournis par des professionnels ; que sont exclus du champ d‘application des dispositions du code de la consommation relatives au crédit immobilier les prêts qui sont destinés à financer une activité professionnelle ; que cependant la destination professionnelle d'un crédit ne peut résulter que d'une stipulation expresse ; que, selon les constatations de l'arrêt, le prêt consenti aux emprunteurs fait expressément référence à la procédure de la loi Scrivener, ce dont il résulte que le prêt n'a pas été conclu dans le but de financer les besoins d'une quelconque activité professionnelle mais bien sous l'égide du code de la consommation tel que cela résulte de la volonté même des parties exprimée dans l'acte ; qu'en considérant, néanmoins, que les dispositions du code de la consommation ne sont pas applicables en l'espèce, l'arrêt attaqué, qui ne s'est pas attaché à la destination contractuelle du crédit, a méconnu les dispositions des articles L. 312-3, L. 312-4 et L. 137-2 du code de la consommation ; 5°/ que la prescription abrégée s'applique à tous les prêts bancaires contractés par une personne physique dans un but étranger à son activité professionnelle ; qu'elle s'applique même à une opération réalisée à des fins spéculatives ou fiscales dès lors que la personne physique agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ; qu'il n'est pas douteux en l'espèce que le financement litigieux était étranger à l'activité professionnelle des emprunteurs, tous les deux salariés ; qu'en considérant, néanmoins, que les emprunteurs exerçaient la profession habituelle de loueur en meublé à titre accessoire et qu'ils ne pouvaient revendiquer la qualité de consommateur pour invoquer la prescription biennale, alors même qu'il résultait des énonciations de l'arrêt attaqué que le prêt litigieux avait été souscrit à des fins purement fiscales et d'investissements personnels totalement étrangères à l'activité professionnelle respective des emprunteurs, la cour d'appel a violé l'article L. 137-2 du code de la consommation ; Mais attendu qu'ayant relevé que les emprunteurs avaient souscrit le prêt litigieux afin d'acquérir, sous le statut de loueur en meublé professionnel, des lots de copropriété destinés à la location, la cour d'appel, qui a souverainement estimé que la banque n'avait pas accepté de soumettre le contrat aux dispositions du code de la consommation, en a justement déduit que le prêt litigieux était destiné à financer une activité professionnelle, exclusive de la prescription biennale applicable au seul consommateur ; qu'abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les trois premières branches, le moyen n'est pas fondé ; Et attendu qu'en l'absence de doute raisonnable quant à l'interprétation du droit de l'Union européenne, en particulier des directives n° 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 et n° 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993, il n'y a pas lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. et Mme I... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Cour d'appel de Nîmes, Cour de cassation Première chambre civile, décision 17-27.073 du 08/01/2020, partie 2
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit janvier deux mille vingt. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. I... et Mme I... PREMIER MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement déféré ayant validé la saisie-attribution pratiquée par la SA Lyonnaise de Banque après avoir dit n'y avoir lieu à renvoi préjudiciel devant la Cour de justice de l'Union européenne et D'AVOIR débouté M. et Mme I... de leurs demandes ; AUX MOTIFS QUE Sur la demande de renvoi préjudiciel en interprétation devant la cour de justice de l'Union européenne : La question préjudicielle qui est soumise à la cour par les époux I... porte sur le point de savoir si les dispositions du droit de l'Union européenne, et en particulier celles de la Directive du 25 octobre 2011 qui définissent le consommateur comme une personne physique agissant à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle, doivent être interprétées en ce sens que des particuliers, personnes physiques qui, parallèlement à leur activité professionnelle, souscrivent un emprunt auprès d'une banque en vue d'acquérir un lot de copropriété destiné à la location au sein d'une résidence hôtelière, principalement en vue de l'obtention d'avantages fiscaux, développant leur patrimoine, constituent des consommateurs. La directive 2011/83/UE du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs propose, sur le modèle des autres directives communautaires, une définition du consommateur qui est la reprise exacte de la définition donnée par la proposition de directive du 8 octobre 2008 relative aux droits des consommateurs. Le consommateur est ainsi désigné, dans l'article 2 de la directive de 2011, comme «toute personne physique qui, dans les contrats relevant de la présente directive, agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale». Il est constant que tant la directive de 2011 retranscrite en droit interne par la loi Hamon que celle de 2008 n'avaient aucune existence juridique à la date de la signature des prêts litigieux par les époux I.... Par ailleurs, avant cette directive, les textes européens, les directives ou les règlements de Bruxelles et de Rome, et la jurisprudence de la cour de justice des communautés européennes limitent le bénéfice des dispositions consuméristes destinées à corriger le déséquilibre entre les parties aux personnes physiques contractant pour la satisfaction de leurs besoins personnels et pour un usage étranger à leur activité professionnelle. Le conseil des communautés européennes puis de l'Union européenne a été conduit à plusieurs reprises à élaborer des directives tendant à harmoniser la réglementation des rapports entre professionnels et consommateurs au nombre desquelles la directive 93/13/ "contribution à l'entretien et l'éducation" du Conseil du 5 avril 1993 relative à l'élimination des clauses abusives dont l'article 2, sous b) définit le consommateur comme toute personne physique qui dans les contrats ... agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle et sous c), définit le terme «professionnel» comme visant «toute personne physique ou morale qui, dans les contrats relevant de la présente directive, agit dans le cadre de son activité professionnelle, qu'elle soit publique ou privée». Ainsi l'analyse de la définition de consommateur en droit communautaire permet d'établir que celle-ci repose sur deux critères, un critère finaliste qui renvoie au fait que le consommateur doit agir à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle, et plus particulièrement de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale (en d'autres termes, le consommateur ne peut être que celui qui contracte pour ses besoins personnels ou domestiques) et une finalité personnelle du contrat conclu, critère essentiel qui permet de savoir si on est en présence ou non d'un consommateur nécessitant d'être protégé sur le terrain du droit de la consommation. L'article L 312-3 du code de la consommation applicable en l'espèce (devenu L313-2 dudit code) exclut du champ d'application des dispositions protectrices du code de la consommation les prêts destinés sous quelque forme que ce soit à financer une activité professionnelle, notamment celle des personnes physiques qui à titre habituel même accessoire à une autre activité, procurent sous quelque forme que ce soit des fractions d'immeuble en jouissance. Les époux I... ne démontrent pas que cet article serait contraire aux dispositions communautaires, aucune d'elles ne visant expressément "une activité professionnelle" exclusive de l'exercice par une même personne physique de deux activités professionnelles à titre habituel, l'une à titre principal et l'autre à titre accessoire, qui l'une comme l'autre relève de la qualification "professionnelle".
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Ils estiment que la Cour de Cassation dans ses deux arrêts du 12 octobre 2016 et du 25 janvier 2017 n'a pas fait application du critère de finalité professionnelle de la transaction pour définir le statut ou non du consommateur, conformément au principe 2014/17/EU du 4 février 2014 et à la directive 93/13 CE modifiée par la directive 2011—83 du 25 octobre 2011. Or, la Cour de cassation relevant que les lots de copropriété acquis étaient destinés à la location et que le propriétaire emprunteur était inscrit au registre du commerce des sociétés en qualité de loueur en meublé professionnel, en a déduit que le prêt contracté pour financer l'acquisition des dits lots était destiné à financer une activité professionnelle, fût-elle accessoire. La location habituelle, et ce, bien que saisonnière, de tels lots en meublés caractérise, aux termes d'une jurisprudence bien établie émanant tant de la Cour de cassation que du Conseil d'Etat, préexistante aux affaires dites "Apollonia", l'utilisation professionnelle des lots et l'exercice par le loueur en meublés d'une activité professionnelle. La jurisprudence apprécie au cas par cas le caractère habituel de la location. Dès lors, la Cour de cassation a bien fait dans ses arrêts critiqués des 12 octobre 2016 et 25 janvier 2017 application du critère de finalité professionnelle. Le reproche des appelants n'est pas fondé. En effets, M. ils ont signé tous les deux la "fiche de réservation produit" pour un investissement "LMNP" soit Loueur en Meublé Non Professionnel, le 16 janvier 2006. Compte tenu de l'ampleur de leur investissement immobilier, M. I... s'est inscrit au registre du commerce et des sociétés du tribunal de commerce d'Avignon en qualité de loueur meublé professionnel à compter du 27 janvier 2006. En effet, il est établi que les époux I... ne se sont pas limités à la seule acquisition du lot e copropriété financée par la Lyonnaise de banque mais en ont acquis dix-sept au total pour plus de 3 millions d'euros d'investissement financé à 100 % par des prêts d'une durée oscillant entre 20 et 25 ans avec pour chaque lot acquis un contrat de réserve location accompagné d'un bail signé le même jour. Le montant de remboursement annuel devait être remboursé pour une grande partie par les revenus des locations. Il n'est pas contesté que certains des lots acquis sont toujours loués à ce jour, dix ans après leur acquisition. La location habituelle des lots acquis est établie. Par ailleurs, le moyen selon lequel il y aurait une discrimination au préjudice de l'épouse puisque seul M. I... est inscrit au RCS et le statut de simple consommateur de Mme I... serait ainsi ignoré par la solidarité prononcée n'est pas opérant dès lors que la Cour de cassation n'a pas considéré dans ses attendus que l'épouse serait inférieure en étant soumis au statut de son mari mais a considéré qu'en sa qualité d'emprunteur solidaire elle avait poursuivi le même but que son mari. Le fait qu'elle ne soit pas inscrite au RCS n'entraîne pas sa négation ou le refus de prendre en compte sa qualité propre. La Cour a considéré que la solidarité s'appliquait dès lors que les conjoints mariés et déclarant sous le même foyer fiscal, avaient eu une stratégie patrimoniale commune. La qualification professionnelle du prêt s'appliquait également à l'épouse. Il n'y a pas ainsi à considérer un statut discriminant de l'épouse, l'immatriculation pouvant être faite au nom du seul conjoint indépendamment du sexe du déclarant, car seule la stratégie commune a déterminé la Cour de cassation à retenir le caractère uniquement professionnel du prêt pour les emprunteurs solidaires. En conclusion, s'il n'est pas contestable que les époux I... aient eu à titre principal une activité salariée, ils ont également eu une activité professionnelle accessoire qui est celle de loueur en meublé. Le fait que le bailleur n'intervienne ni directement, ni indirectement dans l'entretien des meubles et ne pénètre jamais dans les locaux loués ne fait pas obstacle à une telle qualification de cette activité dès lors qu'il peut l'exercer, comme en l'espèce, par l'intermédiaire de mandataire tel la SAS Park and Suites. La jurisprudence de la Cour de cassation n'étant pas contraire à la notion de consommateur définie par les instances communautaires et plus particulièrement à l'article 2 b et c de la directive précitée du 5 avril 1993, rien ne justifie le préjudiciel en interprétation devant la cour de justice de l'Union européenne». 1°) ALORS QU' est un consommateur au sens de la directive n° 2011.83 UE du 25 octobre 2011 et de la directive 2014.17 UE du 4 février 2014, reprenant les termes des directives antérieures, notamment de la directive 9313.CE du 5 avril 1993, une personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ; que transposant cette directive, l'article 3 de la loi n° 2014.344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a inséré un article préliminaire dans le code de la consommation aux termes duquel, au sens du présent code, est considérée comme consommateur toute personne qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ; que ces dispositions sont d'application immédiate ;
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qu'en considérant que des particuliers qui exercent une activité salariée comme M. et Mme I..., et qui agissent à des fins autres tout à fait distinctes du cadre de cette activité professionnelle en faisant l'acquisition à l'aide de prêts, à des fins fiscales et patrimoniales d'un immeuble de rapport loué temporairement en meublé, activité totalement étrangère à leur activité professionnelle, ne peuvent être considérés comme des consommateurs car ils exerceraient de ce fait une activité professionnelle « accessoire », ce qui supposerait en droit qu'elle fût indissociable de leur activité « principale » ou du moins liée à cette activité, ce qui n'est pas le cas des époux I..., pas plus que le statut de loueur ne constitue nécessairement une activité professionnelle au sens de la loi, la Cour d'appel a violé l'article liminaire du code de la consommation transposant la directive 2011-83 UE et la directive 2014-17 UE, ainsi que la directive 9313 CE du 5 avril 1993 sur les clauses abusives ; 2°) ALORS QU' en l'espèce, la cour d'appel a relevé que la définition du consommateur en droit communautaire reposait sur deux critères, un critère finaliste correspondant à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de l'activité professionnelle de la personne concernée mais aussi une finalité personnelle du contrat permettant de savoir si on est en présence d'un consommateur nécessitant d'être protégé ou d'un professionnel avisé ; qu'en s'abstenant de rechercher si, dans les faits, les époux I... pouvaient sérieusement être considérés comme des professionnels avisés de l'immobilier et non comme de simples consommateurs au sens du droit communautaire, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des dispositions précitées de l'article liminaire du code de la consommation et des directives 2011-83 UE, 2014-17 UE et 9313 CE ainsi que des règlements de Bruxelles n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 portant refonte du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000, entrée en vigueur le 10 janvier 2015, et de Rome n° 598/2008 du 17 juin 2008. SECOND MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que la saisie-attribution pratiquée le 13 juin 2013 pat la société Lyonnaise de banque entre les mains de la société Park and suites régulièrement dénoncée le 14 juin 2013 était parfaitement valable et D'AVOIR rejeté les demandes de M. et Mme I... ; AUX MOTIFS QU' «Il a été précédemment jugé que : - Les époux I... ont une activité professionnelle principale salariée et une activité professionnelle accessoire qui est celle de loueurs en meublé pour laquelle M. I... est régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés, - que le prêt authentique du 29 juin 2006 a été consenti pour financer l'acquisition de lots destinés à la location et qu'il constitue donc un prêt destinés à financer une activité professionnelle. Il en découle que ce prêt est exclu du champ d'application des dispositions du code de la consommation relatives au crédit immobilier. Si rien n'interdit effectivement aux parties de soumettre volontairement les opérations qu'elles concluent aux dispositions du code de la consommation qui leur sont alors impérativement applicables dans leur intégralité, au cas d'espèce, la référence dans les offres de prêt aux dispositions du code de la consommation ne peut être jugée comme une dérogation volontaire conventionnelle aux dispositions de l'article L.312-3 du code de la consommation que si les époux I... parviennent à démontrer qu'ils avaient informé la banque de leur activité professionnelle de loueur en meublé dès lors qu'on ne peut déroger qu'à ce qui est entré dans le champ contractuel. Or, ils ne rapportent pas la preuve de ce qu'ils ont informé la Lyonnaise de banque de sa volonté d'inscrire leur demande de prêt dans un statut de loueur en meublé professionnel, la fiche patrimoniale du 15 février 2006 ne faisant apparaître aucun patrimoine immobilier et 2165 € de charges pour 7835 € de revenus dont 2654 € de loyers. Mais le montant des revenus locatifs ne pouvait laisser penser à la banque qu'ils avaient un statut de loueur en meublé professionnel et qu'en tout cas aucun élément ne lui permettait de penser qu'ils avaient agi déjà comme tel puisque la fiche de réservation mentionnait une acquisition en loueur non professionnel, concomitamment l'acquisition cumulée de dix-sept lots n'étant nullement apparente. Elle constitue pourtant une activité de loueur professionnel que la banque pouvait ignorer au regard des informations fournies datées te signées des emprunteurs. Les dispositions du code de la consommation ne sont donc pas applicables en l'espèce et les époux I... ne peuvent se prévaloir du non-respect des dispositions des articles L. 312 -1 et suivants du code de la consommation et de plus un tel non-respect n'était pas de nature à entraîner une perte du caractère authentique de l'acte de prêt. La Lyonnaise de banque dispose bien d'un titre exécutoire, l'acte authentique de prêt du 29 juin 2006 lui autorisant la saisie-attribution pratiquée.
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Sur la prescription de la créance de la banque, Nonobstant la mention, dans l'acte notarié, de certaines dispositions du code de la consommation, dénuées d'effet au regard de l'article L. 312-1 ancien du code de la consommation, les époux I... pour les raisons évoquées ci-dessus ne peuvent revendiquer la qualité de consommateur au regard des dispositions de l'article L312-3 du code de la consommation applicable en l'espèce (devenu L313-2 dudit code), de sorte qu'ils ne peuvent invoquer la prescription biennale de l'article L137-2 du code de la consommation ancien devenu L. 218-2 du même code. La prescription quinquennale de l'article L110-4 du code de commerce est la seule qui s'applique en l'espèce. A l'examen des pièces, la première échéance impayée remonte au mieux au mois de décembre 2009 et la déchéance du terme a été prononcée le 15 février 2010. La saisie-attribution ayant été pratiquée le 13 juin 2013, l'action de la Lyonnaise de banque n'était pas prescrite. Sur la validation des saisies-attribution. Au vu de ce qui précède, la cour confirme le premier juge en ce qu'il a validé la saisie-attribution pratiquée le 13 juin 2013 ; 1°) ALORS QUE par une décision n° 2017-689 QPC du 8 février 2018, le Conseil constitutionnel a jugé contraire à la Constitution les dispositions de l'article 151 septies du code général des impôts réservant certains avantages fiscaux aux contribuables exerçant une activité de location d'appartements meublés à titre professionnel dès lors qu'elles subordonnaient la reconnaissance de la qualité de loueur en meublé professionnel à l'inscription au registre du commerce et des sociétés; le conseil constitutionnel a en effet considéré, dès lors que l'activité de location de biens immeubles ne constituait pas un acte de commerce au sens de l'article L. 110-1 du code de commerce, que les personnes physiques exerçant cette activité ne pouvaient avoir la qualité de commerçant conférée exclusivement à « ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle » aux termes de l'article L. 121-1 du même code et être inscrites au registre du commerce et des sociétés en application de l'article L. 123-1 du même code ; que dès lors en déduisant de l'inscription au registre du commerce et des sociétés de M. I... le caractère professionnel de l'activité de loueur en meublé qu'il aurait exercée à titre accessoire et en excluant ainsi du champ d'application des dispositions du code de la consommation le prêt souscrit pour financer le bien donné en location quand les personnes physiques qui exercent cette activité n'ont pas la qualité de commerçant et ne peuvent légalement être inscrites au registre du commerce et des sociétés, la cour d'appel a violé les articles L. 110-1, L. 121-1, L. 123-1 du code de commerce, ensemble les articles L 312-3, L 312-4 et L 137-2 du code de la consommation ; 2°) ALORS QUE l'article L 137-2 du code de la consommation dispose que l'action des professionnels pour les biens et services qu'ils fournissent aux consommateurs se prescrit par deux ans ; que les crédits immobiliers consentis aux consommateurs par des organismes de crédit constituent des services financiers fournis par des professionnels ; que sont exclus du champ d‘application des dispositions du code de la consommation relatives au crédit immobilier les prêts qui sont destinés à financer une activité professionnelle ; que cependant la destination professionnelle d'un crédit ne peut résulter que d'une stipulation expresse ; que selon les constatations de l'arrêt, le prêt consenti aux époux I... fait expressément référence à la procédure de la loi Scrivener, ce dont il résulte que le prêt n'a pas été conclu dans le but de financer les besoins d'une quelconque activité professionnelle mais bien sous l'égide du code de la consommation tel que cela résulte de la volonté même des parties exprimée dans l'acte ; qu'en considérant néanmoins que les dispositions du code de la consommation ne sont pas applicables en l'espèce, l'arrêt attaqué, qui ne s'est pas attaché à la destination contractuelle du crédit, a méconnu les dispositions des articles L 312-3, L 312-4 et L 137-2 du code de la consommation ; 3°) ALORS QUE la prescription abrégée s'applique à tous les prêts bancaires contractés par une personne physique dans un but étranger à son activité professionnelle ; qu'elle s'applique même à une opération réalisée à des fins spéculatives ou fiscales dès lors que la personne physique agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ; qu'il n'est pas douteux en l'espèce que le financement litigieux était étranger à l'activité professionnelle des époux I..., tous les deux salariés ; qu'en considérant néanmoins que M. et Mme I... exerçaient la profession habituelle de loueur en meublé à titre accessoire et qu'ils ne pouvaient revendiquer la qualité de consommateur pour invoquer la prescription biennale, alors même qu'il résultait des énonciations de l'arrêt attaqué que le prêt litigieux avait été souscrit à des fins purement fiscales et d'investissements personnels totalement étrangères à l'activité professionnelle respective de M. et Mme I..., la Cour d'appel a violé l'article L 137-2 du code de la consommation.
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 8 JANVIER 2020 Mme P... C... et Mme S... G... ont formé chacune un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, 19ème chambre, en date du 21 novembre 2018, qui, pour complicité des délits de soustraction d'un enfant mineur par ascendant et de non-représentation d'enfant, les a condamnées, la première, à deux ans d'emprisonnement, la seconde, à deux ans d'emprisonnement dont six mois avec sursis, à cinq ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille chacune, et a prononcé sur les intérêts civils. Les pourvois, dirigés contre la même décision, sont joints en raison de la connexité. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. de Larosière de Champfeu, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de Mme S... G..., Mme P... C..., et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 27 novembre 2019 où étaient présents M. Soulard, président, M. de Larosière de Champfeu, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre et Mme Darcheux, greffier de chambre, La chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Mme L... G... et M. R... Y... se sont mariés, le 22 mai 2004, et une fille, D..., née le [...] , est issue de leur union. Le couple s'est séparé dans une ambiance conflictuelle. Par arrêt du 4 février 2010, la cour d'appel d'Aix-en-Provence, infirmant l'ordonnance de non-conciliation, a instauré une résidence alternée de l'enfant. Une ordonnance du juge aux affaires familiales du 8 juillet 2011, ultérieurement confirmée par arrêt du 18 décembre 2012, a fixé la résidence de l'enfant au domicile du père et supprimé le droit de visite et d'hébergement de la mère. 2. Chacun des époux a porté plainte contre l'autre. La plainte pour viols et agressions sexuelles déposée par la mère contre le père a été classée sans suite, et a conduit à la condamnation de Mme L... G... pour dénonciation calomnieuse. D'autre part, le 24 février 2011, elle a été placée en garde à vue à la suite d'une plainte pour non-représentation d'enfant, jusqu'au lendemain. 3. Le 26 février 2011, M. Y... devait normalement revoir sa fille. Mais Mme L... G... a disparu avec l'enfant, sans que leur trace ait pu être retrouvée, en dépit de multiples recherches. 4. Une information ayant été ouverte, Mme L... G... a été renvoyée devant le tribunal correctionnel par ordonnance du juge d'instruction, en date du 27 juillet 2015, pour avoir, du 26 février 2011 au 6 novembre 2014 : - d'une part, refusé indûment de représenter l'enfant à son père, qui avait le droit de la réclamer, en vertu d'un arrêt du 4 février 2010, avec cette circonstance que le père n'a pas été informé de l'endroit où se trouvait l'enfant, retenue plus de cinq jours, infraction prévue par les articles 227-5 et 227-9 du code pénal ; - d'autre part, étant ascendant de l'enfant, soustrait celui-ci des mains du père, titulaire de l'autorité parentale, alors que celui-ci n'avait pas été informé de l'endroit où se trouvait l'enfant, retenue plus de cinq jours, infraction prévue par les articles 227-7 et 227-9 du code pénal ; 5. Le juge d'instruction a également renvoyé devant le tribunal correctionnel, pour complicité de ces deux infractions, Mme P... C... et Mme S... G..., respectivement mère et soeur de Mme L... G..., au motif qu'elles l'auraient aidée, dans sa fuite, à dissimuler toute trace de son existence. 6. Par le jugement entrepris du 3 novembre 2016, le tribunal correctionnel a déclaré les trois prévenues coupables des faits qui leur sont reprochés et les a condamnées : Mme L... G..., par défaut, à trois ans d'emprisonnement, avec mandat d'arrêt, ainsi qu'à l'annulation de son permis de conduire avec interdiction d'en solliciter un nouveau pendant cinq ans, Mme C... et Mme S... G..., contradictoirement, la première, à deux ans d'emprisonnement dont six mois avec sursis, la seconde, à deux ans d'emprisonnement, dont un an avec sursis, la privation des droits civiques, civils et de famille étant prononcée pendant cinq ans à l'égard des trois prévenues. Le jugement a statué sur les intérêts civils. 7. Ce jugement a été frappé d'appel en toutes ses dispositions par Mme C... et Mme S... G..., et, à titre incident, par le procureur de la République sur l'action publique, et par la partie civile, sur les intérêts civils. Examen des moyens Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen
décision 19-80.809 du 08/01/2020, partie 1
8. Le moyen est pris de la violation des articles 6 de la convention européenne des droits de l'homme, 4 du protocole n°7 de la convention européenne des droits de l'homme, 121-6, 121-7, 227-5, 227-7 et 227-9 du code pénal, préliminaire, 6, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, ensemble violation du principe ne bis in idem. 9. Le moyen critique l'arrêt attaqué "en ce qu' il a déclaré Mme C... et Mme G... coupables de complicité de soustraction d'un enfant mineur, et de complicité de non représentation d'un enfant mineur, et a condamné Mme C... à la peine de deux ans d'emprisonnement et Mme G... à la peine de deux ans d'emprisonnement donc six mois avec sursis, et à la privation de leurs droits civiques, civils et de famille pour cinq ans, et a prononcé sur les intérêts civils ; alors que des faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le même prévenu, à deux déclarations de culpabilité ; qu'en déclarant les prévenues coupables tout à la fois de complicité de non-représentation d'enfant et de complicité de soustraction du même enfant, pour les mêmes faits d'aide à la dissimulation de sa localisation et à sa fuite, et la même intention coupable, la cour d'appel a méconnu les dispositions susvisées et le principe ne bis in idem". Réponse de la Cour Vu le principe ne bis in idem ; 10. Selon ce principe, les faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le même prévenu, à deux déclarations de culpabilité de nature pénale, fussent-elles concomitantes. 11. Pour déclarer Mme C... et Mme S... G... coupables de complicité des délits de soustraction d'un enfant mineur par ascendant et de non-représentation d'enfant, l'arrêt attaqué énonce que toutes deux, respectivement mère et soeur de Mme L... G..., l'auteur principal, l'ont aidée dans sa fuite avec son enfant, cette aide lui ayant permis, dans la durée, de dissimuler les lieux où elle se trouvait, de déjouer les recherches entreprises pour la retrouver et de poursuivre sa fuite avec sa fille, pendant près de quatre ans, alors que l'enfant devait être remise à son père. 12. L'arrêt énumère les actes de complicité qu'il retient à la charge des demanderesses : organisation d'un déménagement, résiliation d'abonnements, cession d'un véhicule, accomplissement de démarches administratives au nom de Mme L... G... ou pour son compte, qui auraient permis de la retrouver si elle les avait faites elle-même, fourniture d'argent et de vêtements, précautions prises pour déjouer les surveillances, comportant, en particulier, le recours à des phrases codées, lors d'appels téléphoniques passés depuis des cabines publiques. 13. Mais en se déterminant ainsi, la cour a méconnu le principe visé ci-dessus : 14. En effet, il résulte des énonciations de l'arrêt que les actes de complicité de deux infractions retenus par la cour d'appel procèdent, de manière indissociable, d'une action unique, l'aide apportée à la fuite illicite d'une mère avec son enfant au mépris des droits du père, caractérisée par une seule intention coupable. 15. La cassation de l'arrêt est donc encourue. Elle interviendra avec renvoi. Prononcée sur le premier moyen de cassation proposé, elle rend inutile l'examen des autres. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 21 novembre 2018, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit janvier deux mille vingt.
décision 19-80.809 du 08/01/2020, partie 2
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par M. U... X..., domicilié [...] , contre l'arrêt rendu le 11 janvier 2018 par la cour d'appel de Dijon (2e chambre civile), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. L... Q... X..., domicilié [...] , 2°/ à M. T... X..., domicilié [...] , défendeurs à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 5 novembre 2019, où étaient présents : Mme Mouillard, président, M. Guérin, conseiller doyen rapporteur, Mme Darbois, conseiller, Mme Labat, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Guérin, conseiller, les observations de la SCP de Nervo et Poupet, avocat de M. U... X..., de la SARL Cabinet Briard, avocat de MM. L... Q... et T... X..., l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 11 janvier 2018), que MM. U... X..., L... Q... X... et T... X... étaient associés à parts égales et co-gérants d'un GAEC, dont les vins étaient commercialisés par la SARL [...] , dans laquelle ils étaient associés à parts égales, M. T... X... assurant la gérance de la société et ses deux frères y exerçant des fonctions salariées ; que des dissensions étant survenues entre les trois frères, la société [...] a rompu le contrat de travail de M. U... X..., qui s'est également vu retirer la cogérance du GAEC ; qu'après la dissolution judiciaire de celui-ci, ordonnée à la demande de M. U... X..., les trois associés ont décidé, à l'unanimité, de dissoudre également la société [...] ; qu'estimant que ses deux frères s'étaient alloués des rémunérations excessives par rapport à l'activité limitée de la société avant sa dissolution, M. U... X... les a assignés en référé en désignation d'un expert de gestion ; qu'au vu du rapport de ce dernier, M. U... X... a assigné ses deux frères en responsabilité ; Sur le second moyen, pris en ses première et troisième branches : Attendu que M. U... X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande formée contre M. T... X..., pris en ses qualités de gérant puis de liquidateur amiable de la SARL [...] , pour violation des statuts de cette société et faute de gestion alors, selon le moyen : 1°/ que si les statuts d'une société prévoient que la rémunération est déterminée par décision collective ordinaire des associés, aucune rémunération ne peut être versée antérieurement à cette décision et la fixation de cette rémunération ne peut faire l'objet d'une ratification a posteriori ; qu'en décidant que, faute de précision des statuts sur l'obligation de déterminer la rémunération du gérant antérieurement à son versement, et compte tenu de la pratique consistant à fixer la rémunération à l'issue de l'exercice comptable auquel elle correspondait, le gérant n'avait pas méconnu les dispositions statutaires, la cour d'appel a violé l'article L. 223-8 du code de commerce et de l'article 1103 du code civil, anciennement 1134 du même code ; 2°/ que le gérant de société commet une faute dont il doit réparation lorsqu'il a privé les associés de leurs droits de percevoir les revenus qu'ils devaient tirer de l'exploitation de la société ; que la cour d'appel qui a décidé que M. U... X... ne justifiait d'aucun préjudice résultant des rémunérations octroyées à M. T... X... et à M. L... Q... X..., sans s'expliquer comme cela lui était demandé sur l'organisation de la société [...] qui, adossée au GAEC, avait pour objectif d'assurer la rémunération égalitaire des trois frères se partageant les bénéfices dégagés par la société, n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L. 223-22 du code de commerce ; Mais attendu, d'une part, qu'après avoir relevé que l'article 18 des statuts de la société [...] stipulait que « Les gérants peuvent recevoir un traitement annuel, fixe ou proportionnel, dont la quotité et le mode de paiement seront déterminés par décision ordinaire des associés ou par décision de l'associé », l'arrêt retient qu'en l'absence de précision de cet article sur la question de savoir si la décision de verser une rémunération au gérant devait intervenir pour l'exercice comptable futur ou pour celui qui se terminait, les statuts permettaient qu'elle ait lieu soit a priori, soit a posteriori ;
Cour d'appel de Dijon, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-13.850 du 18/12/2019, partie 1
qu'ayant constaté que la décision des associés sur la rémunération du gérant était toujours intervenue à l'issue de l'exercice comptable auquel elle correspondait, bien qu'il ne fût pas contesté par MM. L... Q... et T... X... que les convocations adressées en vue des assemblées générales ne mentionnaient pas qu'il serait décidé de la rémunération du gérant, c'est sans méconnaître les statuts de la société [...] ni violer les dispositions de l'article L. 223-18 du code de commerce que la cour d'appel a statué comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ; Attendu, d'autre part, que l'arrêt ayant retenu, par les motifs vainement critiqués par la première branche, que la fixation des rémunérations du gérant n'était pas fautive, le grief de la troisième branche, relatif au préjudice prétendument causé à M. U... X... en raison de l'octroi de ces rémunérations, est sans portée ; Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen ni sur le second, pris en sa deuxième branche, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. U... X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à MM. L... Q... et T... X... la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP de Nervo et Poupet, avocat aux Conseils, pour M. U... X.... PREMIER MOYEN DE CASSATION Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré prescrite toute action de Monsieur U... X... au titre des rémunérations allouées à Messieurs T... et L... Q... X... par la SARL [...] antérieurement au 8 juillet 2008 Aux motifs que Monsieur U... X... entend engager la responsabilité de ses frères sur le fondement de l'article L223-22 du code de commerce pour les rémunérations dont ils ont bénéficié à compter de l'année 2006 dans le cadre de la SARL [...] , T... pour ses fonctions de gérants et L... Q... pour son activité salariée au profit de la société ; il ressort de l'article L 223-23 du code de commerce que les actions engagées sur le fondement de l'article L223-22 se prescrivent par trois ans à compter du fait dommageable ou, s'il a été dissimulé, de sa révélation ; il est établi que les rémunérations dont Monsieur T... X... a bénéficié ont donné lieu à des délibérations en assemblée générale de la SARL [...] ; Monsieur U... X... affirme que ces délibérations lui ont été cachées dans la mesure où l'ordre du jour des assemblées générales qui lui a effectivement été adressé avec la convocation, ne comportait pas la mention de la rémunération du gérant et qu'il avait connaissance des manoeuvres occultes de ses frères qu'à la lecture du rapport de l'expert judiciaire Monsieur P... ; or s'il n'est pas contesté par Messieurs L... Q... et T... X... que les convocations adressées en vue des assemblées ; or il n'est pas contesté par Messieurs L... Q... et T... X... que les convocations adressées en vue des assemblées générales ne mentionnent pas qu'il serait décidé de la rémunération du gérant, ni que son frère, absent lors de ces assemblées , ne s'est pas vu notifier le procès-verbal des délibérations, il ressort toutefois du courrier en date du 11 mars 2008 que le conseil de Monsieur U... X... a adressé à Monsieur F... liquidateur du GAEC ( pièce 43 des appelants) que le bilan clos au 31 mars 2007 faisant apparaître l'augmentation des rémunérations des salariés était alors en possession de son client, lequel avait relevé qu'elle était de 77% ; il est ainsi établi que Monsieur U... X... a au plus tard le 11 mars 2008 eu la révélation du fait donc il se dit victime, ; en conséquence, toute action engagée postérieurement au 11 mars 2011 concernant ces rémunérations est prescrite ; il s'en déduit que l'assignation en référé délivrée par Monsieur U... X... le 8 juillet 2011 n'a pas pu interrompre une prescription déjà acquise et que seuls les faits dommageables survenus postérieurement au 8 juillet 2008 peuvent donner lieu à une procédure ; le jugement du tribunal de commerce ne peut qu'être infirmé sur ce point ; 1- Alors que les termes du litige sont déterminés par les conclusions des parties ;
Cour d'appel de Dijon, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-13.850 du 18/12/2019, partie 2
que dans leurs conclusions d'appel, Messieurs L... Q... et T... X... ont fait valoir qu'il résultait d'un courrier du 18 juin 2008, que Monsieur C... X... avait eu connaissance à cette date du montant des salaires qu'ils s'étaient octroyés de sorte que la prescription avait couru à compter de cette date et que les demandes concernant les rémunérations allouées pour la période allant de 2006 au 30 juin 2008 étaient prescrites ; que la Cour d'appel qui a décidé que la prescription avait couru à compter du 11 mars 2008, et que les demandes antérieures à l'assignation du 8 juillet 2011 étaient prescrites a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile 2- Alors qu'en toute hypothèse les juges du fond sont tenus de respecter et de faire respecter le principe de la contradiction ; que dans leurs conclusions d'appel, Messieurs L... Q... et T... X... ont soutenu qu'il résultait d'un courrier du 18 juin 2008 que leur frère U... avait eu connaissance du montant du salaire qu'ils s'étaient octroyés et qu'en conséquence, la prescription était acquise au 18 juin 2011 ; qu' en relevant d'office qu'il résultait d'un courrier en date du 11 mars 2008 que Monsieur U... X... avait eu la révélation du fait dont il se disait victime à cette date et que la prescription était acquise au 11 mars 2011, sans provoquer les explications des parties sur la portée de ce courrier du 11 mars 2008 sur lequel elle s'est fondée , a violé l'article 16 du code de procédure civile SECOND MOYEN DE CASSATION Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur U... X... de sa demande à l'encontre de Monsieur T... X... pris en ses qualités de gérant puis de liquidateur amiable de la SARL [...] pour violation des statuts de cette société et faute de gestion Aux motifs qu'aux termes de l'article L 223-22 du code de commerce, les gérants sont responsables individuellement ou solidairement selon le cas envers la société ou envers les tiers soit des infractions aux dispositions législatives ou règlementaires applicables aux sociétés à responsabilité limitée, soit des violations des statuts, soit des fautes commises dans leur gestion ; Monsieur U... X... reproche à ses frères une violation des statuts de la société en ce que la rémunération allouées au gérant a été approuvée en fin d'exercice alors que selon lui les statuts prévoyaient une fixation a priori de cette rémunération ; l'article 18 des statuts de la SARL [...] prévoit au titre de la rémunération des gérants : « les gérants peuvent recevoir un traitement annuel, fixe ou proportionnel, dont la quotité et le mode de paiement seront déterminés par décision ordinaire des associés ou par décision de l'associé unique » ; c'est à la suite d'une mauvaise appréciation des termes ci-dessus reproduits que les premiers juges ont estimé que les statuts imposaient que cette détermination devait intervenir pour l'exercice comptable futur et non pas celui qui se terminait, alors qu'en l'absence de précision sur ce point, les statuts permettaient qu'elle ait lieu soit à priori soit à postériori ; par ailleurs, Messieurs L... Q... et T... X... relèvent sans être contredits sur ce point par leur frère, que, jusqu'à l'engagement de la présente procédure, la décision sur la rémunération du gérant était toujours intervenue à l'issue de l'exercice comptable auquel elle correspondait sans faire l'objet de la moindre contestation ; le jugement en ce qu'il a retenu l'existence d'une violation ne peut qu'être infirmé ; Monsieur U... X... reproche ensuite à Monsieur T... X... de s'être alloué une rémunération excessive au titre des années 2006 à 2010 et à L... Q... d'avoir approuvé cette rémunération en contrepartie d'une augmentation de sa propre rémunération et d'avoir ainsi ponctionné la trésorerie de la société ; outre le fait qu'ainsi qu'il a été retenu plus haut, les rémunérations accordées antérieurement au 8 juillet 2008 ne peuvent plus donner lieu à aucune action, force est de constater que la rémunération de Monsieur T... X... en sa qualité de gérant a donné lieu à des décisions prises en assemblée générale de la SARL qui n'ont pas fait l'objet d'une quelconque action en abus de majorité de la part de Monsieur U... X... ; dès lors que la décision sur la fixation de la rémunération du gérant émane de la SARL, elle-même et non pas du gérant, aucune faute de gestion ne peut être reprochée à ce dernier puisqu'il n'a fait qu'appliquer cette décision dont la régularité n'était pas contestée et ne l'est pas plus aujourd'hui ; le vote de Monsieur L... Q... X... sur la rémunération du gérant ne peut pas plus constituer une faute dès lors qu'en l' état il n'est pas démontré ni même soutenu qu'il aurait commis avec son frère T... un abus de majorité ; concernant les salaires dont Monsieur L... Q... X... a bénéficié postérieurement au 8 juillet 2008, ils ont été mentionnés dans les comptes annuels de la SARL soumis eux-aussi au vote des associés, comptes dont il n'est nullement établi ni même soutenu qu'ils auraient été contestés ;
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surtout, U... X... qui agit dans le cadre d'une action personnelle, doit démontrer que la faute qu'il invoque, à la supposer établie lui a causé un préjudice personnel distinct de celui subi par la société ; U... X... sur ce point, et s'appuyant sur le rapport déposé par Monsieur P..., soutient que, de 2006 à 2010, une sur-rémunération a été accordée à son frère L... Q... et qu'en conséquence il a subi un préjudice personnel résultant d'une privation de la rémunération attachée aux actions qu'il détenait dans le capital de la SARL ; pour évaluer ce préjudice, il part du montant de la sur-rémunération telle qu'évaluée par Monsieur P... pour en déduire que cette somme aurait dû être partagée en trois, et que son préjudice est en conséquence égale à ce tiers ; or si la masse salariale d'une société a un impact sur les résultats de cette société, et en conséquence sur le montant des dividendes susceptibles d'être distribués, aux associés à l'issue de l'exercice comptable, elle ne constitue que l'un des éléments du bilan, les résultats dépendant également de tous les autres postes budgétaires ; il n'est en conséquence pas possible de retenir ainsi que le fait Monsieur U... X..., que si les rémunérations de Messieurs T... et L... Q... X... avaient été réduites les dividendes distribués aux actionnaires auraient été majorés de la même manière ; au surplus, le versement des dividendes fait l'objet d'une décision prise annuellement par les associés et n'a aucun caractère automatique ; la perte invoquée sur le montant des dividendes distribués n'a en conséquence aucun caractère certain et n'est aucunement établie par Monsieur U... X... en son quantum ; il ne peut être que débouté de ce chef de demande sans qu'il soit besoin de rechercher si le montant des salaires alloués à L... Q... X... de 2008 à 2010 présentait un caractère anormal et donc fautif ; 1- Alors que si les statuts d'une société prévoient que la rémunération est déterminée par décision collective ordinaire des associés, aucune rémunération ne peut être versée antérieurement à cette décision et la fixation de cette rémunération ne peut faire l'objet d'une ratification a posteriori ; qu'en décidant que faute de précision des statuts sur l'obligation de déterminer la rémunération du gérant antérieurement à son versement, et compte tenu de la pratique consistant à fixer la rémunération à l'issue de l'exercice comptable auquel elle correspondait, le gérant n'avait pas méconnu les dispositions statutaires, la Cour d'appel a violé l'article L 223-8 du code de commerce et de l'article 1103 du code civil anciennement 1134 du même code 2- Alors qu'en toute hypothèse le silence opposé à l'affirmation d'un fait ne vaut pas à lui seul reconnaissance de ce fait ; que la cour d'appel qui a considéré que la décision relative de la rémunération de gérant en fin d'exercice était conforme aux statuts, au motif que Jean- François X... n'avait pas contredit ses frères sur le fait jusqu'à l'engagement de la procédure la décision sur la rémunération du gérant était toujours intervenue à l'issue de l'exercice comptable auquel elle correspondait, a violé l'article 1315 ancien du code civil devenu l'article 1353 du même code 3- Alors que le gérant de société commet une faute dont il doit réparation lorsqu'il a privé les associés de leurs droits de percevoir les revenus qu'ils devaient tirer de l'exploitation de la société ; que la Cour d'appel qui a décidé que Monsieur U... X... ne justifiait d'aucun préjudice résultant des rémunérations octroyées à Monsieur T... X... et à Monsieur L... Q... X..., sans s'expliquer comme cela lui était demandé sur l'organisation de la société [...] qui adossée au GAEC avait pour objectif d'assurer la rémunération égalitaire des trois frères se partageant les bénéfices dégagés par la société, n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L 223-22 du code de commerce
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 11 DÉCEMBRE 2019 M. M... Y... a interjeté appel de l'arrêt de la cour d'assises de la Guadeloupe, en date du 26 avril 2018, qui, pour vol avec arme, vol précédé, accompagné ou suivi de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à 8 jours, vol commis par ruse, effraction et en réunion en pénétrant dans un local d'habitation l'a condamné treize ans de réclusion criminelle ainsi que l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ; Sur le rapport de Mme Issenjou, conseiller, et les conclusions de Mme Moracchini, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 décembre 2019 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Issenjou, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre et M. Maréville, greffier de chambre. La chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Vu l'appel incident du ministère public ; Vu les articles 380-1 à 380-15 du code de procédure pénale ; Vu les observations écrites du ministère public et des parties ; Vu l'arrêt de la chambre criminelle du 16 octobre 2019 désignant la cour d'assises de la Guadeloupe autrement composée pour statuer en appel ; PAR CES MOTIFS, la Cour : CONSTATE que la cour d'assises de la Guadeloupe autrement composée a déjà été désignée. CONSTATE que la demande transmise par le procureur général est devenue sans objet ; Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus.
décision 19-86.441 du 11/12/2019, partie 1
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par la société Interforum, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , contre l'arrêt rendu le 21 mars 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 9), dans le litige l'opposant à M. Y... U..., domicilié [...] , défendeur à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 14 novembre 2019, où étaient présents : M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, Mme Pontonnier, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Interforum, de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de M. U..., et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le deuxième moyen : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 mars 2018), que M. U..., engagé par la société SA Interforum suivant contrat à durée indéterminée à compter du 4 septembre 1989 en qualité de représentant, exerçait en dernier lieu la même activité ainsi qu'un mandat de représentant du personnel ; que le salarié a fait l'objet d'un avertissement le 21 mai 2012 en raison de propos critiques à l'encontre d'une décision de l'employeur, tenus lors d'une réunion commerciale devant des clients de la société ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale le 20 juillet 2012 en annulation de l'avertissement et en paiement de diverses sommes à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral, discrimination syndicale et occupation de son domicile à des fins professionnelles ; Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'annuler l'avertissement du 21 mai 2012 et de la condamner à payer au salarié une certaine somme à ce titre, alors, selon le moyen : 1° / que les faits fautifs commis par le salarié dans le cadre de l'exécution de son contrat, et non dans l'exercice de ses fonctions représentatives, peuvent justifier une sanction disciplinaire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les faits reprochés à M. U... ont été commis à l'occasion d'une réunion commerciale qui se déroulait entre plusieurs représentants commerciaux de l'entreprise et trois clients et à laquelle M. U... participait en qualité de représentant commercial ; qu'en conséquence, les faits commis au cours de cette réunion ne pouvaient se rattacher à l'exercice des mandats de représentant du personnel de M. U... ; qu'en retenant cependant, pour annuler l'avertissement sanctionnant ces faits, que M. U... s'était exprimé en qualité de représentant du personnel suite à l'avertissement subi par une collègue et contesté par cette dernière et que l'employeur ne démontre pas un abus de prérogative de sa part, la cour d'appel a violé les articles L. 1331-1 et L. 1333-2 du code du travail ; 2° / que ne présente pas un caractère discriminatoire la sanction prise à l'encontre d'un salarié qui a commis un fait fautif ; qu'en l'espèce, il est constant que M. U... était seul intervenu au cours de la réunion commerciale avec des éditeurs pour critiquer une décision de la direction, les autres représentants commerciaux ayant seulement indiqué soutenir son action ; qu'en décidant néanmoins que l'avertissement prononcé à son encontre présentait un caractère discriminatoire, pour avoir été pris à l'encontre d'un salarié exerçant ses mandats, la cour d'appel a violé les articles L. 1333-2 et L. 2141-5 du code du travail ; Mais attendu que sauf abus, le représentant du personnel ne peut être sanctionné en raison de l'exercice de son mandat pendant son temps de travail ; Et attendu qu'ayant constaté, dans son appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve, que l'avertissement était motivé par des propos tenus par le salarié pendant une réunion commerciale en sa qualité de représentant du personnel pour la défense d'une salariée sanctionnée à la suite d'un différend avec un client et que l'employeur ne démontrait pas un abus du salarié dans l'exercice de son mandat, la cour d'appel a pu en déduire que la sanction se rattachait à l'exercice des fonctions représentatives du salarié et qu'elle était discriminatoire ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par décision spécialement motivée sur les premier et troisième moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Interforum aux dépens ;
Cour d'appel de Paris K9, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-16.713 du 11/12/2019, partie 1
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. U... la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Interforum. PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé à 60 euros par mois l'indemnité due par la société Interforum à M. U... au titre de l'occupation de son domicile à des fins personnelles et d'AVOIR condamné la société Interforum à payer à M. U... la somme de 3.400 euros à titre de rappel d'indemnité pour la période de juillet 2007 à juillet 2012 ; AUX MOTIFS QUE « M. U... se fonde sur les dispositions de l'article L. 1121-1 du code du travail, l'indemnité devant être calculée en fonction de l'importance de la surface privée transformée en bureau professionnel, de la valeur locative correspondante et de la durée de l'occupation et du temps de travail du salarié à son domicile. M. U... indique qu'il ne dispose d'aucun bureau au sein de la société et qu'il a été contraint d'aménager une pièce à cet effet à son domicile, alors qu'il reçoit régulièrement des éléments professionnels qu'il ne peut stocker dans son véhicule et qui ne sont pas dématérialisés. Il ajoute que la société lui a fourni une imprimante qui n'est pas miniaturisée et qu'il n'a eu d'autre choix que de regrouper ces documents et matériels dans une pièce à son domicile. M. U... conteste le montant de 100 € versé à titre d'indemnité d'occupation par son employeur depuis 2011, au motif que le montant alloué ne correspond ni à la surface occupée, constituée d'une pièce spécialement aménagée, ni au temps consacré à l'accomplissement de ces tâches administratives, que les calculs de l'employeur ne reposent sur aucune base sérieuse, puisqu'il y consacre deux jours et demi par mois alors que la société ne lui octroie qu'une seule journée payée dans son salaire. M. U... déclare qu'il est fondé à solliciter le montant correspondant à la moyenne mensuelle brute des douze derniers mois de salaire, sur cinq ans en vertu de la prescription quinquennale de l'action en paiement des salaires. La société Interforum fait valoir qu'elle a décidé de faire application de la jurisprudence pour ses collaborateurs itinérants utilisant leur domicile à des fins professionnelles pour leurs seules tâches administratives, que les discussions avec les représentants du personnel n'ayant pas abouti, elle a fixé l'indemnité à 100€ pour l'année à compter de 2011. La société Interforum expose sa méthode de détermination du montant de l'indemnité d'occupation à partir du temps de travail passé à domicile par les commerciaux sur la base de leurs compte-rendus d'activité, puis par analogie avec le mode de calcul des frais d'atelier et l'article 4 de l'annexe IV de la convention collective, la somme octroyée étant plus favorable. La société Interforum conteste qu'il soit nécessaire au salarié d'aménager une pièce dédiée. Observant que le salarié a lui-même déclaré dans ses tableaux d'activité qu'il consacrait entre 1,41 et 1,67 jour par mois au temps de travail administratif, la société Interforum conclut que le salarié ne démontre pas qu'il consacrerait deux jours et demi par mois auxdites tâches. La société Interforum conteste le quantum de l'indemnité correspondant à deux jours et demi supplémentaires par mois de rémunération, en ce que le salarié est déjà payé pour le travail administratif qu'il effectue, que l'indemnité ne vise qu'à réparer le préjudice lié à l'occupation partielle du domicile privé, qu'elle n'a pas à être calculée par rapport au salaire et au temps de travail administratif. La société Interforum soutient enfin que M. U... sollicite une application rétroactive de la jurisprudence en sollicitant le paiement depuis 2008. Sur le principe de l'octroi d'une indemnité d'occupation : Il ressort du dossier que M. U... exerce les fonctions de représentant, qu'il a donc une activité itinérante en rendez-vous prospects et clients, mais qu'il accomplit également une activité à domicile relative à diverses tâches administratives pour l'exécution desquelles l'employeur ne lui a pas mis de bureau à disposition au sein de l'entreprise. La société Interforum met à la disposition du salarié un véhicule de fonction ainsi que les cartes de paiement associées, un téléphone portable, un ordinateur portable et une imprimante. Elle indique également prendre en charge le coût d'une ligne téléphonique et ADSL. M. U... devant stocker non seulement le matériel informatique mais encore la documentation mise à sa disposition par l'employeur, stockage effectué à son domicile comme il en justifie par la production de photographies, est donc contraint, en l'absence de local professionnel mis à sa disposition par l'employeur, d'occuper son domicile à des fins professionnelles. M. U... est donc bien fondé à solliciter une indemnité à ce titre. Sur le moyen tiré de l'application rétroactive de la jurisprudence : A compter de l'année 2011, la société Interforum a attribué à chaque salarié concerné une indemnité au titre de l'utilisation du domicile à des fins professionnelles d'un montant de 100 € par an.
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Les parties s'accordent donc d'accord sur l'octroi, dans son principe, d'une indemnité d'occupation du domicile à des fins professionnelles à compter de l'année 2011. La société Interforum fait valoir que les demandes antérieures à 2011 ne peuvent être accueillies au motif que la jurisprudence, qui a mis à la charge des employeurs une indemnité d'occupation date de 2010 et qu'il ne peut y avoir d'application rétroactive de cette jurisprudence. M. U... sollicite l'application de la règle sur cinq années, en vertu des dispositions de l'article L. 3245-1 du code du travail, l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrivant par cinq ans conformément à l'article 2224 du code civil. En application des dispositions de l'article L. 3245-1 du code du travail, la prescription quinquennale s'applique aux indemnités d'occupation. Il est constant que la Cour de cassation ne rend pas d'arrêts de règlement lesquels sont en effet prohibés par l'article 5 du code civil. Le fait que l'employeur n'ait décidé d'indemniser le salarié au titre de l'occupation par ce dernier de son domicile à des fins professionnelles qu'à compter de 2011, soit postérieurement à une décision de la Cour de cassation rendue en 2010, est donc sans incidence sur le droit pour le salarié à prétendre à une telle indemnité pour les années précédentes, dans la limite de la prescription applicable, dès lors qu'il remplissait les conditions pour pouvoir prétendre à une telle indemnisation. Il n'est pas contesté que le salarié occupe son domicile à des fins professionnelles depuis une date antérieure à 2010 et au moins depuis 2007. La date de saisine le 20 juillet 2012 du conseil de prud'hommes interrompant la prescription, M. U... est donc fondé à solliciter le paiement d'une indemnité d'occupation depuis le 20 juillet 2007. Sur le quantum de l'indemnité d'occupation : La cour observe que l'indemnité versée au salarié par la société Interforum est fixée de manière forfaitaire par référence aux dispositions de l'article 4 de l'annexe IV de la convention collective en matière de frais d'atelier, lesquelles visent cependant une situation distincte de celle de M. U.... Il y a lieu de fixer forfaitairement le montant de l'indemnité en fonction de l'espace occupé et de la durée d'occupation du logement à des fins professionnelles, susceptible de varier selon les fonctions occupées par les salariés et la sujétion subie. Il n'est pas utile d'évaluer précisément une surface dédiée ni de tenir compte du fait qu'une pièce soit spécialement aménagée par le salarié, la seule notion d'espace dédié à un bureau étant suffisante pour évaluer ce montant. Il n'y a pas lieu de s'attacher au lieu de résidence et à la valeur locative du bien qui dépend du choix du salarié de son lieu d'habitation. Enfin l'indemnité ne doit pas être fixée en fonction du montant du salaire du salarié puisqu'elle vise à indemniser l'occupation du domicile à des fins professionnelles, et que le salaire est la contrepartie du travail effectué par le salarié. La société Interforum produit les tableaux d'activités détaillées faisant apparaître le nombre de jours en moyenne consacré au travail administratif par M. U..., précisant que M. U... a lui-même déclaré ces chiffrages : - en 2012 : 1,5 jours ; - en 2011 : 1,67 jours ; - en 2010 : 1,41 jours. M. U... produit une liste de tâches relatives à l'organisation de la tournée et à la préparation des visites, concluant que deux jours et demi par mois sont nécessaires. Après avoir analysé ces éléments, la cour retient un jour et demi par mois de travail administratif incombant à M. U.... Au vu de ces éléments, la cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour fixer à 60 € par mois le montant de l'indemnité d'occupation due à M. U... au titre de l'occupation de son logement à des fins professionnelles. M. U... ayant demandé paiement d'une somme totale de 18 222,60 € en précisant qu'elle correspondait à une indemnité annuelle de 3 704,52 € réclamée en prenant en compte la date de saisine du conseil de prud'hommes au regard de la prescription quinquennale alors applicable, il s'en déduit que la demande en paiement porte sur la période de juillet 2007 à juillet 2012. Statuant dans cette limite, et après déduction de la somme de 100 € par an versée par l'employeur depuis 2011, soit un montant total versé de 200 € pour les années 2011 et 2012, la société Interforum doit être condamnée à payer à M. U... la somme de 3 400 € à titre d'indemnité d'occupation pour la période de juillet 2007 à juillet 2012. Le jugement déféré sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de ce chef de demande » ; ALORS QUE pour fixer le montant de l'indemnité due au salarié au titre de l'occupation de son domicile à des fins professionnelles, sans créer de différence de traitement injustifiée, le juge doit tenir compte des dispositions conventionnelles applicables qui déterminent les modalités de fixation de cette indemnité, même si elles concernent une autre catégorie de salariés ;
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qu'en l'espèce, l'annexe IV de la convention collective de l'édition à laquelle est soumise la société Interforum définit les modalités de fixation des « frais d'atelier » des travailleurs à domicile, ces « frais d'atelier » ayant pour objet d'indemniser les frais et la sujétion liés à l'occupation de leur domicile à des fins professionnelles ; que la société Interforum soutenait qu'elle avait fixé le montant de l'indemnité versée aux représentants commerciaux en s'inspirant de ces dispositions conventionnelles, qu'elle avait adaptées à la situation des commerciaux itinérants qui n'accomplissent qu'une part de leur travail administratif à leur domicile à hauteur d'une journée par mois en moyenne ; qu'en refusant de tenir compte de ce mode objectif et conventionnel d'évaluation de l'indemnité d'occupation du domicile personnel du salarié, au motif inopérant que ces dispositions conventionnelles visent une situation distincte de celle de M. U..., la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1135 du code civil dans leur rédaction applicable au litige, ensemble l'article L. 1221-1 du code du travail. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé l'avertissement du 21 mai 2012 et d'AVOIR condamné la société Interforum à payer à M. U... la somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi en raison de l'avertissement injustifié ; AUX MOTIFS QUE « Sur l'avertissement du 21 mai 2012. Cet avertissement a été prononcé aux motifs suivants : "... nous faisons suite à votre entretien du mercredi 2 mai 2012 ... Nous ne comprenons pas et ne pouvons accepter votre comportement le matin du 2 mai 2012 en réunion commerciale. En effet, lors de ces réunions de travail avec les éditeurs qui sont nos clients, vous avez pris la parole devant 3 d'entre eux successivement pour critiquer - au nom de l'équipe- une décision prise par la Direction à l'encontre d'une salariée de l'entreprise en proclamant que, de ce fait, l'équipe serait dans une attitude d'écoute passive et sans participation. Le propos que vous avez tenu ont choqué les éditeurs intervenants qui ont contacté la Direction de l'entreprise pour s'en émouvoir en leur qualité de clients. Il s'agit là d'une attitude peu responsable qui tend à démontrer un mélange des genres entre l'exercice de votre emploi de représentant et l'exercice de vos mandats d'élu... Lors de l'entretien précité du 2 mai dernier, vous avez vous-même sollicité un entretien à la DRH sur le dossier. Encore une fois, un tel comportement est inadmissible car il revient à mettre en cause votre hiérarchie et, ainsi, l'image et l'activité économique de l'équipe et de l'entreprise devant ses clients au risque de mettre en péril la qualité des relations avec ces derniers ..." M. U... indique qu'une salariée, Mme H..., a fait l'objet d'une sanction de l'employeur suite à un différend avec un client, et qu'il a été désigné en qualité de représentant du personnel, pour faire part de la position des collègues de la salariée aux éditeurs lors de réunions commerciales. Il conclut qu'il a donc été sanctionné de façon discriminatoire puisque c'est dans le cadre de l'exercice de sa mission de représentant du personnel qu'il a fait l'objet d'un avertissement. Il ajoute que M. U... a fait l'objet d'intimidation et n'a pas porté l'affaire en justice par crainte de représailles. Il sollicite la confirmation du jugement qui a annulé cet avertissement et son infirmation sur le quantum alloué en réparation de son préjudice, en faisant valoir qu'il a dû affronter les conséquences directes de son activité syndicale de la part de ses supérieurs hiérarchiques, telles que brimades et réflexions désobligeantes et qu'il s'est vu refuser des sollicitations y compris salariales, ainsi que le non versement régulier de primes. La société Interforum fait valoir que la procédure n'est pas irrégulière en ce qu'il n'y avait pas d'obligation de convoquer le salarié à un entretien préalable, mais que celui-ci s'est quand même tenu, permettant au salarié d'échanger. L'employeur précise que l'avertissement notifié à la salariée, objet de critiques, n'a pas été contesté par cette dernière et était justifié. Enfin, l'employeur expose que les faits se sont déroulés dans le cadre d'une réunion commerciale en présence de représentants commerciaux et de clients, qu'il n'y avait pas de mouvement social collectif contrairement aux allégations du salarié, que le salarié s'est comporté de façon fautive lors de la réunion à laquelle il participait au titre de son activité professionnelle et non de son mandat représentatif, critiquant une décision de la direction. Aux termes de l'article L. 1132-1 du code du travail applicable à l'espèce, aucun salarié ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en raison de ses activités syndicales. Le représentant du personnel bénéficie d'une protection en vertu de son mandat, et ne peut être sanctionné en cas de simple irrégularité commise dans le cadre de l'exercice normal des activités représentatives ou syndicales ; Il peut être sanctionné en cas d'abus de prérogative de sa part. L'employeur doit, dans ce cas, prouver non seulement la faute, mais également l'existence d'un abus suffisamment important pour justifier une sanction disciplinaire.
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En l'espèce, la procédure n'est pas irrégulière en ce que le salarié a bénéficié d'un entretien préalable à l'avertissement, ce qui n'était pas obligatoire, et ce qui lui a permis de s'exprimer. Le fait pour le salarié d'avoir pris la parole pour défendre une salariée sanctionnée par un avertissement, lors d'une réunion commerciale est établi dans le dossier. Il ressort également de l'avertissement notifié à M. U... le 20 avril 2012 relatif à des critiques à l'encontre de sa hiérarchie et de son courrier du 5 juin 2012, que cette dernière a contesté auprès de son employeur le bien fondé de cet avertissement qui faisait suite à un différend avec la Fnac, client important et qui avait donné lieu à un courrier collectif adressé aux responsables de la Fnac. Si cette prise de parole ne s'inscrivait pas dans le cadre de la réunion commerciale qui se déroulait entre plusieurs représentants commerciaux et avec trois clients, il se déduit toutefois des pièces versées au dossier que M. U... s'est exprimé en qualité de représentant du personnel suite à l'avertissement subi par une collègue et contesté par cette dernière, et que l'employeur n'étaye pas en quoi cette prise de parole aurait dégénéré en abus, ne versant aucune pièce sur ce point, telle que plainte de client, attestation, compte-rendu de réunion, perte de contrat. Le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a annulé l'avertissement litigieux et en ce qu'il a alloué au salarié la somme de 2 000 € en réparation du préjudice moral subi du fait de cet avertissement injustifié, l'intéressé ne justifiant pas avoir subi le préjudice financier invoqué, dès lors qu'il ne démontre pas avoir été privé d'éléments de salaire ou de certaines primes du fait de l'avertissement prononcé » ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur la demande d'annulation de l'avertissement du 21 mai 2012 que M. U... demande au Conseil d'annuler l'avertissement qui lui a été notifié par lettre du 21 mai 2012 ; Que la S.A. INTERFORUM demande au Conseil de débouter M. U... de l'intégralité de ses demandes ; que la S.A. INTERFORUM a adressé à M. U... une lettre d'avertissement datée du 21 mai 2012 et rédigée ainsi : « Nous faisons suite à notre entretien du mercredi 2 mai 2012 avec F... M... — Directeur Circuit, Q... D... Directeur du Développement des RH et L... E... — DG Diffusion et Marketing. Comme nous vous l'avons expliqué, lors du dudit entretien, nous ne comprenons pas et ne pouvons accepter votre comportement le matin du 2 mai 2012 en réunion commerciale. En effet, lors de ces réunions de travail avec les éditeurs qui sont nos clients, vous avez pris la parole devant 3 d'entre eux successivement pour critiquer — au nom de l'équipe — une décision prise par la Direction à l'encontre d'une salariée de l'entreprise en proclamant que, de ce fait, l'équipe serait dans une attitude d'écoute passive et sans participation. Les propos que vous avez tenus ont choqué les Editeurs intervenants qui ont contacté la Direction de l'entreprise pour s'en émouvoir en leur qualité de clients. Il s'agit là d'une attitude peu responsable qui tend à démontrer un mélange des genres entre l'exercice de votre emploi de Représentant et l'exercice de vos mandats d'élu. Comme cela vous a été expliqué, la direction est tout à fait prête à vous recevoir au titre de vos mandats pour expliquer la décision prise à l'encontre d'une salariée. En revanche, vous ne pouvez adopter décrite précédemment devant des tiers de l'entreprise, de surcroît, des clients. Lors de l'entretien précité du 2 mai dernier, vous avez-vous-même sollicité un entretien à la DRH sur le dossier. Encore une fois, un tel comportement est inadmissible car il revient à mettre en cause votre hiérarchie et, ainsi, l'image et l'activité économique de l'équipe et de l'entreprise devant ses clients au risque de mettre en péril la qualité des relations avec ces derniers. Ces faits graves nous conduisent à vous notifier, par la présente, un avertissement qui sera versé à votre dossier individuel. Nous comptons vivement sur vous pour en revenir à un mode normal de relations de travail dans le respect de votre hiérarchie et des règles en vigueur dans l'entreprise sans que cela n'interfère et ne vienne contredire vos mandats d'élu. Dans cette attente, veuillez croire, Monsieur, en l'assurance de nos salutations distinguées. Q... D... Directeur du Développement des RH » ; que M. U... a contesté cet avertissement et en a demandé le retrait par lettre du 5 juin 2012 ; Que, n'en ayant pas obtenu le retrait, M. U... a saisi le Conseil de prud'hommes de CRÉTEIL le 9 juillet 2012; qu'au moment des faits, M. U... était délégué du personnel titulaire, membre élu et secrétaire du Comité d'Établissement de PARYSEINE IVRY ; Que depuis décembre 2012, il est élu au CHSCT et secrétaire adjoint du CHSCT; que M. U... : - ne conteste pas les faits rapportés dans sa lettre d'avertissement mais les atténue ; - déclare ne pas avoir manqué à ses obligations professionnelles ;
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-ajoute qu'il s'est exprimé au cours de cette réunion en qualité de représentant du personnel et à la demande de ses collègues en soutien solidaire à une autre collègue injustement sanctionnée ; - présente au. Conseil les attestations de plusieurs collègues M. K..., Mme S..., Mme G..., M. I..., M. X..., Mme A..., M J...) déclarant que M. U... avait agi dans le cadre de son mandat à leur demande ; que la S.A. INTERFORUM déclare que l'avertissement adressé à M. U... est justifié; que le Conseil constate que ; - M. U... s'est exprimé dans le cadre d'un « mouvement social » au cours duquel il était mandaté par ses collègues ; - seul M. U... a fait l'objet d'un avertissement, ses autres collègues ne recevant qu'une lettre de rappel à l'ordre ; que le Conseil estime que l'avertissement du 21 mai 2012: - à l'encontre de M. U... dans le cadre de son mandat de salarié protégé, est injustifié ; - constitue une discrimination syndicale à l'encontre d'un élu du personnel exerçant activement son mandat ; En conséquence, le Conseil ordonne l'annulation de l'avertissement du 21 mai 2012. - Sur la demande de dommages et intérêts pour avertissement infondé Vu l'article 1382 du Code civil ; que M. U... demande le paiement de 10 000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice suite à son avertissement injustifié ; Que la S.A. INTERFORUM demande au Conseil de débouter M. U... de l'intégralité de ses demandes ; que le Conseil a estimé que l'avertissement du 21 mai 2012 : - à l'encontre de M. U... dans le cadre de son mandat de salarié protégé, était injustifié ; - constituait une discrimination syndicale à l'encontre de cet élu du personnel exerçant activement son mandat ; que M. U... ne présente au Conseil aucun élément permettant d'évaluer le préjudice qu'il a subi suite à son avertissement injustifié ; que le Conseil estime que cet avertissement lui a nécessairement causé un préjudice qu'il convient de le réparer ; En conséquence, il est partiellement fait droit à cette demande à hauteur de 2 000,00 euros » ; 1. ALORS QUE les faits fautifs commis par le salarié dans le cadre de l'exécution de son contrat, et non dans l'exercice de ses fonctions représentatives, peuvent justifier une sanction disciplinaire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les faits reprochés à M. U... ont été commis à l'occasion d'une réunion commerciale qui se déroulait entre plusieurs représentants commerciaux de l'entreprise et trois clients et à laquelle M. U... participait en qualité de représentant commercial ; qu'en conséquence, les faits commis au cours de cette réunion ne pouvaient se rattacher à l'exercice des mandats de représentant du personnel de M. U... ; qu'en retenant cependant, pour annuler l'avertissement sanctionnant ces faits, que M. U... s'était exprimé en qualité de représentant du personnel suite à l'avertissement subi par une collègue et contesté par cette dernière et que l'employeur ne démontre pas un abus de prérogative de sa part, la cour d'appel a violé les articles L. 1331-1 et L. 1333-2 du code du travail ; 2. ALORS QUE ne présente pas un caractère discriminatoire la sanction prise à l'encontre d'un salarié qui a commis un fait fautif ; qu'en l'espèce, il est constant que M. U... était seul intervenu au cours de la réunion commerciale avec des éditeurs pour critiquer une décision de la direction, les autres représentants commerciaux ayant seulement indiqué soutenir son action ; qu'en décidant néanmoins que l'avertissement prononcé à son encontre présentait un caractère discriminatoire, pour avoir été pris à l'encontre d'un salarié exerçant ses mandats, la cour d'appel a violé les articles L. 1333-2 et L. 2141-5 du code du travail. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Interforum à payer à M. U... la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral et discrimination syndicale ; AUX MOTIFS QUE « Aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur a l'obligation de protéger la santé physique et mentale de ses salariés. Aux termes de l'article L. 1152-1 applicable du même code, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Il résulte des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 applicables du code du travail que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Cour d'appel de Paris K9, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-16.713 du 11/12/2019, partie 6
Selon l'article L. 1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison notamment de ses activités syndicales. L'article L. 1134-1 dispose que lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. En l'espèce, M. U... fait valoir qu'il a subi : - des objectifs inadaptés en raison de l'absence de prise en compte tant de ses mandats que de ses arrêts maladie ; - des pressions quotidiennes résultant de sa charge de travail imposée, de courriels adressés pendant ses arrêts de travail et ses congés, de l'absence de prise en compte des difficultés rencontrées dans l'exercice de ses missions ; - une absence d'évolution professionnelle ; - l'absence de versement de commissions ; - l'intensification d'actes de harcèlement moral depuis novembre 2013 : conflit relatif à la visite à la librairie O..., mise en place d'une nouvelle procédure sans information préalable du salarié, remise en cause des congés payés du salarié ; - une discrimination syndicale ; - une dégradation de son état de santé. Sur les objectifs inadaptés : M. U... soutient que les objectifs qui lui ont été assignés étaient inadaptés notamment en ce qu'ils ne tenaient pas compte de ses mandats au sein des instances représentatives du personnel ce qui a conduit à le placer en infériorité vis à vis de l'équipe et de ses arrêts maladie, notamment de 19 jours en octobre 2013. Le salarié produit plusieurs courriels dans lesquels il demande une diminution de ses objectifs en terme de chiffre d'affaires en raison de son activité au sein des instances représentatives du personnel, l'employeur ne répondant pas à ses demandes d'aménagement au regard du nombre de jours effectivement travaillés, et comparant ses performances dans plusieurs courriels au reste de l'équipe de façon défavorable à plusieurs reprises, alors que sur la période concernée le salarié était pris plusieurs journées notamment pour des réunions du CHSCT. Cependant le courriel de Mme D..., directeur des ressources humaines, du 20 mai 2016, permet d'établir que le secteur du salarié a été revu à la baisse depuis 2010 et qu'à compter de l'année 2014 un aménagement a été convenu avec le salarié en cas d'impact de ses mandats d'élu sur le résultat de ses opérations commerciales. Le salarié justifie qu'en octobre 2013, il lui a été rapporté que son nombre de visite était en très forte baisse consécutivement à son arrêt maladie ; toutefois il ne peut en être déduit que ses objectifs étaient inadaptés. Ce fait doit donc être écarté, n'étant pas matériellement établi. Sur les pressions quotidiennes : Le salarié invoque une charge de travail accrue et des demandes pressantes et incessantes visant à le faire "craquer" psychologiquement. Il justifie de demandes de mise à jour de son plan de tournée par courriels du 7 juin 2013 pour le mois de juin, du 28 juin 2013 pour le mois de juillet, du 17 juillet 2013, du 15 janvier 2014, et expose qu'il n'a pas le temps de faire ce travail administratif additionnel, qui ne fait pas partie de ses missions, alors qu'en qualité de cadre il est autonome dans l'organisation de son temps de travail. Le salarié fait également état de courriels qui lui ont été adressés pendant ses arrêts de travail et ses congés et produit plusieurs courriels : - en décembre 2013 alors qu'il se trouve en congés puis en RTT ; - le 1er octobre 2013 sur ses résultats en septembre 2013, alors qu'il fait l'objet d'un arrêt de travail depuis le 12 septembre 2013 ; - le 8 novembre 2013 lui demandant de régulariser des "FAJ", alors qu'il se trouve en arrêt de travail à compter de cette date. Le salarié justifie qu'il a alerté son employeur à plusieurs reprises sur les difficultés rencontrées, notamment en matière informatique avec un logiciel qui présente des dysfonctionnements (courriels du 14 novembre 2011 et du 24 octobre 2013), et avec son ordinateur, en dépit d'une 'hotline' informatique, ainsi que de l'absence de réponse à des demandes d'information (courriel du 10 septembre 2013 relatif à la disponibilité de la revue Crimes et châtiment, du 2 décembre 2013 relatif au suivi d'un article sur un livre de V... B...). Ce fait doit donc être considéré comme matériellement établi. Sur l'absence d'évolution professionnelle : Le salarié déplore qu'il occupe toujours le même poste depuis son embauche en dépit de bonnes évaluations et d'excellents résultats.
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Il relève qu'à compter de 2008, les entretiens annuels d'évaluation sont tenus oralement et ne donnent plus lieu à compte rendu, et qu'il n'a pas bénéficié de formation malgré ses demandes, notamment d'une formation en anglais commercial de 2003 à 2005, enfin qu'il n'a pas obtenu de mutation en interne malgré ses demandes. Il ressort du dossier qu'en effet le salarié n'a pas connu d'évolution fonctionnelle au sein de l'entreprise depuis son embauche, alors qu'il a demandé une évolution au sein du service export (comme indiqué dans son compte-rendu d'entretien individuel de l'année 2003), ainsi que dans l'équipe Poche, qu'il n'a pas non plus reçu de formation malgré des demandes répétées pour une formation en anglais (figurant par exemple dans ses comptes-rendus d'entretien individuel de 2003 et 2005). Il est également établi qu'aucun compte-rendu écrit de ses entretiens annuels d'évaluation ne lui a été remis à compter de 2008. Ce fait est donc matériellement établi. Sur l'absence de versement de commissions : Le salarié reproche à son employeur de l'avoir privé de commissions en raison de l'annulation, deux années consécutives en 2011 et en 2012, de la parution du livre de M. R... qui l'a privé de chiffre d'affaires, l'employeur refusant d'ajuster ses objectifs en retirant ce livre. Toutefois, ce fait qui relève de l'aléa de l'édition n'est pas suffisant pour établir que le salarié a été privé du versement de commissions, alors que son marché est nécessairement touché par divers aléas. Sur l'intensification des actes de harcèlement moral depuis novembre 2013 : Le salarié fait état d'un conflit relatif à la librairie O..., premier client de son secteur, qui n'a pas été suivi en son absence pendant son arrêt maladie en dépit de ses consignes, une commande de novembre 2013 pour janvier 2014 n'ayant pas été prise en compte. Cependant, il ne peut être tenu rigueur à l'employeur d'un suivi moins rigoureux en l'absence du salarié, l'employeur justifiant toutefois avoir mis en oeuvre des moyens pour pallier l'absence du salarié. Le salarié déplore ne pas avoir été informé et consulté sur la mise en place d'une procédure de bordereau de retour, dont il a constaté l'existence à travers deux documents de septembre 2013. Cependant, il n'est pas justifié que cette procédure interne nécessitait la consultation et l'information du salarié, celle-ci n'étant pas d'une importance significative et étant du domaine du pouvoir de gestion de l'employeur. Le salarié mentionne une demande de congés qui a fait l'objet d'un refus par son supérieur hiérarchique en janvier 2014 pour la période du 14 au 18 avril 2014 afin de participer à un congrès international, avant d'être acceptée à titre exceptionnel après intervention de Mme D.... Il en résulte que ce congé a finalement été autorisé, ce fait n'est donc pas établi. Ces éléments de fait ne sont donc pas établis. Sur la discrimination syndicale : Le salarié fait état de l'avertissement injustifié qui lui a été notifié. Il ajoute qu'il a fait l'objet de remarques et de réflexions insidieuses depuis son élection. Il conclut que les conditions de travail ainsi que les relations avec ses supérieurs hiérarchiques se sont dégradées, entraînant une très forte pression, que cette discrimination est connue de l'inspection du travail qui a déjà rappelé à l'ordre la société sur le fonctionnement des institutions ainsi que sur le cas d'autres salariés. Le salarié justifie avoir alerté l'inspection du travail le 2 décembre 2012 sur les conditions d'exercice de ses fonctions. Toutefois l'intervention de l'inspection du travail du 20 août 2014 n'est pas en lien direct avec la situation de discrimination alléguée même s'il est fait mention de l'obligation pour l'employeur de respecter les dispositions relatives au fonctionnement du CHSCT, et du rappel de règles de fonctionnement des instances représentatives du personnel. Au vu des développements qui précèdent, il est établi que le salarié a fait l'objet d'un avertissement discriminatoire en raison de son activité syndicale, le salarié n'étayant toutefois pas les autres allégations par des éléments objectifs le concernant directement. Sur la dégradation de l'état de santé du salarié : Le salarié justifie d'une dégradation de son état de santé par la production de certificats médicaux établis par : - le Dr N..., psychologue du travail, le 29 octobre 2013 : "... sur le plan clinique, les signes décrits semblent évoquer un état de stress chronique (difficulté de concentration et de mémorisation)... En conclusion, il semble que l'état de stress chronique décrit par le salarié est en lien avec le vécu au travail... L'ensemble de ces éléments semblent générer une souffrance au travail" ; - le Dr C..., médecin du travail dans son avis d'inaptitude du 6 novembre 2013 : "je pense que le contexte professionnel actuel n'est pas propice à sa reprise. Il se sent en désaccord avec l'organisation de l'entreprise ce qui le met en grandes difficultés". Ces éléments matériellement établis, pris dans leur ensemble, en ce inclus les éléments relatifs à l'état de santé du salarié, permettent de présumer l'existence d'une discrimination syndicale et d'un harcèlement moral.
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L'employeur se contente de répliquer en termes généraux que le salarié ne subit pas de surcharge de travail, qu'il se comporte comme un électron libre dans la gestion de son activité commerciale, qu'il doit rendre compte à son supérieur hiérarchique et établir des plans de tournées, que ce dernier a agi dans le cadre de son pouvoir de gestion et de direction. L'employeur réfute les problèmes informatiques invoqués en faisant valoir que le service informatique les résout dès qu'ils sont signalés. En outre, l'employeur fait valoir que les courriels adressés durant les arrêts de travail et les congés le sont en des termes ni agressifs, ni méprisants, sont informatifs et n'ont rien d'abusif. L'employeur répond quant à l'absence de prise en considération des difficultés rencontrées par le salarié, que celui-ci fait preuve de mauvaise foi et qu'il ne démontre pas qu'il se soit trouvé dans une situation délicate vis à vis d'un client, ni qu'il n'ait eu de retour. Cependant, ces éléments n'établissent pas que la pression accrue et avérée au travail subie par le salarié est justifiée par des éléments étrangers à tout harcèlement et toute discrimination, dès lors que la pression exercée en particulier par le supérieur hiérarchique sur le salarié excède la norme acceptable sur ce marché pour ce type de poste, alors que les conditions de travail sont difficiles et que le salarié a un statut de cadre avec une autonomie et une expérience avérée. L'employeur fait valoir également que le salarié s'abstient de toute comparaison avec des collègues, qu'il n'a pas été possible de faire droit à sa demande de mutation en interne, le poste à l'export ayant fait l'objet d'un recrutement. L'employeur précise que l'anglais ne fait pas partie des formations dispensées aux représentants, que celui-ci a bénéficié d'autres formations. L'employeur ajoute que le salarié a bénéficié d'entretiens postérieurement à 2008, mais qu'en 2008 et 2009 les entretiens n'ont pas donné lieu à la formalisation d'un écrit comme pour d'autres salariés. Ces éléments sont insuffisants pour démontrer que l'absence d'évolution professionnelle du salarié, qui a été embauché il y a de nombreuses années, est justifiée par des éléments étrangers à tout harcèlement et toute discrimination, l'employeur n'expliquant pas le refus d'une mutation dans l'équipe Poche et reconnaissant l'absence d'écrit pour deux entretiens d'évaluation en 2008 et en 2009. L'employeur conteste toute discrimination syndicale, alors que le salarié n'a jamais évoqué une telle situation avant 2014, que le courrier adressé à l'inspection du travail est rédigé par le salarié lui-même et ne peut être retenu comme preuve des faits allégués, que l'inspection du travail ne s'est pas déplacée dans les lieux et n'a pas adressé de courrier à l'employeur sur sa situation. L'employeur conclut que l'avertissement est justifié au vu des faits reprochés au salarié. Cependant, au vu des développements qui précèdent, l'avertissement prononcé à l'encontre de M. U... est discriminatoire. Il se déduit de ces éléments que le salarié a subi des faits de harcèlement moral et de discrimination syndicale, en raison de pressions constantes dans son travail, d'une absence d'évolution professionnelle en dépit de ses demandes et de la notification d'un avertissement discriminatoire, ayant conduit à une détérioration de son état de santé. En conséquence, il y a lieu d'allouer au salarié des dommages et intérêts réparant l'atteinte à la dignité et à la santé du salarié résultant du harcèlement moral dont il a fait l'objet ainsi qu'au titre de la discrimination syndicale qu'il a subie, résultant de la privation d'une partie de l'évolution professionnelle de l'intéressé, que la cour évalue à 20 000 €. La décision entreprise sera donc infirmée sur ce point » ; 1. ALORS QUE pour juger que M. U... a été victime d'un harcèlement moral et d'une discrimination, la cour d'appel a retenu que l'avertissement prononcé à l'encontre de M U... était injustifié et discriminatoire ; que la cassation qui ne manquera pas d'intervenir, sur le premier moyen de cassation, entraînera la cassation, par voie de conséquence, du chef de l'arrêt ayant condamné la société Interforum à payer à M. U... la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale et harcèlement moral, en application de l'article 625 du code de procédure civile ; 2. ALORS QUE ni les manifestations de l'exercice normal du pouvoir de direction de l'employeur ou du supérieur hiérarchique, ni de simples difficultés matérielles rencontrées par un salarié dans l'usage du matériel informatique pour l'exercice de ses fonctions ne peuvent, à elles seules, laisser présumer un harcèlement moral ou une discrimination ; qu'en se bornant à relever que M. U... justifie de « demandes de mise à jour de son plan de tournée » par son supérieur hiérarchique, de « courriers adressés pendant ses arrêts de travail » et de « difficultés rencontrées, notamment en matière informatique » ou dans la communication de certaines informations, sans faire ressortir en quoi ces demandes, courriers ou difficultés présentaient un caractère anormal au regard de l'exercice normal du pouvoir de direction et de contrôle de l'employeur, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé l'existence d'une « pression accrue et avérée au travail » et en particulier une « pression exercée par le supérieur hiérarchique (
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) excéd[ant] la norme acceptable », a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1, L. 1154-1, L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail ; 3. ALORS QUE le juge doit examiner l'ensemble des éléments produits par l'employeur pour apprécier si les faits qui lui sont reprochés sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination et à tout harcèlement moral ; qu'en l'espèce, pour contester les prétendues « pressions quotidiennes » exercées à l'encontre de M. U..., la société Interforum justifiait qu'en sa qualité de commercial itinérant, fût-il cadre autonome, M. U... était tenu d'établir un plan de tournée pouvant être contrôlé par le directeur des ventes et que les relances de ce dernier étaient justifiées par la réticence de M. U... à renseigner ses plans de tournée dans son agenda informatique, comme les autres représentants ; que, s'agissant des courriers électroniques adressés pendant des arrêts de travail ou congés du salarié, la société Interforum expliquait également que le courrier du 16 décembre 2013, auquel M. U... avait répondu trois jours plus tard, lui avait été adressé avant son départ en congé, que le courrier du 1er octobre 2013 constituait un simple courrier d'information auquel M. U... n'était pas tenu de répondre et que le courrier du 8 novembre 2013 s'expliquait par le fait que le supérieur de M. U... n'avait pas été informé de son arrêt maladie ; que, s'agissant des difficultés rencontrées par le salarié avec le matériel informatique, la société Interforum justifiait, par la production du listing des interventions du service informatique, que ce dernier avait résolu rapidement chacune des difficultés rencontrées par M. U... lorsqu'il les a signalées ; qu'en affirmant cependant que l'employeur se contentait de répliquer en termes généraux aux allégations du salarié, pour refuser de se prononcer sur ces différents éléments de justification, étayés des preuves nécessaires, la cour d'appel a violé les articles L. 1134-1 et L. 1154-1 du code du travail ; 4. ALORS QUE sauf disposition conventionnelle contraire, l'employeur n'est pas tenu d'assurer la progression de carrière d'un salarié par des changements d'emploi ; qu'en conséquence, la seule absence d'évolution professionnelle du salarié ne peut suffire à laisser présumer une discrimination, pas plus que le rejet d'une demande de mutation antérieure à l'exercice de fonctions syndicales ou le refus d'une formation étrangère aux fonctions exercées par le salarié ; qu'en l'espèce, la société Interforum justifiait que M. U... avait bénéficié de diverses formations au cours de sa carrière, qu'aucune formation d'anglais n'est dispensée aux représentants commerciaux qui ne font pas usage de langues étrangères dans l'exercice de leurs fonctions et qu'elle a chaque année reçu M. U... en entretien d'évaluation ; qu'elle soulignait également que M. U... n'établissait pas que d'autres représentants commerciaux auraient bénéficié d'une évolution professionnelle et que sa demande de mutation était bien antérieure au début de son engagement syndical, datant de 2008 ; qu'en considérant néanmoins que le fait que M. U... n'ait pas connu d'évolution professionnelle en dépit de deux demandes de mutation antérieures au début de ses activités syndicales, ni bénéficié de la formation d'anglais demandée, et que les entretiens annuels d'évaluation de 2008 et 2009 (en réalité 2009 et 2010) n'aient pas été formalisés par écrit suffisaient à retenir l'existence d'une « privation d'évolution professionnelle » présentant un caractère discriminatoire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et L. 2141-5 du code du travail.
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par M. B... Q..., domicilié [...], contre l'arrêt rendu le 12 janvier 2018 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale B), dans le litige l'opposant à la société Mutuelles du Mans assurances vie (MMA vie) société anonyme, dont le siège est [...], défenderesse à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 13 novembre 2019, où étaient présents : M. Cathala, président, Mme Leprieur, conseiller doyen rapporteur, MM. Maron, Pietton, Mme Richard, conseillers, Mmes Depelley, Duvallet, M. Le Corre, Mmes Prache, Marguerite, conseillers référendaires, M. Weissmann, avocat général référendaire, Mme Lavigne, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Leprieur, conseiller doyen, les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat de M. Q..., de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société MMA vie, l'avis de M. Weissmann, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 12 janvier 2018), que M. Q..., engagé par la société Mutuelles du Mans assurances vie (MMA vie) le 2 juillet 1973, occupait en dernier lieu un poste de délégué régional animation et développement au sein de la direction centrale commerciale, à la direction régionale de Lyon ; qu'un projet de réorganisation de la direction centrale commerciale, impliquant la non-reconduction de 83,60 postes sur 803,49 et la création de 48,6 postes a été soumis au comité central d'entreprise de l'unité économique et sociale ; que durant la procédure d'information-consultation, a été promulguée la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, instituant notamment la possibilité de négociation portant sur les conditions de mobilité interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que le 3 juillet 2013, après avis favorable du comité central d'entreprise, a été conclu un accord relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences et à la formation professionnelle, dont l'article 7.1.9 contient des dispositions relatives à la mobilité interne résultant de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que, se prévalant de ces dispositions, la société a proposé au salarié, par lettre du 27 septembre 2013, une affectation sur le poste de délégué développement agents, sur le site de Clichy, rattaché à la direction régionale Île-de-France-Centre-Normandie, que l'intéressé a refusée le 15 octobre 2013 ; que, par lettre du 28 novembre 2013, la société a transmis au salarié trois offres de postes de reclassement, qu'il a déclinées le 14 décembre 2013 ; que la société a notifié au salarié son licenciement pour motif économique le 31 janvier 2014 ; que ce dernier a saisi la juridiction prud'homale ; Sur les deuxième et troisième branches du premier moyen, ainsi que les troisième à cinquième moyens : Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Sur le premier moyen, pris en ses autres branches : Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de condamnation de la société au paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors selon le moyen : 1°/ que l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que les « mesures collectives d'organisation courantes » sont celles qui permettent, par la mobilité interne des salariés, d'opérer au sein d'une entreprise, des aménagements organisationnels de faible importance ; que ces mesures sont donc exclusives de tout projet de réorganisation d'ampleur ; que pour considérer que les mesures prévues par l'employeur dans l'accord de mobilité étaient des mesures d'organisation courante, la cour d'appel a énoncé que la loi ne fixait aucun seuil au-delà duquel une réorganisation cesse d'être une « mesure collective d'organisation courante », d'une part, et que les mesures mises en place par la société MMA vie, en ce qu'elles consistaient à prévoir, mais aussi à prévenir les mobilités qu'impliquait la réorganisation litigieuse relavaient bien d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, d'autre part ; qu'en considérant ainsi que la notion de mesures d'organisation courante devait être déterminée au seul regard de leur nature et non pas de leur ampleur, la cour d'appel a violé les articles L. 2242-21 et L. 2242-23 du code du travail ;
Cour d'appel de Lyon SB, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-13.599 du 11/12/2019, partie 1
2°/ que, subsidiairement, à supposer qu'il soit considéré que la cour d'appel ait entendu retenir que les mesures mises en place par la société MMA vie relevaient d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences dès lors qu'elles avaient pour objet de permettre la mise en place d'un projet de réorganisation plus vaste, l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que de telles mesures ont pour objet, par la mobilité interne des salariés, de procéder à des aménagements organisationnels de faible importance ; que ces mesures sont exclusives de tout projet de réorganisation d'ampleur ; qu'en retenant toutefois que les mesures mises en place par la société MMA vie en ce qu'elles avaient pour objet de prévoir, mais aussi de prévenir les effets de la mobilité engendrés par un projet de réorganisation, constituaient des mesures collectives d'organisation courantes, quand de telles mesures ne peuvent être mises au service d'un projet de réorganisation plus vaste, la cour d'appel a violé les articles L. 2242-21 et L. 2242-23 du code du travail ; 3°/ que l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que de telles mesures ont pour objet, par la mobilité interne des salariés, de procéder à des aménagements organisationnels de faible importance ; que ces mesures sont exclusives de tout projet de réorganisation d'ampleur ; que la cour d'appel a relevé que la société MMA vie avait mis en place des mesures correspondant à la création de trente-sept postes dans les différentes directions régionales de la direction centrale commerciale, la reconduction de huit postes non pourvus, la création de dix postes de vérifications en régions au sein de la DPCE, l'affectation de trente-et-un salariés à des missions temporaires de dix-huit à vingt-quatre mois et la création d'un vivier devant compter à terme quinze salariés ; qu'en considérant que l'accord de mobilité prévoyant ces mesures étaient conformes à la loi, quand l'ampleur de ces mesures excluait qu'elles soient qualifiées de « mesures collectives d'organisation courantes », la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 2242-21 et L. 2242-23 du code du travail ; 4°/ que, en tout état de cause, l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que de telles mesures ont pour objet, par la mobilité interne des salariés, de procéder à des aménagements organisationnels de faible importance ; que ces mesures sont exclusives de tout projet de réorganisation d'ampleur ; qu'en se bornant à énoncer que les mesures mises en place par la société MMA vie relevaient d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences en ce qu'elles n'emportaient aucune réduction d'effectif et étaient destinées à prévoir, mais aussi à prévenir les mobilités qu'impliquaient la réorganisation litigieuse, et qu'un cabinet d'experts mentionnait dans son rapport que le projet de réorganisation de la direction centrale commerciale relevait d'une mesure d'organisation courante, sans se déterminer au regard de l'ensemble des mesures visées par l'accord de mobilité pour trancher la question de savoir si l'ampleur des mesures de réorganisation mises en place par la société n'excédait pas le cadre de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2242-21 et L. 2242-23 du code du travail ; 5°/ que l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que de telles mesures ont pour objet, par la mobilité interne des salariés, de procéder à des aménagements organisationnels de faible importance ; que ces mesures sont exclusives de tout projet de réorganisation d'ampleur ; qu'en énonçant qu'un cabinet d'experts mentionnait dans son rapport que le projet de réorganisation de la direction centrale commerciale relevait d'une mesure d'organisation courante, la cour d'appel a statué par des motifs insuffisants à caractériser que l'ensemble des mesures envisagées dans l'accord de mobilité devaient être qualifiées des mesures d'organisation courante, et ainsi, privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2242-21 et L. 2242-23 du code du travail ; 6°/ que l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que de telles mesures ont pour objet, par la mobilité interne des salariés, de procéder à des aménagements organisationnels de faible importance ; que ces mesures sont exclusives de tout projet de réorganisation d'ampleur ;
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qu'en retenant que les mesures mises en place par la société MMA vie relevaient d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si la durée de mise en place de ces mesures par la société MMA vie n'était pas de nature à exclure qu'elles constituent des mesures collectives d'organisation courantes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2242-21 et L. 2242-23 du code du travail ; Mais attendu que selon l'article L. 2242-21 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que la cour d'appel, qui a constaté que la mobilité individuelle du salarié était envisagée dans le cadre d'une réorganisation de la direction centrale commerciale ne s'accompagnant pas d'une réduction d'effectifs, a exactement déduit de ces seuls motifs que cette réorganisation constituait une mesure collective d'organisation courante au sens du texte précité ; que le moyen n'est pas fondé ; Sur le deuxième moyen : Attendu que le salarié fait le même grief à l'arrêt, alors selon le moyen : 1°/ que les mesures mises en place au titre de la mobilité interne des salariés doivent être proportionnées au but recherché par la société ; qu'en retenant que le licenciement individuel pour motif économique de M. Q... reposait sur une cause réelle et sérieuse en ce qu'il découlait de l'accord de mobilité sans s'assurer, fut-ce d'office, que les mesures mises en place par la société MMA vie au titre de cet accord étaient proportionnées au but recherché par la société, la cour d'appel a violé les articles L. 2242-21 et L. 2242-23 du code du travail ; 2°/ que lorsqu'un salarié refuse l'application à son contrat de travail des stipulations de l'accord relatives à la mobilité interne, il bénéficie, préalablement à son licenciement individuel pour motif économique, des mesures de reclassement telles qu'aménagées par l'accord de mobilité interne ; qu'un tel aménagement ne peut conduire à exclure tout reclassement du salarié dans les filiales du groupe situées à l'étranger ; qu'en jugeant au contraire, que l'accord pouvait exclure toute proposition de reclassement dans les filiales du groupe situées à l'étranger, la cour d'appel a violé l'article L. 2242-23 du code du travail ; 3°/ que, en tout état de cause, lorsqu'un salarié refuse l'application à son contrat de travail des stipulations de l'accord relatives à la mobilité interne, il bénéficie, préalablement à son licenciement individuel pour motif économique, des mesures de reclassement telles qu'aménagées par l'accord de mobilité interne ; qu'en se bornant à retenir que la société MMA Vie avait satisfait à son obligation de reclassement dès lors qu'elle a, conformément aux dispositions prévues par l'accord de mobilité interne à l'entreprise, proposé à M. Q..., trois offres de reclassement, sans s'assurer que ces offres, au nombre de trois, portant sur un secteur géographique limité privant le salarié de toute possibilité d'être reclassé dans les filiales du groupe situées à l'étranger, étaient conformes aux exigences légales, la cour d'appel a violé l'article L. 2242-23 du code du travail ; 4°/ que lorsqu'un salarié refuse l'application à son contrat de travail des stipulations de l'accord relatives à la mobilité interne, il bénéficie, préalablement à son licenciement individuel pour motif économique, des mesures de reclassement telles qu'aménagées par l'accord de mobilité interne ; qu'en se bornant à retenir que la société MMA vie a satisfait à son obligation de reclassement dès lors qu'elle a, conformément aux dispositions de l'accord de mobilité interne à l'entreprise, proposé à M. Q..., trois offres de reclassement, sans s'assurer que l'obligation de reclassement prévue par l'accord de mobilité interne, prévoyant exclusivement trois postes de reclassement étaient, au regard de la taille de l'entreprise, conforme aux exigences légales, la cour d'appel a violé l'article L. 2242-23 du code du travail ; Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder aux recherches prétendument omises selon les première et quatrième branches, qui ne lui étaient pas demandées, a constaté, d'une part, que l'accord de mobilité interne prévoyait que trois offres de reclassement concernant des emplois de même catégorie ou équivalents, situés si possible dans la zone d'emploi des salariés, seraient présentées simultanément, et, d'autre part, que les trois propositions de reclassement faites au salarié, concernant des postes situés à Lyon, Toulouse et Clichy, étaient conformes aux dispositions de l'accord ; qu'elle en a exactement déduit que l'employeur avait ainsi satisfait à son obligation de reclassement interne, telle qu'adaptée par l'accord ; que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. Q... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
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Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour M. Q... PREMIER MOYEN DE CASSATION M. Q... fait grief à l'arrêt attaqué : DE L'AVOIR débouté de sa demande tendant à voir dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et, en conséquence, de sa demande en condamnation de la société MMA Vie au paiement de la somme de 310 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; AUX MOTIFS QUE « selon les articles L.2242-21 et suivants du code du travail, dans leur rédaction résultant de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que l'accord issu de la négociation, qui constitue un volet de l'accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences dans les entreprises ou groupes d'entreprises soumis à une telle obligation, droit contenir notamment les mesures prescrites par l'article L. 2242-22 ; que les clauses des contrats de travail contraires à l'accord sont suspendues ; que le licenciement des salariés qui refusent l'application à leur contrat de travail des stipulations de l'accord relatives à la mobilité interne repose sur un motif économique ; qu'il est prononcé selon les modalités d'un licenciement individuel pour motif économique et ouvre droit aux mesures d'accompagnement et de reclassement que doit prévoir l'accord, qui adapte le champ des modalités de mise en oeuvre du reclassement interne prévu aux articles L. 1233-4 et L. 1233-4-1 ; qu'en cas de litige portant sur la rupture du contrat de travail, l'office du juge consiste seulement à vérifier si l'accord collectif de mobilité interne est conforme aux dispositions légales et si l'employeur a respecté les obligations que l'accord mettait à sa charge avant de notifier un licenciement pour motif économique ; qu'en l'espèce, M. Q... conteste implicitement la conformité à la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 de l'article 7.1.9 de l'accord du 3 juillet 2013 relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, consacré à la mobilité interne résultant de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; qu'en effet, selon lui, l'accord de mobilité interne, conclu après l'achèvement d'une procédure d'information-consultation des instances représentatives du personnel portant sur une réorganisation de grande ampleur, ne s'inscrivait pas dans une démarche de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ; qu'il ajoute que la réorganisation mise en oeuvre était exclusive de toute mesure collective d'organisation courante ; qu'il soutient encore que le projet de réorganisation devait entraîner une réduction d'effectifs et, partant, des suppressions d'emplois ; qu'aucune conséquence ne peut cependant être tirée de l'antériorité de la procédure d'information-consultation du comité central d'entreprise par rapport à la conclusion de l'accord de mobilité ; qu'en effet, l'article 13 de la loi n° 2013-504 ayant eu pour objet de réduire le champ d'application des règles du licenciement collectif pour motif économique en imposant aux salariés, par accord collectif, une mobilité tempérée propice au maintien de l'emploi, il était loisible à la société MMA Vie de ne pas poursuivre dans la démarche qu'elle avait engagée au début du printemps 2013, alors que les nouvelles dispositions légales n'étaient pas encore applicables ; que la loi ne fixe aucun seuil au-delà duquel une réorganisation cesse d'être une mesure collective d'organisation courante : qu'une gestion prévisionnelle consistant non seulement à prévoir, mais aussi à prévenir, les mobilités qu'impliquait la réorganisation litigieuse relevaient bien d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ; qu'en amendant le projet de loi initial pour substituer les termes « sans projet de réduction d'effectifs » aux termes « sans projet de licenciement », le législateur a opté pour une appréciation globale des conséquences sur l'emploi des mesures collectives d'organisation, les postes supprimés pouvant être compensés par des postes créés ; qu'ici, l'expert désigné par le comité central d'entreprise a admis dans son rapport que le projet ne s'accompagnait pas d'une réduction d'effectifs en raison de : - la création de 37 postes dans les différentes directions régionales de la direction centrale commerciale, - la reconduction de 8 postes non pourvus - la création de 10 postes de vérificateurs en régions au sein de la DCPE, - l'affectation de 31 salariés à des missions temporaires de 18 à 24 mois, - la création d'un vivier devant compter à terme 15 salariés, experts formés sur de nombreux métiers de l'entreprise ;
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que M. Q... qui, avec une bonne foi douteuse, fait grief à la société MMA Vie de n'avoir pas envisagé son reclassement à l'étranger, alors qu'il a refusé d'être reclassé à Lyon, Clichy et Toulouse, a perdu de vue le texte de l'article L.2242-23 qui ouvre aux parties signataires de l'accord de mobilité la faculté d'adapter le champ et les modalités de mise en oeuvre du reclassement interne prévu aux articles L.1233-4 et L. 1233-4-1 du code du travail ; que l'accord du 3 juillet 2013 a opté en faveur de trois offres de reclassement au sein de MMA, présentées simultanément aux salariés et concernant des emplois de même catégorie ou équivalents, situés si possible dans la zone d'emplois des salariés ; que le critère de proximité géographique ayant été privilégié, la société MMA Vie n'avait pas à rechercher des postes) l'étranger ; que les trois propositions de reclassement du 28 novembre 2013 conformes à l'accord épuisaient les obligations de la société qui n'avait pas à reprendre ses recherches après le refus de M. Q... ; que le licenciement individuel pour motif économique des salariés ayant refusé successivement une mesure individuelle de mobilité et trois offres de reclassement n'impliquait pour l'employeur aucun choix imposant la mise en oeuvre de critères d'ordre de licenciement ; qu'en conséquence, le licenciement de M. Q... procède d'une cause réelle et sérieuse ; que le jugement entrepris sera confirmé de ce chef » ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « que M. Q... s'est vu notifier son licenciement par la société MMA Vie le 31 janvier 2014 pour motif économique : « (...) Nous vous informons que nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour motif économique ; que cette mesure s'inscrit dans le cadre de l'accord GPEC du 3 juillet 2013 portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique dans le cadre d'une mesure collective d'organisation courante sans réduction d'effectif ; que le licenciement fait suite à votre refus de la proposition de mobilité, puis de reclassement interne, présenté dans le contexte de la réorganisation de la Direction Centrale Commerciale. En effet, le déploiement de notre politique de « développement rentable » nous amène à porter nos efforts vers des marchés porteurs que sont les marchés Pro et entreprise et assurances de personnes. Ce choix stratégique s'accompagne d'un renforcement de la professionnalisation des équipes commerciales, de nos expertises, y compris auprès des réseaux de distribution que sont les agents et le courtage. Par ailleurs, les évolutions règlementaires relatives à la prévoyance offrent des perspectives sur le marché des complémentaires santé en entreprise qui nous conduisent à nous réorganiser. Cette approche s'est traduite notamment par la création de 5 directions régionales, la mise en place d'actions en faveur d'un renforcement de la professionnalisation des acteurs de distribution, d'une organisation en multi-réseaux, qui nécessitent des évolutions de fonctions et/ou des repositionnements géographiques. La réorganisation a fait l'objet d'une procédure d'information-consultation des instances représentatives du personnel qui s'est achevée le 13 juin 2013 par le recueil de l'avis du Comité Central d'Entreprise de PUES MMA. Dans ce contexte, nous avons été amenés à vous proposer une mobilité du poste de DRAD vers une fonction de Délégué Développement Agents sur Clichy toujours au sein de la DCC. C'est ainsi qu'après une phase de concertation, puis un entretien au cours duquel les mesures d'accompagnement individualisé vous ont été présentées, vous avez reçu, par courrier du 27 septembre 2013, une proposition d'avenant) votre contrat de travail portant sur cette proposition de mobilité. Vous avez disposé d'un délai d'un mois à compter de la présentation de la proposition pour l'accepter ou la refuser, le défaut de réponse dans le délai imparti valant acceptation. Vous avez refusé cette proposition par courrier du 15 octobre 2013. Nous vous avons alors reçu en vue de vous présenter 3 offres de reclassement interne, ces propositions détaillées ont par ailleurs été portées à votre connaissance par courrier du 28 novembre 2013. Par courrier du 14 décembre 2013, vous avez expressément refusé ces propositions de reclassement. Aucun autre reclassement n'ayant pu être identifié, cette situation nous a conduit à engager la procédure objet de courrier (...) » ; que le licenciement de M. Q... est donc survenu consécutivement à l'application de l'accord de mobilité interne crée par la loi sécurisation de l'emploi du 14/06/2013 et signé au sein de la société MMA Vie le 3/07/2013 ; que l'article L.2242-21 du code du travail dispose en effet que l'employeur peut mettre en oeuvre par accord, en dehors de toute contrainte afférente au droit du licenciement économique, des modifications du contrat de travail inhérentes à des mobilités fonctionnelles et / ou géographiques résultant de mesures collectives d'organisations courantes sans réduction d'effectif ; que le cabinet Callentis, expert auprès du CCE mentionne dans son rapport que le projet de réorganisation de la Direction Centrale Commerciale relève d'une mesure d'organisation courante, après celles déjà survenues en son sein en 2010, 2011 et 2012 ; que le même expert mentionne que ce projet de réorganisation induit des modifications de postes et des postes non reconduits sans pour autant qu'une réduction d'effectifs ne soit envisagée au regard des créations de postes parallèlement projetées ;
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que le bilan social produit par la société MMA Vie, suite à la demande du conseil par note en délibéré, confirme qu'aucun autre licenciement pour motif économique n'est survenu en dehors de celui de M. Q... ; que par ailleurs le conseil relève que la société MMA Vie a fait application du dispositif de reclassement interne prévu dans l'accord, et ce, consécutivement au refus de mutation sur Clichy de M. Q..., en limitant la recherche d'opportunités de reclassement au sein de la zone géographique du salarié ; qu'à ce titre, la société MMA Vie lui a fait trois offres dont une, au sein de la Direction Commerciale et relevant de la même catégorie au sein du Développement des Agences en Gestion basé à Lyon ; que c'est donc en toute connaissance de cause que M. Q... a fait le choix de refuser toutes les propositions de mobilité qui lui ont été faites par la société MMA Vie, après qu'il ait eu, dès juin 2013 ; connaissance du montant d'une éventuelle indemnité de licenciement en cas de rupture de contrat résultant d'un refus d'acceptation de sa part des mesures de mobilité et de reclassement ; que c'est à juste titre que la société MMA Vie a procédé au licenciement économique de M. Q... sur le fondement de l'article L.2242-23 alinéa 4 disposant que seuls les salariés refusant l'application à leur contrat de travail des stipulations de l'accord à la mobilité interne sont licenciés ; qu'en conséquence, le conseil jugera que le licenciement pour motif économique de M. Q... est parfaitement fondé, et le déboutera de sa demande de dommages et intérêts ; 1°) ALORS QUE l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que les « mesures collectives d'organisation courantes » sont celles qui permettent, par la mobilité interne des salariés, d'opérer au sein d'une entreprise, des aménagements organisationnels de faible importance ; que ces mesures sont donc exclusives de tout projet de réorganisation d'ampleur ; que pour considérer que les mesures prévues par l'employeur dans l'accord de mobilité étaient des mesures d'organisation courante, la cour d'appel a énoncé que la loi ne fixait aucun seuil au-delà duquel une réorganisation cesse d'être une « mesure collective d'organisation courante », d'une part, et que les mesures mises en place par la société MMA Vie, en ce qu'elles consistaient à prévoir, mais aussi à prévenir les mobilités qu'impliquait la réorganisation litigieuse relavaient bien d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, d'autre part ; qu'en considérant ainsi que la notion de mesures d'organisation courante devait être déterminée au seul regard de leur nature et non pas de leur ampleur, la cour d'appel a violé les articles L. 2242-21 et L. 2242-23 du code du travail ; 2°) ALORS QUE tout jugement doit, à peine de nullité, être motivé ; que sont assimilables à un défaut de motifs, les motifs inintelligibles ; qu'en énonçant qu' « une gestion prévisionnelle consistant non seulement à prévoir, mais aussi à prévenir les mobilités qu'impliquait la réorganisation litigieuse relevait bien d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences » (arrêt, p.5), la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inintelligibles, a ainsi violé l'article 455 du code de procédure civile ; 3°) ALORS QUE, en tout état de cause, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en retenant que les mesures mises en place par la société MMA Vie, en ce qu'elles tendaient à prévoir mais aussi à prévenir les mobilités qu'impliquait la réorganisation litigieuse relevaient d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen qu'elle a relevé d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; 4°) ALORS QUE, subsidiairement, à supposer qu'il soit considéré que la cour d'appel ait entendu retenir que les mesures mises en place par la société MMA Vie relevaient d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences dès lors qu'elles avaient pour objet de permettre la mise en place d'un projet de réorganisation plus vaste, l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que de telles mesures ont pour objet, par la mobilité interne des salariés, de procéder à des aménagements organisationnels de faible importance ; que ces mesures sont exclusives de tout projet de réorganisation d'ampleur ; qu'en retenant toutefois que les mesures mises en place par la société MMA Vie en ce qu'elles avaient pour objet de prévoir, mais aussi de prévenir les effets de la mobilité engendrés par un projet de réorganisation, constituaient des mesures collectives d'organisation courantes, quand de telles mesures ne peuvent être mises au service d'un projet de réorganisation plus vaste, la cour d'appel a violé les articles L. 2242-21 et L. 2242-23 du code du travail ;
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5°) ALORS QUE, l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que de telles mesures ont pour objet, par la mobilité interne des salariés, de procéder à des aménagements organisationnels de faible importance ; que ces mesures sont exclusives de tout projet de réorganisation d'ampleur ; que la cour d'appel a relevé que la société MMA Vie avait mis en place des mesures correspondant à la création de 37 postes dans les différentes directions régionales de la direction centrale commerciale, la reconduction de 8 postes non pourvus, la création de 10 postes de vérifications en régions au sein de la DPCE, l'affectation de 31 salariés à des missions temporaires de 18 à 24 mois et la création d'un vivier devant compter à terme 15 salariés ; qu'en considérant que l'accord de mobilité prévoyant ces mesures étaient conformes à la loi, quand l'ampleur de ces mesures excluait qu'elles soient qualifiées de « mesures collectives d'organisation courantes », la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 2242-21 et L. 2242-23 du code du travail ; 6°) ALORS QUE, en tout état de cause, l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que de telles mesures ont pour objet, par la mobilité interne des salariés, de procéder à des aménagements organisationnels de faible importance ; que ces mesures sont exclusives de tout projet de réorganisation d'ampleur ; qu'en se bornant à énoncer que les mesures mises en place par la société MMA Vie relevaient d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences en ce qu'elles n'emportaient aucune réduction d'effectif et étaient destinées à prévoir, mais aussi à prévenir les mobilités qu'impliquaient la réorganisation litigieuse, et qu'un cabinet d'experts mentionnait dans son rapport que le projet de réorganisation de la direction centrale commerciale relevait d'une mesure d'organisation courante, sans se déterminer au regard de l'ensemble des mesures visées par l'accord de mobilité pour trancher la question de savoir si l'ampleur des mesures de réorganisation mises en place par la société n'excédait pas le cadre de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard les articles L. 2242-21 et L. 2242-23 du code du travail ; 7°) ALORS QUE l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que de telles mesures ont pour objet, par la mobilité interne des salariés, de procéder à des aménagements organisationnels de faible importance ; que ces mesures sont exclusives de tout projet de réorganisation d'ampleur ; qu'en énonçant qu'un cabinet d'experts mentionnait dans son rapport que le projet de réorganisation de la direction centrale commerciale relevait d'une mesure d'organisation courante, la cour d'appel a statué par des motifs insuffisants à caractériser que l'ensemble des mesures envisagées dans l'accord de mobilité devaient être qualifiées des mesures d'organisation courante, et ainsi, privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2242-21 et L. 2242-23 du code du travail ; 8°) ALORS QUE l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que de telles mesures ont pour objet, par la mobilité interne des salariés, de procéder à des aménagements organisationnels de faible importance ; que ces mesures sont exclusives de tout projet de réorganisation d'ampleur ; qu'en retenant que les mesures mises en place par la société MMA Vie relevaient d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si la durée de mise en place de ces mesures par la société MMA Vie n'était pas de nature à exclure qu'elles constituent des mesures collectives d'organisation courantes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2242-21 et L. 2242-23 du code du travail. DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) M. Q... fait grief à l'arrêt attaqué : DE L'AVOIR débouté de sa demande tendant à voir dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et, en conséquence, de sa demande en condamnation de la société MMA Vie au paiement de la somme de 310 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; AUX MOTIFS QUE « selon les articles L. 2242-21 et suivants du code du travail, dans leur rédaction résultant de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ;
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que l'accord issu de la négociation, qui constitue un volet de l'accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences dans les entreprises ou groupes d'entreprises soumis à une telle obligation, droit contenir notamment les mesures prescrites par l'article L.2242-22 ; que les clauses des contrats de travail contraires à l'accord sont suspendues ; que le licenciement des salariés qui refusent l'application à leur contrat de travail des stipulations de l'accord relatives à la mobilité interne repose sur un motif économique ; qu'il est prononcé selon les modalités d'un licenciement individuel pour motif économique et ouvre droit aux mesures d'accompagnement et de reclassement que doit prévoir l'accord, qui adapte le champ des modalités de mise en oeuvre du reclassement interne prévu aux articles L. 1233-4 et L. 1233-4-1 ; qu'en cas de litige portant sur la rupture du contrat de travail, l'office du juge consiste seulement à vérifier si l'accord collectif de mobilité interne est conforme aux dispositions légales et si l'employeur a respecté les obligations que l'accord mettait à sa charge avant de notifier un licenciement pour motif économique ; qu'en l'espèce, M. Q... conteste implicitement la conformité à la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 de l'article 7.1.9 de l'accord du 3 juillet 2013 relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, consacré à la mobilité interne résultant de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; qu'en effet, selon lui, l'accord de mobilité interne, conclu après l'achèvement d'une procédure d'information-consultation des instances représentatives du personnel portant sur une réorganisation de grande ampleur, ne s'inscrivait pas dans une démarche de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ; qu'il ajoute que la réorganisation mise en oeuvre était exclusive de toute mesure collective d'organisation courante ; qu'il soutient encore que le projet de réorganisation devait entraîner une réduction d'effectifs et, partant, des suppressions d'emplois ; qu'aucune conséquence ne peut cependant être tirée de l'antériorité de la procédure d'information-consultation du comité central d'entreprise par rapport à la conclusion de l'accord de mobilité ; qu'en effet, l'article 13 de la loi n° 2013-504 ayant eu pour objet de réduire le champ d'application des règles du licenciement collectif pour motif économique en imposant aux salariés, par accord collectif, une mobilité tempérée propice au maintien de l'emploi, il était loisible à la société MMA Vie de ne pas poursuivre dans la démarche qu'elle avait engagée au début du printemps 2013, alors que les nouvelles dispositions légales n'étaient pas encore applicables ; que la loi ne fixe aucun seuil au-delà duquel une réorganisation cesse d'être une mesure collective d'organisation courante : qu'une gestion prévisionnelle consistant non seulement à prévoir, mais aussi à prévenir, les mobilités qu'impliquait la réorganisation litigieuse relevaient bien d'une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ; qu'en amendant le projet de loi initial pour substituer les termes « sans projet de réduction d'effectifs » aux termes « sans projet de licenciement », le législateur a opté pour une appréciation globale des conséquences sur l'emploi des mesures collectives d'organisation, les postes supprimés pouvant être compensés par des postes créés ; qu'ici, l'expert désigné par le comité central d'entreprise a admis dans son rapport que le projet ne s'accompagnait pas d'une réduction d'effectifs en raison de : - la création de 37 postes dans les différentes directions régionales de la direction centrale commerciale, - la reconduction de 8 postes non pourvus - la création de 10 postes de vérificateurs en régions au sein de la DCPE, - l'affectation de 31 salariés à des missions temporaires de 18 à 24 mois, - la création d'un vivier devant compter à terme 15 salariés, experts formés sur de nombreux métiers de l'entreprise ; que M. Q... qui, avec une bonne foi douteuse, fait grief à la société MMA Vie de n'avoir pas envisagé son reclassement à l'étranger, alors qu'il a refusé d'être reclassé à Lyon, Clichy et Toulouse, a perdu de vue le texte de l'article L.2242-23 qui ouvre aux parties signataires de l'accord de mobilité la faculté d'adapter le champ et les modalités de mise en oeuvre du reclassement interne prévu aux articles L.1233-4 et L. 1233-4-1 du code du travail ; que l'accord du 3 juillet 2013 a opté en faveur de trois offres de reclassement au sein de MMA, présentées simultanément aux salariés et concernant des emplois de même catégorie ou équivalents, situés si possible dans la zone d'emplois des salariés ; que le critère de proximité géographique ayant été privilégié, la société MMA Vie n'avait pas à rechercher des postes) l'étranger ; que les trois propositions de reclassement du 28 novembre 2013 conformes à l'accord épuisaient les obligations de la société qui n'avait pas à reprendre ses recherches après le refus de M. Q... ; que le licenciement individuel pour motif économique des salariés ayant refusé successivement une mesure individuelle de mobilité et trois offres de reclassement n'impliquait pour l'employeur aucun choix imposant la mise en oeuvre de critères d'ordre de licenciement ; qu'en conséquence, le licenciement de M. Q... procède d'une cause réelle et sérieuse ; que le jugement entrepris sera confirmé de ce chef » ;
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ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « que M. Q... s'est vu notifier son licenciement par la société MMA Vie le 31 janvier 2014 pour motif économique : « (...) Nous vous informons que nous sommes contraints de procéder à votre licenciement pour motif économique ; que cette mesure s'inscrit dans le cadre de l'accord GPEC du 3 juillet 2013 portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique dans le cadre d'une mesure collective d'organisation courante sans réduction d'effectif ; que le licenciement fait suite à votre refus de la proposition de mobilité, puis de reclassement interne, présenté dans le contexte de la réorganisation de la Direction Centrale Commerciale. En effet, le déploiement de notre politique de « développement rentable » nous amène à porter nos efforts vers des marchés porteurs que sont les marchés Pro et entreprise et assurances de personnes. Ce choix stratégique s'accompagne d'un renforcement de la professionnalisation des équipes commerciales, de nos expertises, y compris auprès des réseaux de distribution que sont les agents et le courtage. Par ailleurs, les évolutions règlementaires relatives à la prévoyance offrent des perspectives sur le marché des complémentaires santé en entreprise qui nous conduisent à nous réorganiser. Cette approche s'est traduite notamment par la création de 5 directions régionales, la mise en place d'actions en faveur d'un renforcement de la professionnalisation des acteurs de distribution, d'une organisation en multi-réseaux, qui nécessitent des évolutions de fonctions et/ou des repositionnements géographiques. La réorganisation a fait l'objet d'une procédure d'information-consultation des instances représentatives du personnel qui s'est achevée le 13 juin 2013 par le recueil de l'avis du Comité Central d'Entreprise de PUES MMA. Dans ce contexte, nous avons été amenés à vous proposer une mobilité du poste de DRAD vers une fonction de Délégué Développement Agents sur Clichy toujours au sein de la DCC. C'est ainsi qu'après une phase de concertation, puis un entretien au cours duquel les mesures d'accompagnement individualisé vous ont été présentées, vous avez reçu, par courrier du 27 septembre 2013, une proposition d'avenant) votre contrat de travail portant sur cette proposition de mobilité. Vous avez disposé d'un délai d'un mois à compter de la présentation de la proposition pour l'accepter ou la refuser, le défaut de réponse dans le délai imparti valant acceptation. Vous avez refusé cette proposition par courrier du 15 octobre 2013. Nous vous avons alors reçu en vue de vous présenter 3 offres de reclassement interne, ces propositions détaillées ont par ailleurs été portées à votre connaissance par courrier du 28 novembre 2013. Par courrier du 14 décembre 2013, vous avez expressément refusé ces propositions de reclassement. Aucun autre reclassement n'ayant pu être identifié, cette situation nous a conduit à engager la procédure objet de courrier (...) » ; que le licenciement de M. Q... est donc survenu consécutivement à l'application de l'accord de mobilité interne crée par la loi sécurisation de l'emploi du 14/06/2013 et signé au sein de la société MMA Vie le 3/07/2013 ; que l'article L.2242-21 du code du travail dispose en effet que l'employeur peut mettre en oeuvre par accord, en dehors de toute contrainte afférente au droit du licenciement économique, des modifications du contrat de travail inhérentes à des mobilités fonctionnelles et / ou géographiques résultant de mesures collectives d'organisations courantes sans réduction d'effectif ; que le cabinet Callentis, expert auprès du CCE mentionne dans son rapport que le projet de réorganisation de la Direction Centrale Commerciale relève d'une mesure d'organisation courante, après celles déjà survenues en son sein en 2010, 2011 et 2012 ; que le même expert mentionne que ce projet de réorganisation induit des modifications de postes et des postes non reconduits sans pour autant qu'une réduction d'effectifs ne soit envisagée au regard des créations de postes parallèlement projetées ; que le bilan social produit par la société MMA Vie, suite à la demande du conseil par note en délibéré, confirme qu'aucun autre licenciement pour motif économique n'est survenu en dehors de celui de M. Q... ; que par ailleurs le conseil relève que la société MMA Vie a fait application du dispositif de reclassement interne prévu dans l'accord, et ce, consécutivement au refus de mutation sur Clichy de M. Q..., en limitant la recherche d'opportunités de reclassement au sein de la zone géographique du salarié ; qu'à ce titre, la société MMA Vie lui a fait trois offres dont une, au sein de la Direction Commerciale et relevant de la même catégorie au sein du Développement des Agences en Gestion basé à Lyon ; que c'est donc en toute connaissance de cause que M. Q... a fait le choix de refuser toutes les propositions de mobilité qui lui ont été faites par la société MMA Vie, après qu'il ait eu, dès juin 2013 ; connaissance du montant d'une éventuelle indemnité de licenciement en cas de rupture de contrat résultant d'un refus d'acceptation de sa part des mesures de mobilité et de reclassement ; que c'est à juste titre que la société MMA Vie a procédé au licenciement économique de M. Q... sur le fondement de l'article L.2242-23 alinéa 4 disposant que seuls les salariés refusant l'application à leur contrat de travail des stipulations de l'accord à la mobilité interne sont licenciés ;
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qu'en conséquence, le conseil jugera que le licenciement pour motif économique de M. Q... est parfaitement fondé, et le déboutera de sa demande de dommages et intérêts ; 1°) ALORS QUE les mesures mises en place au titre de la mobilité interne des salariés doivent être proportionnées au but recherché par la société ; qu'en retenant que le licenciement individuel pour motif économique de M. Q... reposait sur une cause réelle et sérieuse en ce qu'il découlait de l'accord de mobilité sans s'assurer, fut-ce d'office, que les mesures mises en place par la société MMA Vie au titre de cet accord étaient proportionnées au but recherché par la société, la cour d'appel a violé les articles L.2242-21 et L. 2242-23 du code du travail ; 2°) ALORS QUE lorsqu'un salarié refuse l'application à son contrat de travail des stipulations de l'accord relatives à la mobilité interne, il bénéficie, préalablement à son licenciement individuel pour motif économique, des mesures de reclassement telles qu'aménagées par l'accord de mobilité interne ; qu'un tel aménagement ne peut conduire à exclure tout reclassement du salarié dans les filiales du groupe situées à l'étranger ; qu'en jugeant au contraire, que l'accord pouvait exclure toute proposition de reclassement dans les filiales du groupe situées à l'étranger, la cour d'appel a violé l'article L. 2242-23 du code du travail ; 3°) ALORS QUE, en tout état de cause, lorsqu'un salarié refuse l'application à son contrat de travail des stipulations de l'accord relatives à la mobilité interne, il bénéficie, préalablement à son licenciement individuel pour motif économique, des mesures de reclassement telles qu'aménagées par l'accord de mobilité interne ; qu'en se bornant à retenir que la société MMA Vie avait satisfait à son obligation de reclassement dès lors qu'elle a, conformément aux dispositions prévues par l'accord de mobilité interne à l'entreprise, proposé à M. Q..., trois offres de reclassement, sans s'assurer que ces offres, au nombre de trois, portant sur un secteur géographique limité privant le salarié de toute possibilité d'être reclassé dans les filiales du groupe situées à l'étranger, étaient conformes aux exigences légales, la cour d'appel a violé l'article L. 2242-23 du code du travail ; 4°) ALORS QUE lorsqu'un salarié refuse l'application à son contrat de travail des stipulations de l'accord relatives à la mobilité interne, il bénéficie, préalablement à son licenciement individuel pour motif économique, des mesures de reclassement telles qu'aménagées par l'accord de mobilité interne ; qu'en se bornant à retenir que la société MMA Vie a satisfait à son obligation de reclassement dès lors qu'elle a, conformément aux dispositions de l'accord de mobilité interne à l'entreprise, proposé à M. Q..., trois offres de reclassement, sans s'assurer que l'obligation de reclassement prévue par l'accord de mobilité interne, prévoyant exclusivement trois postes de reclassement étaient, au regard de la taille de l'entreprise, conforme aux exigences légales, la cour d'appel a violé l'article L. 2242-23 du code du travail. TROISIÈME MOYEN DE CASSATION (encore plus subsidiaire) M. Q... fait grief à l'arrêt attaqué : DE L'AVOIR débouté de sa demande tendant à voir dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et, en conséquence, de sa demande en condamnation de la société MMA Vie au paiement de la somme de 310 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; AUX MOTIFS QUE « selon les articles L.2242-21 et suivants du code du travail, dans leur rédaction résultant de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, l'employeur peut engager une négociation portant sur les conditions de la mobilité professionnelle ou géographique interne à l'entreprise dans le cadre de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; que l'accord issu de la négociation, qui constitue un volet de l'accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences dans les entreprises ou groupes d'entreprises soumis à une telle obligation, droit contenir notamment les mesures prescrites par l'article L.2242-22 ; que les clauses des contrats de travail contraires à l'accord sont suspendues ; que le licenciement des salariés qui refusent l'application à leur contrat de travail des stipulations de l'accord relatives à la mobilité interne repose sur un motif économique ; qu'il est prononcé selon les modalités d'un licenciement individuel pour motif économique et ouvre droit aux mesures d'accompagnement et de reclassement que doit prévoir l'accord, qui adapte le champ des modalités de mise en oeuvre du reclassement interne prévu aux articles L. 1233-4 et L. 1233-4-1 ; qu'en cas de litige portant sur la rupture du contrat de travail, l'office du juge consiste seulement à vérifier si l'accord collectif de mobilité interne est conforme aux dispositions légales et si l'employeur a respecté les obligations que l'accord mettait à sa charge avant de notifier un licenciement pour motif économique ; qu'en l'espèce, M. Q... conteste implicitement la conformité à la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 de l'article 7.1.9 de l'accord du 3 juillet 2013 relatif à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, consacré à la mobilité interne résultant de mesures collectives d'organisation courantes sans projet de réduction d'effectifs ; qu'en effet, selon lui,
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par M. Z... T..., domicilié [...], contre l'arrêt rendu le 10 avril 2018 par la cour d'appel de Besançon (1re chambre civile et commerciale), dans le litige l'opposant à la Caisse de crédit mutuel Belfort sud, dont le siège est [...], défenderesse à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 13 novembre 2019, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Vitse, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller, Mme Randouin, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Vitse, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. T..., de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la Caisse de crédit mutuel Belfort sud, l'avis de M. Lavigne, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 10 avril 2018), que M. T... s'est porté caution solidaire d'un prêt accordé par la Caisse de crédit mutuel Belfort sud (la banque) et a consenti une hypothèque en garantie de cet engagement ; que, le 28 juillet 2016, la banque lui a délivré un commandement de payer valant saisie immobilière, avant de l'assigner à l'audience d'orientation ; Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense : Vu l'article 606 du code de procédure civile ; Attendu qu'en rejetant la demande d'annulation du commandement de payer valant saisie immobilière, l'arrêt tranche une partie du principal ; Qu'il en résulte que le pourvoi est recevable ; Sur le premier moyen : Attendu que la caution fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale et de valider le commandement de payer valant saisie immobilière, alors, selon le moyen, qu'en application de l'article 2313 du code civil, la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et qui sont inhérentes à la dette, comme, par exemple, la prescription de la dette principale ; qu'en l'espèce, la dette principale était soumise à la prescription biennale de l'article L. 218-2 du code de la consommation s'agissant d'un prêt immobilier accordé à un consommateur ; qu'en énonçant néanmoins que « l'extinction de l'obligation principale par le jeu de la prescription biennale qui bénéficie aux seuls consommateur n'est pas inhérente à la dette mais constitue une exception purement personnelle au débiteur principal qui est un consommateur de sorte que, par application de l'article 2313 du code civil, la caution, qui n'a pas cette qualité à l'égard de la caisse faute pour celle-ci de lui avoir fourni un service quelconque, ne peut s'en prévaloir », la cour d'appel a violé l'article L. 218-2 du code de la consommation ensemble l'article 2313 du code civil ; Mais attendu que la cour d'appel a exactement retenu qu'en ce qu'elle constitue une exception purement personnelle au débiteur principal, procédant de sa qualité de consommateur auquel un professionnel a fourni un service, la prescription biennale prévue à l'article L. 218-2 du code de la consommation ne pouvait être opposée au créancier par la caution ; que le moyen n'est pas fondé ; Sur le second moyen, ci-après annexé : Attendu que la caution fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts, de mentionner le montant de la créance de la banque, de la condamner aux dépens d'appel et de renvoyer le dossier devant le juge de l'exécution aux fins de poursuite de la procédure sous la forme d'une vente amiable ; Attendu que ce moyen, rendu inopérant par le rejet du premier, ne peut être accueilli ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. T... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. T... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit que la créance de la CCM n'est pas prescrite, d'avoir, en conséquence, rejeté la demande en annulation du commandement de payer et d'avoir déclaré recevable l'action de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL BELFORT SUD ;
Cour d'appel de Besançon 01, Cour de cassation Première chambre civile, décision 18-16.147 du 11/12/2019, partie 1
AUX MOTIFS PROPRES Qu'il ressort du commandement de payer lui-même que la créance de la Caisse, laquelle a confirmé avoir contractuellement la maîtrise de la déchéance du terme, est devenue exigible le 10 janvier 2013, date à partir de laquelle court le délai de prescription, Monsieur T... ne justifiant par aucune pièce que la Caisse se serait prévalue de la déchéance du terme antérieurement à cette date ; que l'extinction de l'obligation principale par le jeu de la prescription biennale qui bénéficie aux seuls consommateur n'est pas inhérente à la dette mais constitue une exception purement personnelle au débiteur principal qui est un consommateur de sorte que, par application de l'article 2313 du Code civil, la caution, qui n'a pas cette qualité à l'égard de la Caisse faute pour celle-ci de lui avoir fourni un service quelconque, ne peut s'en prévaloir ; qu'en ce qui concerne ses rapports avec la Caisse, la prescription est donc régie par l'article 2224 du Code civil ; que les parties s'accordant pour reconnaître que le premier acte interruptif de prescription est le commandement de payer simple adressé à la caution le 25 août 2015, il s'ensuit que la créance servant de fondement aux poursuites engagées par la Caisse n'est pas prescrite ; ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DU PREMIER JUGE QUE l'article L. 137-2 du Code de la consommation dans sa rédaction applicable au présent litige dispose que « L'action des professionnels, pour les biens ou les services qu'ils fournissent aux consommateurs, se prescrit par deux ans » ; que l'article 2224 du Code civil prévoit que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; qu'en l'espèce, il résulte de l'acte notarié de prêt du 3 juin 2005 que Monsieur Z... T... et son épouse se sont portés caution solidaire et hypothécaire du prêt souscrit par leur fils Monsieur B... T... pour un montant de 102.000 euros ; que le bien hypothéqué est celui désigné par le commandement ; que, selon les documents produits par la CAISSE DE CREDIT MUTUEL BELFORT SUD et notamment les décomptes de créances produits, la créance principale serait exigible depuis le 10 janvier 2013 ; que Monsieur Z... T... soutient que la date de départ de la prescription biennale est celle du premier impayé non régularisé, soit le 1er décembre 2010, dans la mesure où Monsieur B... T... a bénéficié d'un plan de surendettement portant les échéances mensuelles dudit prêt à la somme de 300 euros ; que, toutefois, il n'est aucunement établie que les échéances du contrat de crédit n'étaient pas honorées, aucun courrier de mise en demeure n'est produit ; qu'il n'est pas davantage établi par Monsieur Z... T..., caution, que les échéances n'étaient pas honorées dans le cadre du deuxième plan ayant abouti à une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire suivant décision du septembre 2013 ; que, cependant, la créance du CCM a été déclarée dans le cadre de cette procédure pour un montant de 83.669,63 euros ; qu'il est manifeste que la déchéance du terme n'avait pas été prononcée à l'endroit du débiteur principal, Monsieur B... T..., avant l'ouverture de cette procédure ; or que c'est la déchéance du terme qui rend exigible la créance et fixe le point de départ du délai de prescription ; qu'en outre, l'applicabilité de la prescription biennale relève de la loi spéciale bénéficiant aux consommateurs ; or qu'en l'espèce, cette prescription biennale doit être écartée dans la mesure où la banque bénéficie en l'espèce de la garantie personnelle de la caution sans pour autant lui avoir fourni aucun service au sens de l'article L. 137-2 devenu L. 218-2 du Code de la consommation ; qu'aussi, il résulte des éléments ci-dessus que la créance de la banque n'était pas prescrite à l'endroit de la caution à la date du commandement de payer du 16 octobre 2015 et du commandement aux fins de saisie du 28 juillet 2016 ; qu'en conséquence, l'exception de nullité sera rejetée et le commandement de payer sera déclaré régulier ; ALORS Qu'en application de l'article 2313 du Code civil, la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et qui sont inhérentes à la dette, comme, par exemple, la prescription de la dette principale ; qu'en l'espèce, la dette principale était soumise à la prescription biennale de l'article L. 218-2 du Code de la consommation s'agissant d'un prêt immobilier accordé à un consommateur ; qu'en énonçant néanmoins que « l'extinction de l'obligation principale par le jeu de la prescription biennale qui bénéficie aux seuls consommateur n'est pas inhérente à la dette mais constitue une exception purement personnelle au débiteur principal qui est un consommateur de sorte que, par application de l'article 2313 du Code civil, la caution, qui n'a pas cette qualité à l'égard de la Caisse faute pour celle-ci de lui avoir fourni un service quelconque, ne peut s'en prévaloir », la Cour d'appel a violé l'article L. 218-2 du Code de la consommation ensemble l'article 2313 du Code civil. SECOND MOYEN DE CASSATION
Cour d'appel de Besançon 01, Cour de cassation Première chambre civile, décision 18-16.147 du 11/12/2019, partie 2
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté Monsieur Z... T... de sa demande de dommages et intérêts, d'avoir mentionné que le montant retenu pour la créance du CCM s'élève à la somme totale de 92.954,55 euros au titre du prêt immobilier MODULIMMO décomposée comme suit : 74.0001,34 € en capital, 12.531,97 € en intérêts et accessoires à la date d'exigibilité, 5.180,90 euros au titre de l'indemnité d'exigibilité (%) et 1.240,34 € au titre des cotisations d'assurance et d'avoir condamné Monsieur Z... T... aux dépens d'appel et renvoyé le dossier de la procédure devant le juge de l'exécution du Tribunal de grande instance de BELFORT aux fins de poursuite de la procédure d'exécution sous la forme d'une vente amiable ; AUX MOTIFS PROPRES QUE, pour le surplus Monsieur T... n'a élevé devant le juge de l'orientation aucune contestation quant au montant de la créance tel que déclaré par la Caisse et retenu par le juge ; or qu'il est de jurisprudence constante que, nonobstant les articles 561 et 564 du Code de procédure civile, aucune contestation, ni aucune demande incidente ne peut être formée après la tenue de l'audience d'orientation, à moins qu'elle ne porte sur des actes de procédure postérieurs à celle-ci, et que cette règle ne méconnaît pas les dispositions de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme (Civ. 2ème 17 nov. 2011, F-P+B, n° 10-26.784 et n° 10-25.439) ; qu'il s'ensuit que faute pour l'appelant d'avoir élevé une telle contestation devant le premier juge, celle qu'il formule pour la première fois à hauteur de cour est irrecevable ; qu'enfin, sur le prix minimum du bien en vente amiable, il n'est produit aucune pièces nouvelle qui rendrait pertinente la demande de Monsieur T... de voir celle-ci réduite en deçà de la somme de 90.000 € fixée à l'origine comme mise à prix en cas de vente aux enchères ; que, compte tenu de ce qui précède, le jugement entrepris mérite confirmation en toutes ses dispositions et la demande reconventionnelle de l'appelant en dommages-intérêts doit être rejetée ; ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DU PREMIER JUGE QUE, sur les vérifications de l'article R. 322-15 du Code des procédures civiles d'exécution, en vertu de l'article R. 322-15 du CPCE, « à l'audience d'orientation, le juge de l'exécution vérifie que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 sont réunies (...) » ; que ces vérifications doivent être faites d'office ; que l'article L. 311-2 du CPCE énonce que tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut procéder à une saisie immobilière (...) » ; que le créancier poursuivant dispose d'un titre exécutoire constitué par un acte notarié de prêt en date du 3 juin 2005 résultant d'une offre émise par la CAISSE DE CREDIT MUTUEL BELFORT SUD et acceptée par le débiteur le 3 juin 2005, ladite offre ainsi que le tableau d'amortissement étant intégrés à l'acte ; que le prêt accordé consistait en un prêt Immobilier MODULIMMO pour un montant de 102.000 euros remboursable en 180 mensualités à un taux effectif global de 5,859 % l'an garanti par le cautionnement solidaire et hypothécaire de Monsieur Z... T... et de son épouse ; qu'une créance est liquide lorsqu'elle est évaluée en argent ou lorsque le titre contient tous les éléments pour procéder à son évaluation ; qu'en l'espèce, le titre exécutoire contient ces éléments ; que la créance doit également être exigible c'est à dire que le créancier doit être en droit d'en réclamer le paiement ; que, d'une part le titre doit donc mentionner les conditions d'exigibilité et d'autre part, le créancier poursuivant doit démontrer qu'il a respecté ces condition ; qu'en l'espèce, le paragraphe 16 prévoit les modalités de l'exigibilité immédiate des sommes ; qu'à la suite de différents impayés, et suite aux procédures de surendettement puis de redressement judiciaire à l'initiative du débiteur principal, Monsieur Z... T... en qualité de caution été a mis en demeure de rembourser la somme de 88.730,94 euros par courrier en date du 7 mai 2015, puis un commandement de payer lui a été adressé le 25 août 2015 ; que la créance de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL BELFORT SUD est certaine, liquide et exigible ; que l'article 322-18 du code des procédures civiles d'exécution énonce que le jugement d'orientation mentionne le montant retenu pour la créance du poursuivant en principal, frais, intérêts et autres accessoires ; qu'au vu des pièces produites, il convient de mentionner que la créance de la CAISSE DE CREDIT MUTUEL BELFORT SUD s'élève : au titre du prêt immobilier MODULIMMO à la somme de 92.954,55 € décomposée comme suit - 74.001,34 € en capital, - 12.531,97 € en intérêts et accessoires à la date d'exigibilité, - 5.180,90 € au titre de l'indemnité d'exigibilité ( %), - 1.240,34 € au titre des cotisations d'assurance, Qu'au vu de ce qui précède, il convient de déclarer l'action du CAISSE DE CREDIT MUTUEL BELFORT SUD régulière ; Que, sur la demande tendant à la vente amiable, le code des procédures civiles d'exécution prévoit la possibilité pour le juge d'autoriser la vente amiable à la demande du débiteur, procédure qui a la préférence du législateur ;
Cour d'appel de Besançon 01, Cour de cassation Première chambre civile, décision 18-16.147 du 11/12/2019, partie 3
que, cependant, l'article R. 322-15 de ce code prévoit que lorsque le juge ordonne la vente amiable, il s'assure qu'elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur ; qu'en l'espèce, Monsieur Z... T... justifie d'une évaluation de son bien pour la somme de 80.000 euros ; qu'il n'est pas exclu que ces diligences permettent la conclusion d'une vente non judiciaire dans des conditions satisfaisantes ; que cette option, en tous cas, ne porte pas préjudice aux intérêts du créancier puisqu'à l'expiration d'un délai fixé, et à défaut de constater la vente amiable, la vente par adjudication sera ordonnée ; qu'il convient donc d'autoriser la vente amiable du bien saisi ; que, conformément aux dispositions de l'article R. 322-21 il convient donc de fixer le prix en deçà duquel l'immeuble ne pourra être vendu eu égard aux conditions économiques du marché ; que le créancier proposait quant à lui et dans le cadre de sa demande de vente par adjudication, une mise à prix de 90.000 euros ; qu'en conséquence, le prix en deçà duquel le bien ne pourra être vendu sera fixé à 90.000 euros ; ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen qui s'attaque au chef de l'arrêt ayant dit que la créance de la CCM n'était pas prescrite, entraînera, par voie de conséquence, en application de l'article 624 du Code de procédure civile, la censure de ce chef de l'arrêt.
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante : Vu le pourvoi formé par M. N... M..., domicilié [...] , contre l'arrêt rendu le 20 avril 2018 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Nouvelle clinique des dentellières, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [...] , ayant un établissement [...] , 2°/ à la société Groupe médical des dentellières, société d'exercice libérale à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , défenderesses à la cassation ; Les sociétés Nouvelle clinique des dentellières et Groupe médical des dentellières ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 5 novembre 2019, où étaient présents : Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Gilibert, conseiller rapporteur, M. Ricour, conseiller, Mme Jouanneau, greffier de chambre ; Vu les observations écrites de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de M. M..., de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat des sociétés Nouvelle clinique des dentellières et Groupe médical des dentellières ; Sur le rapport de Mme Gilibert, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Vu l'article 1014 du code de procédure civile ; Attendu que les moyens de cassation du pourvoi principal ainsi que celui du pourvoi incident annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ; REJETTE les pourvois tant principal qu' incident ; Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre décembre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES à la présente décision Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour M. M... PREMIER MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement déféré sauf en ce qu'il a ordonné la remise des documents de fin de contrat rectifiés et condamné les sociétés Groupe Médical des Dentellières et Nouvelle Clinique des Dentellières aux dépens et à payer à M. M... la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, d'AVOIR statuant à nouveau et y ajoutant, dit que le licenciement du salarié était fondé sur une cause réelle et sérieuse, d'AVOIR débouté le salarié de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d'AVOIR dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en cause d'appel ; AUX MOTIFS QUE «1) Sur le licenciement : Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié. Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables ; Par ailleurs la lettre de licenciement fixe les limites du litige. En l'espèce M. M... a été licencié pour insuffisance professionnelle par lettres du 13 janvier 2012 comportant de nombreuses similitudes pour plusieurs séries de motifs; Il lui est notamment reproché un certain nombre de désordres affectant le système informatique de la SELARL Groupe médical des dentellières et de la SARL Nouvelle clinique des dentellières, et en particulier sa sécurité, relevés par la société SPIE lors d'un état des lieux réalisé en décembre 2011 dans le cadre d'un projet d'externalisation de la gestion et de l'administration de son système d'information. Le rapport d'audit décrit les défaillances suivantes : - Côté infrastructure réseau : - liaisons Internet et VPN non doublées, - absence de communication entre les sites de Vauban et des Dentellières, - absence de filtrage des adresses IP souces accédant aux serveurs: à corriger rapidement pour des raisons de sécurité évidentes, - Côté infrastructure serveurs : - sauvegarde simplement partielle, surtout au niveau du serveur Srvchimio,
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- fonctionnement de vSphere sur un seul serveur : dangereux car, en cas d'arrêt des logiciels de production, impossible de remonter de sauvegarde, - accès des serveurs aux baies de stockage non redondé, ce qui est problématique en cas de panne matérielle, - absence d'antivirus sur certains serveurs, ce qui constitue une faille importante au niveau de la sécurité des informations, - absence de communication du serveur antivirus avec les postes et serveurs du site de Vauban, - absence de réplique de l'active Directory entre les deux sites, d'où la nécessité d'être très prudent le jour où les deux sites seront correctement interconnectés ; Ce rapport souligne également la persistance de plusieurs difficultés relevées lors d'un précédent audit de mai 2010, et notamment du libre accès au local informatique, de l'affichage des mots de passe à l'entrée du local, de l'absence de protection du serveur web, de l'existence d'un même login pour deux personnes et de l'absence de filtrage sur les ports et périphériques ; Pour contester les conclusions de cet audit, M. M... se borne à critiquer les compétences et l'impartialité de la société SPIE et à critiquer certaines observations formulées dans le rapport ; Toutefois, sur le premier point, le simple courriel du successeur de M. M... en date du 29 juin 2012 décrivant certains points de blocage avec l'entreprise SPIE est insuffisant à démontrer le manque de légitimité de cette société, spécialiste en informatique et implantée dans 34 pays. Il sera également relevé que par ailleurs que la société SPIE a réalisé son audit, non pour juger de la qualité du travail accompli par M. M... au sein de la SELARL Groupe médical des dentellières et de la SARL Nouvelle clinique des dentellières, mais dans un but d'externalisation du système d'information. Son objectivité ne peut donc être remise en question, alors même que sa rémunération n'avait aucun lien avec les constatations qu'elle pouvait opérer. Sur le second point, les observations émises par M. M... sur les désordres relevés ne concernent qu'une faible partie d'entre eux et ne sont étayés pas aucune pièce déterminante. Il ressort de l'ensemble de ces éléments que les défaillances du système informatique relevées lors de l'audit sont matériellement établies. Compte tenu de leur nombre, de l'existence d'un précédent audit, dont les recommandations- que M. M... ne pouvait ignorer, n'ont pas été suivies, et des fonctions de responsable informatique et chef de projet exercées par l'intéressé- leur existence même caractérise l'insuffisance professionnelle qui lui est reprochée. Il est également fait grief à M. M... une absence de réaction aux demandes des collaborateurs concernant le fonctionnement du matériel informatique. Il ressort des courriels de M. X..., responsable des services de radiologie du parc et de Vauban, que M. M... a dû être relancé à plusieurs reprises concernant la panne affectant la pointeuse du site du Parc et que le dysfonctionnement a duré plus de trois semaines. La négligence du salarié, qui argue d'une panne électrique sans en justifier et ne prétend pas que le traitement de cette difficulté n'aurait pas ressorti à ses attributions, de ce chef est donc établie. Il résulte de ce qui précède que, si les autres reproches contenus dans le courrier de rupture soit sont insuffisamment établis, soit ne concernent pas les attributions du salarié, le licenciement de M. M... est fondé sur une cause réelle et sérieuse, de sorte qu'il sera débouté de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif » ; 1°) ALORS QU'il appartient aux juges de rechercher, au-delà des énonciations de la lettre de licenciement, la véritable cause du licenciement ; qu'en l'espèce, le salarié faisait valoir et offrait de prouver (productions n°7 à 13) qu'il avait été embauché dans le cadre du déménagement du centre de cancérologie sur le site de Vauban, qu'une fois le déménagement opéré en juillet 2011, sa fonction n'était plus nécessaire puisque l'employeur avait souhaité externaliser une partie de l'informatique, ce dont il avait informé les salariés en décembre 2011, qu'ainsi l'employeur avait, le 31 octobre précédent, proposé oralement à M. M... une rupture de son contrat de travail, et lui avait verbalement demandé le 17 novembre 2011, de bien vouloir quitter l'entreprise dans le cadre d'une rupture conventionnelle, et que suite au courrier du conseil du salarié du 12 décembre 2011 l'informant des conditions de la rupture de son contrat de travail, il avait engagé une procédure de licenciement pour insuffisance professionnelle pour début janvier 2012 ; que le salarié soutenait, encore, avec offres de preuve et sans être contesté, qu'il n'avait en réalité jamais été intégré au sein de l'entreprise puisqu'il ne disposait pas d'espace de travail privé, ni de carte de visite à son nom, que la direction ne répondait pas à ses courriers et que le responsable technique, M. V... avait conservé son titre de « responsable technique et informatique » jusqu'en novembre 2011 (productions n°8 et 9) ; qu'il en déduisait que son licenciement avait été prémédité et instrumentalisé (conclusions d'appel de l'exposant p. 3, 8 et 21) ;
Cour d'appel de Douai A1, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-21.251 du 04/12/2019, partie 2
qu'en jugeant le licenciement de M. M... fondé sur une insuffisance professionnelle, sans concrètement rechercher si la cause véritable du licenciement du salarié n'était pas distincte de celle énoncée dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, en violation des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail, alors en vigueur ; 2°) ALORS QUE l'employeur ne peut reprocher au salarié, à l'appui d'un licenciement pour insuffisance professionnelle, que des carences dans l'exécution de tâches relevant de ses attributions ; qu'en l'espèce, le salarié faisait valoir, avec offres de preuve et sans être contesté, qu'il avait été embauché dans le cadre d'une création de poste en qualité de responsable informatique projet, sans qu'aucune fiche de poste ne lui ait été transmise, et sans qu'aucun organigramme faisant apparaître ses attributions n'ait été établi (conclusions d'appel de l'exposant p.8, productions n°8 et 9) de sorte que ses missions n'étaient pas clairement définies et qu'il avait, en réalité, été embauché seulement pour effectuer le déménagement du centre de cancérologie ; qu'étaient versés aux débats ses contrats de travail qui ne comprenaient aucune définition des missions qui lui étaient confiées (productions n°14 à 16) ; qu'encore, en sollicitant la confirmation du jugement et en application de l'article 954 du code de procédure civile, le salarié était réputé s'en approprier les motifs selon lesquels « il ressort des débats que M. N... M... a été embauché sur la création du poste de Responsable informatique projet, que la mission essentielle confiée au salarié à l'embauche était d'assurer le transfert d'une partie des services basés à la Clinique des Dentellières vers la Clinique Vauban ; qu'il n'a pas été établi de fiche de poste relative à la fonction de responsable informatique projet ; que les pièces versés aux débats laissent apparaître une mauvaise coordination et délimitation des champs d'intervention entre le responsable du service technique et M. N... M... ; que certaines des tâches relevaient plus de la compétence d'un technicien en informatique que de celle d'un responsable de projet informatique ; que M. N... M... n'a pas bénéficié d'entretien annuel propre à définir des objectifs professionnels » (jugement p.4 et 5) ; qu'en reprochant au salarié les dysfonctionnements relevés par le rapport d'audit de la société SPIE ainsi qu'un manque de réaction aux demandes des collaborateurs concernant le fonctionnement du matériel informatique, sans à aucun moment s'assurer que les attributions du salarié avaient été clairement définies et à tout le moins sans préciser quelles attributions incombaient au salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail, alors en vigueur, ensemble l'article 954 du code de procédure civile ; 3°) ALORS QUE les juges ne peuvent pas dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel reprises oralement à l'audience (arrêt p.3), le salarié faisait valoir qu'il avait été embauché dans le cadre de la création du poste de responsable informatique projet sans qu'une fiche de poste n'ait été établie, que ses attributions n'avaient pas été clairement définies, et qu'il avait principalement pour mission d'installer le logiciel de cancérologie (MOSAIQ) ainsi que l'ensemble de ses composants sur le site des Dentellières puis sur celui de l'avenue Vauban en vue du déménagement (conclusions d'appel de l'exposante p.2 et p.8), et était réputé, en demandant la confirmation du jugement sur le licenciement et conformément à l'article 954 du code de procédure civile, s'en approprier les motifs selon lesquels « il ressort des débats que M. N... M... a été embauché sur la création du poste de responsable informatique projet, que la mission essentielle confiée au salarié à l'embauche était d'assurer le transfert d'une partie des services basés à la Clinique des Dentellières vers la Clinique Vauban ; qu'il n'a pas été établi de fiche de poste relative à la fonction de responsable informatique projet ; que les pièces versées aux débats laissent apparaître une mauvaise coordination et délimitation des champs d'intervention entre le responsable du service technique et M. N... M... ; que certaines des tâches confiées à M. N... M... relevaient plus de la compétence d'un technicien en informatique que de celle d'un responsable de projet informatique ; que M. N... M... n'a pas bénéficié d'entretien annuel propre à définir des objectifs professionnels » (jugement p.4 et 5), de sorte qu'était contesté le point de savoir si le traitement des pannes de la pointeuse relevait de ses attributions ; qu'en affirmant que le salarié ne prétendait pas que le traitement de la difficulté concernant la pointeuse ne relevait pas de ses attributions, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de ce dernier et partant a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile, ensemble l'article 954 du code de procédure civile ; 4°) ALORS QUE le silence à l'affirmation d'un fait ne vaut pas à lui seul reconnaissance de ce fait ;
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qu'en l'espèce, en retenant que le salarié ne contestait pas que le traitement de la panne affectant la pointeuse du site du Parc qui lui était reproché par l'employeur relevait de ses attributions, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 ; 5°) ALORS QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, le salarié avait versé aux débats des courriers du 10 août 2012 qu'il avait adressés à ses employeurs (productions n°8 et 9) aux termes desquels il indiquait que « M. Christophe X..., responsable des services de radiologie du Parc et de Vauban m'appela le 21 septembre 2011 pour me demander de régler l'heure affichée par la pointeuse, car elle retardait de 2 minutes et cela dérangeait les salariés. Je lui répondis que l'opération ne pouvait pas être réalisée à distance, et qu'un déplacement sur site était nécessaire. Estimant pouvoir régler le problème lui-même, M. X... prit l'initiative de régler l'heure sur la pointeuse. Le lendemain, il m'adressa un e-mail pour m'informer que la pointeuse ne fonctionnait plus du tout. En le questionnant sur les circonstances de la panne, il m'apprit qu'il avait tenté d'appliquer une procédure qu'il avait trouvée pour régler l'heure. Il me fit parvenir, à ma demande, un e-mail en date du 23 septembre 2011 décrivant la procédure en question. Mon déplacement sur site le jour même me révéla que la configuration de la pointeuse avait été entièrement effacée ! Une fois de plus, vous exposez des faits rapportés. M. X... ne vous a pas fait part de sa tentative. Je ne vous l'apprends pas, vous étiez en procès avec le fournisseur, la société Easydentic, laquelle a installé les pointeuses. Ce qui me privait de tout support technique. J'ai su reprogrammer la pointeuse seul, sans aucun soutien. Le 29 septembre ce matériel fonctionnait puisque dans un e-mail, M. X... me fit part de problèmes d'utilisation du logiciel Astrow connecté à la pointeuse. Le 30 septembre 2011, une panne réseau mettait encore une fois la pointeuse hors connexion, panne confirmée par mon e-mail envoyé à la même date. La panne a été résolue la semaine suivante grâce au changement de composant réseau. Vous ne m'avez jamais interrogé, écrit ou interpellé sur le sujet alors qu'en date du 22 septembre 2011, suite à un changement d'organisation du service Call Center, vous n'avez pas hésité à m'écrire une note d'information pour diagnostiquer un dysfonctionnement du standard téléphonique (qui fonctionnait fort bien) » ; qu'en retenant que le salarié arguait d'un panne électrique sans en justifier, avait fait preuve de négligences concernant la panne affectant la pointeuse du site du Parc, sans à aucun moment, ni viser ni analyser serait-ce sommairement les courriers susvisés, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ; 6°) ALORS QUE les juges ne peuvent pas dénaturer les écrits soumis à leur examen ; qu'en l'espèce, dans son courriel du 29 juin 2012, M. R... , successeur de M. M... avait notamment indiqué que « suite à la réunion du 20 juin 2012, veuillez trouver ci-dessous les différents points de blocage concernant la société SPIE : 1/ Pour pouvoir avancer dans un projet j'ai besoin d'avoir un interlocuteur possédant des compétences informatiques à jour, prêt à s'investir dans mon projet, sachant anticiper, proactif et comprenant mes besoins. il est indispensable de travailler avec des personnes connues et reconnues dont nous connaissons les compétences et avec nous le faisons en toute confiance » (production n°6) ; qu'il résultait de ce courrier que le successeur de M. M... remettait en cause les compétences de la société SPIE ; qu'en affirmant que le courriel du successeur du salarié du 29 juin 2012 décrivait certains points de blocage avec l'entreprise SPIE, la cour d'appel a dénaturé ce document en violation du principe susvisé ; 7°) ALORS subsidiairement QUE l'insuffisance professionnelle du salarié suppose que les carences qui lui sont reprochées lui soient imputables ; qu'en l'espèce, en demandant la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a dit son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, le salarié était réputé, conformément à l'article 954 du code de procédure civile, s'en approprier les motifs selon lesquels « il est fait grief à M. N... M... de ne pas être suffisamment disponible sur l'ensemble des trois sites, de ne pas intervenir sur un site alors qu'il est déjà en intervention sur un autre ; que les pièces versées aux débats laissent apparaître une mauvaise coordination et délimitation des champs d'intervention entre le responsable du service technique et M. N... M... ; que la technicienne informaticienne rattachée au service technique et informatique a quitté la société peu après l'arrivée de M. N... M... ; que certaines des tâches confiées à M. N... M... relevaient plus de la compétence d'un technicien en informatique que de celle d'un responsable de projet informatique ;
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que M. N... M... n'a pas bénéficié d'entretien annuel propre à définir des objectifs professionnels ; le conseil constate que M. N... M... n'a pas eu les moyens suffisants pour effectuer sa mission » ; que le salarié faisait, en outre, valoir, sans être contesté, qu'il ne disposait d'aucun moyen de communication (téléphone ou ordinateur portable) avant juin 2011 et qu'après le déménagement du centre de cancérologie, il disposait au sein du site des Dentellières d'un ordinateur fixe avec messagerie, au sein de celui de Vauban d'un ordinateur de supervision sans messagerie et d'aucun moyen de communication au sein de la clinique du Parc, ce dont il avait alerté l'employeur en vain (V. conclusions d'appel de l'exposant p. 15) ; qu'il soutenait, encore, avec offre de preuve, qu'il avait dû administrer seul 3 sites et, par conséquent, avait été surchargé de travail (conclusions d'appel de l'exposant p.3 § 1 et p.21 § 9 ; production n°16) ; qu'en retenant que le licenciement pour insuffisance professionnelle du salarié était fondé, sans à aucun moment rechercher, comme elle y était pourtant expressément invitée, si les carences reprochées au salarié n'étaient pas la conséquence de l'insuffisance des moyens nécessaires à la réalisation de ses missions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail, alors en vigueur, ensemble l'article 954 du code de procédure civile ; 8°) ALORS en tout état de cause QUE la cause réelle et sérieuse s'apprécie in concreto ; qu'en l'espèce, le salarié faisait valoir, sans être contesté, qu'il n'avait fait l'objet d'aucun entretien d'évaluation et qu'aucune observation ne lui avait été faite durant la réalisation des travaux de déménagement du centre de cancérologie (conclusions d'appel de l'exposant p.2 et 8), de sorte qu'il n'avait jamais été alerté sur ses éventuelles insuffisances ; qu'il était réputé, en sollicitant la confirmation du jugement sur le licenciement et en application de l'article 954 du code de procédure civile, s'approprier les motifs des premiers juges selon lesquels « certains griefs remontent au mois de novembre 2010 alors que le salarié a été embauché le 1er septembre 2010 et que le contrat de travail prévoyait une période d'essai de trois mois renouvelable ; que le conseil constate que la SARL Nouvelle Clinique des Dentellières et la SEL Groupe Médical des Dentellières n'ont pas tiré les conséquences relatives à leur doute sur les aptitudes professionnelles de M. N... M... à exercer sa fonction de responsable informatique ; que M. N... M... n'a pas bénéficié d'entretien annuel » (jugement p.4 et 5) ; qu'en ne s'expliquant pas sur l'ensemble de ces circonstances pourtant de nature à avoir une incidence sur le bien-fondé de l'insuffisance professionnelle reprochée au salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail, alors en vigueur, ensemble l'article 954 du code de procédure civile. SECOND MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement déféré sauf en ce qu'il a ordonné la remise des documents de fin de contrat rectifiés et condamné les sociétés Groupe Médical des Dentellières et Nouvelle Clinique des Dentellières aux dépens et à payer à M. M... la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, d'AVOIR statuant à nouveau, limité la somme due par les sociétés Groupe Médical des Dentellières et Nouvelle Clinique des Dentellières au salarié au titre du rappel de salaires, et d'AVOIR dit n'y avoir lieu à faire application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en cause d'appel ; AUX MOTIFS QUE « - S'agissant de la date du terme de la relation contractuelle : L'article L. 1234-3 du code du travail dispose que : 'La date de présentation de la lettre recommandée notifiant le licenciement au salarié fixe le point de départ du préavis.'. La date de présentation doit s'entendre de la première présentation au destinataire, le non-retrait de la lettre n'affectant pas l'effet du licenciement. En l'espèce les lettres de licenciement ont été présentées à M. M... le samedi 14 janvier 2012. En application de l'article R. 1231-1 du code du travail, le début du préavis est repoussé au premier jour ouvrable suivant, soit le lundi 16 janvier 2011. Le délai du préavis s'est donc terminé le 15 avril 2011. La demande tendant au paiement d'un rappel de salaire pour la période du 16 au 19 avril 2011 est donc rejetée » ; ALORS QUE lorsque le délai de préavis expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt que le délai de préavis expirait le 15 avril 2011 (lire 2012), un dimanche, de sorte qu'il devait être prorogé jusqu'au lundi 16 avril 2012 ;
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qu'en rejetant la demande de rappel de salaire pour la période du 16 au 19 avril 2012, quand le délai de préavis expirait le 16 avril 2012, de sorte qu'était dû un rappel de salaire pour ce jour, la cour d'appel a violé l'article R. 1231-1 du code du travail. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour les sociétés Nouvelle clinique des dentellières et Groupe médical des dentellières Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné les société Nouvelle Clinique des Dentellières et Groupe Médical des Dentellières, à lui verser 1.599,05 € à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires ; AUX MOTIFS QU' « il résulte de l'article L. 3171-4 du Code du travail qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; que Monsieur M... soutient que 48 heures 30 de travail correspondant à des jours déterminés ne lui ont pas été rémunérés durant la relation contractuelle et produit le témoignage de M. F... C... qui atteste que le salarié a travaillé tard le 30 juin 2011 et a également été présent durant la matinée du samedi 2 juillet 2011 et durant la journée du samedi 16 juillet 2011 ; que ce document et le décompte précis des heures qu'il prétend avoir effectuées contenu dans ses conclusions, contrairement à ce que soutient l'employeur, sont suffisants pour étayer sa demande ; que la prétention du salarié étant étayée, il appartient donc à l'employeur de se conformer à son obligation de fournir les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'à défaut pour les sociétés Groupe médical des Dentellières et Nouvelle Clinique des Dentellières de rapporter de telles preuves, il sera fait droit aux demandes du salarié correspondant à 48 h 30 soit 1.599,05 € outre les congés payés y afférents » ; 1°) ALORS QUE, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient dans un premier temps au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, Monsieur M... alléguait avoir effectué des heures supplémentaires les 13 janvier 2012, 25 novembre 2011, 20 septembre 2010, 31 janvier 2011, 11 avril 2011, 30 juin 2011, 1er juillet 2011, 2 juillet 2011, 3 juillet 2011 et 16 juillet 2011, pour un total de 48h30 ; qu'en déclarant recevable la demande de rappel de salaire, au motif que Monsieur M... étayait suffisamment ses allégations par la production dudit décompte et d'une attestation de Monsieur C... attestant que Monsieur M... aurait travaillé tard le 30 juin et aurait été présent les 2 juillet et 16 juillet, ce qui était insuffisant pour constituer des éléments précis relatifs aux différentes périodes prétendument travaillées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du Code du travail ; 2°) ALORS QUE le juge ne peut faire droit à une demande de rappel d'heures supplémentaires que si le salarié a effectivement travaillé durant les heures alléguées et doit donc déterminer les heures réellement travaillées par ce dernier ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a fait droit à l'intégralité de la demande, après avoir uniquement fait état de preuves relatives à trois des dix périodes de travail fondant la demande de Monsieur M... ; qu'en statuant ainsi et en faisant droit au plein de la demande, sans relever aucun élément permettant d'en établir le bien-fondé, ni avoir établi les heures effectivement travaillées par Monsieur M..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du Code du travail.
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu la décision suivante : Statuant sur le pourvoi formé par : - M. A... K..., partie civile, contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de RIOM, en date du 18 avril 2019, qui a déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance du juge d'instruction refusant d'informer sur sa plainte, des chefs de faux témoignage et escroquerie au jugement ; La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 23 octobre 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : Mme de la Lance, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Pichon, conseiller rapporteur, Mme Planchon, conseiller de la chambre ; Greffier de chambre : Mme Darcheux ; Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire PICHON et les conclusions de M. l'avocat général PETITPREZ ; Vu le mémoire personnel et les observations complémentaires produits ; Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale ; Attendu qu'après avoir examiné tant la recevabilité du recours que les pièces de procédure, la Cour de cassation constate qu'il n'existe, en l'espèce, aucun moyen de nature à permettre l'admission du pourvoi ; DÉCLARE le pourvoi NON ADMIS ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatre décembre deux mille dix-neuf ; En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
décision 19-83.387 du 04/12/2019, partie 1
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par la société Compo expert France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...], contre l'arrêt rendu le 8 mars 2018 par la cour d'appel de Nîmes (4e chambre commerciale), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Etablissements X..., société anonyme, dont le siège est [...], 2°/ à la société Le Puech rouge, société en nom collectif, dont le siège est [...], 3°/ à l'association Le Ceta du Vidourle, dont le siège est [...], défenderesses à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 8 octobre 2019, où étaient présents : M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Kass-Danno, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, Mme Besse, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Kass-Danno, conseiller référendaire, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Compo expert France, de Me Carbonnier, avocat de la société Le Puech rouge, de la SCP Didier et Pinet, avocat de la société Etablissements X..., l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne acte à la société Compo expert France du désistement de son pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre l'association Ceta du Vidourle ; Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 8 mars 2018), que le 30 avril 2014, la société Etablissements X... (la société X...) a vendu à la société le Puech rouge (la société le Puech), arboriculteur, un produit fabriqué par la société Compo expert France (la société Compo), destiné à créer une barrière protectrice sur les organes végétatifs en vue de prévenir les dégâts liés aux coups de soleil ; que les abricots traités avec ce produit étant devenus impropres à la consommation, la société le Puech a assigné en paiement de dommages-intérêts la société X..., laquelle a appelé en garantie la société Compo, se prévalant d'un manquement par cette dernière à son obligation d'information et de conseil ; Attendu que la société Compo fait grief à l'arrêt de dire qu'elle devra relever et garantir la société X... de sa condamnation à payer à la société le Puech une certaine somme en réparation de son préjudice alors, selon le moyen : 1°/ que l'obligation d'information du fabricant à l'égard de l'acheteur professionnel n'existe que dans la mesure où la compétence de celui-ci ne lui donne pas les moyens d'apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques des biens qui lui sont livrés ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la société Compo avait manqué à son devoir de conseil envers la société X... en ne la mettant pas en mesure de satisfaire sa propre obligation de conseil envers la société le Puech, dès lors qu'elle n'avait pas alerté « les utilisateurs des dangers de marquage des fruits en cas d'application tardive ni de ce que l'épiderme duveteux de l'abricot est de nature à davantage retenir le produit qu'un fruit lisse » ; que, pour se prononcer ainsi, la cour d'appel s'est fondée sur les informations générales transmises au Ceta du Vidourle par un courriel du 4 avril 2014 et leur mise en oeuvre par la société le Puech ; qu'en statuant de la sorte, tandis que l'obligation d'information dont la société Compo était redevable envers la société X..., son seul cocontractant, devait s'apprécier au regard des renseignements que cette dernière, acquéreur professionnel, avait fourni à la société Compo sur l'utilisation par l'acquéreur final du produit qu'elle lui avait commandé, la cour d'appel a violé les articles 1147, dans sa rédaction applicable en la cause, et 1615 du code civil ; 2°/ que le professionnel n'engage pas sa responsabilité au titre de son devoir d'information, de conseil et de mise en garde, si le préjudice allégué par son client résulte d'une méconnaissance des préconisations qui lui ont été faites s'agissant de la mise en oeuvre du produit acheté ; qu'en l'espèce, la société Compo faisait valoir que M. S..., l'un de ses préposés, avait indiqué dans un courriel du 4 avril 2014 au Ceta du Vidourle, qui l'avait interrogé d'une manière générale sur l'application du produit Invelop Talc sur des abricots de variété Farbaly, qu'il convenait de procéder à plusieurs passages, dont un premier passage à 45 kg/ha la semaine du 7 avril, après avoir précisé qu'il convenait d'éviter de marquer les fruits ou le moins possible ;
Cour d'appel de Nîmes, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-16.821 du 27/11/2019, partie 1
qu'elle faisait également valoir que la société le Puech avait appliqué le produit Invelop Talc en un seul passage, le 24 mai 2014, prenant ainsi le risque que les pluies ayant lieu entre la date d'application et la date de récolte ne soient pas suffisantes pour nettoyer complètement les fruits, et selon un dosage supérieur à celui préconisé pour cette période de l'année, de sorte que l'utilisation du produit avait été trop tardive et ne correspondait pas aux préconisations de la société Compo ; que la cour d'appel a néanmoins jugé le contraire, aux motifs qu'il était impossible à la société le Puech d'appliquer le produit durant la semaine du 7 avril puisqu'il n'avait été livré que le 17 avril et qu'elle avait « pris la précaution de n'appliquer qu'une fois le produit à un dosage inférieur aux 45 kg par hectare préconisé par M. S... pour le premier passage », cette application ayant été effectuée tandis que « les abricots étaient au stade de « petits fruits », leur récolte n'ayant lieu qu'en juillet », de sorte que l'application n'était « pas tardive au regard des indications données dans le Powerpoint du fabricant qui fait état page 24 de passages sur des abricotiers variété Farbaly fin mai pour un dosage de 30 kg par hectare sur l'itinéraire Crau 1 » ; qu'en se prononçant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le courriel du 4 avril 2014 transféré à la société le Puech le 7 avril mentionnait expressément le risque de marquage et comportait des préconisations précises sur les dates d'application du produit Invelop Talc, notamment sur la nécessité de procéder à un premier passage la semaine du 7 avril au plus tard, ni si cette préconisation était formulée afin que les pluies ultérieures soient suffisantes pour nettoyer les fruits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147, dans sa rédaction applicable en la cause, et 1615 du code civil ; 3°/ qu'il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que l'application, par la société le Puech, du produit Invelop Talc sur sa production d'abricots Farbaly le 24 mai 2014 n'était pas tardive « au regard des indications données dans le Powerpoint du fabricant qui fait état page 24 de passages sur des abricotiers variété Farbaly fin mai pour un dosage de 30 kg par hectare sur l'itinéraire Crau 1 avec un résultat cité page 27 de 90 % de fruits indemnes sur Invelop », et dès lors le « premier passage » avait été effectué à un dosage « inférieur aux 45 kg par hectare préconisé par M. S... [...] alors que les abricots étaient au stade de « petits fruits », leur récolte n'ayant lieu qu'en juillet » ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que ce document s'il mentionnait effectivement un passage à la fin du mois de mai à un dosage de 30 kg par hectare, mentionnait également trois autres passages préalables, dont le premier au début du mois d'avril, pour une récolte en juillet, conformément aux préconisations de la société Compo laquelle avait insisté sur une première application précoce au début du mois d'avril pour éviter le marquage des fruits, la cour d'appel a dénaturé par omission cet écrit en violation de l'article 1134 alors applicable ; Mais attendu qu'après avoir relevé que la société le Puech avait interrogé la société Compo sur la portée exacte des caractéristiques techniques du produit, mis sur le marché, en 2012, pour le traitement des pommes, puis étendu, peu à peu, à la culture des abricotiers, l'arrêt retient que cette dernière avait, certes, informé la société le Puech qu'il ne fallait pas, ou le moins possible, marquer les fruits et qu'il convenait de s'approprier la méthode d'application du produit, mais n'avait donné aucune indication sur cette méthode ni sur le fait que l'épiderme duveteux de l'abricot était de nature à retenir le talc, composé de particules fines, et que les conséquences d'un marquage étaient irrémédiables, le fruit ne pouvant être nettoyé ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui, sans dénaturation, a procédé à la recherche invoquée par la deuxième branche, a pu déduire que la société le Puech avait manqué à son obligation de donner à l'acquéreur d'un produit nouveau, fût-il utilisateur professionnel de ce produit, les renseignements nécessaires à son usage et de l'informer, le cas échéant, des risques pouvant en résulter ; que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Compo expert France aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Etablissements X... la somme de 3 000 euros et à la société le Puech rouge la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept novembre deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt
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Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour la société Compo expert France. IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que la société Compo Expert France devra relever et garantir la société Établissements X... de sa condamnation à payer à la société Le Puech Rouge la somme de 95.563,40 € en réparation de son préjudice constitué par inexécution de son obligation de conseil ; AUX MOTIFS QU'il ressort des écritures de l'appelante que l'action du domaine le Puech rouge est fondée sur le devoir de conseil du vendeur. Cette obligation consiste pour le vendeur à s'informer des besoins de l'acheteur et informer ensuite celui-ci des contraintes techniques de la chose vendue et de son aptitude à atteindre le but recherché. Elle n'existe que dans la mesure où la compétence de l'acheteur ne lui donne pas les moyens d'apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques du dispositif en cause. En l'occurrence, le produit n'était proposé à la vente que depuis quelques années et l'acheteur indique, ce qui est confirmé par le CETA du Vidourle, avoir cherché à obtenir des renseignements auprès de l'association, laquelle, ne connaissant pas le produit, a mis en relation le domaine du Puech rouge avec la société « compo expert » fabricant. Il est justifié de cette mise en relation par un courriel du 4 avril 2014 émis par Monsieur S... de la société « compo expert » détaillant les caractéristiques du produit à l'association « Ceta du Vidourle », courriel transféré au domaine du Puech rouge le 7 avril suivant ; qu'il est ainsi établi que l'acheteur n'avait pas les moyens d'apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques du produit « invelop talc », mis sur le marché en 2012, d'abord pour le traitement des pommes, puis étendu peu à peu à la culture des abricotiers et qu'il souhaitait obtenir des informations à son sujet ; que c'est au vendeur, débiteur de l'obligation légale de conseil, qu'il incombe de démontrer son exécution ; que lors de l'expertise amiable, le directeur commercial des établissements X... avait déclaré que l'application de talc avait été formellement déconseillée par ses soins et que le produit n'avait été vendu au client que parce qu'il fallait satisfaire sa demande insistante ; mais que les établissements X... n'apportent pas la preuve de cette mise en garde et se limitent à nier dans leurs écritures l'existence d'un dommage ; qu'à défaut d'avoir renseigné son client sur l'aptitude du produit vendu à l'utilisation qui en était prévue, la responsabilité contractuelle des établissements X... est engagée s'il est rapporté la preuve par l'acheteur d'un préjudice en lien avec le manquement ; qu'à cet égard, le constat d'huissier du 15 juillet 2014 relève que les arbres sont chargés de fruits et que les abricots sont recouverts d'un film blanchâtre, avec parfois des taches blanchâtres. L'expertise amiable, qui a été effectuée à la suite de la demande en garantie des établissements X... au contradictoire du domaine du Puech rouge, de la société « compo expert » de l'association CETA du Vidourle, des établissements X... et de leurs assureurs respectifs, a eu lieu le 5 septembre 2014, c'est-à-dire environ deux mois après la récolte. La matérialité des faits à savoir la pellicule blanchâtre est toutefois démontrée par le constat d'huissier, la proposition de MB fruits du 15 juillet 2014 de vendre les abricots à une conserverie « peu exigeante » en raison des traces de produits et le refus opposé par Monsieur V... P...' de réceptionner une livraison d'abricots le 16 juillet 2014 à cause de la présence de résidus sur le produit ; que le produit incriminé a été appliqué le 24 mai 2014 alors que les abricots étaient au stade « petit fruits » à proportion de 30 kg par hectare pour éviter les coups de soleil. Il n'y a eu aucun autre traitement à cette période, les fongicides et insecticides ayant été pulvérisés pour la dernière fois le 11 avril 2014 (pièce 17, fiche de suivi parcellaire) ; que les résidus blanchâtres constatés ne peut donc provenir que de la pulvérisation « invelop talc », ce qui n'était d'ailleurs pas contesté lors de l'expertise amiable ; que la société « compo export » produit des photos qui auraient été prises par ses soins les 11 et 15 juillet 2014 qui sont totalement inexploitables parce que trop petites (pièce 7) ; qu'elle ne démontre donc son allégation selon laquelle la majeure partie de la récolte était commercialisable ; [...] que le vendeur demande à être garanti par l'association le « Ceta du Vidourle » au motif qu'elle assurait une mission d'assistance à la culture du verger et a préconisé l'application du produit ; que les premiers juges ont effectivement retenu que le domaine du Puech rouge était assisté par l'association ; mais que contrairement à ce que soutient le vendeur, le rapport d'expertise amiable n'établit pas cette mission d'assistance et de conseil.
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S'il est en effet indiqué dans le rappel des faits que « le conseil pour appliquer ce produit a été donné par Monsieur G..., technicien agricole du Ceta », qui suit contractuellement le verger, ce dernier conteste cette version des faits et intervient pour expliquer « que dans cette affaire, il n'a fait que mettre en rapport Messieurs K... et S... » (note de la cour : gérant du domaine pour le premier et ingénieur de compo expert pour le second) « et qu'il n'est pas intervenu directement et personnellement dans cette application » ; que le courriel de transmission des préconisations du fabricant par l'association, qui n'émet aucun avis sur le produit, atteste de ce rôle d'intermédiaire dans le cadre d'une mise en relation mais pas davantage. Par conséquent, le « ceta du Vidourle » n'est pas débiteur d'une obligation de conseil et n'a pas à garantir le vendeur des condamnations prononcées à son encontre ; que les établissements X... recherchent également la responsabilité de la société « compo expert » au visa de l'article 1641 du code civil mais aussi de l'obligation de conseil ; qu'il est exact que les établissements X... ne démontrent pas l'existence d'un vice caché alors même que le rapport d'expertise amiable pointe plutôt une incertitude sur ce type d'application par manque d'expérience et de recul ; qu'il n'en demeure pas moins que le fabricant est débiteur d'un devoir de conseil à l'égard de l'acheteur ; que le fabricant conteste tout d'abord la réalité les causes et l'imputabilité des désordres allégués par le domaine le Puech rouge faute d'expertise judiciaire. Il a été vu précédemment que le dommage est établi — et pas seulement grâce au rapport d'expertise amiable et en lien avec la pulvérisation de talc que l'expertise judiciaire n'aurait pas été utile à la solution du litige et contrairement à ce que l'intimé soutient, le rapport d'expertise amiable a été établi contradictoirement quand bien même l'expert était mandaté par l'assureur des établissements X... que le fabricant fait ensuite valoir que le domaine le Puech rouge n'a pas respecté les conditions d'application du produit « Invelop » ; que la dose d'emploi mentionnée sur l'étiquette du produit préconise une pulvérisation de 50 kg par hectare dès le stade de sensibilité des fruits, 50 kg par hectare 3 à 4 semaines après, renouvellement 1 à 3 x 25 kg par hectare suivant les conditions climatiques et la date de récolte ; que l'ingénieur de compo expert préconisait dans son courriel un dosage légèrement inférieur : 45 kg par hectare au premier passage début avril, puis renouvellement à 30 kg, puis à 15 à 25 kg par hectare pour le dernier passage avant fin mai ; qu'il convient de relever en premier lieu qu'il était impossible au domaine le Puech rouge d'appliquer le produit durant la semaine du 7 avril alors qu'il lui était livré le 17 avril suivant ; qu'en second lieu, le domaine le Puech rouge communique le contrôle de ses pulvérisateurs qui ne font état d'aucun défaut nécessitant un nouveau contrôle ; qu'en troisième lieu, le fabricant ne justifie pas de son allégation selon laquelle la surface allouée par l'exploitant à des variétés sensibles aux coups de soleil représente précisément 3,3 ha sur un total de 100 ha alors qu'il est mentionné dans le rapport d'expertise amiable que l'exploitation comprend 95 ha d'abricotiers ; qu'en tout état de cause, le courriel de Monsieur S... ne suggère pas de limiter la pulvérisation sur quelques rangs au départ ; qu'enfin, le domaine le Puech rouge a pris la précaution de n'appliquer qu'une fois le produit un dosage inférieur aux 45 kg par hectare préconisé par Monsieur S... pour le premier passage, sur une surface limitée à 3,33 ha ; que cette application a été faite alors que les abricots étaient au stade de « petits fruits », leur récolte n'ayant lieu qu'en juillet ; qu'elle n'est donc pas tardive au regard des indications données dans le PowerPoint du fabricant qui fait état page 24 de passages sur des abricotiers variétés Farbaly fin mai pour un dosage de 30 kg par hectare sur l'itinéraire Crau I avec un résultat cité page 27 de 90 % de fruits indemnes avec Invelop ; que, certes, la société « compo expert », dans son courriel, prévient l'utilisateur de ne pas marquer les fruits ou le moins possible et qu'il convient de « s'approprier » la méthode. Mais elle n'indique pas comment s'approprier cette méthode, ni que l'épiderme duveteux de l'abricot est de nature à retenir le talc qui est composé de particules fines alors que les conséquences d'un marquage sont irrémédiables, le fruit ne pouvant être nettoyé ; que la vigilance de l'acheteur aurait dû être attirée sur ce point comme le font d'ailleurs spontanément deux des témoins de la société « compo expert » qui mentionnent dans leur attestation que l'application ne doit pas avoir lieu trop tard à cause des risques de marquage ; que si l'étiquette du produit précise qu'il est important d'appliquer Invelop tôt en saison, elle justifie ce conseil par le fait que les fruits sont sensibles aux grosses chaleurs dès leur stade jeune et non en raison du risque de marquage ;
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