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La rentrée littéraire promet un programme de belle qualité
Jean-Jacques Schuhl, Gilles Leroy, Christian Gailly, Yasmina Khadra, James Ellroy, Amos Oz, V. S. Naipaul… La rentrée de janvier s'annonce sous les meilleurs auspices.
Jean-Jacques Schuhl, Gilles Leroy, Christian Gailly, Yasmina Khadra, James Ellroy, Amos Oz, V. S. Naipaul… Si la rentrée de janvier s'annonce sous les meilleurs auspices, force est de constater que, avec 491 romans (contre 558 en 2009), la tendance à la baisse enregistrée à l'automne s'accentue. Principale victime de cette glaciation : la littérature étrangère, qui enregistre un recul de 21 % avec 167 romans, contre 211 l'an dernier. Soit son plus bas niveau depuis 2001. Peut-être doit-on voir là le contrecoup de l'augmentation des droits d'auteur et de traduction, mais aussi le fait que les organisateurs du Salon du livre ont choisi de célébrer les trente ans de la manifestation en invitant non pas un pays mais des écrivains français et étrangers. Si la littérature française, de son côté, marque un léger fléchissement avec 324 livres, contre 347 l'an passé, les premiers romans après un automne en demi-teinte repartent à la hausse avec 73 titres, contre 61 en 2009. Loin de l'effervescence de septembre et de la tension des prix, cette rentrée hivernale est placée sous le signe de la décrue. Elle n'en offre pas moins un programme de belle qualité. Ainsi chez Gallimard, où le retour de Jean-Jacques Schuhl avec Entrée des fantômes, dix ans après son Goncourt pour Ingrid Caven, est déjà annoncé comme l'un des événements de la rentrée. Tout comme le nouveau roman de Patrick Modiano, prévu en mars. Autres têtes d'affiche : Philippe Sollers avec Discours parfait, le troisième tome de ses articles, chroniques et entretiens ; Richard Millet, qui propose un récit et un roman où le Liban tient une grande place ; Camille Laurens, qui narre, avec Romance nerveuse, la rencontre d'une romancière et d'un paparazzi, ou encore Philippe Djian, dont le nouveau livre, Incidences, paraîtra en février. Du côté des filiales de Gallimard, notons la présence d'un autre Goncourt, Gilles Leroy, qui propose, au Mercure de France, Zola Jackson. Chez Verticales, Arnaud Cathrine poursuit son exploration du roman-choral avec Le Journal intime de Benjamin Lorca, tandis que Céline Minard, chez Denoël, propose avec Olimpia, un portrait sulfureux de la belle-sœur du pape Innocent X. Enfin, chez P.O.L., l'essai de Marie Darrieussecq, Rapport de police : accusation de plagiat et autres modes de surveillance de la fiction pourraient bien susciter quelques polémiques. Face à cette escouade, Grasset n'est pas en reste, qui publie le dernier roman de Jacques Chessex (décédé le 9 octobre), Le Dernier Crâne de M. de Sade, "chesséien" en diable. Mais aussi Troisième chronique du règne de Nicolas Ier, de Patrick Rambaud, l'émouvant roman Le Premier Amour de Véronique Olmi ou encore deux recueils de poèmes de Charles Dantzig. La maison sœur Fayard n'a pas à rougir d'un programme où l'on retrouvera le délicat Dominique Fabre, mais également Claire Castillon, Frédéric Vitoux, Cyrille Fleischman, Morgan Sportès et un nouveau Pierre Pelot des plus sanglant. En cette rentrée, la palme du recrutement en masse revient incontestablement à Actes Sud, qui affiche, au côté de Claude Pujade-Renaud, une myriade de transfuges. A commencer par Anne Weber (ex-Seuil), Emmelene Landon, venu de Léo Scheer, Denis Baldwin-Beneich (ex-Denoël), Emilie Frèche (Flammarion) ou encore Véronique Bizot,qui, après des nouvelles chez Stock, publie son premier roman. Le Seuil, à l'inverse, joue la carte des auteurs maison avec François Emmanuel, Olivier Rolin, Maryline Desbiolles, Patrick Grainville, Michèle Gazier ou encore Catherine Clément. Tout comme l'Olivier, qui poursuit son travail de mise en lumière de jeunes auteurs tels Valérie Zenatti, Jakuta Alikavazovic ou le drolatique Martin Page. Chez Stock, outre l'arrivée de Catherine Vigourt avec le très autobiographique Un jeune garçon, sont également très attendus le dernier roman de Luc Lang, Esprit chien, ainsi qu'en février un volumineux et très singulier roman de Marie Billetdoux, C'est encore moi qui vous écris (1968-2008), composé à partir de ses écrits intimes (lettres, bulletins scolaires, critiques de livres…). Toujours aussi éclectique, Flammarion offre un programme où se côtoient Diastème, Laurent Seksik, qui évoque de manière romanesque les derniers jours de Stephan Zweig, Brigitte Fontaine ou Andrée Chedid. Eternel oublié des prix d'automne, non sans s'en plaindre, Yasmina Khadra, chez Julliard, a donc choisi janvier pour publier L'Olympe des infortunes, une fable philosophique qui rompt avec ses précédents romans. Autre grand auteur algérien de cette rentrée, aux éditions de l'Aube, Maïssa Bey. Sous forme épistolaire, la romancière aborde, dans Puisque mon cœur est mort, le thème du pardon et de la loi de réconciliation nationale. Ce bref tour d'horizon ne pourrait s'achever sans évoquer les Editions de Minuit, qui proposent, comme en septembre, un duo de choix avec Eric Chevillard et Christian Gailly. Christine Rousseau
01/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/01/la-rentree-litteraire-promet-un-programme-de-belle-qualite_1286666_3260.html
Gordon Brown appelle à une réunion internationale sur le Yémen
Cette demande intervient une semaine après l'attaque terroriste manquée à bord d'un vol à destination des Etats-Unis par un jeune Nigérian qui avait séjourné au Yémen.
Une semaine après l'attaque terroriste manquée à bord d'un vol à destination des Etats-Unis par un jeune Nigérian qui avait séjourné au Yémen, Gordon Brown a appelé, vendredi, à une réunion internationale sur le Yémen et la lutte contre le terrorisme le 28 janvier à Londres. Cette réunion doit se tenir en parallèle avec la conférence internationale sur l'Afghanistan déjà prévue à Londres à la même date. Selon Downing Street, ce projet a déjà reçu "un fort soutien de la Maison Blanche et de l'Union européenne", et la Grande-Bretagne s'attachera dans les prochains jours à obtenir l'appui de l'Arabie saoudite et des pays du Golfe. La tentative du jeune Nigérian Omar Farouk Abdulmutallab de faire exploser, le jour de Noël, un avion de ligne américain en provenance d'Amsterdam qui s'apprêtait à atterrir à Detroit, souligne que la menace terroriste est toujours très présente, huit ans après les événements du 11 septembre 2001, avait rappelé, plus tôt vendredi dans un article, le premier ministre britannique. Le jeune homme de 23 ans a affirmé avoir été entraîné au Yémen par Al-Qaida, selon des responsables américains cités par les médias. Le ministère yéménite des affaires étrangères a confirmé que le Nigérian se trouvait encore, au début de décembre, au Yémen, peu avant l'attentat qu'il a tenté de perpétrer. La réunion devrait chercher à encourager et coordonner l'aide internationale au Yémen pour renforcer les capacité du gouvernement, qui ne contrôle pas l'ensemble de son territoire, et à contribuer au développement économique des zones les plus propices à la radicalisation des militants, selon Downing Street. Elle vise également à identifier les besoins du pays, afin que celui-ci puisse lutter, contre le terrorisme et à déboucher sur des engagements des Etats participants pour renforcer l'armée yéménite et coordonner les efforts contre le terrorisme dans la région.
01/01/2010
proche-orient
https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/01/01/gordon-brown-appelle-a-une-reunion-internationale-sur-le-yemen_1286665_3218.html
L'abandon des poursuites contre Blackwater indigne l'Irak
Un juge américain a rejeté jeudi les accusations portées contre cinq employés de la société de sécurité, accusés d'avoir ouvert le feu à Bagdad sur la foule et tué quatorze Irakiens en 2007.
Un juge américain a rejeté, jeudi 31 décembre, les accusations portées contre cinq employés de Blackwater – la plus grande entreprise privée de sécurité utilisée par les Etats-Unis en Irak – accusés d'avoir ouvert le feu à Bagdad sur la foule et tué quatorze Irakiens en 2007 lors d'une mission pour le département d'Etat. Une décision qui aussitôt suscité l'indignation en Irak : "J'ai été vraiment stupéfaite de la décision et j'attends de l'ambassade américaine une copie de la décision du juge", a ainsi affirmé la ministre des droits de l'homme irakienne, Wejdane Mikhaïl. "Ce qui s'est passé a été très mauvais, car tant de personnes innocentes sont mortes, des jeunes, des étudiants, tués par quelqu'un qui aimait tirer sur des gens non armés." Le juge fédéral Ricardo Urbina a argué dans sa décision que l'accusation avait violé les droits des accusés en utilisant des témoignages livrés alors que les agents de sécurité étaient protégés par l'immunité que leur conférait le gouvernement américain. "Tous les Irakiens vont être mécontents. Il y a eu tellement de travail de fait pour poursuivre ces gens en justice, je ne comprends pas la décision du juge", explique Mme Mikhaïl. Selon la ministre, les témoignages présentés étaient suffisants pour renvoyer les cinq agents devant la justice américaine. L'un des agents "a raconté ce qui s'était passé place Nousour, comment ils ont tué des gens innocents qui se trouvaient juste dans leur voiture sans aucune arme", insiste-t-elle. "CONTRECOUP" Cet incident avait provoqué la colère des Irakiens, qui n'ont eu de cesse d'accuser les agents de sécurité étrangers d'avoir la détente trop facile et d'agir sans retenue et en toute impunité. Après cet incident, le gouvernement a retiré la licence d'exploitation de Blackwater, dont les contrats s'élevaient à des centaines de millions de dollars par an. Au début de mars, le patron et fondateur de la société américaine de sécurité Xe – le nouveau nom de Blackwater –, Erik Prince, avait annoncé sa démission après la perte du contrat en Irak. Avec leurs convois sillonnant Bagdad à vive allure, leurs gardes ouvrant le feu en l'air pour se faire un passage dans les embouteillages et ses hélicoptères survolant sans cesse le ciel de Bagdad, Blackwater était devenu pour les Irakiens le symbole des agissements controversés des sociétés privées. Le porte-parole du gouvernement irakien a assuré que l'enquête menée par les autorités irakiennes indiquait sans l'ombre d'un doute que les gardes étaient responsables de la mort des civils irakiens. Le commandant des forces américaines en Irak, Ray Odierno, a dit craindre que la décision du juge américain ait des répercussions sur l'ensemble des sociétés privées. "Ce que je crains, c'est qu'il y ait un contrecoup contre les sociétés de sécurité qui continuent de travailler [en Irak]. Je ne souhaiterais pas être témoin de cela."
01/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/01/l-abandon-des-poursuites-contre-blackwater-indigne-l-irak_1286663_3216.html
Au moins 93 morts dans un attentat au Pakistan
Un kamikaze a fait exploser sa voiture piégée vendredi, au milieu d'un terrain de volley-ball.
Un attentat a fait au moins 93 morts et plusieurs dizaines de blessés, vendredi 1er"Cinq personnes sont décédées pendant la nuit à l'hôpital (...), ce qui porte le bilan à 93 morts" janvier, au Pakistan selon un nouveau bilan fourni samedi par la police. Un kamikaze a fait exploser une bombe au milieu d'un terrain de volley-ball. , a déclaré le chef de la police locale qui précise que le kamikaze a précipité une voiture chargée d'explosifs sur le terrain autour duquel les villageois étaient rassemblés pour regarder le match. L'explosion a provoqué l'effondrement d'une maison située à proximité, d'où ont été extraites plusieurs victimes, femmes et enfants. L'attentat a eu lieu à Shah Hasan Khan, un village du district de Bannu, voisin des zones tribales frontalières de l'Afghanistan où l'armée pakistanaise combat actuellement les talibans alliés à Al-Qaida. En cette fin d'année, le pays est victime d'un regain de violence. Lundi, un attentat-suicide à Karachi, revendiqué par les talibans, avait fait quarante-trois morts. Une réunion d'un comité local anti-talibans se tenait dans la mosquée située juste à côté du terrain de volley-ball lors de l'attentat, a indiqué Mushtaq Marwat, un membre de ce "comité de paix", à la chaîne de télévision locale Geo. "Soudain, il y a eu une énorme explosion. Nous sommes sortis et avons vu des morts et des blessés partout", a-t-il raconté, en estimant que le bilan devrait s'alourdir. "COMBATTRE LA MENACE TERRORISTE JUSQU'À SON ÉLIMINATION TOTALE" Le premier ministre, Youssouf Raza Gilani, a condamné l'attentat en affirmant, dans un communiqué, que "de tels actes terroristes ne peuvent affaiblir la résolution du gouvernement à combattre la menace terroriste jusqu'à son élimination totale". Le nord-ouest du Pakistan est la cible privilégiée de la vague d'attentats islamistes qui secoue le Pakistan et a fait plus de deux mille huit cents morts depuis près de deux ans et demi. Cette sanglante série s'est accélérée depuis octobre, lorsque l'armée a lancé une offensive terrestre contre les talibans dans le Waziristan du Sud, fief du Mouvement des talibans pakistanais (TTP), allié à Al-Qaida. Le TTP et ses alliés, qui dénoncent l'alignement du Pakistan sur la "guerre contre le terrorisme" menée par les Etats-Unis dans la région, sont considérés comme les principaux auteurs des attentats perpétrés depuis deux ans et demi. Le TTP a également revendiqué un attentat contre une procession chiite, qui a fait quarante-trois morts, lundi dernier à Karachi, dans le sud du Pakistan, qui semble démontrer que sa capacité de nuisance s'étend bien au delà du Nord-Ouest.
01/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/01/au-moins-25-morts-dans-un-attentat-au-pakistan_1286661_3216.html
Cinq morts dans un incendie à Nîmes
Cinq personnes sont mortes, et treize autres ont été blessées à Nîmes, dans le Gard, dans un incendie qui s'est déclenché vendredi 1er janvier au petit matin.
Cinq personnes sont mortes, et treize autres ont été blessées à Nîmes, dans le Gard, dans un incendie qui s'est déclenché vendredi 1er janvier au petit matin. Le feu, dont on ignore l'origine pour l'instant, a pris au sixième et dernier étage d'un immeuble. "A l'arrivée des pompiers, trois personnes étaient décédées dans un appartement, et deux autres dans un appartement voisin par intoxication", a expliqué, sur i-Télé, le directeur de cabinet du préfet du Gard. On dénombre également "treize blessés, dont trois graves. Une personne dans le coma a été transférée à Marseille", a-t-il ajouté. Les secours ont été prévenus vers 5 heures du matin, mais "l'incendie avait déjà bien démarré", a-t-il expliqué. France Info précise que les victimes sont trois adultes et deux enfants. "L'origine de l'incendie est indéterminée mais a priori accidentelle", a déclaré le procureur adjoint de la République de Nîmes, cité par Europe 1.
01/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/01/cinq-morts-dans-un-incendie-a-nimes_1286657_3224.html
Le texte sur le transfert des monuments censuré
Le Conseil constitutionnel a écarté l'article permettant à l'Etat de céder son patrimoine.
La décision a été un peu occultée par la censure de la taxe carbone. Dans le milieu du patrimoine, elle revêt pourtant une grande importance : le Conseil constitutionnel a rejeté, mardi 29 décembre 2009, la disposition de la loi de finances qui autorise le transfert de tous les monuments historiques aux collectivités territoriales. La haute juridiction a estimé que cet article 116 - anciennement 52 - constituait un "cavalier budgétaire qui n'a pas sa place en loi de finances". Autrement dit, la question de la dévolution du patrimoine national de l'Etat et de ses établissements publics aux mairies, conseils généraux ou régionaux leur est apparue comme excédant les simples questions financières et que, par conséquent, ce texte ne devait pas être noyé dans l'ensemble du projet de budget. Cette décision devrait satisfaire les nombreux opposants au projet, à gauche comme à droite. Ceux-ci dénonçaient, sur la forme, la procédure choisie, comme ne permettant pas un débat approfondi. Mais, plus largement, la censure repose le problème sur le fond. Depuis août 2004, la loi limite le transfert patrimonial à 176 monuments inscrits sur une liste établie par un décret du Conseil d'Etat. Procédure qui n'a pas connu un franc succès. Fallait-il élargir la liste ou décider que, par principe, tous les bâtiments étaient transférables ? Matignon a tranché, à l'automne, pour cette seconde hypothèse. Une rupture qui a fait réagir de nombreux défenseurs du patrimoine (Le Monde du 23 novembre 2009). Circonstance aggravante, la première mouture du texte, adoptée par l'Assemblée nationale, ne prévoyait de consulter que les seuls préfets avant cession. Exit, donc, le ministère de la culture. Passé par le Sénat, puis par une commission mixte paritaire, la dernière rédaction a rétabli l'avis du ministère. Mais, pour nombre de spécialistes, les garanties susceptibles d'éviter qu'à terme ces joyaux patrimoniaux n'atterrissent dans les mains du privé n'étaient pas données. Le Conseil constitutionnel ne s'est pas prononcé sur ce point. Mais sa décision rebat les cartes. Au ministère de la culture, certains reposeront sans doute la question de la philosophie du texte. Quant au ministère des finances, il devrait remettre en cause le principe de la gratuité de ces cessions, qui ne l'a jamais convaincu. Pour l'heure, toutefois, aucune décision n'a été prise, ni en termes de calendrier, ni sur le fond de la question, indique-t-on de source proche du dossier. Nathaniel Herzberg
01/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/01/le-texte-sur-le-transfert-des-monuments-censure_1286563_3246.html
Les incessantes métamorphoses du Cirque invisible
Le tandem formé par Victoria Chaplin et Jean-Baptiste Thierrée est au Théâtre du Rond-Point.
Si le Cirque invisible de Victoria Chaplin et Jean-Baptiste Thierrée fascine autant, c'est parce qu'il octroie une pause dans le parcours du combattant du spectateur. L'homme pressé est d'ailleurs superbement figuré par le pôle masculin de ce duo, embarqué dans une voiture décapotable. La longue chevelure, l'écharpe dénouée, le cornet de glace, tout de carton comme la voiture, sont abusivement rabattus en arrière sous l'effet d'un vent imaginaire et fixé, comme sur une vieille carte postale. C'est ainsi que les deux loustics traitent la vitesse : en la figeant. Ce n'est pas le moindre des paradoxes de ce spectacle, à voir jusqu'au 16 janvier au Théâtre du Rond-Point, à Paris. Et de ce cirque, transformiste, drôle, mélancolique, joué par une femme éduquée aux arts du corps et un homme enfant, né en 1937, qui prend les lapins pour des cafetières, et les cafetières pour des réalités. Le Cirque invisible a le succès qu'il mérite. Pour autant, il trimbale une appellation antinomique - cirque et invisible. Mais ce qu'on peut y voir, c'est le passage du temps. En ce sens, le spectacle est, et n'est pas, pour les enfants : ces derniers possèdent à la fois un sens très flou de la durée et du découpage calendaire, et une idée assez précise du merveilleux. Quant aux adultes, ils seront en mesure d'apprécier la nostalgie intrinsèque à la vie qui passe vite. Le temps pour Jean-Baptiste et Victoria est une étrangeté, sphérique et fléchée. Une petite balle rouge rémanente, une horloge, un rocking-chair, une marquise qui devient cheval (les transformations en bestioles sont la spécialité de Victoria Chaplin). C'est aussi la vie figurée par une chanson que l'on entend dans le spectacle - Les Trois Cloches (la naissance, le mariage, la mort), fruit de la collaboration entre Les Compagnons de la chanson et Edith Piaf. Jean-Baptiste Thierrée la chante en play-back en manipulant des marionnettes ; c'est parfait. ŒUVRE EN DEVENIR Le Cirque invisible, est né il y a presque vingt ans. Quand ils font un nouveau spectacle, les deux fiancés terribles changent de nom : Cirque Bonjour, Cirque imaginaire, et puis celui-ci (le fils du couple, James Thierrée, connaît aussi le succès en ce moment dans un autre lieu parisien, au Théâtre de la Ville). Pour autant, ces deux heures pleines développées dans une logique de la rapidité, par des tableaux qui jouent sur la brièveté, sont une oeuvre en devenir. Les Chaplin-Thierrée y ajoutent, y retirent. Ils enlèvent le gros lapin (vrai) à qui ils faisaient lire un exemplaire géant d'Alice au pays des merveilles, qui peut-être réapparaîtra demain. Ils adjoignent un lancer de carottes, un découpage de doigt ou un manger de bougie. Avec eux, prendre son temps devient une esthétique. Le Cirque invisible. Théâtre du Rond-Point. 2 bis, avenue Franklin-Roosevelt, Paris 8e. M° Franklin- Roosevelt. Du mardi au samedi, à 20 h 30. Le dimanche à 15 heures. Jusqu'au 16 janvier. De 10 € à 33 €. Tél. : 01-44-95-98-21. Véronique Mortaigne
01/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/01/les-incessantes-metamorphoses-du-cirque-invisible_1286562_3246.html
A New York, les galeries dépriment et guettent la reprise
La capitale de l'art entretient son pouvoir d'attraction et sa folle énergie, malgré la fermeture de plusieurs galeries.
Un stand vide a frappé les esprits à la Foire d'art de Miami, début décembre 2009. L'occupant aurait eu des problèmes de transport. Officieusement, la galerie Christian Haye, qui se trouve sur la 57e Rue à Manhattan, avait fait brutalement banqueroute. Une preuve, parmi d'autres, que les marchands qui ont pignon sur rue dans la capitale mondiale de l'art contemporain sont frappés par la crise. Il suffit de se promener à New York et de pousser les portes, pour constater que les dizaines de galeries qui y sont installées font le dos rond depuis plus d'un an. Partout, le niveau des ventes a chuté, et le prix des oeuvres a baissé. Ce sont les petites et moyennes galeries qui souffrent le plus, celles qui représentent les artistes les moins bankables - les moins connus par les spéculateurs. Durant les six premiers mois de 2009, environ vingt-cinq galeries auraient fermé. Certaines s'étaient pourtant fait une réputation en défendant des artistes émergents : Roebling Hall, Rivington Arms, Clementine, Bellwether... Certains lieux, comme la jeune galerie Smith-Steward, ont "évolué pour devenir un centre d'expositions sans adresse permanente", apprend-on. Objectif : ne pas disparaître et attendre de dénicher un loyer moins cher. Dans le quartier de Chelsea, à l'ouest de Manhattan, haut lieu des galeries de la ville, "le trafic piétonnier s'est remarquablement amoindri là où les foules se bousculaient l'année passée", remarque le New York Times. Les traders qui aimaient à s'offrir des pièces à 10 000 dollars ont déserté. Désormais, les affaires se font avec les collectionneurs les plus riches. Ceux encore capables de dire, comme le rapporte un galeriste : "J'ai perdu 7 milliards de dollars dans la crise, mais il me reste 200 millions, largement de quoi me refaire." Selon le Baer Faxt, site Internet qui observe le marché de l'art international, "les affaires se sont amoindries de 50 % à 80 %" dans les six premiers mois de l'année, ce qui est vertigineux. Les plus puissantes des galeries, comme Paula Cooper, Luhring Augustine ou Cheim & Read, parviennent cependant à tenir. Mais elles ont dû réduire drastiquement les coûts : licenciement d'une partie du personnel, pression accrue sur les vendeurs d'oeuvres (payés à la commission) ou évincement des artistes dont les ventes sont les plus faibles. La galerie 303 (303Gallery) se concentre désormais sur un seul espace à Chelsea, contre deux auparavant. Certains artistes doivent aussi payer les frais de production de leurs oeuvres, auparavant couverts par les galeries. Si ce n'est Charles Cowles, lieu trentenaire et spécialisé dans la photographie, aucune grosse machine n'a mis la clé sous la porte. Larry Gagosian, considéré comme le marchand le plus puissant au monde, installé dans trois espaces à New York, deux à Londres et un à Rome, a même annoncé qu'il doublerait sa surface en 2010, en s'installant à Los Angeles. "Je dois travailler deux fois plus, mais j'ai réussi à attirer une douzaine de nouveaux clients", confie un de ses vendeurs. Autre signe d'un fossé grandissant entre petits et gros, la puissante et européenne galerie Hauser & Wirth, déjà installée à Zürich et à Londres, a ouvert en septembre un espace à New York, dans l'Upper East Side. "Tout le monde réduit les frais en ce moment, mais nous réfléchissons sur vingt ans", explique un des directeurs. New York entretient néanmoins sa réputation, son pouvoir d'attraction et sa folle énergie. Pendant que beaucoup se lamentent, les projets continuent d'y fleurir. Surtout venant d'institutions qui continuent de trouver des fonds et du mécénat. Ainsi le prestigieux Whitney Museum, dévolu à l'art américain, souhaite ouvrir une nouvelle aile dans le Meatpack, au sud de Chelsea, et à l'orée de la High Line, inaugurée à l'été 2009 et qui est une ancienne voie ferrée transformée en promenade verte par les architectes Diller et Scofidio - elle devrait être prolongée en 2010. De son côté, la Dia Art Foundation, qui joue un rôle primordial dans la conservation de chefs-d'oeuvre de l'art contemporain, comme la Spiral Jetty, joyau monumental du land art que Robert Smithson a imaginé au nord du lac Salé (Utah), projette de revenir à Chelsea cinq ans après y avoir renoncé. Mais son directeur, le Français Philippe Vergne, a annoncé "une architecture modeste", afin que l'essentiel de l'argent "soit dépensé pour les artistes". Pour l'instant, la Dia se contente de montrer de petites expositions dans les espaces de la Hispanic Society of America, au coeur du quartier d'Harlem. Alors que Chelsea décline ou se renouvelle, un autre quartier de l'art s'affirme dans le bas de Manhattan : le Lower East Side, longtemps populaire, réservé aux nouveaux immigrants, entre l'East Village et Chinatown. On y trouve désormais des parkas à 20 dollars comme des escarpins à 500 dollars. Depuis la création du New Museum, il y a deux ans, dévolu à l'art contemporain, le quartier attire les galeries. Une vingtaine se sont installées depuis un an, dont les Zürcher, un couple de Français. Une cinquantaine de petites structures viennent s'accoler aux restaurants chinois et agences de voyage. Un dernier lieu fait parler de lui, cette fois sur la très chic et chère Park Avenue : l'Armory. Ancien quartier général de la jeunesse dorée partant pour la guerre, ce magnifique bâtiment de la fin du XIXe siècle a été sauvé de la ruine par une association, pour en faire un lieu de culture. Elle a chargé les architectes suisses Herzog et de Meuron (la Tate Modern de Londres, c'est eux) de le restaurer. 40 millions de dollars ont déjà été investis. Opéra, théâtre et art contemporain trouvent leur place dans des salles superbes dessinées par Louis Comfort Tiffany, l'inventeur de l'Art nouveau américain. En mai, le Français Christian Boltanski installera dans les 5 000 m2 de l'armurerie l'installation qu'il dévoile au Grand Palais, à Paris, à partir du 3 janvier. New York aurait-elle trouvé son grand palais ? Emmanuelle Lequeux
01/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/01/a-new-york-les-galeries-depriment-et-guettent-la-reprise_1286561_3246.html
Le mimétisme, art guerrier animal
Une étude britannique sur des chenilles et des poussins éclaire un processus évolutif.
La duplicité peut être une qualité. Dans les règnes animal et végétal, les exemples de subterfuges et de faux-semblants sont multiples. Monocirrhus polyacanthus, un poisson d'Amérique du Sud aux teintes bigarrées, adopte les couleurs d'une feuille morte pour mieux approcher ses proies. Les oiseaux nocturnes de la famille des Nyctibiidae se confondent avec des souches d'arbres. Le papillon vice-roi (Limenitis archippus) revêt la parure orange veinée de noir du papillon monarque (Danaus plexippus), dont le goût répulsif tient à distance ses prédateurs. La blennie dévoreuse, petit poisson carnivore, prend la livrée d'une autre espèce se nourrissant de parasites, le labre nettoyeur, pour duper ses victimes. Certaines mouches bourdonnent comme des abeilles pour faire battre en retraite les araignées. Les lithops, ou plantes-cailloux, se font passer pour des minéraux... Ces stratégies adaptatives sont destinées à se protéger d'un prédateur ou, au contraire, à leurrer une proie. Les biologistes de l'évolution ont beaucoup étudié certains de ces travestissements. Comme le camouflage, ou mimétisme cryptique, grâce auquel une espèce se fond dans son environnement afin de ne pas être détectée. Ou comme l'aposématisme, faculté de certains animaux, notamment des insectes et des batraciens, à arborer des couleurs voyantes pour mettre en fuite leurs ennemis. Mais une forme particulière de mimétisme reste mal connue : celle où l'animal ne cherche pas à échapper à la vue, mais où il se grime en objet inanimé non comestible, tel qu'une brindille, une feuille, une pierre ou une déjection. Une équipe britannique décrit, dans l'édition de Science du 1er janvier, une expérience donnant à penser que ce comportement constitue une tactique de défense active. Les chercheurs ont utilisé comme cobayes des poussins de basse-cour et des chenilles de papillons de deux espèces, la citronnelle rouillée (Opisthograptis luteolata) et l'ennomos lunaire (Selenia dentaria), qui ont l'apparence de brindilles brunes et noueuses. TROMPER LES PRÉDATEURS Dans un premier temps, certains des poussins ont été mis en présence de rameaux d'aubépine, sur lesquels ils se sont fait le bec. Puis des chenilles ont été servies à tous les volatiles. Résultat : les poussins qui avaient précédemment goûté aux branchages ont attendu plus longtemps que les autres avant de s'attaquer aux larves, et s'en sont saisis avec davantage de précaution. Cette leçon de choses, qui aurait sans doute ravi Darwin, lui-même passionné par les vers de terre, prouve que le mimétisme sans camouflage - les chenilles, posées sur un sol nu, étaient parfaitement visibles - parvient bel et bien à tromper les prédateurs, concluent les auteurs. Et qu'il s'agit d'un système défensif à part entière. Cette étude apporte un nouvel éclairage sur les mécanismes évolutifs à l'oeuvre dans le couple prédateur-proie. Les biologistes mettaient jusqu'ici l'accent sur le développement des facultés sensorielles, permettant au mangeur de repérer le mangé sous son déguisement. Dans l'expérience relatée, l'hésitation des oisillons ayant mordillé du bois à se jeter ensuite sur une pitance de même aspect suggère que sont également en jeu les capacités cognitives. L'aptitude à déjouer les pièges du mimétisme pourrait constituer un facteur de sélection jusqu'alors négligé. (Skelhorn et al. in Science du 1er janvier) Pierre Le Hir
01/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/01/le-mimetisme-art-guerrier-animal_1286552_3244.html
Des neurochimistes identifient une molécule de la panique
L'orexine, un neuropeptide qui joue un rôle crucial dans l'éveil, semble impliquée dans certains troubles de l'anxiété.
Une attaque de panique constitue un trouble de l'anxiété sévère, où les symptômes mentaux et physiques semblent se nourrir mutuellement : palpitations cardiaques, gêne respiratoire, transpiration, vertige, se combiner à une sensation de perte de contrôle de soi, à l'impression d'être en train de mourir. Si les origines biologique et psychologique de ces crises sont parfois difficiles à démêler, il a été démontré qu'elles peuvent être induites, tant chez l'homme que chez l'animal, par du lactate de sodium ou des inhalations de CO 2 . Des médicaments permettent de les juguler, mais ils ne sont pas sans inconvénients (risque de dépendance). Une nouvelle étude illustre le rôle d'une hormone dans ce trouble anxieux, pouvant ouvrir des pistes thérapeutiques. Une équipe américano-suédoise a en effet constaté que certaines molécules inhibitrices de l'orexine (aussi nommée "hypocrétine") pouvaient réduire les comportements de panique observés chez des rats sélectionnés pour présenter ces troubles d'angoisse. Philip Johnson (Université de l'Indiana) et ses collègues ont aussi montré que l'activation des neurones qui synthétisent l'orexine est nécessaire à l'apparition de la panique chez ces rats. Enfin, ils ont constaté que des patients sujets à l'anxiété panique présentaient des concentrations d'orexine dans le fluide cérébro-spinal plus élevées que dans un groupe contrôle. L'orexine a beaucoup été étudiée pour son rôle dans l'éveil et ses troubles : certains chiens narcoleptiques présentent des mutations de récepteurs à orexine, tandis que chez l'homme, c'est la molécule stimulant ces récepteurs qui fait défaut. Récemment, une équipe dirigée par Jian-Sheng Lin (unité Inserm 628, université Claude-Bernard, Lyon) a montré que des souris manipulées pour ne pas exprimer l'orexine entraient directement en sommeil paradoxal et en catalepsie. Concernant la panique, "corrélation n'est pas causalité", rappelle M. Lin, qui se demande si les antagonistes de l'orexine utilisés par ses confrères n'induisent pas simplement une somnolence chez les animaux. "Au contraire, les rats ainsi traités montrent plus d'interactions sociales et des comportements d'exploration accrus, ce qui va à l'encontre de l'hypothèse de la sédation", écrivent Philip Johnson et ses collègues. Antoine Pelissolo (Hôpital de la Pitié-Salpêtrière) juge leur étude "préliminaire, mais sérieuse, dans un domaine où les pistes thérapeutiques sont assez limitées". (Johnson et al., Nature Medecine du 27 décembre) Hervé Morin
01/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/01/des-neurochimistes-identifient-une-molecule-de-la-panique_1286557_3244.html
Un chêne survit depuis 13 000 ans sur une colline de Californie
C'est l'un des êtres vivants les plus vieux de la planète, mais il ne paie pas de mine.
C'est l'un des êtres vivants les plus vieux de la planète, mais il ne paie pas de mine : le gland de chêne de Palmer dont l'arbuste est issu a germé il y a probablement plus de 13 000 ans sur une colline de Californie, alors que la dernière ère glaciaire touchait à sa fin. Il a survécu jusqu'à aujourd'hui aux sécheresses et aux coups de foudre, non sous la forme majestueuse qu'on prête aux arbres du genre Quercus, mais sous celle d'un modeste buisson de 28 mètres par 5, ne dépassant pas 1 mètre de haut. S'il a retenu l'attention des chercheurs, c'est parce qu'il était le seul de son espèce dans un environnement aussi sec, et à si basse altitude (336 mètres), alors que ses pareils s'épanouissent généralement entre 900 et 1 500 mètres. Les scientifiques ont fait l'hypothèse que l'ensemble des repousses émanait d'un clone unique. Une analyse génétique a montré que c'était bien le cas. Restait à déterminer son ancienneté. Impossible d'utiliser la datation au radiocarbone : les termites avaient dévoré tout le bois mort. Mais, en évaluant sa croissance annuelle à partir de cernes de branches, les chercheurs ont estimé à au moins 13 000 ans le laps de temps qui lui a été nécessaire pour coloniser le fragment de colline où il a pris racine. Il y a peu de chance qu'il y subsiste encore longtemps : la ville est à ses pieds et grignote les alentours. Le chêne de Jurupa (du nom de la colline) surclasse en ancienneté Prometheus, un pin Bristlecone du Nevada vieux de 5 000 ans. Mais, dans sa catégorie des arbres "clonaux", il reste un jeunot par rapport à des peupliers faux-trembles de l'Utah : couvrant 40 hectares de forêt, ils sont issus d'un même système racinaire évalué à plus de... 80 000 ans. (May et al., "PLoS One" du 23 décembre) Hervé Morin
01/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/01/un-chene-survit-depuis-13-000-ans-sur-une-colline-de-californie_1286556_3244.html
Pleins feux sur les Jeux d'hiver de 2010
Dans l'immeuble jouxtant le siège social d'APTN, à Winnipeg, on travaille d'arrache-pied à transformer l'intérieur d'une ancienne banque en deuxième studio de télévision ultramoderne.
Dans l'immeuble jouxtant le siège social d'APTN, à Winnipeg, on travaille d'arrache-pied à transformer l'intérieur d'une ancienne banque en deuxième studio de télévision ultramoderne. C'est de là que seront retransmises, du 12 au 28 février, les émissions consacrées aux Jeux olympiques d'hiver qui auront lieu à Vancouver et Whistler, sur la Côte ouest du Canada. APTN en est, en effet, l'un des diffuseurs officiels, au sein d'un consortium de douze chaînes canadiennes, mais il oeuvrera à sa manière, c'est-à-dire en grande partie en langues autochtones. "Cette désignation est l'une de nos plus grandes réussites", se réjouit Jean LaRose, directeur général de cette chaîne nommée "premier radiodiffuseur autochtone officiel" des Jeux d'hiver. Le réseau proposera une couverture, en direct et en haute définition, des compétitions et cérémonies, ainsi que des reportages et des émissions d'information "olympique". Cette programmation spéciale, de quatorze à seize heures par jour, sera structurée en trois blocs "linguistiques" : trois à quatre heures en anglais, autant en français (avec la seule couverture vraiment nationale en français) et autant dans... huit langues autochtones, particulièrement aux heures de grande écoute. "Nous n'avions pas de journalistes sportifs innus, cris ou dénés, explique M. LaRose. Nous avons donc mis à profit les six derniers mois pour former une équipe d'une trentaine d'autochtones de différentes langues. Avec l'aide de journalistes sportifs, pour la plupart retraités de Radio Canada, ils ont appris les subtilités de chaque sport et la terminologie particulière qui y est associée. L'objectif est qu'ils puissent commenter les compétitions, dans une ou plusieurs langues autochtones, et ce de façon professionnelle autant que colorée." Pour la première fois, des Inuits ou des Cris pourront ainsi suivre un événement de cette envergure dans leur langue ! Le hic ? Bien des termes sportifs comme luge ou skeleton, n'existent pas en inuktitut ou en tlingit... APTN a trouvé la solution : à chaque "limite" linguistique rencontrée, l'équipe s'adresse à la communauté visée pour demander, par exemple, l'aide des aînés. Ensemble, ils trouvent alors un nouveau terme qui viendra "enrichir" cette langue. A. Ps
01/01/2010
actualite-medias
https://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2010/01/01/pleins-feux-sur-les-jeux-d-hiver-de-2010_1286506_3236.html
Ke Khu We Meyo Ooske-Uskwinisse !
Depuis dix ans, la chaîne canadienne APTN, qui émet dans vingt langues autochtones, s'est imposée. Elle retransmettra même les JO de Vancouver.
Mitho Makosi Kesikansi-Ke Khu We Meyo Ooske-Uskwinisse, Quviasuvvisiutsiarit ammalu Qitinngumarik, Merry Christmas and Happy New Year, joyeux Noël et bonne année !" Sur la chaîne de télévision APTN, le multilinguisme est une affaire entendue, non seulement pour célébrer l'année nouvelle mais dans toute sa programmation. Le Réseau de télévision des peuples autochtones (Aboriginal Peoples Television Network) a terminé 2009 en fêtant son dixième anniversaire, fort d'une expérience unique au monde : celle de donner parole et image aux quelque 633 "communautés" amérindiennes du Canada, sans compter celles des métis et des Inuits du Grand Nord, aux langues et modes de vie extrêmement variés. L'une des principales originalités du réseau est de diffuser ses émissions en une vingtaine de langues autochtones, du cri à l'inuktitut, en passant par le mohawk, le déné, l'innu, le gwichin ou le miqma'aq et bien sûr l'anglais et le français, les deux langues officielles du Canada qui permettent à tous les autochtones du pays de se comprendre entre eux. Car ce projet, explique son directeur général, Jean LaRose, lui-même Abénakis du Québec, a pour ambition de "faire connaître le parcours de nos peuples, célébrer nos cultures, inspirer nos enfants et honorer la sagesse de nos aînés", autrement dit d'être le reflet fidèle et positif des peuples autochtones du Canada, soit 1,2 million de personnes parlant 52 langues. Quoi de mieux, à cet égard, qu'un réseau télévisuel pour lier des communautés disséminées dans un immense pays comme le Canada ?, se sont dit ceux qui l'ont bâti. La tâche n'a pas été facile. Si le siège social d'APTN a aujourd'hui pignon sur rue en plein centre-ville de Winnipeg, capitale du Manitoba abritant la plus forte concentration d'autochtones au Canada, son ancêtre du Grand Nord, TVNC (Television Northern Canada), était, lui, au bord de la faillite quand le nouveau projet pancanadien a émergé. Soutenu par l'Assemblée des premières nations, instance politique des autochtones, APTN a obtenu sa licence de radiodiffusion, en 1999, sous une pluie de critiques, certains opposants du milieu de la télévision n'hésitant pas à la qualifier de "mauvaise expérience de transformation sociale", voire de "taxe de culpabilité" imposée aux Canadiens. Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) a tenu bon, lui accordant même une place de choix dans le service de base de chaînes "imposées" aux câblodistributeurs, au même titre qu'un canal météo et une chaîne sur les travaux parlementaires. A la clé de ce service, offert à dix millions de foyers canadiens, une redevance qui atteint aujourd'hui 0,25 dollar canadien (0,16 euro) par mois et par abonné. "Même après notre lancement, souligne toutefois M. LaRose, les câblodistributeurs n'ont pas désarmé, modifiant sans prévenir le numéro de la chaîne ou la repoussant très loin dans la liste des postes offerts à l'écran, en prétextant qu'elle n'était pas regardée. En fait, notre auditoire est très sous-estimé", ajoute-t-il en avançant le chiffre de deux millions de téléspectateurs réguliers, soit quatre fois plus que les estimations officielles. APTN a tout de même réussi à faire sa place dans l'univers de la télé canadienne, avec un budget plutôt modeste (42 millions de dollars canadiens, en 2009) et sans subvention gouvernementale. La "compagnie sans but lucratif" diffuse à partir de trois signaux régionaux - Est (de Terre-Neuve à l'Ontario), Ouest (du Manitoba à la Colombie-Britannique) et Nord (au nord du 60e parallèle) -, en plus d'avoir, depuis avril 2008, un canal à haute définition pancanadien. Chacun a sa part de production originale, adaptée à son public, avec, par exemple, davantage d'émissions en français, à l'est du Canada, et davantage en langues autochtones, au nord. Le réseau a sa régie centrale, à Winnipeg, mais aussi des rédactions et studios dans dix autres villes canadiennes, employant 140 personnes, dont 75 % d'autochtones. "Dans l'équipe de direction, nous sommes même 100 % d'autochtones", précise M. LaRose. Grâce à ses efforts pour la formation et la promotion interne, APTN a même figuré, en 2009, parmi les "25 meilleurs employeurs du Manitoba". Sur le petit écran, le réseau a ses programmes vedettes : bulletins d'informations, émissions de variétés, dramatiques comme le récent Blackstone (sur les dessous du pouvoir dans une réserve indienne) ou comédies comme "By the Rapids" (série sur l'arrivée d'un adolescent de la ville dans une communauté autochtone). "Wapos Bay" est la série fétiche des enfants, diffusée en anglais, français, cri et inuktitut, qui débute sa quatrième saison, avec les nouvelles aventures de trois enfants dans le Grand Nord. En dix ans, le réseau a relevé un véritable défi en élaborant une programmation à fort contenu autochtone (80 %), ce qui a permis de créer une réelle industrie nationale de production autochtone. Début 1999, ils n'étaient qu'une poignée de producteurs indépendants. "Les deux premières années ont été très difficiles, avoue Jean LaRose, alors qu'aujourd'hui il y en a plus de quatre-vingts, alimentant le réseau en émissions de toutes sortes" : comédies, téléréalités, dramatiques, documentaires, émissions de sport et de variétés, émissions pour enfants... L'organisme public Téléfilm Canada l'a aidé avec son programme de soutien aux scénaristes, "Place aux histoires autochtones". APTN a aussi misé sur les coproductions avec d'autres chaînes canadiennes ou étrangères. Chef de file du réseau World Indigenous Television Broadcasters Network (WITBN), il diffuse ainsi 20 % d'émissions autochtones produites en Nouvelle-Zélande, en Australie, aux Etats-Unis, en Amérique centrale ou en Amérique du Sud. Juste retour des choses pour APTN qui a servi, dans le passé, de modèle de télévision aux Maoris de Nouvelle-Zélande et aux autochtones australiens... Représenter dans sa programmation, au travers d'émissions d'information, de variétés ou de fiction, l'ensemble des communautés autochtones du Canada, dans leur diversité de cultures et de langues, est un autre élément fort de la mission d'APTN. Son ambition - affichée dans le slogan "APTN, c'est plus que de la télé" - est de les aider à mieux se connaître et à les faire connaître des non-autochtones. "Chaque émission, explique M. LaRose, est réalisée en deux versions au moins, une dans une langue autochtone, l'autre en anglais ou en français, pour être diffusée à différentes heures et comprises par le plus grand nombre." APTN multiplie aussi les émissions pour les jeunes dans leur langue d'origine. Et se prépare à demander, en 2012, lors de son prochain renouvellement de licence, le droit d'opérer deux chaînes supplémentaires, l'une pour les jeunes, l'autre strictement en langue autochtone, par blocs d'une journée complète de diffusion, par exemple en cri ou en inuktitut. Histoire de faire sa part pour contrer l'extinction accélérée des langues autochtones au Canada. Anne Pélouas
01/01/2010
actualite-medias
https://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2010/01/01/ke-khu-we-meyo-ooske-uskwinisse_1286505_3236.html
En Suède, la taxe carbone est passée à 109 euros la tonne
Instauré en 1991, l'impôt sur les énergies fossiles ménage la compétitivité des entreprises.
Souvent citée en exemple lors des débats sur la taxe carbone, la taxe suédoise prévoit aussi de généreuses dérogations pour les entreprises. Cette taxe, qui, à compter du 1er janvier 2010, est à nouveau augmentée de l'équivalent d'un euro par tonne de CO 2 , a été introduite dès 1991 en Suède. D'ailleurs, le patronat suédois ne s'oppose plus à cette taxe carbone. "La taxe carbone n'est pas trop un obstacle à la croissance, mais il faut rappeler que c'est parce que l'industrie bénéficie d'une réduction de 79 % de la taxe carbone par rapport à ce que paient les foyers, dit Torbjörn Spector, expert de la fiscalité de l'énergie à Svenskt Näringsliv, l'organisation patronale. Il faut que les industries exposées à la concurrence internationale conservent cet avantage sous peine d'être pénalisées." Cet argument est particulièrement important pour la Suède, qui compte de très nombreuses multinationales par rapport à la taille de sa population et est donc très dépendante de ses exportations. La satisfaction est la même du côté du gouvernement de centre-droit où l'on répète que cette taxe ne gêne en rien la croissance : en vingt ans, les rejets de gaz à effet de serre ont été réduits de 9 % quand, dans le même temps, la croissance a augmenté de 48 %. D'après les estimations du ministère des finances, les émissions suédoises de CO 2 auraient été 20 % plus élevées en 2010 sans la taxe carbone. L'Etat suédois perçoit chaque année 15 milliards de couronnes (1,4 milliard d'euros) provenant de cette taxe. En 1991, lors de son lancement, la taxe sur le CO 2 était de 27 euros par tonne. Aujourd'hui, elle atteint 109 euros par tonne de CO 2 , soit six fois plus que le prix envisagé en France. FIDÈLES À LEUR PRINCIPE Outre son coût bien plus élevé et sa générosité pour les entreprises, la taxe suédoise n'introduit pas de différence tarifaire en fonction de critères sociaux et géographiques. A cet égard, les Suédois sont fidèles à leur principe général très peu favorable aux dérogations fiscales. Les hausses successives des taxes sur les carburants ont diminué les rejets de CO 2 liés au trafic de 1,5 à 3,2 millions de tonnes de CO 2 par an entre 1990 et 2005, essentiellement des voitures individuelles. La taxe carbone a provoqué la quasi-disparition des chauffages urbains au fioul. Le gouvernement suédois met en avant que la Suède compte parmi les pays de l'UE avec les plus faibles rejets de CO 2 (6,7 tonnes par habitant et par an contre 9,3 tonnes pour la moyenne de l'UE à 27). Durant sa présidence qui s'est achevée le 31 décembre, la Suède avait tenté de plaider en faveur d'une taxe carbone à l'échelle européenne. C'était pour Stockholm une façon parmi d'autres de tenter d'arriver au sommet de Copenhague avec une proposition forte et crédible. Les Suédois avaient pris soin de préciser qu'il ne s'agirait pas d'une taxe harmonisée et que chaque pays, sur le principe de la TVA, en resterait maître. La proposition est restée lettre morte pour l'instant. Olivier Truc (Stockholm, correspondance) et Olivier Truc
01/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/01/en-suede-la-taxe-carbone-est-passee-a-109-euros-la-tonne_1286512_3244.html
En un an, plus de la moitié des universités sont passées à l'autonomie
Les 51 établissements autonomes gèrent leur masse salariale et leurs ressources humaines.
Au 1er janvier, 33 nouvelles universités passent à l'autonomie. Sur les 83 universités françaises, elles sont maintenant 51 à avoir opté pour ce mode de gestion prévu par la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU) d'août 2007. Le passage aux responsabilités et compétences élargies (RCE) autorise les établissements à gérer leur masse salariale aussi bien que leurs ressources humaines. Une révolution culturelle en marche depuis janvier 2009, date à laquelle une première vague d'établissements s'est lancée, rejointe aujourd'hui par 33 nouvelles venues. Concrètement, les 51 universités autonomes gèrent une masse salariale de 5,3 milliards d'euros et près de 100 000 emplois. "Le vrai changement, c'est que nos établissements ont appris à gérer, puisque ce transfert de compétences a triplé nos budgets", commente Lionel Collet, le président de la Conférence des présidents d'universités. Plutôt que de négocier leurs postes avec le ministère, ils peuvent recruter eux-mêmes. La commission de spécialistes, qui se réunissait à dates fixes, a donc laissé place à un comité de sélection qui offre bien plus de souplesse. De même, les rémunérations à offrir aux enseignants peuvent sortir du carcan de la traditionnelle grille des salaires. "Ce qui permet déjà à certains d'aller chercher des enseignants très pointus à l'étranger, se réjouit Lionel Collet. Même si tout ne change pas en un jour." Ou d'améliorer le quotidien des personnels. L'université de La Rochelle, autonome depuis la première heure, a pu dégager 350 000 euros - soit 1 % de sa masse salariale -, grâce à une gestion plus serrée des fonds qui lui étaient alloués. Elle a redistribué cette manne sous forme de primes à ses salariés, enseignants-chercheurs aussi bien que personnels techniques. Derrière cette évolution de gestion, c'est la "performance", chère à la ministre de l'enseignement supérieur, Valérie Pécresse, qui est recherchée. Et Gérard Blanchard, président de l'établissement de La Rochelle, estime qu'un pas est bel et bien en train d'être franchi dans ce sens dans son établissement qui accueille 7 000 étudiants. "L'autonomie nous a permis de créer une fondation qui nous aide à améliorer notre démarche pédagogique. Ainsi, allons-nous ouvrir le 5 janvier un diplôme "maison" qui, en 130 heures de cours, formera nos étudiants de masters à une approche plus tranversale de leur futur métier d'ingénieur", résume le président de La Rochelle. Cette formation complémentaire a été bâtie avec les industriels présents dans la fondation. Elle devrait contribuer à améliorer le taux d'insertion des étudiants en master à qui elle est destinée. Un élément d'importance à l'heure où un cinquième du budget des universités sera corrélé à leurs performances. Parmi les 33 établissements qui rejoignent la liste des autonomes figurent essentiellement des universités pluridisciplinaires comme Paris-XII, Paris-XIII, Nantes, Dijon, Besançon, Avignon, Brest, Lorient. Mais aussi des universités plus spécialisées : en droit (Lyon-III, Paris-II) ou en sciences exactes (Rennes-I, Toulouse-III). A l'exception notable de Rennes-II, et plus marginalement de Bordeaux-II, très peu d'universités de sciences humaines sont pour l'instant passées aux RCE. Sur la trentaine d'établissements qui restent encore hors processus d'autonomie, soit parce qu'elles ne l'ont pas encore demandé, soit parce qu'elles ne l'ont pas obtenue, figurent des bastions des sciences humaines comme Lyon-II, Toulouse-II, Grenoble-III ou Paris-I, III, IV et VIII. Il leur reste jusqu'au 1er janvier 2012 pour s'y préparer. Deux ans pour que, selon l'expression de Valérie Pécresse, "l'expérience donne envie aux autres" Maryline Baumard , Philippe Jacqué et . Maryline Baumard et Philippe Jacqué
01/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/01/en-un-an-plus-de-la-moitie-des-universites-sont-passees-a-l-autonomie_1286534_3224.html
Mauvaise élève, la Russie n'a pas transmis ses données
Les autorités russes n'ont pas voulu participer à l'étude menée par l'association Robin des bois.
Les autorités russes n'ont pas voulu participer à l'étude menée par l'association Robin des bois, bien que - ou peut-être parce que - la situation environnementale du nord du pays est particulièrement dégradée. Le Grand Nord russe souffre en effet de plusieurs maux : pollution industrielle de l'air et de l'eau en raison de l'exploitation de matières premières, et radioactivité et pollution nucléaire là où des installations militaires ont été déployées. Le problème est d'autant plus grave que la région est assez peuplée : sur quatre millions de terriens vivant dans la région arctique, deux millions vivent en Russie. Mourmansk (300 000 habitants) et Norilsk (200 000 habitants) sont les plus grandes villes du monde établies au nord du cercle arctique. La ville de Norilsk constitue un exemple du désastre écologique en cours ; l'ONG américaine Blacksmith Institute en a d'ailleurs fait l'une des dix villes les plus polluées du monde en 2008. Centre d'extraction de nickel, mais aussi de cobalt, de cuivre et de charbon, la région rejette chaque année plus de 2 000 000 de tonnes de dioxyde de soufre. Le taux de maladies respiratoires, notamment chez les enfants, y est particulièrement élevé. Plus à l'ouest, la péninsule de Kola est, elle, doublement touchée : la région, au coeur du système de défense de l'URSS, compte un grand nombre de "cimetières" de sous-marins nucléaires, notamment autour de Mourmansk. Plus d'une cinquantaine d'appareils n'ont toujours pas été désarmés. Une ONG norvégienne, Bellona, a lancé en vain un signal d'alarme : les installations qui accueillent les vieux sous-marins sont également désuètes et pourraient facilement contaminer l'air et l'eau environnants. La région souffre également de pollution industrielle : la ville de Nickel, à la frontière norvégienne, crache 100 000 tonnes de dioxyde de soufre par an, soit quatre fois plus que l'ensemble des rejets norvégiens... NOUVELLE STRATÉGIE Enfin, la grande île de Nouvelle-Zemble, encore plus au nord, est un cas mystérieux : site de prédilection pour les essais nucléaires du régime soviétique, la région est inhabitée et difficilement accessible. Les taux de strontium et de césium y seraient astronomiques, et certains déchets nucléaires y auraient été entreposés afin de soulager des régions habitées, notamment la péninsule de Kola. Face à ce florilège de sites en danger, le gouvernement russe semble davantage préoccupé par le développement de ses régions nordiques. En 2008, le président Dmitri Medvedev a présenté sa politique pour le Nord : l'Etat russe entrevoit un programme en douze ans, qui s'appuie d'abord sur une réappropriation de la région, notamment en déterminant les frontières internationales, encore parfois floues. En 2007, la grande médiatisation de la pose du drapeau russe à 4 200 m au fond des mers glacées par une équipe d'explorateurs marins avait déjà laissé entrevoir cette nouvelle stratégie. Vers la fin de la prochaine décennie, Moscou entend faire du Grand Nord la "base stratégique de (ses) ressources naturelles", au risque de sacrifier encore davantage l'écosystème déjà affaibli de la région. Alexandre Billette
01/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/01/mauvaise-eleve-la-russie-n-a-pas-transmis-ses-donnees_1286511_3244.html
L'Arctique est souillé par une multitude de pollutions
L'ONG Robin des Bois montre que des activités locales ont un impact sur l'environnement.
L'environnement unique et fragile de l'Arctique est soumis à de multiples pollutions, qui, pour beaucoup, proviennent de l'extérieur : réchauffement climatique, substances toxiques transportées par les courants atmosphériques et océaniques vers le pôle... Mais la zone connaît aussi une pollution endogène, moins étudiée, dont l'association de protection de l'environnement Robin des Bois dresse, pour la première fois, dans une étude publiée en décembre, un tableau général. En compilant les données fournies par six des pays riverains de l'océan Arctique (la Russie n'a pas transmis ses données), l'association dénombre 2 750 sites pollués dans la zone. "C'est un nombre anormalement élevé par rapport à la densité de population sur place, qui est très faible", commente Jacky Bonnemains, président de Robin des Bois. Bases militaires et scientifiques, prospection, exploitation et distribution de gaz et de pétrole, stockage de carburants, complexes miniers et sidérurgiques, décharges de déchets ménagers sont responsables de ces pollutions. L'éloignement des sites de stockage et d'élimination des déchets, les coûts de transport, la faible densité de la population, ont incité les producteurs de déchets à les abandonner sur place. Les substances toxiques les plus présentes sont les hydrocarbures, les métaux lourds (plomb, mercure, cadmium), et les polluants organiques persistants (pesticides, PCB), potentiellement dangereux pour l'environnement et la santé des populations locales (les pollutions radioactives ne font pas partie de cet inventaire). Les Inuits du Groenland et du Canada présentent des taux de mercure et de PCB dans le sang parmi les plus élevés au monde. Cette contamination est en général attribuée au régime alimentaire des populations autochtones, qui se nourrissent de mammifères marins dans la graisse desquels les polluants organiques persistants s'accumulent. "La contamination d'origine locale pourrait également être importante", selon Jacky Bonnemains. Les sites pollués se situent en bordure de l'océan, de lacs ou de fleuves. "Ce sont des abcès environnementaux et des voies de transfert des polluants vers les eaux douces et marines", prévient l'association. Une menace accrue par le réchauffement climatique. "On a longtemps considéré le gel comme un mode de confinement des substances toxiques contenues dans les déchets, explique M. Bonnemains. Mais ils pourraient être remobilisés par la fonte du permafrost." LUTTE CONCERTÉE Parmi les pays interrogés, seule la Russie n'a pas fourni les informations demandées, bien que sa zone arctique soit notoirement polluée. Les autres pays disposent d'inventaires nationaux. L'objectif de l'association, en "décloisonnant" ces données, est d'inciter les pays à conduire une action de lutte concertée contre la pollution. Pour l'heure, ces dernières sont menées, à des rythmes inégaux, par les Etats. Les mesures consistent le plus souvent à regrouper les déchets et à les stocker sur place dans des fosses étanches. Les transferts vers des centres de traitement, très coûteux, sont rares. Les pays les plus avancés dans la mise en sécurité des déchets sont les Etats-Unis et le Canada, suivis des pays scandinaves. Le Groenland, qui vient d'accéder à l'autonomie, arrive en dernier - sans compter la Russie. Pour Robin des Bois, les Etats concernés doivent résorber les pollutions existantes, mais aussi prévenir l'abandon de déchets dans le futur. "Si tous les projets d'activité industrielle en Arctique gèrent les déchets de la même manière que les activités pionnières, on court à la catastrophe", affirme Jacky Bonnemains. Hydrocarbures, pêche, transports maritimes, tourisme : l'Arctique est aujourd'hui l'objet de toutes les convoitises, et les Etats riverains s'affrontent pour faire valoir leur souveraineté dans la zone. Les écologistes rêvent d'un statut protecteur comparable à celui de l'Antarctique, signé en 1959, qui interdit tant les activités militaires que l'exploitation des ressources minérales. Mais les Etats concernés y sont hostiles, car les projets d'exploitation sont légion : au Canada, par exemple, un consortium international espère y exploiter des champs de gaz, qu'il faudra relier aux réseaux existant par 1 200 km de pipelines. Mercredi 30 décembre, une commission a jugé le projet acceptable. Mais seulement à condition que les compagnies respectent 176 recommandations pour en minimiser l'impact. Gaëlle Dupont
01/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/01/l-arctique-est-souille-par-une-multitude-de-pollutions_1286508_3244.html
Sous haute surveillance policière, la nuit du réveillon s'est passée dans le calme
Le ministère de l'intérieur fait état de 405 interpellations qui ont entraîné 398 gardes à vue.
De Parisiens, il n'y en a guère. Sous les arbres ruisselant de lumières qui bordent l'avenue des Champs-Elysées, les fêtards déambulent en hordes chaloupantes, joyeuses, frigorifiées. On s'interpelle en italien, en russe, en turc, en anglais... Malgré quelques chapeaux pointus de carnaval, le bonnet de laine et la toque dominent dans le froid de gueux. Bien avant minuit, certains ont déjà sorti le champagne. D'autres se réchauffent un instant, massés sur les grilles du métro, avant de reprendre la marche moutonnière vers l'Arc de triomphe. A partir de 23 heures, plus aucune voiture. Une marée de deux cent mille badauds a envahi l'espace – chaussée incluse –, de la place de l'Etoile à celle de la Concorde. L'an dernier, ils étaient cinq cent cinquante mille. Un couple avec leur gamin de 11 ans, s'est retrouvé sur les Champs en sortant du Palais de la découverte. Ils sont restés dans le quartier "pour voir", mais le regretteraient presque. Comme une déferlante, la foule semble vouloir tout emporter. On est coincé, ballotté, pas moyen de s'échapper. Surgit une bande de Peaux-rouges : des garçons de 15 ans remontent l'avenue au pas de charge, scandant "Cergy !" – leur cri de guerre. Une fille enveloppée du drapeau portugais sourit. Plus loin, vers la rue de Washington, un Brésilien pose pour un objectif en brandissant l'étendard de son club de foot. Un groupe d'adolescents, filles et garçons, hurle "Viva l'Algérie !" Alentour, des patrouilles de policiers, gendarmes et CRS arpentent les trottoirs ; pas une rue qui ne soit jalonnée de fourgons de police. Une présence tellement lourde qu'elle "inquiète" ce père de famille. "On se croirait en guerre", observe-t-il. "Moi, au contraire, ça me rassure", lance une sexagénaire, venue de Nanterre avec ses sœurs, nièces et petits-enfants. Rassurer était bien l'objectif du ministère de l'intérieur en cette dernière nuit de l'année, occasion de traditionnels débordements. Le ministre Brice Hortefeux, s'y est employé, multipliant les visites sur le terrain dans la soirée, vérifiant avec les responsables policiers la bonne mise en œuvre des plans de sécurité. Pour que ce réveillon ne figure pas dans les annales comme un record d'insécurité, les forces de l'ordre réquisitionnées se sont largement déployées. Sur l'ensemble du territoire, selon le ministère de l'intérieur, on a compté quatre cent cinq interpellations, dont trois cent quatre-vingt-dix-huit gardes à vue : des flagrants délits de tentatives d'incendie de véhicules, de poubelles et de jets de projectiles incendiaires sur les forces publiques. Dans l'attente du bilan définitif du ministère de l'intérieur, qui devait paraître dans la journée du 1er janvier, les évaluations locales indiquent une nuit plutôt calme. "Comme un week-end ordinaire", estiment les forces de police de la cellule mise en place à Bordeaux, où une vingtaine d'interpellations a eu lieu, essentiellement pour incendie ou dégradation de voitures. Dans l'agglomération nantaise, le préfet, Jean Daubigny, estimait en milieu de nuit que "moins d'une dizaine de véhicules avaient été incendiés". Une tendance "à la baisse par rapport à l'année précédente",où trente-deux véhicules avaient brûlé, contre une quarantaine en 2007. Deux escadrons de gendarmes mobiles étaient cependant postés en renfort pour quadriller l'ouest et le nord de ville. Dans le quartier nantais sensible de Malakoff, leurs véhicules ont essuyé jets de pierres ou de bouteilles et tirs de pétards. Mais aucun affrontement n'a eu lieu. Dans la métropole lilloise, la prévention semble avoir porté ses fruits. Six interpellations de début de nuit – dont deux à Roubaix – de jeunes qui s'approvisionnaient en essence à pied ont marqué une soirée dont le bilan s'avère meilleur qu'en 2008. A l'autre bout du pays, l'atmosphère était à peine plus tendue. Vingt et un véhicules ont été incendiés dans les Alpes-Maritimes, contre vingt l'an dernier, selon le bilan la direction départementale de la sécurité publique à 3 heures et demie, vendredi 1er janvier. Là aussi, les incendies ont essentiellement eu lieu dans les quartiers sensibles : treize feux de véhicules dans le quartier de l'Ariane à Nice, huit à Vallauris, dans la cité de la Zaïne. A Strasbourg, ville traditionnellement phare en matière de voitures brûlées, les estimations indiquent une décrue des violences par rapport à l'an dernier. Cette comptabilité, dont l'enjeu majeur était de rester au-dessous des chiffres de l'an dernier, n'a pas entaché le réveillon des flâneurs des Champs-Elysées. "Vous pourriez nous prendre en photo ?", demandait une tribu de Drômois posant devant l'entrée du restaurant Le Fouquet's tandis qu'un gang en jupons et collants fluo – une Australienne, une Américaine et une Canadienne – espérait un feu d'artifice, ou qu'un couple de Brésiliens cherchait le chemin de la Tour Eiffel... Puis, d'un coup, une rumeur a suspendu gestes et conversations. C'était l'heure. De son cabas, une Russe gigantesque à parka jaune a tiré champagne et gobelets. Dans une explosion de rires, à la lueur de fusées rouges et vertes griffant joyeusement la nuit glaciale, les bouchons ont sauté, saluant l'an 2010. Catherine Simon, Patricia Jolly avec Paul Barelli (Nice), Claudia Courtois (Bordeaux), Geoffroy Deffrennes (Lille), Emmanuel Vautier (Nantes)
01/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/01/sous-haute-surveillance-policiere-la-nuit-du-reveillon-s-est-passee-dans-le-calme_1286533_3224.html
1er janvier 2010 : augmentations et revalorisations
Le smic passe à 8,86 euros de l'heure, le forfait hospitalier à 18 euros, le prix du TGV augmente.
De la revalorisation des prestations à l'augmentation des prélèvements, ce qui entre en vigueur au 1er janvier. Finances Niches fiscales Le plafond des niches fiscales baisse à 20 000 euros plus 8 % du revenu imposable. Prélèvements sociaux La taxe sur l'intéressement, la participation ou l'épargne salariale est doublée, passant à 4 %, comme les prélèvements sociaux sur les retraites chapeaux. Les plus-values mobilières sont désormais soumises aux cotisations sociales dès le premier euro. Les contrats d'assurance-vie, jusqu'alors exonérés de prélèvements sociaux au décès du bénéficiaire, perdent cet avantage. Retraite Pension de réversion Les 600 000 retraités, veufs ou veuves, qui touchent moins de 800 euros par mois et bénéficient d'une pension de réversion vont voir cette prestation revalorisée de 11,1 %. Durée de cotisation La durée de cotisation pour prétendre à une pension de retraite passe à 162 trimestres. Il faudra attendre le 1er avril pour une éventuelle revalorisation des pensions. Famille Les pères d'enfants nés à compter de 2010 pourront bénéficier en partie de la majoration de durée d'assurance (MDA) de deux ans par enfant qui était jusqu'alors attribuées aux seules mères salariées du privé. Santé Accidents du travail Les indemnités journalières versées par la Sécurité sociale sont désormais soumises à hauteur de 50 % à l'impôt sur le revenu. Mutuelles Les cotisations des mutuelles santé devraient augmenter de 5 % en moyenne en 2010, pour tenir compte de la hausse des dépenses de santé et du budget de la "Sécu", a indiqué lundi 28 décembre le président de la Mutualité française, Jean-Pierre Davant, dans Le Parisien/Aujourd'hui en France. Hôpital Le forfait hospitalier journalier passe de 16 à 18 euros. C'est la dernière des trois augmentations décidées dans le cadre de la réforme de l'assurance-maladie de 2004. Transports Automobile La prime à la casse passe de 1 000 à 700 euros, et tombera à 500 au 1er juillet. TGV et taxi Les tarifs des TGV vont augmenter de 1,9 % en moyenne. La course en taxi de 1,2 %. Travail Smic Le salaire minimum va être porté à 8,86 euros l'heure, soit 1 343,77 euros mensuels brut pour 35 heures hebdomadaires de travail. A compter de 2010, la revalorisation automatique du smic aura lieu tous les 1er janvier. Chômage Le mode d'indemnisation du chômage partiel intègre désormais les primes et prend en compte toutes les périodes de chômage partiel. Cette décision fait suite à un accord entre patronat et syndicats. Contrat de travail Le contrat unique d'insertion, CUI, harmonisant et assouplissant les actuels contrats aidés destinés aux exclus du marché de l'emploi, entre en vigueur le 1er janvier. Solidarité Minima sociaux Le revenu de solidarité active (RSA) passe à 460,09 euros mensuels pour une personne seule et sans enfants. Il augmente ainsi de 1,2 %, comme l'allocation de solidarité spécifique (ASS).
01/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/01/1er-janvier-2010-augmentations-et-revalorisations_1286532_3224.html
Après la fermeture de son unique centrale nucléaire, la Lituanie prévoit une hausse des tarifs de l'électricité
Le pays, durement touché par la crise, va devoir importer près de la moitié de ses besoins.
La Lituanie a fermé jeudi 31 décembre 2009 le second réacteur de son unique centrale nucléaire d'Ignalina, au nord-est de Vilnius, non loin de la frontière avec la Biélorussie. Le pays balte, qui était jusque-là l'un des plus dépendants au monde du nucléaire, respecte ainsi la condition que Bruxelles lui avait imposée pour pouvoir adhérer à l'Union européenne (UE) en 2004. En dépit des nombreuses mises à jour de sécurité effectuées depuis la restauration de l'indépendance en 1991, cette centrale RMBK avait le tort d'être du même type que celle de Tchernobyl, c'est-à-dire sans enceinte de confinement. La fermeture de la centrale fut l'une des conditions préalables à l'adhésion à l'UE, et les Lituaniens s'étaient résignés à ce que certains avaient alors de qualifié de "diktat". Conformément au calendrier, le premier réacteur avait été fermé fin 2004. Depuis, de nombreux Lituaniens s'étaient battus pour tenter de prolonger la durée de vie de la centrale. En 2008, un référendum avait même été organisé dans ce sens. Faute de participation suffisante, il n'avait pas été validé, mais une écrasante majorité s'était exprimée en faveur d'un prolongement de l'exploitation. Finalement, l'Etat a choisi de tenir ses engagements internationaux. EVITER LA DÉPENDANCE Après avoir été exportatrice d'électricité, la Lituanie, durement frappée par la crise économique, se retrouve importatrice. Le gouvernement a annoncé qu'en conséquence le prix de l'électricité devrait augmenter de 30 %, ce qui pourrait contribuer à accroître l'inflation de 0,8 % en 2010. Les besoins lituaniens en électricité devraient s'élever, cette année, à 9,1 milliards de kilowattheures (kWh). Ce sont donc environ 4 milliards de kWh qui devront être importés. Pour cette ancienne république soviétique, l'inquiétude, hier comme aujourd'hui, est bien sûr d'éviter autant que possible la dépendance au gaz russe. Lietuvos Energija, l'opérateur du réseau lituanien, a annoncé que pourvoir le pays en électricité ne serait pas un problème, car la compagnie était déjà rodée à ce type de demande lorsque la centrale devait être fermée pour maintenance ou défaillance. A court terme, plusieurs solutions sont mises en oeuvre, qu'il s'agisse de solutions domestiques ou extérieures. "Un accord a été signé avec l'Estonie. Un accord général a été conclu avec la Biélorussie, et nous (discutons) avec l'Ukraine", a déclaré Arvydas Sekmokas, le ministre lituanien de l'énergie. Ce sont notamment les questions de transit par la Biélorussie qui doivent être réglées. Vilnius a admis que la question des importations ukrainiennes via la Biélorussie n'était pas réglée. Andrius Kubilius, le premier ministre lituanien, a déclaré que la Russie pourrait interférer dans ces importations. "Mais la Lituanie ne se retrouvera en aucun cas sans électricité", a-t-il affirmé. A plus long terme, les Lituaniens misent sur différentes alternatives. L'une d'entre elles est un câble électrique sous-marin qui les alimenterait en partie depuis la Suède. Dans un avenir plus lointain, le pays prévoit de remplacer la centrale soviétique par une nouvelle centrale nucléaire. Celle-ci sera partagée avec l'Estonie, la Lettonie et la Pologne. L'appel d'offres a été formellement lancé le 8 décembre 2009. Les discussions ont pris du retard, et son ouverture, originellement souhaitée pour 2015, ne devrait pas se faire avant 2018, au plus tôt. Olivier Truc (Stockholm, correspondance) et Olivier Truc
01/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/01/apres-la-fermeture-de-son-unique-centrale-nucleaire-la-lituanie-prevoit-une-hausse-des-tarifs-de-l-electricite_1286546_3234.html
Le prix du gaz sera révisé chaque trimestre
L'Etat et GDF Suez ont signé, fin décembre 2009, un nouveau "contrat de service public".
Dominant sur le marché français du gaz et détenu à plus de 35 % par l'Etat, GDF Suez doit prendre des engagements vis-à-vis du gouvernement - comme le faisait Gaz de France avant sa fusion avec Suez. L'Etat et le groupe d'énergie ont signé, fin décembre 2009, un nouveau "contrat de service public" (2010-2013) dans lequel GDF Suez s'engage en matière de protection des ménages démunis, de satisfaction des clients et de sécurité d'approvisionnement de la France. Le texte prévoit un nouveau mécanisme d'ajustement des tarifs du gaz vendu aux 11 millions de clients résidentiels du groupe. Les nouvelles règles prévoient que le gouvernement fixe chaque année, par arrêté, "les barèmes" déterminant le cadre général dans lequel évoluent les prix du gaz naturel. L'Etat pourra alors réviser les coûts liés à l'entretien des infrastructures (réseau et stockage) et à la commercialisation, qui représentent la moitié du montant de la facture de gaz. "Dépolitiser" l'ajustement L'autre moitié, correspondant au prix de la matière première, sera revue chaque trimestre en fonction des prix des fournisseurs (Norvège, Algérie, Russie, Pays-Bas...). GDF Suez saisira la Commission de régulation de l'énergie (CRE) d'une demande de hausse ou de baisse, et celle-ci sera quasiment automatique. La prochaine modification des tarifs (indexés sur un panier de produits pétroliers et les taux de change) interviendra le 1er avril en application du nouveau texte. Ce mécanisme permettra au gouvernement de "dépolitiser" en partie la décision sur l'ajustement - souvent à la hausse - des tarifs. Jusqu'à présent, un certain flou l'avait poussé à recourir parfois à des manoeuvres dilatoires pour ne pas augmenter les prix du gaz et contredire sa politique en faveur du pouvoir d'achat. Au grand dam de GDF, puis de GDF Suez. "Ce contrat clarifie et renforce les conditions des évolutions tarifaires à travers un système transparent, automatique et tenant compte de l'ensemble des coûts de l'entreprise", s'est félicité le PDG de GDF Suez, Gérard Mestrallet. Le groupe estime avoir subi, ces dernières années, une perte de plus de 1,8 milliard d'euros en raison du refus des gouvernements d'ajuster les tarifs aux coûts réels d'approvisionnement. Avec ce nouveau contrat, le groupe assure également renforcer ses engagements en faveur de la sécurité des biens et des personnes - plusieurs accidents dramatiques ont causé de nombreux morts ces dernières années en France. Il va aussi doubler le fonds de solidarité en faveur des clients les plus démunis, pour le porter à 6 millions d'euros, une somme très modeste au regard des 6,5 milliards d'euros de bénéfices nets réalisés en 2008. Le gouvernement a aussi demandé au groupe un "renforcement de la sécurité d'approvisionnement" du pays : plus de 80 % de la consommation française devra être couverte par des contrats long terme (de 20 à 30 ans) ou par des ressources propres. GDF Suez investit dans l'exploration et la production de gaz (mer du Nord, Australie, golfe du Mexique, Libye, Azerbaïdjan...) pour sécuriser une partie de ses ventes. Ses dirigeants se sont fixé comme objectif de détenir l'équivalent de 1,5 milliard de barils de pétrole au cours de la prochaine décennie. Jean-Michel Bezat
01/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/01/le-prix-du-gaz-sera-revise-chaque-trimestre_1286545_3234.html
Les grands chefs s'engagent à ne plus servir de thon rouge en 2010
Les cuisiniers des Relais et Châteaux ont signé une charte à l'initiative du chef Olivier Roellinger.
Olivier Roellinger, chef connu et respecté pour avoir, depuis Cancale, rendu à la Bretagne sa place dans la compétition gourmande grâce aux produits de la mer - poissons, coquillages et crustacés - vient de frapper un grand coup en faisant adopter par tous les cuisiniers des Relais et Châteaux - en France et à l'étranger - l'engagement de ne plus servir de thon rouge de l'Atlantique et de Méditerranée dans leurs établissements à partir du 1er janvier 2010. Cette décision a été prise à la mi-novembre, à l'unanimité, lors du dernier congrès de cette association hôtelière internationale, à Biarritz, en même temps qu'elle portait le chef breton à sa vice-présidence, aux côtés de son président, Jaume Tapiès, hôtelier à Andorre. "En vingt ans, 80 % des ressources de thon ont disparu !", s'exclame Olivier Roellinger. Capturés avant leur maturité sexuelle, ils sont élevés dans des fermes aquacoles et exportés vers les pays consommateurs, notamment le Japon. "Il y a 50 000 sushi bars dans le monde, indique encore le chef cancalais, mais il faut savoir que les thons, une fois capturés, sont nourris avec de la farine de poisson. Pour faire 1 kg de thon, il faut 15 kg de poissons sauvages péchés par des bateaux minotiers qui ramassent tout sur les côtes du Sénégal et d'Amérique du Sud et ruinent la pêche locale. C'est immoral." Une étude de la revue américaine Science Magazine l'avait annoncé sans grand ménagement : le XXIe siècle serait le dernier où l'on pourrait encore trouver du poisson sauvage, leur quasi-disparition étant annoncée à l'horizon 2050. Olivier Roellinger n'est ni le premier ni le seul parmi les chefs à avoir poussé un tel cri d'alarme. Mais c'est la première fois que le consommateur est pris à témoin par un ensemble de prescripteurs, au risque d'irriter certains pêcheurs. Car la charte adoptée à Biarritz va plus loin encore. "Nous nous engageons, au-delà du thon rouge, à ne plus servir d'espèces menacées, à nous approvisionner en produits de la mer durables." Ce qui implique des techniques de pêche respectueuses de l'environnement, appliquées à des stocks en bon état, une fois la taille de maturité sexuelle atteinte. Le nouveau vice-président des Relais et Châteaux insiste : "Il faut arrêter avec la sole, le turbot, comme avec le thon..." On a privilégié ces poissons parce qu'ils se conservent mieux que d'autres. Il faut réduire le délai moyen - dix jours actuellement - entre le moment de la pêche et celui où le poisson est dans les assiettes. "Réhabilitons le maquereau et le chinchard. Le lieu de ligne, aussi, c'est exceptionnel", assure le chef, qui, ayant obtenu trois étoiles au guide Michelin en 2006, décidait deux ans plus tard - attitude exceptionnelle - de renoncer à cette distinction, ne conservant qu'un établissement plus modeste, près de Cancale, affilié aux Relais et Châteaux. Présente dans 55 pays avec 475 établissements, cette association hôtelière semblait surtout, jusque-là, se préoccuper de stratégie commerciale et de questions d'image face à une concurrence internationale active dans le secteur du tourisme de luxe. L'initiative d'Olivier Roellinger, si elle montre qu'il y a une vie après le Michelin, n'est sans doute pas totalement exempte de visées marketing, à un moment où les instances maritimes internationales sont sollicitées de toutes parts pour suspendre la pêche au thon rouge. Mais la charte inspirée par l'ancien chef étoilé va bien au-delà d'une simple application du principe de précaution. Elle met en jeu des intérêts considérables et surtout des habitudes de consommation, même si le boycottage des sushi bars ou la substitution du maquereau au saint-pierre n'est pas pour demain. Olivier Roellinger a été soutenu activement par plusieurs chefs étrangers au sein de son organisation, notamment l'Australien d'origine japonaise Tetsuya Wakuda, installé à Sydney. De leur côté, Ducasse, Robuchon et Passédat ont entendu le message. Eric Ripert, l'excellent chef français du Bernardin, le numéro un du poisson à New York, partage les mêmes choix, bien qu'il vienne de quitter les Relais et Châteaux. Il est engagé dans les campagnes visant la protection de la légine australe ou le blue fin tuna (thon nageoire bleue). Il soutient la politique des quotas, très stricte selon lui, en vigueur sur la Côte est : "Si nous ne sommes pas proactifs il n'y aura plus de poisson." Son livre On the Line (Ed. Artisan Division of Workman, 2008) a obtenu le prix 2009 de la Commanderie de Rungis. Il y relate la quête passionnante d'un équilibre entre les plaisirs de la table et le respect de la nature. Jean-Claude Ribaut
01/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/01/les-grands-chefs-s-engagent-a-ne-plus-servir-de-thon-rouge-en-2010_1286566_3238.html
"Les avantages catégoriels doivent reposer sur des critères ""objectifs"""
Un arrêt de la Cour de cassation appelle à respecter le principe de l'égalité de traitement entre les salariés. Certains avocats s'attendent à une multiplication des contentieux.
Une bombe atomique", "un tsunami social"... Les avocats d'entreprise ont bien du mal à digérer l'arrêt du 1er juillet 2009 de la Cour de cassation, qui appelle à respecter le principe de l'égalité de traitement entre salariés. Ce n'est pourtant pas la première fois qu'elle affirme que tout avantage accordé à une catégorie de personnels, par exemple les cadres, doit reposer sur des "raisons objectives". Alors pourquoi cette tempête ? D'abord passé quasiment inaperçu, à la veille des congés d'été, cet arrêt a été peu à peu analysé par les juristes, le patronat et les syndicats. Tous ont alors découvert sa portée. Immense. Dans cette affaire, un démarcheur-livreur de la société DHL Express a saisi la justice de diverses demandes, dont un rappel d'indemnité compensatrice de congés payés. Non-cadre, il ne bénéficie que de 25 jours de congé par an, contre 30 pour les cadres, conformément à un accord d'entreprise de 1988. Pour justifier cet écart, l'employeur avait évoqué notamment "l'importance des responsabilités" confiées aux cadres. Argument qui n'a pas convaincu la haute juridiction. "Vu le principe d'égalité de traitement (...), la seule différence de catégorie professionnelle ne saurait en elle-même justifier, pour l'attribution d'un avantage, une différence de traitement entre les salariés (...) ", cette différence devant "reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence", indique cet arrêt. La Cour de cassation avait déjà statué ainsi concernant des avantages instaurés unilatéralement par des employeurs. Avec cette nouvelle jurisprudence, elle va plus loin, appliquant son raisonnement à un accord d'entreprise. Mais la "vraie bombe", estime Sylvain Niel, directeur associé du cabinet d'avocats Fidal, c'est que "cet arrêt a vocation à s'appliquer aussi aux conventions collectives de branche. Or, toutes contiennent des dispositions catégorielles favorables aux cadres, et la plupart du temps, on est incapable de les justifier objectivement". Indemnités de licenciement, mutuelle, capital-décès, etc. : ces avantages concernent la plupart des 700 conventions collectives. La cour d'appel de Montpellier, dans un arrêt du 4 novembre 2009, illustre d'ailleurs l'application de l'arrêt du 1er juillet 2009 aux textes conventionnels. Une salariée non cadre d'une cave coopérative agricole, licenciée économique, réclamait une indemnité compensatrice de préavis et une indemnité de licenciement alignée sur celles des cadres, plus généreuses (notamment un préavis de trois mois, contre deux mois pour les non-cadres). Cette différence de traitement est prévue par la convention collective des caves agricoles, mais "aucune raison objective et pertinente" ne la justifie, a estimé le juge, qui a donné raison à la salariée. La boîte de Pandore est donc ouverte. "Les non-cadres, vous pouvez prétendre aux mêmes droits que les cadres !", proclame l'avocat Eric Rochelave sur son site Internet. "On risque de voir se multiplier les contentieux individuels sur ce sujet, prévient M. Niel. Et s'il faut aligner vers le haut tous ces avantages, cela aura un coût faramineux pour les entreprises !" Pour l'éviter, estime l'avocat, "les fédérations patronales pourraient dénoncer les conventions collectives". Puis ensuite les renégocier, mais en alignant les avantages... vers le bas. A condition de trouver des syndicats pour les signer. Vaste chantier. Toutefois, l'inquiétude est loin d'être générale. Côté syndical, la CFE-CGC estime que "cette jurisprudence permet de secouer le corpus des textes négociés. Nous sommes en train de lister les conventions collectives où des avantages catégoriels n'ont pas de justification". Selon le syndicat des cadres, la Cour de cassation "envoie un message très sérieux : on ne peut pas négocier des avantages n'importe comment". Mais, ajoute la centrale, "la Cour de cassation doit aussi comprendre qu'un accord n'est pas une somme d'avantages. Il résulte d'un compromis" et doit donc être apprécié dans son ensemble. Côté patronal aussi, certains sont sereins. "Je ne pense pas que notre convention trouve matière à révision, estime Laurent Duc, président de la Fédération nationale de l'hôtellerie. Par exemple, les non-cadres travaillent 225 jours par an, les cadres 217, mais c'est une contrepartie à leur régime de forfait-jour." Mais l'autre point qui déchaîne les passions, c'est l'intervention du juge dans des textes négociés. "Tous les accords, estime Jean-Denis Combrexelle, directeur général du travail, sont le fruit d'un "donnant, donnant" entre syndicat et patronat, et il n'appartient pas au juge de s'en mêler. Une convention collective signée par les partenaires sociaux est présumée légitime, encore plus depuis la loi sur la représentativité syndicale du 20 août 2008. Mais trop de magistrats ne le comprennent pas." Francine Aizicovici
01/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/01/les-avantages-categoriels-doivent-reposer-sur-des-criteres-objectifs_1286544_3234.html
La Chine et six pays d'Asie du Sud-Est suppriment la quasi-totalité des droits de douane
Cet accord va permettre à Pékin de compenser la baisse de ses exportations vers l'Europe et les Etats-Unis depuis le début de la crise mondiale.
La Chine et six pays d'Asie du Sud-Est ont supprimé depuis le 1er janvier la quasi-totalité des droits de douane sur 7 000 produits et services couvrant 90 % de leurs échanges. Cet accord qui entre en vigueur dans ce qui est devenu, en volume, la troisième zone de libre-échange de la planète, va modifier le paysage commercial et industriel d'une région qui, de la Chine à Singapour, des Philippines à la Birmanie, couvre 13 millions de kilomètres carrés et totalise une population d'environ 2 milliards d'habitants. L'accord ne sera appliqué dans la totalité de la zone qu'en 2015 : au sein de l'Association des pays de l'Asie du Sud-Est (Asean), seuls la Thaïlande, l'Indonésie, Brunei, les Philippines, Singapour et la Malaisie sont pour l'instant concernés. Les derniers entrants, les plus pauvres - Birmanie, Laos, Vietnam et Cambodge -, bénéficient d'un "sursis" de cinq ans avant d'être soumis aux termes de cet accord qu'ils ont aussi signé. Négocié depuis 2002, ce projet a déjà permis la suppression, à partir de 2005, de droits de douane sur plusieurs centaines de produits. Pour la Chine, qui va pouvoir augmenter ses exportations de matières premières et inonder l'Asie du Sud-Est de ses produits bon marché, cet accord est une aubaine. Les échanges dans la région devraient doubler en 2010 par rapport au volume de 2005 : 200 milliards de dollars (140 milliards d'euros) contre un peu plus de 100 milliards de dollars. DE NOUVEAUX MARCHÉS Jusqu'à présent, les marchandises chinoises étaient taxées de 5 % en Asie du Sud-Est. La levée des barrières douanières sur la majorité des biens manufacturés - excepté sur certains produits textiles et électroniques, jugés sensibles - va permettre à Pékin de compenser la chute de ses exportations vers l'Europe et les Etats-Unis depuis le début de la crise mondiale. Les pays de l'Asean vont pouvoir accroître leurs exportations vers la Chine (riz, fruits exotiques, caoutchouc, huile de palme, gaz naturel). Mais cette nouvelle donne économique a aussi de quoi les inquiéter vu le "poids" du grand voisin du Nord. Selon Sothirak Pou, chercheur associé à l'Institut des études d'Asie du Sud-Est de Singapour : "Plus d'un pays de l'Asean ne voit pas cet accord de libre-échange comme un avantage." Certains industriels de la région ont déjà mis en garde leur gouvernement sur ses conséquences. Et notamment le fait que la Chine, dont la devise, le yuan, est sous-évaluée et dont les entreprises bénéficient de subventions, va tirer profit de la levée des droits de douane. Si la Malaisie devrait pouvoir bénéficier de cet accord, tel ne sera pas forcément le cas d'un pays comme le Vietnam, producteur de marchandises à faible valeur ajoutée, qui pourrait se retrouver désavantagé face au "rouleau compresseur" chinois. A Pékin, Song Hong, économiste de l'Académie des sciences sociales, estime cependant que la croissance des exportations de certains produits, notamment agricoles, d'Asie du Sud-Est vers la Chine, pourrait concurrencer les paysans des provinces chinoises frontalières de l'ancienne Indochine, le Guangxi ou le Yunnan. Les Cambodgiens ont, de leur côté, souligné que cet accord va permettre au royaume khmer, dont les exportations agricoles vers les Etats-Unis et l'Europe sont à la baisse, de trouver de nouveaux marchés en Chine. En Indonésie, l'heure est à l'inquiétude. "Si le gouvernement met en place l'accord maintenant, beaucoup d'industries vont mourir", a déclaré récemment Airlangga Hartarto, un député. Les responsables de l'Asean ne nient pas les conséquences pour leur région. Pushpanathan Sundram, secrétaire général adjoint chargé des questions économiques de l'Association, a déclaré dernièrement au New York Times qu'"il faudra parfois payer le prix" de cet accord. Mais, à terme, a-t-il ajouté, la Chine et l'Asean en "seront les mutuels bénéficiaires". Bruno Philip (Bangkok, correspondant en Asie du Sud-Est) et Bruno Philip
01/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/01/la-chine-et-six-pays-d-asie-du-sud-est-suppriment-la-quasi-totalite-des-droits-de-douane_1286543_3234.html
Bourses : rebond en 2009, doutes pour 2010
Les pertes enregistrées depuis la faillite de Lehman Brothers, en septembre 2008, ont presque été gommées
La Bourse est souvent accusée d'être déconnectée de l'économie "réelle", parfois trop en avance, parfois trop optimiste. L'année 2009 en offre sans doute une nouvelle illustration. Alors qu'un peu partout dans le monde, la crise inquiète encore les entreprises et les ménages, que le chômage continue de croître, les places de Paris, de Londres, de New York, ou de Shanghai, ont affiché, en 2009, des progressions spectaculaires : + 22,32 % en France pour le CAC 40, désormais proche des 4 000 points (à 3 936,33 points), + 22,07 % au Royaume-Uni pour le Footsie, + 18,82 % aux Etats-Unis pour le Dow Jones et + 79,98 % en Chine pour le Shanghai SE Composite. Selon Bloomberg, le MSCI World, l'indice des Bourses mondiales a enregistré cette année sa plus forte hausse depuis 2003 avec 28 % de gain. Et même s'ils sont encore loin de leurs sommets de 2007, les marchés ont presque entièrement gommé les pertes enregistrées depuis septembre 2008, date de la faillite de la banque Lehman Brothers. L'année avait pourtant mal démarré. De janvier à mars, les investisseurs redoutaient une explosion du système financier, une crise systémique. Les marchés plongeaient. Mais, progressivement, aidés par des plans de relance massifs et les politiques monétaires ultra-accommodantes des banques centrales, les indicateurs économiques ont commencé à se redresser en Asie, aux Etats-Unis et en Europe. Les green shots - lueurs d'espoir dans le paysage économique, évoquées par le président américain, Barack Obama - se sont multipliées avant de se transformer en preuves tangibles d'une embellie. L'un après l'autre les pays sont sortis de la récession. "La reprise était virtuelle, elle est devenue réelle à partir de l'été", confirme un gérant de fonds. Les investisseurs ont révisé leurs scénarios, passant de celui d'une crise sévère à celui d'une reprise légère. In fine, "les valeurs qui avaient été le plus massacrées ont été celles qui ont le plus progressé sur l'année", observe Vincent Durel, gérant du fonds actions françaises chez Fidelity. C'est ce qui s'appelle dans le jargon boursier "un marché Béta", indique-t-il. Les financières, des banques en particulier, dont certains redoutaient la faillite ont vu leurs cours s'envoler (+ 84 % pour l'américaine Morgan Stanley, + 184 % pour la française Natixis). L'ensemble des valeurs dites "cycliques", les plus sensibles à la conjoncture ont fait de même, comme celles ayant lien avec la construction, la consommation ou l'industrie automobile, aidées par la prime à la casse. Renault et Peugeot figurent parmi les plus fortes hausses du CAC 40, respectivement + 95 % et + 94 %. Mais le potentiel de hausse des actions n'est-il pas déjà entièrement consommé ? "Ce mieux" va-t-il se confirmer en 2010 ? Cette reprise fragile ne va-t-elle pas s'étioler avec la disparition progressive des soutiens publics ?, se demandent les investisseurs. "Nous sommes dans une course à étapes, et l'on ne sait pas qui prendra le relais des pouvoirs publics pour soutenir l'économie : les consommateurs ? Les entreprises ? Les Etats à nouveau ?", résume Gregori Volokhine, chez Meeschaert à New York. Pour l'heure, personne n'a de réponse. A court terme toutefois, la plupart des gérants n'anticipent pas de rechute. Les sociétés ont drastiquement réduit leurs coûts - via la baisse de leurs investissements et celle de leurs effectifs. Même une légère reprise de la demande suffirait selon eux à doper leurs profits. Le consensus des analystes mise sur un rebond des bénéfices des sociétés en zone euro de l'ordre de 30 %. Mais à un horizon de six mois, les inquiétudes sont vives. Les experts redoutent notamment le moment où les banques centrales, aux Etats-Unis et en Europe, vont commencer à éponger les liquidités injectées sur le marché avant de remonter leurs taux d'intérêts. Et celui où certains Etats, trop endettés, annonceront la mise en place de politiques de rigueur. Autrement dit, le moment où l'économie devra marcher sans béquille. "La reprise a été techniquement assistée, si l'emploi ne redémarre pas d'ici six mois, elle va mourir", redoute François Chevallier, économiste à la banque Leonardo. Selon lui, le scénario de 2010 pourrait être le même qu'en 1994, où la reprise n'avait duré qu'un an. Les Etats et les banquiers centraux, en Europe et aux Etats-Unis, conscients de ces inquiétudes se montrent prudents. "Personne ne veut casser le marché, reconnaît Teun Draaisma, chez Morgan Stanley, mais les changements de discours des politiques fiscales et monétaires, auront plus d'impact qu'on ne le croit". Selon lui, ce changement de ton des banques centrales et des Etats pourrait entraîner une chute des indices de l'ordre de 10 % en Europe comme aux Etats-Unis. Claire Gatinois
01/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/01/bourses-rebond-en-2009-doutes-pour-2010_1286539_3234.html
"Sarkozy : redonnons sens au mot ""fraternité"""
Le chef de l'Etat s'efforce de corriger les dérives du débat sur l'identité nationale Il a promis au cours de ses voeux télévisés "une année de renouveau".
En lançant à l'automne 2009 le débat sur l'identité nationale, à l'approche des élections régionales de mars 2010, Nicolas Sarkozy avait demandé en privé à ses ministres "du gros rouge qui tache". Jeudi 31 décembre, le président de la République en a appelé, lors de ses voeux aux Français, à la "fraternité". "Je souhaite que 2010 soit l'année où nous redonnerons un sens au beau mot de fraternité qui est inscrit dans notre devise républicaine", a déclaré le chef de l'Etat dans son allocution télévisée de sept minutes, costume et cravate sombres, plan serré et drapeaux tricolore et européen en arrière-plan. Sans jamais évoquer le débat sur l'identité nationale, qui a tourné à la stigmatisation de l'immigration et de l'islam, M. Sarkozy a adopté un ton rassembleur : "Respectons-nous les uns les autres, faisons l'effort de nous comprendre, évitons les mots et les attitudes qui blessent. Soyons capables de débattre sans nous déchirer, sans nous insulter, sans nous désunir", a souhaité le président de la République, accusé par ses détracteurs d'être parfois brutal et de dresser les Français les uns contre les autres. Le chef de l'Etat, qui s'inquiète en privé de la tournure du débat, était intervenu à deux reprises : le 12 novembre 2009 à La Chapelle-en-Vercors, où il avait à la fois fait l'éloge du terroir et du métissage ; dans une tribune au Monde, le 9 décembre, où il avait réduit le sujet à la religion et appelé les croyants, notamment musulmans, à un exercice humble de leur culte. Il réagissait à la votation suisse interdisant la construction de nouveaux minarets. La double intervention de M. Sarkozy était censée clore un débat délétère, où les ministres avaient multiplié les surenchères. Le ministre de l'immigration et de l'identité nationale, Eric Besson, avait organisé un charter vers l'Afghanistan. Le ministre de l'intérieur, Brice Hortefeux, avait prôné un couvre-feu pour les mineurs de moins de 13 ans. Le mot d'ordre était alors d'éviter toute résurgence du Front national alors que les régionales de mars auront valeur de test de mi-quinquennat. En réalité, le débat a continué de prospérer ainsi que les dérapages. A Charmes (Vosges), la patrie de Barrès, la secrétaire d'Etat à la famille, Nadine Morano, avait relancé la polémique en dressant un stéréotype du jeune musulman, souhaitant qu'il "ne mette pas sa casquette à l'envers" et ne "parle pas verlan". M. Besson s'est vu traiter de collaborateur et comparé à Pierre Laval, numéro deux du régime de Pétain, par le socialiste Jean-Christophe Cambadélis, tandis que les anciens premiers ministres de Jacques Chirac, Jean-Pierre Raffarin, Alain Juppé, Dominique de Villepin, ont tous dénoncé, avec plus ou moins de virulence, la dérive du débat. VOCABLE MITTERRANDIEN M. Besson fera un point d'étape, lundi 4 janvier, sur le débat sur l'identité nationale, que les préfectures ont eu pour mission d'organiser. M. Sarkozy a confié à ses proches qu'il ferait des "propositions" le 4 février, date initialement retenue de clôture du débat et qu'il y aurait des "surprises". Le chef de l'Etat compte aussi se rendre au cimetière de Notre-Dame-de-Lorette, près d'Arras (Pas-de-Calais), dont le carré musulman a été profané. La tactique a déjà été utilisée. Après avoir droitisé son discours pour rassembler son camp, M. Sarkozy entend maintenant donner des gages au centre gauche. A l'approche des régionales, qui marqueront le début du compte à rebours pour 2012, il adopte soudain le ton et le vocable mitterrandien, exhortant "ses chers compatriotes" à rester "unis" et la France à être "rassemblée". L'ancien président socialiste, qui l'avait emporté en 1981 en rassemblant toute la gauche, avait conquis son second mandat en 1988 sur le slogan de "la France unie". M. Sarkozy n'hésite pas non plus à reprendre le concept de "fraternité", scandé au Zénith en septembre 2008 par la socialiste Ségolène Royal. Ce mot est nouveau dans le langage du chef de l'Etat. Lors de son discours de Saint-Quentin, le 24 mars 2009 avant les élections européennes, il avait fait l'éloge des deux autres piliers de la devise républicaine, la liberté et l'égalité. Mais c'était pour vanter la sécurité ("la liberté, c'est de pouvoir prendre le métro sans se faire agresser par des voyous") et fustiger l'égalité lorsqu'elle se transforme en égalitarisme ("l'égalitarisme, c'est le nivellement par le bas"). Lors de ses premiers voeux, en décembre 2007, M. Sarkozy avait tenté de lancer un débat sur la "politique de civilisation", concept emprunté au sociologue Edgar Morin, mais sans jamais parvenir à lui donner un contenu. Au plus bas dans les sondages, Nicolas Sarkozy, qui affiche un teint hâlé après une semaine de vacances où il fut l'hôte du roi du Maroc, revendique désormais la spécificité française. L'ancien chantre de la rupture vante aujourd'hui "notre modèle social qui a amorti le choc" de la crise. Il rend "un hommage particulier" aux partenaires sociaux et aux chefs d'entreprise qui ont cherché à sauver des emplois. Il appelle à exporter les idées françaises, alors que se met en place une nouvelle gouvernance mondiale avec l'émergence du G20, qui regroupe les principales puissances de la planète. "Les idées que la France défend vont pouvoir s'imposer dans la recherche d'un nouvel ordre mondial." TROIS CHANTIERS Aux Français inquiets des réformes, il promet des lendemains plus florissants : "2010 sera une année de renouveau. Les efforts que nous faisons depuis deux ans et demi vont porter leurs fruits." Le message s'adresse aussi à la majorité qui s'agace des réformes imposées sans vraie liberté de débat, parfois mal préparées et qui conduisent quelquefois à des camouflets, comme celui infligé mardi 29 décembre 2009 par le Conseil constitutionnel avec l'annulation de la taxe carbone qui devait entrer en vigueur au 1er janvier. Le président confirme qu'un nouveau texte sera présenté au conseil des ministres le 20 janvier. "Je ne suis pas un homme qui renonce à la première difficulté", a asséné M. Sarkozy. Il n'empêche, le calendrier des réformes à venir s'est allégé. Le président de la République a évoqué trois chantiers : les retraites et la dépendance ; l'organisation territoriale ; la justice. Mais il n'a fait aucune annonce nouvelle. L'an passé, il avait profité des multiples cérémonies de voeux de janvier pour multiplier les annonces, au point de créer un sentiment de confusion. M. Sarkozy avait dégringolé dans les sondages après sa présidence de l'Union européenne et sa gestion de la crise financière jugées réussies. Si le chef de l'Etat reconnaît "une année difficile pour tous", il persiste dans la défense de son bilan. Il nie l'échec du sommet de Copenhague en décembre. Il affirme que les Etats ont pris des engagements de réduction des gaz à effets de serre et décidé d'une taxation de la spéculation financière pour aider les pays pauvres victimes du réchauffement. C'est inexact. M. Sarkozy, qui n'a pas de grand rendez-vous international à son agenda, espère se rattraper en 2011, lorsque la France présidera le G20 et le G8. A quelques mois des élections présidentielles. Sophie Landrin et Arnaud Leparmentier
01/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/01/sarkozy-redonnons-sens-au-mot-fraternite_1286496_823448.html
"Pour Benoît Hamon, porte-parole du PS, ""le président de la République fonctionne désormais comme un disque rayé"""
Malgré l'appel à la fraternité et à l'unité lancé par le chef de l'Etat, l'opposition continue de réclamer l'arrêt du débat sur l'identité nationale.
Malgré l'appel à la fraternité et à l'unité lancé par le chef de l'Etat, l'opposition continue de réclamer l'arrêt du débat sur l'identité nationale, lancé par Eric Besson le 2 novembre 2009. La secrétaire nationale des Verts, Cécile Duflot, aimerait l'arrêt d'une "machine à créer du conflit et de la violence". "Il ne faut pas seulement des formules pour dire qu'il faut être gentil quand on parle de ce sujet", a-t-elle estimé. Le député (PS) Pierre Moscovici voit dans le discours présidentiel les prémices d'une suspension du débat. "Sans parler de désaveu d'Eric Besson, je sens que ce débat ne sera pas repris du tout en 2010, ou il sera repris sur un autre ton, qui serait mieux que cette espèce de déchirure qui nous a été imposée." La veille, l'ancien premier ministre et rival de Nicolas Sarkozy, Dominique de Villepin, dans ses voeux diffusés sur Internet, avait de nouveau fustigé ce débat, parlant de "confusion" et "d'égarement". Demandant que cessent les "illusions de la rupture et les divisions stériles", M. de Villepin avait réclamé un "retour aux enjeux fondamentaux", "au rassemblement", "à la justice" et "à l'équilibre". "L'enjeu, ce n'est pas de savoir qui nous sommes, mais d'être fidèles à ce que nous sommes", avait assené l'ancien premier ministre. L'UMP, au contraire, s'est félicitée de la volonté d'apaisement du président de la République. Le premier ministre, dans un communiqué, a salué "l'engagement pris par le président de construire en 2010 une France fraternelle". "Dans l'épreuve, comme dans le succès, a expliqué François Fillon, le rassemblement de la nation est un bien précieux et la condition de la réussite collective." Pour le porte-parole de l'UMP, Dominique Paillé, les mots "rassembleurs" et "respectueux" de M. Sarkozy étaient " indispensables". "Ils ne seront peut-être pas suffisants, mais je ne doute pas que le président prendra sur ce terrain d'autres initiatives", a-t-il lancé. L'allocution présidentielle a globalement suscité l'ironie hors le parti au pouvoir. "Indécent satisfecit" pour le Parti communiste, "méthode Coué" pour le MoDem, "catalogue de "grâce à moi"" pour le PS, "tout va bien Madame la marquise" ont ironisé les Verts. "Il a expédié en deux phrases les souffrances imposées aux Français par la crise et la politique de son gouvernement", a déploré le coordinateur national du PCF, Pierre Laurent. Pour le porte-parole du PS, Benoît Hamon, "le président de la République fonctionne désormais comme un disque rayé. Il se répète dans un exercice désormais lassant d'autocélébration, qui confirme qu'il est probablement coupé du monde réel." Le NPA, le mouvement d'Olivier Besancenot, partage également l'analyse. "Nicolas Sarkozy a montré qu'il vit dans un autre monde que celui de l'ensemble de la population. 2009 a été l'année de la crise, de l'explosion du chômage, de la précarité. Mais seul Sarkozy a le culot d'expliquer qu'ensemble nous avons évité le pire." Le MoDem regrette que le discours présidentiel n'apporte, malgré la crise, "aucune idée simple permettant de dessiner l'avenir". S. La.
01/01/2010
politique
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En Iran, Mir Hossein Moussavi propose un plan de sortie de crise en cinq points
Dans un climat très tendu, le chef de l'opposition lance un appel à l'unité.
Des convois militaires, en provenance de Qom, la ville sainte, ou de Karaj, se dirigeant vers Téhéran ; plusieurs centres névralgiques de la capitale quadrillés par les miliciens bassidji et les forces de sécurité en civil (les lebaschahsi) ; des stations de métro à leur tour placées sous haute surveillance, selon un site Internet étudiant : la tension est encore montée d'un cran, en Iran, jeudi 31 décembre. Ces bruits de bottes annonçaient-ils une nouvelle escalade de violence ? Plutôt une démonstration de force dissuasive au moment où se préparaient dans la rue d'autres actions. De fait, dans la journée, des milliers de personnes se sont rendues, en dépit des interdictions, au grand cimetière de Behecht-e-Zarah, où avait été enterré la veille, sous contrôle policier, le neveu de Mir Hossein Moussavi, figure de proue de l'opposition tué par balles lors des manifestations de la fête de l'Achoura, le 27 décembre. D'autres rassemblements sporadiques auraient eu lieu également place Haft-e-Tir et place Mohseni à Téhéran, mais aussi dans plusieurs universités. Des heurts violents se seraient produits à Mashad où des centaines de miliciens auraient attaqué des étudiants faisant une dizaine de blessés. Toutefois, si la démonstration de force de jeudi était aussi destinée à rassurer un pouvoir, déstabilisé par l'ampleur de la contestation, elle a eu pour conséquence d'inquiéter aussi certains fondamentalistes. Ces derniers s'alarment d'un scénario à la pakistanaise, dans lequel les Gardiens de la révolution, qui assurent la sécurité, les renseignements et gèrent une bonne part de l'économie nationale, pourraient prendre totalement le pays en main. D'où les quelques voix qui se sont élevées appelant à la conciliation, y compris dans les cercles les plus conservateurs. Ainsi Assadolah Askaroladi, secrétaire des Motalefeh, le parti qui regroupe les confréries religieuses et politiques les plus influentes chez les fondamentalistes et qui est très écouté parmi les puissants négociants du bazar, a-t-il suggéré, jeudi, que le pays "se retrouve autour du Guide suprême Khamenei pour élaborer des solutions" au lieu de se déchirer. Dans la soirée, un communiqué de M. Moussavi publié sur le site Norouz (celui du principal parti réformateur, le Mocharekat) allait dans le même sens. Expliquant que si les manifestations de l'Achoura avaient atteint une telle ampleur, ce n'était pas parce qu'il avait, lui-même ou d'autres chefs de l'opposition, convoqué les gens dans la rue, M. Moussavi explique : "La population décide elle-même, nous ne faisons que l'accompagner. Les manifestants ne sont pas violents, c'est la répression qui fait tout pour les rendre violents." Et il ajoute : "Nous arrêter ou nous tuer ne changera rien, c'est une crise de confiance (...). Nous sommes des nationalistes, religieux et fidèles à la Constitution, on ne veut pas renverser le système, mais le réformer. des solutions politiques sont encore possibles." Lesquelles ? M. Moussavi propose un véritable plan de sortie de crise en cinq points. D'abord, que le gouvernement de M. Ahmadinejad accepte d'être responsable de ses actes devant le Parlement, le pouvoir judiciaire et la nation, sans plus avoir l'appui inconditionnel des plus hautes autorités. Ensuite, qu'une loi soit adoptée pour obtenir des élections claires, libres et équitables. La présidentielle de juin qui a vu la victoire de M. Ahmadinejad était entachée de fraudes aux yeux de Mir Hossein Moussavi, ce qui a été le point de départ de la contestation. Troisième point : la libération des prisonniers politiques et leur réhabilitation. Quatrième : la liberté de la presse et la réouverture des journaux fermés. Enfin, dernier point, reconnaître les droits des citoyens, notamment la validité de l'article 27 de la Constitution qui accorde la liberté de manifester. Conscient de la difficulté, le chef de l'opposition conclut en disant qu'il n'est pas nécessaire de négocier tout à la fois, mais qu'une discussion pourrait s'engager sur l'un des points, pour amorcer le dialogue : "Il n'existe pas un Iran coupé en deux, un Iran de Dieu et un Iran de Satan, mais un seul pays qui doit retrouver son unité." Marie-Claude Decamps
01/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/01/en-iran-mir-hossein-moussavi-propose-un-plan-de-sortie-de-crise-en-cinq-points_1286516_3216.html
Bataille juridique autour de l'usage d'une route en Cisjordanie
Le gouvernement israélien s'émeut d'une décision de la Cour suprême autorisant les Palestiniens à utiliser une voie traversant leurs terres.
Le quotidien Yedioth Aharonoth de jeudi 31 décembre a fait état de la colère du premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, contre la décision rendue par la Cour suprême d'Israël en autorisant de nouveau les Palestiniens à emprunter la "route 443", qui relie Jérusalem à Tel-Aviv. En octobre 2002, au plus fort de la seconde Intifada, le gouvernement leur en avait interdit l'usage à la suite de tirs contre des véhicules circulant sur la voie, qui avaient coûté la vie à six Israéliens. M. Nétanyahou aurait fait part de son incrédulité devant un arrêt risquant, selon lui, de mettre en danger la vie de ses concitoyens, et promis d'étudier la possibilité de corriger l'arrêt de la haute juridiction par une législation appropriée. Cette approche est celle des partis de droite et de l'armée, qui n'ont pas de mots assez durs pour qualifier une décision obtenue par deux voix contre une. La Cour suprême a accordé un délai de cinq mois au ministère de la défense pour faire appliquer cet arrêt sur une portion de 14 kilomètres située entre le check-point de Makkabim (près de la ville de Modi'in) et la ville de Givat Ze'ev, au nord-ouest de Jérusalem. L'armée devra également prendre des mesures permettant d'assurer la sécurité des quelque 40 000 automobilistes israéliens qui empruntent quotidiennement la route 443, un axe qui permet d'éviter la route "numéro 1", souvent très encombrée, reliant Jérusalem à Tel-Aviv. S'il faut s'attendre à des manoeuvres dilatoires de la part du gouvernement, les Palestiniens ont néanmoins remporté une indiscutable victoire politique, en obtenant un jugement favorable à propos de cette route partiellement construite sur des terres dont les propriétaires palestiniens ont été expropriés dans les années 1980. DÉMARCHES SIMILAIRES A l'époque, l'Etat avait justifié cette mesure en expliquant que la route 443 bénéficierait aussi à la "population locale" palestinienne. Depuis 2002 cependant, les quelque 55 000 Palestiniens habitant les villages situés de part et d'autre de la route se sont vu refuser le droit d'utiliser cet axe routier, et toutes les voies d'accès ont été bloquées. Les maires d'une demi-douzaine de villages, ainsi que l'Association pour les droits civiques en Israël, avaient entamé une procédure devant la Cour suprême, laquelle a émis dans le passé des jugements tantôt favorables, tantôt hostiles, aux Palestiniens : parmi les premiers figurent plusieurs modifications de la "barrière de sécurité" (le "mur") qui trace son sillon en Cisjordanie. Les juges ont estimé que "la liberté de mouvement est un droit fondamental", et que des dispositions qui "interdisent complètement le trafic palestinien sur la route ne sont pas conformes avec les règles du droit international". Inquiet de ce qu'il considère comme un dangereux précédent, le ministère de la défense fourbit sa défense juridique en prévision d'une multiplication de démarches similaires : il reste plus de 60 kilomètres de routes réservées aux seuls Israéliens en Cisjordanie. Laurent Zecchini et Laurent Zecchini
01/01/2010
proche-orient
https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/01/01/bataille-juridique-autour-de-l-usage-d-une-route-en-cisjordanie_1286517_3218.html
Deux journalistes français ont disparu en Afghanistan
Avec les Etats-Unis, la France envisage d'étendre son intervention militaire dans une zone instable à l'est du pays.
Deux journalistes français réalisant un reportage pour l'émission "Pièces à conviction" diffusée par France 3 et leurs trois accompagnateurs afghans auraient été enlevés, mercredi 30 décembre 2009, au nord-est de Kaboul, dans la province de Kapisa où sont stationnées les troupes françaises. Faute de revendication, le ministère français des affaires étrangères et France Télévisions préféraient, jeudi soir, indiquer que ces personnes "n'avaient pas donné de nouvelles depuis quarante-huit heures". Des troupes ont été positionnées sur les principaux axes afin d'empêcher leur éventuel transfert clandestin à l'extérieur de la province. Cette disparition est intervenue alors que le ministre de la défense, Hervé Morin, rendait visite, à l'occasion du réveillon, les soldats français sur la base de Nijrab, à 30 kilomètres de là. La France s'apprête, dans les semaines qui viennent, à modifier son dispositif sur le terrain. Les journalistes avaient passé deux semaines en compagnie des militaires français. Afin de compléter leur reportage, ils avaient quitté le giron militaire et emprunté un taxi en compagnie de leur traducteur afghan et de deux de ses parents, pour recueillir des témoignages près de la ville de Tagab, principale ville de la province de Kapisa. Selon les autorités françaises à Kaboul, ils auraient été interceptés non loin du village d'Omarkheyl situé sur la route entre Tagab et Saroubi lieu où ont péri, en août 2008, dans une embuscade, neuf soldats français. LA CIA EN DEUIL Le contact local des reporters aurait pu prévenir un groupe d'insurgés locaux. Il pourrait tout aussi bien s'agir de talibans, de membres du Hezb-e-Islami, mouvement radical islamiste très présent dans cette région, ou de malfrats locaux désirant monnayer le kidnapping. Mi-décembre, trois journalistes travaillant pour le Guardian, deux Afghans et un Irakien, avaient été libérés après avoir été brièvement pris en otages dans l'est du pays, près de la frontière pakistanaise. En novembre, un journaliste norvégien et son interprète afghan ont été retenus une semaine dans la même région avant d'être libérés. Début septembre, un journaliste britannique du New York Times avait été enlevé dans la province de Kunduz (nord). Il avait été libéré quelques jours plus tard par un commando de l'OTAN lors d'une opération qui s'était soldée par la mort de son interprète afghan. La région montagneuse de Kapisa se trouve sur l'axe reliant Kaboul et Jalalabad en direction de la frontière pakistanaise. Près de 700 des 3 000 soldats que la France compte en Afghanistan y sont déployés. L'armée française opère sous le contrôle des Américains en charge, pour le compte de l'OTAN, de tout l'est du pays. Selon une source militaire de l'OTAN à Kaboul, les Français réfléchissent actuellement avec les Américains à une extension de leur présence sur le terrain notamment dans l'est du pays. Il pourrait s'agir de forces spéciales qui remplaceraient des effectifs américains dans certains postes avancés situés à la frontière afghano-pakistanaise. Ce déploiement limité en nombre permettrait de tenir la promesse faite par le chef de l'Etat, Nicolas Sarkozy, de participer aux côtés des Etats-Unis à la lutte contre Al-Qaida et l'insurrection talibane sur la frontière poreuse entre l'Afghanistan et le Pakistan. Fait rare, la CIA a reconnu officiellement, jeudi, avoir perdu, la veille, sept agents de premier plan dans cette même zone dans un poste avancé près de Khost. Six autres membres de l'agence de renseignement ont aussi été blessés lors de l'attentat-suicide commis par un homme revêtu d'un uniforme de l'armée afghane. Jeudi, les drapeaux ornant le quartier général de la CIA à Langley, en Virginie, étaient en berne. Ces morts et ces enlèvements concluent une année 2009 meurtrière avec 509 morts dans les rangs de l'OTAN. Ils témoignent aussi d'une situation sécuritaire de plus en plus détériorée. Alors que des membres de la coalition internationale, comme le Canada, les Pays-Bas et les Etats-Unis ont évoqué une date de retrait pour leurs troupes, la France n'a, à ce jour, jamais envisagé cette possibilité. Jacques Follorou
01/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/01/deux-reporters-francais-ont-disparu-en-afghanistan_1286515_3216.html
Offensive républicaine contre Barack Obama aux Etats-Unis
Après les révélations sur les failles de la sécurité dans l'attentat manqué du 25 décembre, les adversaires du président l'accusent de laxisme.
La trêve hawaïenne de fin d'année de Barack Obama s'est transformée en chausse-trape politique. Tandis que les files d'attente s'allongeaient dans les aéroports, au lendemain de la tentative d'attentat du 25 décembre contre un avion de Northwest, le président américain a tardé à interrompre ses vacances pour s'adresser aux Américains. Le camp républicain s'est immédiatement engouffré dans la brèche, brossant l'image d'un Barack Obama moins préoccupé par la menace terroriste que par ses parties de golf au bord des plages de son enfance. L'ancien vice-président Dick Cheney a dénoncé le "profil bas" du président. "Il semble penser que s'il donne aux terroristes les mêmes droits qu'aux Américains, (...) s'il ferme Guantanamo et en libère les terroristes d'Al-Qaida les plus endurcis, nous ne serons pas en guerre", a déclaré, mercredi 30 décembre, M. Cheney au site Politico, ajoutant : "Mais nous sommes en guerre, et quand le président Obama prétend le contraire, nous sommes moins en sécurité." "Dans l'administration Obama, le respect des droits des terroristes pèse plus lourd que la vie des Américains", a aussi attaqué Newt Gingrich, un "poids lourd" républicain. Dans une lettre destinée à collecter des fonds, Pete Hoekstra, un élu du Michigan, affirme que M. Obama "et ses copains gauchistes sapent le travail des hommes et femmes courageux qui oeuvrent inlassablement à nous protéger". Pete Hoekstra accuse aussi le président, qui a promis de fermer la base de Guantanamo à Cuba, de "renvoyer chez eux, au Yémen, des prisonniers de Gitmo". Selon le Washington Post, d'ex-détenus de Guantanamo, dont certains ont été relâchés par l'administration Bush, ont aidé à développer la branche d'Al-Qaida dans la péninsule Arabique (AQPA) qui a revendiqué la tentative d'attentat du 25 décembre. Ces critiques, qui rompent avec la tradition de réserve après une attaque terroriste, ravivent la tactique de la campagne présidentielle républicaine : faire passer les démocrates pour laxistes sur le terrorisme. Sur le blog de la Maison Blanche, le directeur de la communication, Dan Pfeiffer, a renvoyé la balle aux républicains, responsables selon lui de la concentration des forces nationales vers l'Irak - "un pays d'où Al-Qaida était absent", rappelle-t-il. Cette stratégie a permis à l'organisation de se regrouper à la frontière entre le Pakistan et l'Afghanistan et de "se régénérer dans des endroits comme le Yémen et la Somalie", ajoute-t-il. M. Obama n'a pas "besoin de bomber le torse", souligne M. Pfeiffer. Et s'il n'utilise plus l'expression "guerre contre la terreur", emblématique des années Bush, c'est qu'il considère que son administration n'est pas "en guerre contre une tactique (le terrorisme) ", mais "contre quelque chose de tangible : Al-Qaida". Selon le collaborateur du président, "sept années de rhétorique belliqueuse n'ont pas diminué la menace d'Al-Qaida" et il "est étrangement paradoxal, à un moment où (le) pays est attaqué, que l'architecte de ces politiques (Dick Cheney) attaque le président". En décembre 2001, George Bush avait mis six jours à réagir à la tentative d'attentat de Richard Reid, qui avait essayé de faire exploser une bombe dissimulée dans sa chaussure sur un vol Paris-Miami. "Les républicains sont tout simplement hypocrites", a lancé Brad Woodhouse, porte-parole du comité national des démocrates. Au-delà de ces attaques, l'attentat manqué de Noël a révélé des failles, sur lesquelles l'administration Obama enquête. Selon la presse, Londres avait rejeté en mai 2009 une demande de visa d'Omar Farouk Abdulmutallab, le suspect du 25 décembre ; en août 2009, les renseignements américains avaient intercepté des communications d'Al-Qaida au Yémen évoquant l'utilisation d'un Nigérian dans un complot. Si ces informations avaient été bien analysées, elles auraient peut-être permis d'éviter la tentative d'attentat. Philippe Bolopion et Philippe Bolopion
01/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/01/offensive-republicaine-contre-barack-obama-aux-etats-unis_1286518_3222.html
Au Mexique, bataille acharnée sur le droit à l'avortement
L'Eglise critique Mexico, qui a dépénalisé l'IVG jusqu'à douze semaines.
Quand elle a quitté, avant Noël, son village de l'Etat de Puebla, dans le centre montagneux du Mexique, Esmeralda n'a pas dit à sa mère qu'elle allait jusqu'à la capitale, à de longues heures d'autocar de chez elle. Encore moins qu'elle allait y avorter. "Je ne suis pas mariée, j'habite avec ma famille et j'ai déjà un petit garçon", souffle cette douce jeune femme de 21 ans, qui en paraît à peine 18. Blottie sur une chaise longue dans la section spécialisée du centre de santé Beatriz Velasco de Aleman, un établissement public géré par la ville de Mexico, elle attend que le misoprostol, une pilule abortive, déclenche les contractions. Comme huit autres patientes ce matin-là, elle a dépassé le seuil des neuf semaines à compter des dernières règles, au-delà duquel un avortement nécessite une intervention. Esmeralda a de la chance : elle a eu droit à une interruption volontaire de grossesse (IVG) totalement gratuite, sous contrôle médical, dans de bonnes conditions psychologiques. Sur le territoire de l'Etat de Puebla, l'un des bastions du catholicisme mexicain, cela lui aurait été refusé. Dans l'ensemble du pays, 140 femmes sont poursuivies en justice, et 33 incarcérées pour avoir mis fin à leur grossesse. La petite villageoise a appris "par la télévision", dit-elle, que, depuis mai 2007, l'IVG est légale à Mexico, sans restriction jusqu'à la fin de la 12e semaine, et que les cliniques municipales y acceptent les résidentes d'autres Etats de la République. Maria, une association fondée par de jeunes féministes, aide les plus démunies à se loger et à se nourrir durant leur séjour dans la capitale. La crise économique ne peut que renforcer la demande. Le droit à l'avortement est devenu l'enjeu d'une bataille acharnée, au Mexique entre ceux qui le défendent et ceux qui y sont opposés. Gouvernée depuis plus d'une décennie par le Parti de la révolution démocratique (PRD, gauche), la capitale est un îlot de libéralisme dans un pays balayé par une vague de conservatisme : son Assemblée législative a même autorisé, le 21 décembre 2009, le mariage entre homosexuels. Mais l'Eglise catholique, dont se réclament plus de 85 % de Mexicains, a lancé une vaste contre-offensive depuis que Mexico a dépénalisé l'avortement jusqu'à douze semaines, fin avril 2007. On a vu alors s'ouvrir, non loin de la basilique de la Vierge de Guadalupe, un sanctuaire dédié aux foetus avortés. Des militants de l'organisation non gouvernementale (ONG) Pro Vida ("pro vie") montent la garde, à 20 mètres de la file d'attente qui s'étire dès 6 heures du matin à l'entrée du centre d'IVG Velasco. "Il y a eu quelques incidents, comme les pneus crevés de ma voiture, mais rien de grave, souligne le docteur Luis Jorge Arellano, directeur de l'établissement. Sur 26 médecins, trois seulement sont objecteurs de conscience, ainsi que cinq infirmières. A nous seuls, nous assumons le tiers des quelque 30 000 IVG pratiquées cette année dans la capitale. C'est seulement dans notre établissement que ce service est gratuit à 100 %." A Guadalajara, un avortement coûte 8 000 pesos (quatre fois le salaire minimum), le médecin risquant d'être radié, confie une patiente venue depuis la métropole de l'Ouest mexicain. Dans cet ancien fief des "Cristeros", les insurgés catholiques qui ont pris les armes contre le gouvernement fédéral de 1926 à 1929, la principale pharmacie du centre-ville refusait encore, il y a peu, de vendre des contraceptifs. Mais comment expliquer que les Etats de Veracruz, d'Oaxaca, de Puebla ou du Chiapas, contrôlés par le Parti révolutionnaire institutionnel (PRI, centre), la vieille formation hégémonique issue de la révolution mexicaine, aient basculé dans le camp anti-avortement ? L'un après l'autre, 18 des 32 Etats mexicains ont adopté une Constitution qui protège la vie "dès la conception ". Presque toujours, les élus du PRI, pourtant héraut de la laïcité, y ont voté de concert avec ceux du Parti d'action nationale (PAN, droite), la formation du président Felipe Calderon, proche du clergé. Un tournant similaire se prépare dans six autres Etats. Cette lame de fond a douché les féministes, qui croyaient avoir remporté une victoire définitive en août 2008, lorsque la Cour suprême a refusé de casser la loi sur l'IVG adoptée en 2007 à Mexico. L'affaire provoque des remous au sein de l'Internationale socialiste, dont le PRI est membre, et dans les rangs de ce parti, majoritaire depuis juillet au Congrès. Sa présidente, Beatriz Paredes, se voit accusée de sacrifier ses convictions personnelles sur l'autel de la politique : elle voudrait éviter que l'Eglise ne favorise le PAN lors de l'élection présidentielle de 2012. L'un des prétendants du PRI pour cette échéance, le gouverneur de l'Etat de Mexico, Enrique Pena-Nieto, vient d'effectuer une visite très médiatisée au Vatican, préparant ainsi l'avenir. Car, au-delà des frontières du Mexique, la bataille aura des retombées en Amérique latine et dans la forte communauté d'origine mexicaine aux Etats-Unis. Joëlle Stolz (Vienne, correspondante) et Joëlle Stolz
01/01/2010
ameriques
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La présidence de l'OSCE représente un défi pour le Kazakhstan
L'ex-république soviétique devra faire la preuve de sa volonté de réforme.
C'est une première pour l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) : une ancienne république soviétique assure depuis le 1er janvier la présidence tournante de l'institution. C'est aussi la première fois qu'un Etat à majorité musulmane dirige l'organisation, créée en 1975 en période de dégel soviético-occidental et dont l'ambition initiale était d'instaurer un dialogue entre les membres du pacte de Varsovie et les pays d'Europe de l'Ouest. L'attribution de la présidence annuelle de l'OSCE au Kazakhstan, décidée fin 2007 par les 56 Etats membres, n'allait pas de soi. Epinglé pour ses nombreuses entraves aux libertés, dénoncé pour ses élections jugées frauduleuses, accusé d'entretenir un culte de la personnalité autour de son président, le Kazakhstan de Noursoultan Nazarbaïev n'avait jusque là pas pu obtenir la présidence de l'OSCE, en raison des réticences d'un trop grand nombre de membres. Après deux tentatives infructueuses, le Kazakhstan est parvenu à convaincre ses pairs de l'OSCE en promettant une série de réformes, qui devaient prendre place, "au plus tard", en 2008. Astana devait notamment simplifier l'enregistrement des partis politiques, alléger sa législation sur la presse et réformer son système électoral en suivant les recommandations faites par le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l'homme de l'OSCE (Odihr). Pourtant, en dépit de quelques mesures adoptées, la situation des droits de l'homme se détériore au Kazakhstan, selon de nombreuses ONG, parmi lesquelles Human Rights Watch. Le plus connu des militants du pays, Evgueniï Jovtis, purge une peine de quatre ans de prison ferme pour homicide involontaire, à la suite d'un procès qualifié de "politique " par les opposants, et les manifestations publiques sont toujours encadrées par un arsenal législatif contraignant. Au niveau politique, le système est verrouillé par le réseau clanique développé autour de Noursoultan Nazarbaïev, qui a obtenu 91 % des voix aux élections présidentielles de 2005. Il pourra se représenter en 2012 à la faveur d'une loi qui limite à deux les mandats présidentiels, à l'exception "du premier président du pays". A la tête du Kazakhstan depuis l'indépendance en 1991, Noursoultan Nazarbaïev peut aussi compter sur le parti La Patrie, qui occupe la totalité des 98 sièges de l'Assemblée législative. Enfin, les réformes concernant la liberté de la presse semblent avoir produit l'effet inverse : une nouvelle loi sur la diffamation complique le travail des journalistes, surtout lors d'enquêtes sur la corruption. Pour le Web par exemple, une loi votée en 2009 - et décriée par l'Union européenne - assimile tout site Internet à un média, et rend le propriétaire pénalement responsable de l'information publiée - un coup dur pour les nombreux blogs politiques. Face aux inquiétudes, Astana botte en touche et répète à l'envi le credo de sa présidence : la "sécurité", notamment sur le dossier afghan. Selon Kanat Saoudabaïev, ministre kazakh des affaires étrangères et président en exercice de l'OSCE pour l'année, "toute discussion sur la sécurité européenne est prématurée tant que la question afghane n'est pas résolue ". Un credo salué par Moscou, qui entretient avec l'OSCE des relations compliquées. Le premier ministre Vladimir Poutine l'a souvent pourfendu, et déploré son "ingérence" dans les affaires intérieures, notamment à l'occasion d'élections où l'OSCE envoie des observateurs. Le président russe, Dmitri Medvedev, a, lui, salué la nouvelle présidence kazakhe, "qui permettra à l'OSCE de trouver une nouvelle place". Moscou souhaiterait certainement voir son voisin kazakh profiter de sa position pour limiter le rôle de l'organisation dans le monitoring électoral et les programmes de promotion de la démocratie. Selon certaines sources diplomatiques, Washington aurait donné son aval à la présidence kazakhe, à la condition que celle-ci ne modifie en rien les programmes de l'Odihr, chargé de l'observation des élections, notamment dans les ex-républiques soviétiques. Alexandre Billette
01/01/2010
europe
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Une tuerie relance le débat sur les armes en Finlande
Cinq personnes ont été tuées près d'Helsinki, après des drames similaires en 2007 et en 2008.
Après la tuerie qui s'est déroulée, jeudi 31décembre 2009 au matin, à Espoo, dans la banlieue d'Helsinki, la Finlande est à nouveau plongée dans le drame et la consternation. Six personnes sont mortes, dont le meurtrier, qui s'est suicidé. Le meurtrier a commencé à tirer avec un pistolet de 9 mm dans le supermarché Prisma à Espoo vers 10 heures heure locale, alors que des centaines de personnes étaient en train de faire leurs achats de nourriture pour le réveillon du Nouvel An. Des scènes de panique ont été rapportées. Trois hommes et une femme travaillant au magasin ont été abattus sur place. Une cinquième victime a été retrouvée plus tard dans un appartement. Il s'agissait de l'ancienne compagne du meurtrier, une Finlandaise avec qui il avait vécu pendant dix-huit ans, selon la presse. Celle-ci était également employée dans ce supermarché. Le meurtrier avait, par le passé, menacé de la tuer. La justice lui avait interdit d'approcher son domicile et son lieu de travail. La police semble attribuer le massacre à la jalousie, mais ignore encore pourquoi l'homme a abattu les quatre collègues de la jeune femme. L'auteur du massacre, Ibrahim Shkupolli, est un Albanais du Kosovo de 43 ans qui vivait en Finlande depuis 1990. Son ex-compagne, âgée de 42 ans, l'avait quitté en 2008 parce qu'il était violent. Selon un journal finlandais, Ibrahim Shkupolli s'était, depuis, marié avec une jeune femme du Kosovo dont il avait eu un enfant. L'homme a été retrouvé un peu plus tard dans son appartement, où il s'était donné la mort. Ibrahim Shkupolli était déjà connu des services de police. Il avait été condamné pour agression et pour infraction à la législation sur les armes. La tuerie a aussitôt provoqué de très nombreuses réactions en Finlande. Le pays a été traumatisé ces dernières années par plusieurs massacres collectifs. Règles plus strictes Le 23 septembre 2008, Matti Saari, étudiant dans une école professionnelle à Kauhajoki, tuait dix élèves avant de se suicider. Un massacre similaire s'était déroulé dans une autre école finlandaise, à Jokela, en novembre 2007, quand Pekka-Eric Auvinen, un élève de 18 ans, avait tué huit personnes avant, lui aussi, de se suicider. Des règles plus strictes pour la détention d'armes furent introduites en 2008, suite au drame de Kauhajoki, mais dans le cas des armes illégales, la police a reconnu avoir moins de possibilités d'agir. Le premier ministre, Matti Vanhanen, a ordonné dès jeudi une enquête sur les armes illégales. Il a également déclaré qu'il fallait à nouveau mettre en question le grand nombre d'armes en circulation en Finlande. Il y a à peine deux semaines, s'est achevé le procès d'un policier inculpé dans l'affaire de la tuerie de Kauhajoki car il n'avait pas confisqué l'arme de Matti Saari la veille du drame, en dépit de signes avant-coureurs. Durant le procès, les familles des victimes avaient crié leur révolte, considérant que rien n'avait été fait pour empêcher que de tels massacres ne se reproduisent. O. T.
01/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/01/une-tuerie-relance-le-debat-sur-les-armes-en-finlande_1286523_3214.html
En Lettonie, des lopins de terre distribués aux plus pauvres
Le PIB letton a reculé de 17 % en 2009, ce qui en fait le pays européen le plus touché par la crise.
Pendant tout l'automne 2009, Laiga Lidaka a préparé des conserves avec les légumes récoltés sur une petite parcelle de terre à Vaive, une commune de 1 700 habitants située à une centaine de kilomètres à l'est de la capitale de la Lettonie, Riga. "Le reste est à la cave. Cela me fait des légumes jusqu'au printemps. Sans cela, je n'aurais rien eu à manger pendant cet hiver." Cette parcelle de terre qui est son salut, elle l'a obtenue gratuitement de la commune, dernier recours pour les plus nécessiteux dans un pays frappé par la crise. Le chômage atteint officiellement 16 % parmi les 2,3 millions d'habitants tandis que le PIB a reculé de 17 % en 2009, faisant de la Lettonie le pays de l'Union européenne (UE) le plus touché. Les mécontents sont de plus en plus nombreux, comme à Riga où des Lettons campent depuis un mois en dépit d'un froid mordant devant le palais du gouvernement pour protester contre cette situation. A Vaive, depuis la mi-octobre, Laiga Lidaka, âgée de 55 ans, et ses deux enfants à charge ont le statut de famille pauvre. Elle a bénéficié d'un programme insolite mis en place par la commune, qui a décidé de distribuer des lopins de terre aux plus démunis. Sur les vingt familles concernées, neuf ont accepté l'offre. Bien d'autres seront concernées au printemps. Plusieurs communes ont suivi l'exemple tandis qu'au niveau national, 100 000 foyers bénéficient d'un quota d'électricité gratuite cet hiver. Auparavant, Laiga Lidaka avait travaillé pendant deux mois dans une école de Cesis comme femme de ménage. Elle faisait les allers-retours à pied. "C'était loin." Elle n'en pouvait plus. Elle a arrêté. Elle et ses enfants touchent 180 lats (255 euros) par mois. Elle reçoit aussi 100 lats d'une bourse européenne. Son plus jeune fils, Janis, récupère une petite pension comme orphelin de père. Son autre fils, qui vit avec elle, âgé de 30 ans, travaillait dans le bâtiment. Comme beaucoup d'autres ouvriers du secteur, il est au chômage. Mais comme il travaillait au noir, il n'a pas droit à des indemnités. Un troisième fils est parti en Angleterre. Il travaille aussi dans le bâtiment et vient d'avoir un enfant. "J'aime mon pays, dit Laiga Lidaka, et j'ai pleuré quand j'ai vu que mon premier petit-fils était né à l'étranger." Beaucoup de jeunes Lettons tentent ainsi, depuis des années, leur chance à l'étranger. Et en dépit de la crise dans les autres pays européens, le phénomène ne s'est pas tari. Au contraire, ce sont des familles entières qui émigrent. Une soixantaine de personnes ont quitté le village. Auparavant, c'était l'homme qui partait. Il envoyait de l'argent au pays, faisant rentrer des devises. Désormais, cette manne reste à l'étranger. D'autres se noient dans l'alcool. "C'est dramatique, dit Rudite Petrova, responsable de l'aide sociale à Vaive. Ils en oublient leurs enfants." Des enseignants n'ont plus d'emploi, les autres ont vu leur salaire diminué. Personne n'a encore perdu sa maison à Vaive, mais de nombreux huissiers ont déjà rendu visite aux plus endettés. Valda Zalaiskalna, directrice administrative de la commune de Vaive, qui, comme les autres fonctionnaires locaux, a vu son salaire réduit de 20 %, se veut toutefois optimiste : "Les Lettons peuvent survivre en enfer", lance-t-elle. "Nous avons de la terre et la terre nous nourrit. Nous pouvons nous nourrir par nous-mêmes. Mais notre législation sociale est boiteuse et le gouvernement ne pense pas à la population. La situation va continuer à se détériorer, or l'état de nos finances empire." Le 1er janvier, la législation a changé. Au lieu d'un paiement dégressif des allocations chômage (100 % du salaire les deux premiers mois, puis 75 % les deux mois suivants et 45 lats mensuels les cinq derniers mois), les chômeurs touchent maintenant 50 % de leur salaire pendant les neuf mois d'indemnisation. "Après ces neufs mois, les chômeurs deviennent nos clients", explique Rudite Petrova. Laiga Lidaka, elle, s'inquiète pour l'avenir. "J'ai dix ans à tenir jusqu'à la retraite. Dix ans à vivre comme ça ? Je ne veux pas y penser. Et pour quelle retraite ? Les retraités touchent 140 lats par mois." Pour elle, cette crise, c'est la faute du gouvernement. Et quand une émission politique passe à la radio, elle éteint désormais son poste. Olivier Truc (Stockholm, correspondance) et Olivier Truc
01/01/2010
europe
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La chancelière Angela Merkel prépare les Allemands à une année 2010 difficile
Les dossiers les plus délicats seront examinés après des élections régionales stratégiques en mai.
L'année 2010 sera difficile pour l'Allemagne. Angela Merkel l'a dit sans détours à ses compatriotes lors de son allocution télévisée du 31 décembre. "Nous ne pouvons pas espérer que la récession soit rapidement surmontée", a souligné la chancelière chrétienne-démocrate, qui portait de fines lunettes pour l'occasion. La première économie de la zone euro a certes commencé à sortir de la plus grave récession qu'elle ait connue depuis la seconde guerre mondiale. Les prévisions de croissance ont été corrigées à la hausse ces derniers mois - le gouvernement table sur une hausse du PIB de 1,2 % en 2010 - et l'augmentation du chômage est restée limitée. Mais de nombreuses incertitudes planent sur l'avenir. "Il y aura d'abord une dégradation au cours de cette nouvelle année, avant qu'il y ait un redressement", a expliqué Mme Merkel. La chef du gouvernement allemand craint notamment une explosion du chômage. Jusqu'à maintenant, les entreprises ont pu éviter des licenciements massifs en recourant au système du chômage partiel. A long terme, cette mesure n'est pas rentable pour les sociétés. En outre, le dispositif de la prime à la casse, qui a dopé les ventes des constructeurs automobiles, est arrivé à échéance en septembre. Aussi, le chef de l'Agence fédérale pour l'emploi, Frank-Jürgen Weise, s'attend-il à d'importantes destructions d'emplois, notamment dans les secteurs-clés de l'industrie allemande, au cours des prochains mois. Autre menace qui pèse sur la conjoncture : l'aggravation des conditions de crédit pour les entreprises. Début décembre 2009, la chancelière avait convoqué des représentants des banques, entreprises et syndicats pour réfléchir à des mesures de lutte contre la pénurie de crédit. Lors de ses voeux, Mme Merkel a annoncé la mise en place de nouvelles règles pour les marchés financiers afin d'empêcher "l'accumulation d'excès et d'irresponsabilité". Pour la chancelière, 2010 sera un tournant. L'Allemagne doit "transformer son économie de manière à la rendre durable". La question qui se pose, selon elle, est de savoir "comment nous préservons notre prospérité, en changeant notre art de vivre et notre économie". "C'est maintenant que sont posés les jalons pour l'avenir des Allemands", résume l'hebdomadaire Der Spiegel, qui consacre sa "une" à la conjoncture allemande en 2010. En effet, certains économistes critiquent le modèle allemand tourné vers l'exportation et exhortent les responsables politiques à stimuler davantage la demande intérieure. Un emploi sur cinq dépend du commerce extérieur et la part des exportations dans le PIB atteint désormais 47 %. Une manière de répondre à ce défi est d'augmenter substantiellement les investissements dans l'éducation et la recherche. La chancelière souhaite faire passer les dépenses de ce secteur à 7 % du PIB d'ici à 2015. Mais l'urgence est d'abord de sortir le pays de la crise. L'Allemagne a été particulièrement touchée. En 2009, son PIB devrait afficher une baisse de 5,3 % contre 2,4 % pour la France ou 4,4 % pour le Royaume-Uni. "Nous, au sein du gouvernement allemand, devons faire tout ce que nous pouvons pour créer de la croissance", a-t-elle poursuivi. Pour relancer la machine économique, la nouvelle coalition de centre-droit, qui réunit les unions chrétiennes CDU-CSU et les libéraux du FDP, a décidé de baisser les impôts. Une première série d'allégements fiscaux d'un montant de 8,5 milliards d'euros est entrée en application le 1er janvier. D'autres réductions d'impôts sont prévues d'ici à 2011. En même temps, le gouvernement souhaiterait s'atteler à la réduction du déficit public, qui bat des records, pour respecter les critères du pacte de stabilité et le mécanisme de frein à la dette inscrit dans la Constitution allemande. De l'avis de nombreux économistes, les hausses d'impôts seront alors incontournables. Les négociations pour la prochaine loi sur le budget 2011 s'annoncent donc laborieuses. Mais d'ici au 9 mai, date des élections régionales en Rhénanie du Nord-Westphalie, le Land le plus peuplé d'Allemagne, le gouvernement évitera d'aborder ce sujet délicat. De même, les autres dossiers lourds de la coalition, tels la réforme de la santé ou le nouveau concept énergétique, ne devraient pas être rouverts avant ce scrutin test. Cécile Calla
01/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/01/la-chanceliere-angela-merkel-prepare-les-allemands-a-une-annee-2010-difficile_1286524_3214.html
Taxe carbone : l'avis du Conseil constitutionnel est un progrès écologique, par Fabienne Keller
Il donne des raisons d'espérer à propos d'une prochaine consécration constitutionnelle de l'écofiscalité.
Inconstitutionnelle la taxe carbone... Cette position du Conseil constitutionnel paraît en première analyse brutale, conservatrice et même quelque peu anti-écologique. En fait, après lecture de la décision, le sentiment n'est plus le même ; il est même contraire et donne des raisons d'espérer à propos d'une prochaine consécration constitutionnelle de l'écofiscalité. 1. A deux reprises, le Conseil constitutionnel se réfère à la Charte de l'environnement. Ce n'est certes pas nouveau, il avait déjà déclaré en juin 2008 à l'occasion de la loi OGM que tous les articles de la Charte avaient pleine valeur constitutionnelle. L'examen de la loi de finances pour 2010 lui offre l'opportunité de réaffirmer toute la portée constitutionnelle de deux principes fondamentaux : le devoir de chacun de prendre part à la préservation de l'environnement et le principe de responsabilité environnementale. 2. Le Conseil constitutionnel tire l'inconstitutionnalité de la taxe carbone du fait qu'elle contrevient au principe d'égalité devant les charges publiques. Il formule notamment quatre critiques explicites : il regrette que l'énergie électrique produite par les centrales reste en dehors du dispositif ; il déplore les exonérations partielles accordées à de trop nombreux secteurs économiques : transport routier, transport maritime, agriculture, pêche... Le dispositif prévoyait dès son instauration une multitude de niches que j'avais moi-même vivement dénoncées au Sénat, au risque de paraître impopulaire ; il critique le système d'allocation gratuite des quotas au sein du marché européen de quotas carbone ; il va même jusqu'à constater (et regretter ?) l'exonération totale du transport aérien. Par sa décision, le Conseil constitutionnel va contraindre le gouvernement à revoir sa copie dans le sens d'un élargissement de l'assiette de la taxe carbone. C'est plutôt une voie de progrès, même si certaines évolutions ne peuvent être tranchées qu'au niveau international. Je salue le volontarisme du gouvernement, qui a d'ores et déjà déclaré qu'il présenterait un nouveau dispositif le 20 janvier 2010. Je resterai particulièrement vigilante, car les pressions exercées par les divers lobbies - voire une partie de l'opinion publique - seront très fortes pour affaiblir la taxe carbone et la vider de son sens. La décision du Conseil constitutionnel intervient après l'échec de Copenhague et fait courir le risque qu'un sentiment d'improvisation et d'impréparation se répande parmi nos concitoyens. Mais c'est tout le contraire ! La taxe carbone procède d'une analyse véritablement visionnaire. Elle ouvre la voie vers un modèle de développement plus respectueux de l'environnement. A chaque siècle sa grande révolution fiscale. La Révolution française a posé le principe de l'égalité devant les charges publiques. L'instauration de l'impôt sur le revenu au début du XXe siècle a précédé l'Etat providence. La TVA est consubstantielle aux "trente glorieuses" et à la société de consommation. La taxe carbone en ce début de XXIe siècle annonce une société consciente de l'impossibilité d'un développement infini sur une planète dont les ressources ne sont pas inépuisables. Mettre un prix sur une dégradation de l'environnement, ce n'est pas accorder un droit à polluer, mais intégrer le souci de la protection de la nature dans les règles du jeu de l'économie. Il n'est plus loin le temps où le Conseil constitutionnel consacrera définitivement cette grande idée ! Sénatrice du Bas-Rhin présidente du groupe de travail de la commission des finances du Sénat sur la fiscalité environnementale Fabienne Keller
01/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/01/taxe-carbone-l-avis-du-conseil-constitutionnel-est-un-progres-ecologique-par-fabienne-keller_1286560_3232.html
A Téhéran, le pouvoir de Mahmoud Ahmadinejad est en sursis, par Farhad Khosrokhavar
Depuis juin, le "mouvement vert" a gagné la société tout entière.
Depuis six mois, l'Iran est pris dans la tourmente du "mouvement vert". Ce mouvement, né pendant l'élection présidentielle de juin, s'est déclenché après la fraude électorale massive en faveur du président sortant Mahmoud Ahmadinejad. Depuis, malgré la répression qui l'a pris pour cible et a fait plusieurs dizaines de morts, des milliers de prisonniers, de torturés et de blessés, il ne cesse de se répandre dans la société. Le simple fait qu'il perdure est un échec cuisant pour un pouvoir qui devient de plus en plus despotique et répressif à mesure qu'il perd de sa popularité et se sent vulnérable. La proportion de la population qui suit les conservateurs iraniens et dont une partie a peur de la modernité, de la promiscuité entre hommes et femmes et de l'émancipation de la jeunesse est aux alentours de 15 %. C'est la proportion des franges qui ont invariablement voté pour les conservateurs contre vents et marées dans les quinze dernières années. L'échec de Mohammad Khatami à réformer le système politique sous ses deux mandats successifs a induit une désaffection marquée pour les réformateurs. Mais depuis, la politique catastrophique d'Ahmadinejad et son incapacité à sortir d'une économie d'aumône (distribution des revenus pétroliers à ses partisans et aux "déshérités") ont induit une inflation et une désorganisation de l'économie que l'embargo international a empirées, sans en être la cause. Le mouvement vert est avant tout l'expression de la nouvelle société civile iranienne et de sa volonté démocratique. Sa faiblesse majeure est qu'il n'a pas su mobiliser les déshérités , ceux qui pâtissent le plus de la politique économique d'Ahmadinejad, mais dont une partie est prise en charge par son gouvernement et une autre partie se trouve prise dans des réseaux qui n'ont pas de communication avec les nouvelles classes moyennes dont est issu le mouvement vert. C'est que le mouvement n'a pas eu de mot d'ordre sur la justice sociale qui aurait pu attirer la sympathie des plus faibles. Une autre faiblesse du mouvement est qu'il n'a mobilisé que les grandes villes dans un premier temps et que le reste est resté en dehors de son champ d'action. Enfin, le mouvement a été dépourvu de leadership une fois que ses trois chefs, Mir Hossein Moussavi, Mehdi Karoubi et Mohammad Khatami, ont été placés en résidence surveillée, avec arrestation de leurs proches qui géraient le mouvement. Or ces six derniers mois ont paré en partie à ces faiblesses. La répression suivie de torture et quelquefois de viol et de violence inconsidérée a touché la fibre familiale et communautaire de nombreuses couches de "déshérités". Une partie de leurs enfants se trouvent au lycée et à l'université et ont participé au mouvement, subissant les sévices des forces de l'ordre. Le spectacle des morts et des blessés, filmé par les téléphones portables et relayé par Internet, a éveillé les souvenirs du temps du chah. Le mouvement, sécularisé dans ses aspirations, a gardé le lien avec l'islam avec, pour slogan essentiel "Allah est grand", et les voies de fait du régime ont vite fait de transformer la personnalité du Guide de la révolution et celle de son président en celle, honnie, de Yazid (calife omeyyade qui ordonna la mort d'Hussein, troisième imam chiite) dans les dernières manifestations de rue, à l'occasion de l'anniversaire de la mort d'Hussein. Enfin, les villes traditionnelles ont été atteintes par le mouvement, comme Qom, qui était restée silencieuse et qui se réveille pour dénoncer le régime en place. L'une après l'autre, les villes s'éveillent, remettant en cause la légitimité du régime. La rue échappe désormais au monopole du pouvoir, qui était son lieu de prédilection pour affirmer sa légitimité exclusive dans des manifestations organisées d'avance et que personne ne contestait avant l'élection présidentielle. Les jeunes se rejoignent dans la dénonciation du régime qui cherchait à éveiller le sentiment "islamique" de l'honneur masculin contre le "dévergondage" féminin. L'enjeu nucléaire qui aurait dû souder la population derrière le régime en flattant son nationalisme n'a pas joué le rôle escompté par le pouvoir et le problème nucléaire ne bénéficie d'aucune capacité mobilisatrice en Iran, au grand dam du régime. Aucun des symboles de légitimité du pouvoir ne demeure désormais intact. Un mouvement dépourvu de direction politique unifié, non violent idéologiquement et démocratique dans ses revendications ("où est mon vote ?"en est le slogan majeur) commence à faire tache d'huile dans la société iranienne. L'ambiguïté fondamentale en est que le trio qui constitue le leadership du mouvement s'en tient toujours à la révision de l'élection présidentielle de juin (donc la réforme au sein du régime actuel), alors que le mouvement, lui, est déjà dans la phase du changement de régime théocratique (on entend de plus en plus le slogan "mort au dictateur", visant le Guide suprême). Cette ambiguïté a aussi des aspects positifs : elle rend possible l'adhésion de ceux qui veulent dénoncer le pouvoir actuel sans aller jusqu'à un renversement dont ils craignent les conséquences imprévisibles. Ce qui est nouveau dans ce mouvement est qu'il est le premier mouvement démocratique de masse au Moyen-Orient, qu'il est anti-islamiste, ne se nourrit d'aucune utopie religieuse, qu'il est fondé dans son noyau dur sur une sécularisation profonde de la société et qu'il cherche non pas une "cité céleste", mais l'Etat de droit. Il a refusé jusqu'à présent la violence et cherche à construire une nouvelle société sur les ruines de l'islamisme politique. Son fer de lance est les étudiants (3,5 millions) qui forment au moins 10 % de la population adulte du pays. Mais le mouvement a su englober une nouvelle partie de la population et sortir du cercle étudiant où il était enfermé en 1999 où il a été réprimé par les milices du régime, devant un président Khatami velléitaire et impuissant. A présent, la peur du régime est brisée et le pouvoir est "nu", sans cette autorité morale que lui témoignait, il y a encore six mois, une partie importante de la population. Ne demeure que sa capacité répressive, le coup d'Etat de l'armée des pasdarans ou le bain de sang pouvant lui assurer un temps de répit mais sans garantir sa survie. Même dans les forces de l'ordre, on entend désormais des voix discordantes qui refusent d'obtempérer aux ordres de répression aveugle. Le pouvoir est en sursis et son avenir plus qu'incertain. L'ironie internationale veut que les Etats-Unis soient prêts à négocier avec ce pouvoir discrédité à l'intérieur, si celui-ci cède sur le dossier nucléaire. Sous George Bush, le président américain prônait la démocratie mais n'avait pas de crédibilité pour le faire et l'Iran n'était pas prêt à remettre en cause la théocratie islamiste. La société iranienne est prête au changement, mais le président Obama ne la suit plus. Lui qui a la crédibilité internationale pour prescrire la démocratie n'a plus le souffle nécessaire pour le faire. Pourtant, la société iranienne a un besoin urgent de soutien international, non pas tant pour faire avancer le dossier nucléaire, mais pour soutenir son mouvement démocratique. L'Occident comprendra-t-il les nouveaux enjeux avant qu'il ne soit trop tard ? Directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) Farhad Khosrokhavar
01/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/01/a-teheran-le-pouvoir-de-mahmoud-ahmadinejad-est-en-sursis-par-farhad-khosrokhavar_1286558_3232.html
A propos de l'absent, par Françoise Fressoz
Comme chaque 31 décembre, l'un a parlé aux Français, l'autre s'est tu.
C'est conforme aux usages. Ce qui l'est moins, c'est de consacrer toute cette chronique au taiseux. Autrement dit, de négliger Nicolas Sarkozy pour se consacrer au discret François Fillon. Il existe pourtant une bonne raison à cela : dans le couple exécutif, le personnage qui intrigue le plus en ce moment n'est pas le président de la République, mais son premier ministre. Ce qui arrive au chef de l'Etat est banal : Nicolas Sarkozy subit, comme tous ses prédécesseurs, le choc de la mi-mandat, accentué par les effets de la crise économique et une conduite toute personnelle des affaires, qui lui vaut notamment le sévère recadrage du Conseil constitutionnel sur la taxe carbone. Ce qui arrive au premier ministre est plus original : de souffre-douleur de l'hyperprésident, il est en train de passer, sans jamais élever la voix, au statut de possible recours. Dans la majorité, on ne tarit pas d'éloges sur cet homme aussi discret que secret. Les élus UMP vantent son "sens de l'équilibre", "ses qualités d'écoute". Beaucoup soulignent à quel point son discours sur l'identité nationale, le 4 décembre, était "digne". D'autres remarquent qu'il a fallu son déplacement en Chine, avant Noël, pour mettre fin à la brouille diplomatique qu'avait fait naître l'impétueux président, en 2008. Certains se souviennent que, sur la taxe carbone, sa position n'était pas exactement celle de Nicolas Sarkozy. En ce début d'année 2010, François Fillon ne songe plus à jeter l'éponge. Il est devenu un homme politique qui compte. En le marginalisant au début de son quinquennat - ah ! ce mot de "collaborateur" lâché, fin août 2007, devant la presse, alors que les conseillers de l'Elysée semblaient faire la pluie et le beau temps -, le chef de l'Etat lui a rendu un fier service ; il l'a préservé, tandis que lui s'est usé. Et maintenant, il n'a pas d'autre choix que de l'utiliser comme bouclier. En espérant que le bouclier ne se transformera pas en glaive... C'est la raison pour laquelle 2010 sera intéressante à observer. L'objectif de François Fillon est de durer le plus longtemps possible. Cinq ans si possible. Pour gagner ses galons de réformateur et se construire un avenir. C'est la carte qu'avait jouée Raymond Barre, entre 1976 et 1981, sous le septennat de Valéry Giscard d'Estaing, dans un contexte économique aussi difficile, sans d'ailleurs que celui-ci lui porte chance puisqu'il avait échoué à la présidentielle de 1988. Mais il existe, pour François Fillon, un autre scénario plus brutal mais pas forcément négatif : un limogeage post-régionales, qui pourrait, si la fin du quinquennat tournait mal, lui servir de tremplin. C'est ainsi que Georges Pompidou avait réussi à succéder au général de Gaulle, après Mai 68, et le référendum perdu de 1969. Durant sa traversée du désert, bien peu pensaient que l'ancien chef de cabinet du Général serait celui qui lui succéderait. Courriel : [email protected] Françoise Fressoz
01/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/01/a-propos-de-l-absent-par-francoise-fressoz_1286503_3232.html
Le destin de l'Afghanistan se joue d'abord à Kandahar
Terre d'origine du clan Karzaï, la ville méridionale de Kandahar est aussi un bastion historique des talibans, où le mollah Omar a vécu et conservé de profondes racines. C'est sur cette terre pachtoune, plus qu'à Kaboul, que l'avenir à long terme du pays pourrait se décider.
Lorsque l'on parle de l'Afghanistan, les yeux du monde sont rivés sur sa capitale, Kaboul. C'est là que se concentrent les lieux de pouvoir et où se détermine, en principe, son avenir. C'est aussi là que sont réunis les commandements des forces civiles et militaires internationales envoyées sur le sol afghan pour lutter contre l'insurrection et aider le pays à se reconstruire. Mais, à y regarder de plus près, Kaboul n'est qu'une façade. Face à un Etat inexistant, une structure du pouvoir afghan encore clanique, des tribus restées puissantes face à une démocratie artificielle importée de l'extérieur, la vraie légitimité ne vient pas de Kaboul. La géographie du pouvoir afghan aujourd'hui oblige à dire qu'une bonne partie des clés du destin de la population afghane se trouve au sud, en terre pachtoune, dans une cité hostile aux étrangers, foyer historique des talibans, Kandahar. Kandahar est la terre d'origine du clan Karzaï et de sa tribu, les Popalzaï. Hamid Karzaï, président afghan, tient son pouvoir du poids de son clan dans la région. Mi-novembre 2009, dans la grande maison de son frère, Wali, à Kandahar, se pressaient des chefs de tribu venus de tout l'Afghanistan, les piliers de son réseau. L'objet de la rencontre : faire le bilan post-électoral après la réélection contestée de son frère à la tête du pays. Parfois décrié pour ses liens supposés avec la CIA et des trafiquants de drogue, Wali Karzaï joue un rôle politique méconnu. Il a organisé la campagne de son frère, et ce jour-là, à Kandahar, se jouait, sous sa houlette, l'avenir de ceux qui avaient soutenu ou au contraire refusé leur soutien à Hamid. Chef d'orchestre chargé du clan du président, Wali est la personnalité forte du sud du pays. Les Karzaï adossent leur influence à celle de Kandahar dans l'histoire de l'Afghanistan. Lorsque Ahmad Shah, le fondateur du pays, en 1747, conquit la ville, il en fit sa capitale. "Jusqu'en 1979, lors de l'invasion soviétique, Kandahar a incarné le mythe de la création de l'Etat afghan, les Kandaharis considèrent qu'ils ont un droit divin à diriger le pays", résume Mariam Abou Zahab, experte du monde pachtoune. "Kandahar, c'est l'Afghanistan, explique à ceux qui l'interrogent Tooryalaï Wesa, gouverneur de la province. La politique s'y fait et, encore aujourd'hui, la politique sera dictée par les événements qui s'y dérouleront." Cette emprise de Kandahar s'évalue aux places prises au sein du gouvernement par "ceux du Sud". La composition du nouveau gouvernement, le 19 décembre, n'a pas changé la donne. D'autant moins que les rivaux des Karzaï, dans le Sud ou ailleurs, n'ont pas réussi à se renforcer au cours du dernier mandat du président. L'autre terre pachtoune, le grand Paktia, dans le sud-est du pays, à la frontière avec le Pakistan, qui a fourni tant de rois, ne dispose plus de ses relais dans la capitale. Kandahar pèse aussi sur l'avenir du pays, car s'y trouve le coeur de l'insurrection qui menace le pouvoir en place. L'OTAN, défiée depuis huit ans, n'a cessé de perdre du terrain dans le Sud, où les insurgés contrôlent des zones entières. Les provinces du Helmand et de Kandahar sont les zones les plus meurtrières pour la coalition et l'OTAN semble dépourvue de stratégie cohérente. Kandahar est la terre natale des talibans. Ils sont nés dans les campagnes du Helmand et de Kandahar, et le mouvement taliban s'est constitué dans la ville de Kandahar, où vivait leur chef spirituel, le mollah Omar, et où il a conservé de profondes racines. La pression sur la vie quotidienne des Afghans est croissante. Les talibans suppléent même le gouvernement dans des domaines tels que la justice quotidienne. Ceux qui collaborent avec les étrangers sont stigmatisés, menacés, voire tués. En guise de premier avertissement, les talibans collent, la nuit, des lettres sur les portes des "collabos". "La progression talibane est un fait dans le Sud, relate Alex Strick van Linschoten, unique spécialiste occidental de la région et du mouvement taliban à vivre à Kandahar sans protection. L'insécurité, l'absence de travail poussent vers Kaboul ceux qui ont un peu d'éducation et de compétence, seuls restent les pauvres et ceux qui veulent faire de l'argent." En réaction à cette détérioration, les Américains ont décidé, sans l'assumer ouvertement, de reprendre le contrôle de situations confiées officiellement par l'OTAN aux Britanniques dans le Helmand et aux Canadiens dans la province de Kandahar. Le mouvement a été progressif, mais, depuis un an, les Etats-Unis n'ont cessé d'envoyer des renforts américains, au point d'exercer aujourd'hui de fait la direction des opérations dans cette région. Une tendance qui se renforcera encore avec l'arrivée des troupes supplémentaires promises par Barack Obama. L'histoire a montré que, pour gagner en Afghanistan, il fallait tenir les campagnes de Kandahar. Les Britanniques l'ont expérimenté de façon cuisante lors de la seconde guerre anglo-afghane à la fin du XIXe siècle et les Soviétiques n'en sont jamais venus à bout. "On sait comment cela s'est terminé pour eux, on va essayer d'éviter de faire les mêmes erreurs", observait, mi-novembre, optimiste, un officier supérieur américain. Service International Courriel : [email protected] Jacques Follorou
01/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/01/le-destin-de-l-afghanistan-se-joue-d-abord-a-kandahar_1286502_3216.html
Pékin et l'Asean
En décembre 2001, l'adhésion effective de la Chine à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) avait presque été perçue, à tort évidemment, comme un non-événement.
Incomparablement moins importante que le 11-Septembre ou que la faillite frauduleuse d'Enron. Aujourd'hui, il en va de même avec l'accord historique que la Chine, toujours elle, va mettre en oeuvre avec l'Asean (Association des nations de l'Asie du Sud-Est). Conformément à un processus lancé en 2002 et entré partiellement en application en 2005, Pékin et les six principaux pays de l'Asean (Indonésie, Philippines, Thaïlande, Malaisie, Singapour, Brunei) suppriment le 1er janvier les barrières douanières concernant 90 % de leurs échanges commerciaux. Cette zone de libre-échange est comparable à l'Union européenne ou à l'Alena en Amérique du Nord. Près de deux milliards de personnes sont concernées. L'Asean a été créée, en 1967, pour résister aux régimes communistes. Cet accord illustre, à sa manière, le basculement du monde intervenu depuis lors. Contrairement à ce que croyaient les dirigeants de l'Asean il y a quarante ans, ce ne sont pas les soldats de l'Armée populaire qui les envahissent, mais les produits made in China. L'Indonésie, qui représente à elle seule 40 % du PIB de l'Asean, a d'ailleurs été la plus réticente, et le patronat textile voit cet accord d'un très mauvais oeil. Deux chiffres résument la situation. Le déficit de l'Asean avec la Chine est actuellement comparable à l'excédent de l'Asean avec les Etats-Unis : environ 21 milliards de dollars dans les deux cas. On peut donc parier que, grâce notamment à la faiblesse du yuan, Pékin - premier partenaire commercial de ces six pays devant les Etats-Unis - conquerra encore plus massivement les marchés de Bangkok et de Djakarta. Mais l'Asean ne se jette pas dans la gueule du dragon sans raison : malgré son déficit commercial avec Pékin, elle peut d'autant moins se passer de la dynamique de son (trop) puissant voisin que son principal client, de l'autre côté du Pacifique, connaît une crise sans précédent. Bref, la Chine, qui est en passe de détrôner l'Allemagne comme premier exportateur de la planète et de supplanter le Japon comme deuxième puissance économique mondiale, exploite au mieux un rapport de forces qui lui est très favorable. Cela n'est évidemment pas sans conséquence sur le reste de la planète : la question des raisons d'être de l'OMC va finir par se poser, et il est plus que temps que la Chine prenne ses responsabilités mondiales et accepte de réévaluer le yuan.
01/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/01/pekin-et-l-asean_1286500_3232.html
Une nuit de la Saint-Sylvestre bien plus calme que les précédentes
Le passage à la nouvelle année a été fêté joyeusement en France, dans une ambiance plutôt calme.
Le passage à la nouvelle année a été fêté joyeusement en France, dans une ambiance plutôt calme, le nombre des incidents semblant en retrait sensible d'une année sur l'autre. Seul incident notable de la nuit du jeudi 31 décembre au vendredi 1er janvier, en région parisienne, une intoxication au monoxyde de carbone a fait 65 blessés, dont six graves, à Pantin, en Seine-Saint-Denis, dans des circonstances qui n'étaient pas encore précisées vendredi matin. Le ministère de l'intérieur, qui avait mobilisé 45 000 policiers et gendarmes, a fait savoir que les forces de l'ordre ont procédé à 405 interpellations, principalement pour des tentatives d'incendie de véhicule ou pour des jets de projectiles sur les forces de l'ordre, mais qu'"aucun incident important n'a été constaté". TRÈS CALME EN ÎLE-DE-FRANCE, PAISIBLE EN PROVINCE Des informations parcellaires recueillies par l'AFP avant 8 h 30 semblaient confirmer que la nuit de la Saint-Sylvestre a été plus calme que la précédente (1 147 voitures brûlées l'année dernière). En région parisienne, dans les Hauts-de-Seine, une source syndicale policière parlait à 6 heures de 32 véhicules brûlés, dont dix à Colombes, mais pas d'affrontement entre jeunes et police. Dans le Val-de-Marne, selon la police, la nuit a été "très calme", "normale", avec "moins de voitures brûlées que d'habitude". En Seine-et-Marne, quelques véhicules incendiés et feux de poubelle ont été signalés par la sécurité publique. Et la situation était aussi calme en province. A Strasbourg, traditionnellement touchée par les incendies de voitures, on a compté entre 60 et 70 voitures brûlées, selon France Bleu Alsace, contre environ 90 fin 2008. "Il y a eu des tensions, mais les choses se sont globalement mieux passées" que les années précédentes, a résumé Olivier Bitz, adjoint au maire chargé de la sécurité. Dans le Nord, les pompiers ont signalé "124 interventions entre 17 heures et 5 heures du matin pour des feux de voitures, de mobiliers urbains et de poubelles confondus". Ce chiffre semble relativement faible par rapport à l'an passé, où les pompiers avaient dénombré 94 feux rien que pour les véhicules incendiés pour le Jour de l'an.
01/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/01/une-nuit-de-la-saint-sylvestre-bien-plus-calme-que-les-precedentes_1286488_3224.html
Maggie ignorait où se trouvaient les Malouines, dixit Denis Thatcher
Margaret Thatcher ne savait pas où se trouvaient exactement les îles Malouines lors de l'invasion de l'archipel, par les forces Argentines, le 2 avril 1982 : c'est ce qu'affirme dans un entretien télévisé posthume Sir Denis Thatcher, l'époux de l'ancienne premier ministre.
Margaret Thatcher ne savait pas où se trouvaient exactement les îles Malouines lors de l'invasion de l'archipel, par les forces Argentines, le 2 avril 1982 : c'est ce qu'affirme dans un entretien télévisé posthume Sir Denis Thatcher, l'époux de l'ancienne premier ministre, décédé d'un cancer au mois de juin. « Quand, entourée de quelques conseillers, Maggie m'a annoncé l'occupation, je ne parvenais pas à localiser ces îles. Mais, par peur de paraître idiot, je ne l'ai pas avoué. Par la suite, j'ai pris conscience que c'était le cas de tout le monde autour de moi », déclare le « prince consort » au cours d'une interview qui doit être diffusée le 3 août par la chaîne privée Channel Four. Mme Thatcher n'était d'ailleurs pas seule à ignorer l'emplacement de ces rochers désolés perdus dans l'Atlantique sud. A l'époque, la majorité de ses compatriotes n'étaient pas au courant de l'existence de ce territoire de la Couronne, grand comme un mouchoir de poche, peuplé de deux mille habitants. Les propos de Denis Thatcher ont été recueillis en octobre 2002 par sa fille Carol, journaliste à ses heures, dont il était particulièrement proche. A l'instar de la reine d'Angleterre, Sir Denis n'avait jamais donné d'interview aux médias. Depuis l'élection de « Mrs T » à la tête des conservateurs, en 1975, personne n'était parvenu à arracher la moindre confidence à ce personnage effacé qui évoluait le plus discrètement possible dans l'ombre de sa brillante épouse. CONFESSIONS SANS DÉTOUR Devant la caméra, ce Major Thompson grandeur nature manifeste une poignante amertume envers John Major, le successeur de Maggie. « Si John Major n'avait pas gagné [le scrutin de 1992], nous n'aurions pas eu le désastre qui a suivi. C'était un premier ministre atroce et encore plus de gens ont déserté le parti » , indique Sir Denis. Quant à Tony Blair, il en prend également pour son grade : « Epouvantable ! Regardez ce qu'il nous a fait... » « C'est mon roc », avait coutume de dire à propos de son mari Mme Thatcher, qui fut au pouvoir de 1979 à 1990. Il affirme lui avoir suggéré à plusieurs reprises de quitter le pouvoir dès l'été 1989, après la célébration de ses dix ans à la tête du pays. En vain. Le 20 novembre 1990, après la mise en ballottage de la Dame de fer lors de l'élection du chef des Tories, Denis aurait voulu qu'elle démissionne immédiatement. Mais, à l'écouter, par loyauté, il n'a pas eu le courage de le dire à celle qu'il décrit comme « le meilleur premier ministre que le pays ait eu depuis Winston Churchill ».
01/01/2010
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2010/01/01/maggie-ignorait-ou-se-trouvaient-les-malouines-dixit-denis-thatcher_1286387_3210.html
Mir Hossein Moussavi exige l'arrêt de la répression en Iran
Le chef de file de l'opposition iranienne appelle le régime au compromis, assurant que la répression ne viendra pas à bout de l'opposition.
Le chef de file de l'opposition iranienne, Mir Hossein Moussavi, affirme, vendredi 1er janvier sur sa page Facebook et sur son site Internet, Kaleme.org, que la répression ne parviendra pas à briser les manifestations antigouvernementales et qu'il n'a pas peur de mourir pour son combat en faveur des réformes. Pour sortir de la "grave crise" que traverse l'Iran, il réclame la libération immédiate des personnes arrêtées après l'élection présidentielle contestée de juin dernier, demande le respect de la liberté de la presse et exige une réforme de la loi électorale. "Arrêter Moussavi, ou le tuer, arrêter ou tuer [Mehdi] Karoubi (…) ne calmera pas la situation. Je n'ai pas peur de mourir pour défendre les aspirations du peuple", affirme-t-il alors que, la veille, les autorités iraniennes ont ordonné à l'opposition de ne plus organiser de rassemblements ou de défilés. Après la mort de huit personnes – dont un neveu de M. Moussavi – dimanche, en marge de manifestations à l'occasion de la célébration chiite de l'Achoura, les autorités ont prévenu qu'elles ne toléreraient plus aucun défilé antigouvernemental. UNE VINGTAINE DE RÉFORMATEURS ARRÊTÉS Pourtant, selon le site Internet d'opposition Jaras, la police a dû faire usage de gaz lacrymogènes pour disperser une foule de manifestants antigouvernementaux, jeudi dans le centre de Téhéran. Le chef de la police avait prévenu mercredi les partisans de Mir Hossein Moussavi qu'ils devaient s'attendre à une dure répression s'ils s'associaient aux rassemblements contre le régime. Une vingtaine de figures du mouvement réformateur ont été arrêtées cette semaine, dont trois proches conseillers de M. Moussavi, son beau-frère et la sœur de la lauréate du prix Nobel de la paix Shirin Ebadi. Mercredi, des centaines de milliers de personnes se sont massées dans différentes villes d'Iran pour affirmer leur fidélité au régime, en proie à sa crise la plus grave depuis la révolution islamique de 1979. Certains manifestants ont réclamé durant ces rassemblements les exécutions de Mir Hossein Moussavi et Mehdi Karoubi, adversaires malheureux du conservateur Mahmoud Ahmadinejad à la présidentielle du 12 juin 2009. Le ministère du renseignement accuse les dirigeants de l'opposition d'être liés à "des ennemis étrangers et des groupes contre-révolutionnaires" et a averti que le gouvernement n'aurait aucune clémence pour eux s'ils ne s'amendent pas. Les autorités accusent régulièrement des forces soutenues par les puissances étrangères de conspirer pour renverser le régime.
01/01/2010
proche-orient
https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/01/01/mir-hossein-moussavi-exige-l-arret-de-la-repression-en-iran_1286486_3218.html
Dans ses Mémoires, la Dame de fer passe en revue le personnel politique européen
Dans cet ouvrage de 780 pages paru en 1993, l'ancien premier ministre brosse une série de portraits acérés des dirigeants politiques britanniques et étrangers.
LONDRES de notre correspondant "En 1979, la Grande-Bretagne était une nation hors de combat, qui avait encaissé les coups les plus graves qui lui avaient été portés depuis cent ans." Ainsi s'ouvre cet ouvrage qui aura fait couler un flot d'encre et nourri bien des polémiques longtemps avant sa parution. Sept cent douze pages plus loin, l'auteur dresse ce constat : "Ce gouvernement que j'avais dirigé pendant onze ans et demi (...) avait été l'initiateur du nouveau courant de liberté économique qui avait transformé le monde, de l'Europe de l'Est jusqu'à l'Asie australe. Il avait rendu à la Grande-Bretagne sa réputation et son rang de puissance mondiale. Et c'était ce même gouvernement qui avait décidé de se passer de mes services." Si l'amertume est perceptible dans les Mémoires de Lady Thatcher, ce sentiment s'efface cependant derrière l'expression des certitudes. Trois ans après un départ forcé du pouvoir (en novembre 1990), vécu comme une trahison, l'ancien premier ministre, pas plus aujourd'hui qu'hier, ne semble effleurée par le doute. Nul n'ignore le caractère fortement trempé de celle que l'agence Tass surnomma un jour la Dame de fer. Mais comment ne pas s'étonner de constater à quel point Lady Thatcher est persuadée d'avoir eu raison, si longtemps, et contre à peu près tout le monde... Cette assurance s'exprime dans une relation pointilleuse des grands événements internationaux, complétée par une succession de "portraits" acérés des chefs d'Etat et de gouvernement qui furent ses alter ego. Ainsi, de sommets européens en G-7, de la guerre des Malouines à celle du Golfe, de "l'insurrection" du syndicaliste Arthur Scargill à la "lutte pour désarmer la gauche", de la chute du mur de Berlin à la fin de la guerre froide, le récit prend parfois les accents d'une épopée politique. Femme courageuse, "traquée par les terroristes irlandais décidés à l'abattre", Mme Thatcher imposa son style combatif. Il n'est pas faux de souligner que depuis Winston Churchill, aucun autre chef du gouvernement n'a laissé une telle empreinte.
01/01/2010
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2010/01/01/dans-ses-memoires-la-dame-de-fer-passe-en-revue-le-personnel-politique-europeen_1286247_3210.html
L'idée d'un contrôle au faciès dans les aéroports fait son chemin en Grande-Bretagne
Conséquence inattendue de l'utilisation des scanners corporels, Londres envisagerait de cibler certaines catégories de la population.
L'attentat manqué contre l'Airbus de Northwest Airlines le jour de Noël, dont l'auteur est un jeune Nigérian, fait ressurgir la très délicate question du contrôle au faciès. Le gouvernement britannique pourrait en effet autoriser des mesures de haute sécurité visant certaines catégories de la population, rapporte le Guardian, qui redoute que ces contrôles ciblés ne visent in fine des groupes ethniques en particulier. Le quotidien anglais, qui cite une source gouvernementale, affirme que le "profiling" de passagers fait partie des nouvelles mesures de sécurité envisagées dans les aéroports sur ordre du premier ministre Gordon Brown. Cette idée est apparue après que plusieurs hauts responsables aéroportuaires ont prévenu qu'il serait impossible de contrôler l'ensemble des passagers avec les nouveaux scanners corporels que le gouvernement veut introduire dans les aéroports. Ces scanners, qui ressemblent à des cabines, permettent de voir ce qu'un passager dissimule sous ses vêtements et notamment des substances invisibles pour les détecteurs classiques. Mais selon les responsables aéroportuaires anglais cités par le Guardian, ils seraient "trop volumineux, lents et chers pour que leur installation généralisée soit viable" et il s'agirait donc de "choisir" les passagers à scanner. Déjà à l'oeuvre dans dix-neuf aéroports américains, ces nouveaux scanners gagnent du terrain chez les Européens. Outre la Grande-Bretagne, les Pays-Bas et l'Italie ont annoncé vouloir les utiliser. "VOYAGEURS ORDINAIRES" De nombreux responsables de la sécurité aéroportuaire britanniques réclament depuis longtemps de pouvoir recourir au "profiling" des passagers afin de détecter d'éventuels terroristes. Ils affirment que cette surveillance accrue se concentrerait uniquement sur les comportements suspects, mais "il est à craindre que les voyageurs seront sélectionnés pour des contrôles approfondis en fonction de leur race, de leur religion ou de leur origine ethnique", estime le Guardian. Norman Shanks, ancien responsable de la sécurité de BAA, le principal opérateur aéroportuaire britannique, explique au quotidien : "Il s'agit de détecter ceux qui agissent différemment des passagers ordinaires. Néanmoins, cela reviendra à cibler un groupe particulier de gens parce que malheureusement, c'est ce groupe qui pose des problèmes actuellement". L'Association des opérateurs d'aéroports britannique (Airport Operators Association) et BAA sont tous deux en faveur du "profiling" de passagers. "Nous aimerions voir une combinaison de technologie, de renseignement et de profiling", résume un porte-parole de BAA. Aux Etats-Unis aussi, l'attentat manqué du vol Amsterdam-Detroit devrait se traduire par une pluie de contrats pour les fabricants de scanners corporels et a fait ressurgir la question du contrôle au faciès. Les règles édictées par le gouvernement américain sont certes très claires en la matière : le contrôle au faciès est interdit. Pour autant, avec la taille des files d'attente allant crescendo dans les aéroports depuis l'attentat manqué, ce serait se voiler la face que de croire que les agents de sécurité font fi de l'origine ethnique des passagers lorsque vient le moment d'effectuer des contrôles, estiment des experts en sécurité. L'un des seuls élus à appeler les autorités à moins rechigner a publiquement défendu sa cause le lendemain de l'attentat manqué. "L'immense majorité des musulmans sont des gens fantastiques", a argué Peter King, représentant républicain de l'Etat de New York sur la chaîne Fox News, "mais 100 % des terroristes islamistes sont musulmans, et ce sont nos ennemis aujourd'hui". "Alors, même s'il ne faut pas adopter la religion comme critère de contrôle, nous ne devrions pas non plus reculer et exclure [les musulmans] des listes" des personnes surveillées, a-t-il conclu.
02/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/02/l-idee-d-un-controle-au-facies-dans-les-aeroports-fait-son-chemin-en-grande-bretagne_1286963_3214.html
Une trentaine de tableaux de maîtres volés dans une villa du Var
Le butin, qui comprend des Picasso et des douanier Rousseau, pourrait atteindre un million d'euros.
Une trentaine de tableaux de maîtres, parmi lesquels des toiles de Picasso et du douanier Rousseau, dont la valeur totale pourrait atteindre un million d'euros, ont été volés dans une propriété de La Cadière d'Azur (Var), a-t-on appris samedi 2 janvier. Selon le parquet de Toulon, le vol est survenu entre mercredi et jeudi. Le ou les auteurs se sont introduits dans la résidence après avoir fracturé une porte-fenêtre, a précisé une source proche de l'enquête. C'est le gardien qui a découvert le vol jeudi après-midi et donné l'alerte. Le propriétaire, un Français en vacances en Suède au moment des faits, a été contacté pour confirmer l'authenticité des oeuvres dérobées et leur valeur. Il a regagné son domicile pour procéder à un inventaire de sa collection, qui permettra d'établir le montant exact du préjudice, a-t-on précisé au parquet. Une toile de Modigliani, initialement signalée disparue, a finalement été retrouvée dans la maison, selon le parquet de Toulon. La section recherches de la gendarmerie de Marseille et le groupement de gendarmerie du Var ont été saisis de l'enquête. L'Office central de lutte contre les trafics de biens culturels (OCBC) a également été informé. Ce vol intervient après la disparition à Marseille d'un pastel d'Edgar Degas, intitulé Les Choristes, prêté au musée Cantini par le musée d'Orsay le temps d'une exposition.
02/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/02/une-trentaine-de-tableaux-de-maitres-voles-dans-une-villa-du-var_1286961_3224.html
Le manque de sommeil accroît le risque de dépression chez les adolescents
Selon une étude américaine, le risque de dépression chez des adolescents qui vont se coucher après minuit est supérieur de 24 % à celui des enfants envoyés au lit avant 22 heures.
Le manque de sommeil accroît le risque de dépression et de pensées suicidaires chez les adolescents, selon une étude de l'Université Columbia publiée vendredi aux Etats-Unis dans la revue Sleep. Selon cette étude menée auprès de 15 659 collégiens et lycéens, le risque de dépression chez des adolescents qui vont se coucher habituellement après minuit est supérieur de 24 % à celui des enfants envoyés au lit avant 22 heures. Ceux qui dorment moins de cinq heures par nuit présentent un risque de dépression 71 % supérieur à ceux qui dorment sept heures. Les couche-tard sont en outre plus nombreux à avoir des idées suicidaires : 20 % de plus que chez les couche-tôt. "Les résultats de cette étude apportent la preuve supplémentaire qu'un sommeil bref pourrait jouer un rôle dans l'analyse des causes de la dépression", écrivent les auteurs de l'étude dirigée par le professeur James Gangwisch, de l'université new-yorkaise. "On pense communément que les adolescents ont moins besoin de dormir que les pré adolescents", relève le Dr Gangwisch. "Des études montrent pourtant que les adolescents pourraient bien avoir en fait besoin de davantage de sommeil". Selon lui, il est fréquent que les adolescents ne se couchent pas assez tôt pour compenser le fait qu'ils commencent l'école plus tôt que les enfants. En moyenne, les adolescents de cette enquête dorment sept heures et cinquante-trois minutes par nuit, moins que les neuf heures recommandées à cet âge.
02/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/02/le-manque-de-sommeil-accroit-le-risque-de-depression-chez-les-adolescents_1286955_3224.html
Nucléaire : l'ultimatum de l'Iran à la communauté internationale
L'Iran a donné aux grandes puissances un "ultimatum" d'un mois pour accepter un échange d'uranium selon ses propres termes.
L'Iran a donné samedi 2 janvier aux grandes puissances un "ultimatum" d'un mois pour accepter un échange d'uranium selon ses propres termes, faute de quoi il produira lui-même l'uranium nécessaire pour son réacteur de recherche de Téhéran, a rapporté la télévision publique. "La communauté internationale a juste un mois pour se décider" à accepter ou non les conditions de Téhéran, a déclaré le ministre des affaires étrangères Manouchehr Mottaki, cité par la télévision. "Sinon, Téhéran enrichira l'uranium à un niveau supérieur", a-t-il poursuivi avant d'ajouter : "Ceci est un ultimatum". Le ministère allemand des affaires étrangères a peu après estimé que cet ultimatum ne changeait rien à la situation. Pour Berlin, "la situation n'a pas changée. La proposition de la communauté internationale reste valable", a déclaré un porte-parole du ministère. Téhéran a refusé un projet d'accord de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) prévoyant que Téhéran fasse enrichir à 20 % par la Russie la plus grosse partie de son uranium faiblement enrichi pour obtenir en retour du combustible pour son réacteur de recherche de Téhéran. Mardi, les autorités ont déclaré que l'Iran était ouvert à un échange, mais ont demandé qu'il se fasse à leurs conditions, c'est-à-dire par étapes.
02/01/2010
proche-orient
https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/01/02/nucleaire-l-ultimatum-de-l-iran-a-la-communaute-internationale_1286954_3218.html
Légion d'honneur du Nouvel An : Maurice Allais, Daniela Lumbroso, Louis Gallois...
Plusieurs grands patrons, des dirigeants des médias ou encore le prix Nobel d'économie Maurice Allais figurent dans la promotion du Nouvel An.
Quel est le point commun entre le photographe Yann Arthus-Bertrand, le prix Nobal d'économie Maurice Allais, l'animatrice de télévision Daniela Lumbroso, le président exécutif d'EADS Louis Gallois et le coutiruer Paco Rabanne ? Ils figurent tous dans la promotion du Nouvel An de l'Ordre national de la Légion d'honneur. Maurice Allais, 98 ans, seul lauréat français du prix Nobel d'économie en 1988 pour ses contributions à la théorie des marchés, est élevé à la dignité de grand'croix de la Légion d'honneur, tout comme Pierre Fabre, président du groupe pharmaceutique du même nom. La sociologue Eveline Sullerot est élevée à la dignité de grand officier. Fondatrice en 1955 d'une association de femmes pour promouvoir le contrôle des naissances, qui deviendra ensuite le Mouvement Français pour le Planning familial, elle est à l'origine de la "Directive européenne sur l'égalité de traitement entre hommes et femmes". Le couturier espagnol Paco Rabanne, 75 ans, est promu officier. GRANDS PATRONS Outre Pierre Fabre et Louis Gallois (commandeur), nombre de dirigeants de grands groupes français figurent dans cette promotion du Nouvel An. Jean-Cyril Spinetta, PDG d'Air France-KLM est promu commandeur, tout comme l'ancien patron des patrons Ernest-Antoine Seillière, président du conseil de surveillance de la société d'investissement Wendel, est également promu commandeur. Denis Kessler, ancien numéro deux du Medef, PDG du réassureur français Scor est promu officier, comme Anne Lauvergeon, présidente du groupe nucléaire Areva, Guillaume Pépy, président de la SNCF, et René Carron, président du Crédit Agricole. Du côté de la justice, l'avocat Serge Klarsfeld, vice-président de la Fondation pour la mémoire de la Shoah, est promu commandeur, comme son confrère Mario Stasi, ancien bâtonnier du barreau de Paris. Michel Gaudin, préfet de police de Paris, est également promu commandeur. ROGER KAROUCHI, CHEVALIER Alain Duchêne, président de la fondation de l'Armée du Salut, Roger Karoutchi, président du groupe UMP au conseil régional d'Ile-de-France et Fatiha Benatsou, première préfète issue de l'immigration et préfète déléguée à l'égalité des chances auprès du préfet du Val d'Oise, sont nommés chevaliers. Dominique-Jean Chertier, président du conseil d'administration de Pôle emploi, l'organisme issu de la fusion ANPE-Assedic entrée en vigueur début 2009, est promu officier. Le professeur et ancien député UMP du Rhône Jean-Michel Dubernard, qui a notamment réalisé la première greffe de la main en 1998, est nommé chevalier. Du côté des médias, outre Daniela Lumbroso (chevalier), Jean-Luc Hees, président de Radio France, est promu officier. Jean-Pierre Vignolle, directeur général de l'AFP, est nommé chevalier.
02/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/02/legion-d-honneur-du-nouvel-an-maurice-allais-daniela-lumbroso-louis-gallois_1286952_3224.html
Afghanistan : le parlement rejette les trois-quarts du cabinet de Karzaï
Le parlement afghan a rejeté 17 des 24 noms de ministres présentés mi-décembre par le président Hamid Karzaï.
Le parlement afghan a infligé samedi un camouflet au président Hamid Karzaï en rejetant dix-sept des vingt-quatre noms figurant sur la liste de ministres qui leur avait été soumise par le chef de l'Etat. Seuls les ministres de l'intérieur, de la défense, de l'éducation, de la culture et de l'agriculture, de l'industrie ont été investis. "Karzaï a échoué avant l'élection présidentielle et il échoue encore après l'élection. Ses choix et ses décisions sont rejetés par le parlement et par le pays. Il doit démissionner", a déclaré l'ancien premier ministre Ahmad Shah Ahmadza. Ont été rejetés entre autres les noms d'Ismail Khan à l'énergie et de Sarwar Danish à la justice. Il en est allé de même pour les noms proposés à des portefeuilles comme ceux du commerce, de l'économie, de la santé publique ou encore des communications. La seule femme proposée par le président n'a pas été retenue à la condition féminine. MINISTRES INTÈGRES ET COMPÉTENTS Dans la liste soumise par le président Karzaï, un bon nombre de ministres clés étaient déjà en poste avant même la présidentielle d'août dernier. Nombre des soutiens occidentaux du président Karzaï sont satisfaits de voir des techniciens maintenus dans leurs fonctions mais, selon ses détracteurs, le chef de l'Etat recycle des personnalités de la vieille garde à un moment où le pays aurait besoin d'idées neuves. M. Karzaï a été réélu à l'issue d'un scrutin présidentiel calamiteux marqué par des fraudes massives en sa faveur lors du premier tour de la présidentielle le 20 août. La composition de son gouvernement avait été soigneusement étudiée par la communauté internationale, qui ne cesse d'appeler le président Karzaï à lutter contre la corruption endémique jusqu'au sommet de l'Etat et a réclamé à ce titre un cabinet constitué de ministres intègres et compétents. La composition des gouvernements est l'un des rares domaines sur lesquels le parlement afghan peut réellement tenir tête au pouvoir exécutif. Au moment où les questions de sécurité et de corruption deviennent de plus en plus sérieuses, les députés ont eu à coeur de peser de tout leur poids. Ils ont ainsi rejeté la candidature d'Ismaïl Khan, un ancien chef de guerre, au poste de ministre de l'énergie. Les députés ont en revanche entériné les choix du président à certains postes clés soutenus par les occidentaux comme la défense (Abdul Rahim Wardak, ancien chef de la guérilla antisoviétique), l'intérieur et les finances.
02/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/02/afghanistan-le-parlement-rejette-la-moitie-du-cabinet-de-karzai_1286949_3216.html
"Coup d'arrêt du déploiement de la police ""de proximité"" voulue par M. Sarkozy"
Par mesure d'économie, l'objectif de 100 unités territoriales de quartiers (UTEQ) ne sera pas tenu
La création de nouvelles unités territoriales de quartier (UTEQ), ces nouveaux services de police déployés dans les quartiers dits sensibles, s'arrête net. "Je n'ai pas les moyens de les développer", déplore le ministre de l'intérieur Brice Hortefeux en privé. L'objectif de 100 UTEQ prévues par le ministère de l'intérieur d'ici à 2010 ne sera jamais atteint. Seules 35 de ces unités, censées remplacer la police de proximité, ont été jusqu'ici mises en place. Et, à de rares exceptions près, peut-être à Nice, aucun projet supplémentaire n'est plus envisagé. A peine lancé - la première UTEQ a vu le jour en 2008 -, l'un des dispositifs phare du gouvernement en matière de sécurité est donc gelé. Le même raisonnement vaut pour les compagnies de sécurisation, créées en même temps : 23 étaient prévues mais à peine le quart d'entre elles ont été installées. La révision générale des politiques publiques (RGPP) impose, ici comme ailleurs, une baisse des effectifs - le budget 2010 prévoit de supprimer plus de 2000 postes dans les rangs de la police. Or, pour créer les UTEQ, qui comptent chacune entre 20 et 25 fonctionnaires, l'administration ponctionne des commissariats déjà exsangues. Le rapport d'évaluation commandé à l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) et à l'Inspection générale de l'administration (IGA) viendra entériner cet état de fait. Tout en rendant hommage au travail des UTEQ, le document, qui devrait être remis en janvier à M. Hortefeux, échafaude une porte de sortie. Selon nos informations, il conclut à la nécessaire mobilité de ces unités. Elles deviendraient "déplaçables" en fonction des besoins et soumises à des objectifs révisables d'une année sur l'autre. Le rapport prône également l'élaboration d'un diagnostic "approfondi" dans chaque territoire et un "partenariat sérieux" avec les élus. Un tel scénario présenterait l'avantage de combler les trous, mais mettrait à bas la philosophie même du dispositif : être en contact régulier avec la population. Dès son arrivée au ministère de l'intérieur, en 2002, Nicolas Sarkozy avait supprimé la police de proximité mise en place par la gauche, en lui reprochant de jouer les "assistantes sociales". Cinq ans plus tard, après les échauffourées à Villiers-le-Bel (Val d'Oise) de novembre 2007, le projet des UTEQ avait été imaginé pour combler le vide laissé sur le terrain. Dans 22 départements, une liste de quartiers sensibles avait été dressée. Et le 14 avril 2008, les premières unités voyaient le jour en Seine-Saint-Denis. Puis d'autres avaient suivi à Marseille, Toulouse, Rouen, Lille, Strasbourg, Tourcoing, et jusque dans le centre-ville de Rennes. Le 24 juin, le jour même de son installation place Beauvau, sitôt la passation de pouvoir avec Michèle Alliot-Marie achevée, M. Hortefeux s'était rendu à Orly (Val-de-Marne) saluer une nouvelle UTEQ tout juste installée. Le ministre de l'intérieur avait alors déclaré : "C'est une solution qui coûte, qui suppose des redéploiements mais qui est efficace. " Il avait évalué la baisse de la délinquance "entre 10 % et 20% à où les UTEQ s'étaient installées. Elles sont, de fait, souvent réclamées par des élus de droite comme de gauche, malgré une mise en place parfois délicate (nombre de ces unités ont été accueillies dans les quartiers par des caillassages), et les critiques sur l'aspect "Robocop" de l'équipement des policiers (flash-balls, pistolet à impulsion électrique, casques pare-balles...). Mais surtout, l'arrêt brutal du programme entre en totale contradiction avec les discours répétés de Nicolas Sarkozy sur la lutte contre la délinquance. Le 24 novembre, arpentant de nouveau la banlieue parisienne sur son thème fétiche, le chef de l'Etat avait insisté sur sa volonté de "reconquête des quartiers sensibles". Une "reconquête" qui passerait par la lutte contre le trafic de drogue et l'économie souterraine. Or, l'Elysée et le gouvernement sont particulièrement inquiets quant à l'agitation que pourrait provoquer ces initiatives dans certains quartiers. Faire plus avec moins : la Direction générale de la police nationale et la Direction centrale de la sécurité publique travaillent actuellement à une recomposition des circonscriptions de police. Après Paris, la création d'une police d'agglomération à Lyon et Marseille notamment, font partie d'un vaste chantier de réorganisation d'abord dicté par la rigueur budgétaire. Isabelle Mandraud
02/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/02/coup-d-arret-du-deploiement-de-la-police-de-proximite-voulue-par-m-sarkozy_1282040_3224.html
La France compte 63,6 millions d'habitants
La population française reste la deuxième plus importante de l'UE, derrière l'Allemagne et devant la Grande-Bretagne et l'Italie.
La France comptait officiellement 63 601 002 habitants en 2007, selon les résultats du dernier recensement parus jeudi 31 décembre au Journal officiel. Par rapport au dernier recensement exhaustif de 1999 qui comptabilisait 60 millions de personnes, la population a progressé de 8,33%. Les chiffres 2007 déclinés par régions et par départements sont disponibles sur le site internet de l'Insee. Le journal officiel publie aussi la population totale des communes françaises, bien supérieure (65 031 022 d'habitants) en raison des personnes ayant deux résidences et ainsi comptées deux fois. Pour que ces personnes ne soient pas comptées deux fois, la population de la France est égale à la somme des populations municipales. Elle s'établit à 61 795 550 habitants en France métropolitaine et 1 805 452 dans les départements d'outre-mer. La France reste le deuxième pays le plus peuplé de l'Union européenne derrière l'Allemagne (82,2 millions d'habitants au 1er janvier 2008, selon Eurostat) et devant la Grande-Bretagne (61,2 millions), l'Italie (59,6 millions) et l'Espagne (45,2 millions). Mais l'Allemagne affiche un des taux de natalité les plus faibles du monde et sa population a décru de plus de 160 000 habitants au cours de l'année 2008. Sur la même période, la population française gagnait 360 000 habitants, selon eurostat. Toutes les régions à l'exception de deux (Champagne-Ardennes et la Guadeloupe) voient leur population continuer d'augmenter. Les trois plus peuplées sont l'Ile de France (11,74 millions d'habitants en 2007 contre 11,67 en 2006), Rhône-Alpes (6,21 millions contre 6,17 en 2006) et Provence-Alpes-Côte d'Azur (4,944 millions contre 4,89 en 2006). Les régions de métropole les moins peuplées sont la Corse (304 500 habitants contre 299 542 en 2006), et le Limousin, (759 414 habitants econtre 753 537 en 2006). Depuis 2004, le recensement de la population est organisé par enquêtes annuelles tournantes sur un échantillon de la population, qui remplacent le comptage traditionnel organisé auparavant tous les huit ou neuf ans. Celui de 1999 a donc été le dernier concernant toute la population en même temps. L'avantage de la nouvelle méthode est de permettre un recensement actualisé avec une valeur légale chaque année (on aura début 2011 les chiffres valant pour l'année 2008 à partir des enquêtes menées entre 2006 et 2010).
02/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/02/la-france-compte-65-millions-d-habitants_1286942_3224.html
Drame familial dans le Bas-Rhin : mort de trois enfants
Trois fillettes de 5 à 13 ans ont été découvertes mortes dans une maison incendiée samedi à Haguenau.
Les trois fillettes de cinq à treize ans découvertes mortes dans une maison incendiée, samedi 2 janvier à Haguenau, dans le Bas-Rhin, avaient été égorgées, selon le substitut du procureur du tribunal de Strasbourg. Un corps calciné, peut-être celui du père, a été retrouvé dans les décombres, a-t-il ajouté. Les soupçons portent sur le père de famille, qui est recherché, selon le magistrat. Plus tôt, le maire de la ville, Claude Sturni avait affirmé qu'il pouvait s'agir d'une "tragédie de la séparation". Selon M. Sturni, le couple âgé d'une quarantaine d'années était en instance de séparation et la maison était inhabitée "depuis plusieurs semaines". Les trois filles, Sabrina, 5 ans, Narjiss, 11 ans, et Nivine, 13 ans, vivaient d'ordinaire avec leur mère et étaient scolarisées à Haguenau. "C'était une famille qui n'avait jamais été repérée comme difficile, elle vivait dans un lotissement plutôt paisible, dans une maison sympathique", a résumé le maire.
02/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/02/drame-familial-dans-le-bas-rhin-mort-de-trois-enfants_1286940_3224.html
Le Ballet de Perm débarque en France avec Balanchine
La troupe russe, en quête de reconnaissance, s'attaque au répertoire du chorégraphe américain, qu'elle vient présenter en tournée
C'est la première venue en France du Ballet de Perm, ville située en bordure de l'Oural, à 200 kilomètres de Moscou. Cette grosse troupe d'environ soixante danseurs, coincée entre les deux mastodontes que sont le Bolchoï de Moscou et le Marinski de Saint-Pétersbourg, compte bien rattraper, du 7 au 10 janvier, aux Gémeaux, à Sceaux, et en tournée jusqu'au 6 février, son déficit de reconnaissance. Comment ? Grâce à son répertoire, plutôt original dans le contexte russe : depuis l'ère soviétique, le public reste plus friand que jamais des grands ballets académiques. Et voilà que la troupe de l'Opéra national Tchaïkovski de Perm accroche depuis 2004 des pièces de George Balanchine (1904-1983) à son répertoire. Autant dire que le néoclassique désarticulé de l'américain d'origine russe - il débarqua à New York en 1933 - fait l'effet d'un pavé dans le lac... des cygnes (ou presque). Le choix de Balanchine ne pouvait mieux tomber. Le ballet compte beaucoup plus de femmes (environ une trentaine pour vingt hommes), comme toutes les oeuvres de celui qui adorait les femmes et ses danseuses. Elles sont vingt-huit pour Sérénade (1934). Sur une musique de Tchaïkovski, elles apparaissent posées bien droites de profil, les pieds serrés l'un contre l'autre sous les longs tutus bleus. Leur image tirée à quatre épingles se trouve curieusement déplacée par l'étrange position du bras droit tendu devant elles. Cette torsion des repères académiques - ça ressemble à du ballet, ça en est, mais plus vraiment - fait l'attrait bizarre du style balanchinien. La main qui se pose sur le front, le léger déhanché des filles inspiré par Broadway, la souplesse volatile des bras qui flottent autour du corps intriguent. Avec Sérénade, comme avec Concerto Barocco (1941), pièce pour vingt-six interprètes sur une musique de Bach, Balanchine tire sa révérence à son maître Marius Petipa (1818-1910), le chorégraphe du Lac des cygnes ou de La Bayadère. Comme les cygnes forment une flèche ou serpentent avant de se mettre en ligne, Balanchine dessine des diagonales, imagine des carrousels et des attelages de danseurs, renouvelle l'idée du corps de ballet en lui dégageant tout le plateau. Hommage direct, Ballet impérial (1941), encore sur Tchaïkovski, compositeur de coeur de Balanchine, tend un miroir nostalgique au grand style classique et à son sens inné de la géométrie dans l'espace. Il dit aussi adieu au couple romantique, seule vedette en scène. Le danseur se retrouve ainsi à faire pirouetter huit danseuses à tour de rôle. Plus de narration ni de décor chez Balanchine. Les fonds lumineux des plateaux - bleu vif, rose clair... - reflètent l'esthétique épurée du chorégraphe. Le jeu formel et technique devient le sujet des pièces. D'où une multiplication des pas au centimètre carré. Mais le chorégraphe sait aussi travailler sa danse comme on compose un bouquet de fleurs. Et c'est charmant cette façon de piquer une grande tige au milieu de deux plus petites, d'entourer d'un collier de feuillage un groupe d'interprètes. Danser du Balanchine exige, en particulier pour les femmes, des qualités paradoxales que le Ballet de Perm ne possède pas encore précisément. Trop de transparence peut virer à l'absence, trop d'expressivité durcit les lignes, trop de froideur finit par glacer... L'interprète balanchinienne doit attaquer le plateau avec la détermination altière de celle qui connaît son affaire et ne laisse personne lui en remontrer. C'est une guerrière, même en tutu, férocement élégante et sexy. Sa décision se lit dans son jeu de jambes qui s'abat sur un mouchoir de poche. Depuis la mort de Balanchine, ce sont ses anciennes interprètes qui transmettent ses pièces à l'enseigne de la Fondation Balanchine. Ce travail de relais est labélisé et sécurisé en quelque sorte par la Fondation. C'est à l'instigation d'Oleg Levenkov, coordinateur de la compagnie, et du directeur de l'Opéra, George Issakyan, que la troupe de Perm élargit le répertoire. Parallèlement à ce programme Balanchine, très bien accueilli par le public local, un second volet présente des pièces autour de Michel Fokine et de la troupe des Ballets russes, fondée par Serge Diaghilev en 1909. Pour la première fois, le Spectre de la rose a été présenté par les danseurs de Perm, une manière de revitaliser l'image de Diaghilev, l'enfant du pays, dont la famille a contribué au développement de la culture dans la région. Ballet de Perm. Premier programme Balanchine, aux Gémeaux, 42, avenue Georges-Clemenceau, Sceaux (92). RER B Bourg-la-Reine (sortie rue des Blagis, 5 mn à pied, fléchage). Tél. : 01-46-61-36-67. Du 7 au 10 janvier, à 20 h 45 ; dimanche 10 janvier, à 17 heures. 32 €. En tournée : programme Diaghilev avec "Les Sylphides", "Les Danses Polovtsiennes", "Le Spectre de la rose" de Fokine. Rosita Boisseau
02/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/02/le-ballet-de-perm-debarque-en-france-avec-balanchine_1286750_3246.html
Exposition : Xavier Noiret-Thomé à la galerie Filles du calvaire
Noiret-Thomé est de ces peintres actuels, d'une quarantaine d'années, pour lesquels la notion de postmodernisme semble avoir été inventée.
Noiret-Thomé est de ces peintres actuels, d'une quarantaine d'années, pour lesquels la notion de postmodernisme semble avoir été inventée. Sans scrupule, ils pillent l'histoire de l'art moderne et lui prennent de quoi procéder à des associations et hybridations hétérogènes. Noiret-Thomé ne récapitule pas doctement, ne rend pas pieusement hommage, ne s'inscrit pas dans une filiation artistique ou théorique : il se place au terme de toutes les avant-gardes tel un couturier qui se situerait après toutes les modes et les réunirait sans aucun souci de dates et de cohérences. Géométrie et informel, matiérisme et aplats lisses, mouvements réglés et gestes brusques, monochromes et contrastes intenses, petits et grands formats, tout lui sert. Dans son atelier, Mondrian joue à la marelle avec Pollock, Richter fait du patin avec Fontana. Parfois, un miroir est au centre de l'oeuvre, pour achever de déranger toute idée de contemplation et même de la rendre ridicule. Il règne sur ces tableaux, qu'il convient de regarder au troisième ou cinquième degré au moins, un air de dérision et, s'ils séduisent par leur variété et le brio de l'exécution, ils n'en finissent pas moins par susciter la mélancolie. Ce cortège, si chamarré soit-il, n'en est pas moins un peu funèbre. ("K.R.U.M.P", 170 ×140 cm, technique mixte sur toile, 2009) Galerie Filles du Calvaire 17, rue des Filles- du-Calvaire, Paris-3e. Tél. : 01-42-74-47-05. Philippe Dagen et Philippe Dagen
02/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/02/exposition-xavier-noiret-thome-a-la-galerie-filles-du-calvaire_1286747_3246.html
L'héroïne fait moins peur mais tue de plus en plus
Depuis quatre ans, le nombre de cas d'overdoses ne cesse de progresser en France, s'inquiète la direction générale de la santé.
Héroïne : attention, danger ! La direction générale de la santé (DGS) et les agences sanitaires tirent le signal d'alarme. Le nombre de décès par surdose d'héroïne ne cesse de progresser en France. Cette augmentation est significative depuis quatre ans, si l'on se fonde sur les chiffres de l'enquête annuelle réalisée par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) sur les décès en relation avec l'abus de médicaments et de substances. En 2006, l'héroïne seule était impliquée dans 22,6 % des 168 cas de surdoses mortelles. En 2007, ce chiffre passait à 29,2 % sur 192 cas et en 2008 à 28,5 % sur 217 cas. La DGS et les agences sanitaires attribuent cette progression de décès à une grande variabilité de concentration en héroïne pure dans les poudres en circulation. Les pourcentages d'héroïne peuvent varier de zéro à plus de 60 % sans qu'aucune caractéristique physique, comme par exemple la couleur, ne puisse le laisser présager. Par ailleurs, la part des échantillons dosés à plus de 30 % est en augmentation, alors qu'habituellement les doses d'héroïne présentent plutôt des concentrations de l'ordre de 10 %. "Cette grande variabilité accroît la probabilité pour les usagers de consommer, sans en avoir connaissance, des produits très concentrés en héroïne", considèrent les autorités sanitaires. "TOUS LES MILIEUX SOCIAUX" Vendue parfois sous le nom de "rabla" (poudre en arabe), l'héroïne, un opiacé puissant synthétisé à partir de la morphine, conduit à une dépendance physique et psychique s'accompagnant d'une tolérance qui nécessite des doses de plus en plus importantes. Sa consommation, qui reste très marginale, est néanmoins en augmentation, particulièrement chez les jeunes. En 2008, parmi les jeunes âgés de 17 ans, son expérimentation (le fait d'en consommer au moins une fois) s'élevait à 0,8 % chez les filles et à 1,4 % chez les garçons, selon les données de l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies. Ces chiffres apparaissent en hausse par rapport à 2005 (0,6 % pour les filles et 0,8 % pour les garçons). A côté de l'image du toxicomane accro et marginalisé, l'héroïne est associée désormais à une autre image plus festive. "L'héroïne a perdu son côté tabou de drogue dure. Elle se diffuse dans tous les milieux sociaux et on en consomme dans les soirées, notamment pour redescendre après avoir consommé des produits excitants comme la cocaïne, les amphétamines. Elle circule aussi dans les discothèques", témoigne Pierre Chappard, de l'association Autosupport pour les usagers de drogue (ASUD). Ce changement doit beaucoup à son mode de consommation : on ne s'injecte plus ce produit, mais on le sniffe. "Le problème, poursuit Pierre Chappard, c'est que ce mode d'ingestion apparaît sans risque." Or, on meurt aussi bien d'un sniff que d'une injection, et ce risque est encore plus marqué chez des sujets qui consomment de l'héroïne occasionnellement ou pour la première fois. Pour ceux qui, malgré les risques encourus, n'ont pas l'intention d'arrêter, l'association ASUD conseille de tester avec une toute petite dose la concentration d'héroïne, de ne pas en consommer seul, et de ne pas faire de mélanges, notamment avec l'alcool, ce qui multiplie les risques. Martine Laronche
02/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/02/l-heroine-fait-moins-peur-mais-tue-de-plus-en-plus_1286758_3238.html
Faire renaître au théâtre la mémoire de la classe ouvrière
"La Fabbrica", du jeune Italien Ascanio Celestini, est mise en scène par Charles Tordjman aux Abbesses, à Paris, à partir du 5 janvier.
Le théâtre ne cesse de fabriquer de la mémoire. A côté des pièces du répertoire, des spectacles naissent d'un travail sur des documents, récits et témoignages qui mettent en jeu l'histoire, grande ou petite, intime et politique, économique et sociale. C'est le cas de La Fabbrica, à voir aux Abbesses, à partir du 5 janvier, dans une mise en scène de Charles Tordjman. Cette Fabbrica nous vient d'Italie. Son auteur, Ascanio Celestini, 38 ans, est joué en France pour la première fois. Il s'empare d'un sujet inscrit dans les replis de l'actualité : la disparition de la classe ouvrière. Il y a autant de clous qu'avant, mais qui les fabrique ? Hier, on le savait, aujourd'hui, on ne le sait plus, dit le narrateur de la pièce. Cet homme s'appelle Fausto, comme son père et son grand-père. Et, comme eux, il a travaillé toute sa vie dans une usine sidérurgique dont La Fabbrica retrace l'histoire, du temps héroïque des luttes ouvrières à la cessation d'activité, en passant par les années noires du fascisme. Avant d'écrire, Ascanio Celestini a passé beaucoup de temps à Terni, la "Manchester italienne", en Ombrie, et à Pontedera, en Toscane, où il a mené des entretiens avec des ouvriers. En même temps, il rédigeait des fictions en lien avec des éléments dont il avait été le témoin, par exemple la jambe coupée d'un chef d'équipe, victime d'un accident du travail. Formé à la littérature et à l'anthropologie, Ascanio Celestini lie les deux disciplines. Il ne pratique pas un théâtre-documentaire, mais le théâtre-récit, dans la grande tradition italienne de Pier Paolo Pasolini et Dario Fo, ses maîtres. Chez le premier, il aime "la soif anxieuse de connaissance, qui est son testament politique et poétique. Pour écrire, nous dit Pasolini, la conscience et la piété ne suffisent pas. Il faut connaître." Chez Dario Fo, il apprécie l'ironie, "un mot qui vient du grec et signifie à l'origine feindre, comme au théâtre". Et puis, il y a dans le travail de Celestini le goût des histoires, héritées de l'enfance dans une famille où l'on trouve un grand-père bûcheron, un autre charretier devenu, après un accident, homme à tout faire dans un cinéma de Rome, un père artisan qui répare les meubles, une grand-tante un peu sorcière, une grand-mère conteuse. "Quand ma grand-mère racontait une histoire, dit Ascanio Celestini, elle le faisait pour la famille. Ce pouvait être une histoire très belle, mais elle ne regardait que nous. Quand un écrivain publie un livre, il le fait pour tous, comme un acteur qui monte sur la scène. C'est un acte politique, que l'on mette en scène Shakespeare ou que l'on dénonce la guerre en Irak. Il appartient à un artiste de choisir l'un ou l'autre, de décider quelle chose est la plus importante pour tous." L'auteur de La Fabbrica a choisi. Depuis ses débuts, il y a une dizaine d'années, il s'est intéressé aux hôpitaux psychiatriques, aux sans- abri, au fascisme et au nazisme, avec en particulier Saccarina, qui raconte les histoires des ghettos de Rome et de Lodz, ou Radio clandestina, sur les massacres des civils dans les fosses Ardéatines, à Rome, en mars 1944. Son travail, qui lui a valu en 2002 le prix Ubu pour "la complexité de sa recherche de l'Histoire dans les histoires", a été découvert par Charles Tordjman grâce au comité de lecture de la Comédie-Française, dont il a fait partie. "J'ai sauté dessus et je suis allé rencontrer Celestini à Rome." Tordjman, directeur du Théâtre de la Manufacture de Nancy, a demandé à l'auteur de La Fabbrica de fractionner la pièce, qui est au départ un monologue, pour en faire un spectacle à deux voix, celle d'un homme, Fausto, le narrateur, et d'une femme, la belle Assunta aux trois seins, tout droit sortie d'un conte. Charles Tordjman a aussi demandé de pouvoir ajouter des chants. Il a rencontré Giovanna Marini, qui a accepté de composer des chansons pour le spectacle. A Paris, l'amie de Pasolini sera sur la scène des Abbesses, en alternance avec Xavier Rebut. "Ascanio Celestini et Giovanna Marini ont la même envie de colère", dit le metteur en scène. Ce dernier a déjà travaillé sur la question ouvrière. En 2004, il a créé Daewoo, de François Bon, autour de la fermeture de l'usine coréenne d'électroménager, en Lorraine, au début des années 1990. "On était dans le chaud d'une usine de 1 200 ouvrières jetées à la rue, raconte le metteur en scène. Avec La Fabbrica, on rejoint une posture mythologique : l'histoire n'est pas racontée exclusivement de façon politique, elle est allégorique. Les musiques de Giovanna Marini font chanter l'Histoire et la mémoire." La Fabbrica, d'Ascanio Celestini. Mise en scène : Charles Tordjman. Avec Serge Maggiani, Agnès Sourdillon et le trio de chant composé de Sandra Mangini, Germana Mastropasqua, et, en alternance, Giovanna Marini et Xavier Rebut. Théâtre des Abbesses, 31, rue des Abbesses, Paris 18e. M° Abbesses. Tél. : 01-42-74-22-77. Du 5 janvier au 16 janvier. Du mardi au samedi, à 20 h 30 ; dimanche 10 janvier, à 15 heures. De 12 € à 23 €. Durée : 1 h 40. Brigitte Salino
02/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/02/faire-renaitre-au-theatre-la-memoire-de-la-classe-ouvriere_1286746_3246.html
Philippe Bilger
Philippe Bilger est avocat général à la cour d'appel de Paris.
Il a représenté le ministère public au procès du "gang des barbares". Il vient de cosigner avec Roland Agret "Et si on jugeait les juges ?" (éd. Mordicus, 9,90 €). Passionné de cinéma, il ira voir "Bright Star", de Jane Campion. "J'ai envie de voir le plus rapidement possible le dernier film de Jane Campion. A l'égard de cette oeuvre, je me trouve dans cette situation faite à la fois de délicieuse attente et de certitude heureuse. La Leçon de piano (1993), déjà, m'avait touché en plein coeur par cette manière de décrire la lente mais inéluctable montée du désir avec les mille silences, pudeurs et gestes qui l'accompagnent. Bright Star va nous faire vivre la passion contrariée mais irrésistible du jeune poète anglais John Keats et d'une voisine, Fanny Brawne, étudiante au tempérament vif et exalté. Tout ce que j'aime au cinéma semble être réuni, même dans cette simple esquisse. Non seulement l'Histoire, grande ou petite, qui constitue le terreau privilégié pour non pas entraver l'imagination, mais au contraire lui donner un essor infini à partir du réel. J'incline à penser que la vanité des créateurs médiocres, notamment dans beaucoup de films français, les prive d'une matière qui, bien exploitée, sortirait notre cinéma de ses péripéties vaudevillesques ou microcosmiques. La littérature, l'enchantement de la poésie, la légende de Keats, dont la fragilité et la maladie sont entrées dans les têtes presque comme une donnée universelle, viennent projeter leur magie sombre et flamboyante sur la prose d'un monde trop concret. Il y a, dans ce mélange de ce qui a été avec ce qui a été écrit, un accord si naturel que souvent la littérature paraît Histoire et l'Histoire littérature. Le passé défini et l'éternité de l'élan poétique se répondent et s'accordent. La passion - ce mouvement profond, intense et implacable qui vous fait réduire l'univers à un seul être et préférer la douleur, parfois, de la présence à la fausse tranquillité de l'absence - m'attire par avance tant je suis persuadé que Jane Campion en déchiffrera avec finesse et intelligence les secrets et les fatalités. Enfin, si je ne déteste pas les films d'action, précisément parce que leur psychologie sommaire leur permet une intrusion brutale et éclatante dans la substance de la vie, je privilégie tout de même les états d'âme raffinés et les sensibilités complexes dont les développements représentent une action tellement plus singulière. Histoire, littérature, sentiment amoureux, la dramatisation des coeurs et leur lutte contre ce qui prétend les étouffer : l'art est d'abord une promesse. Je rêve peut-être sur le film de Jane Campion. Mais c'est si bon, si doux, si puissant, d'aimer avant de regarder et de savoir. De se "faire son cinéma" avant de goûter le vrai." Bright Star, de Jane Campion, sort en salles le 6 janvier. Propos recueillis par Jean-Luc Douin
02/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/02/au-cinema-avec-philippe-bilger_1286745_3246.html
Soigner ses maux en famille chez le psy
La thérapie familiale dite systémique est une approche particulièrement efficace dans les cas de crise conjugale.
Depuis une petite année, les époux Da Silva (les noms ont été changés) se rendent chaque mois dans l'unité de thérapie familiale de l'hôpital du Clos-Bénard, à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis). Au départ, ils sont venus consulter pour leur plus jeune fils, âgé de 10 ans. Victor, qui est en CM2, n'aime pas l'école, il est agressif avec les enseignants, ses résultats sont mauvais, et à plusieurs reprises, sa mère Béatrice a été convoquée par la directrice. La psychologue qui le suit a conseillé aux parents d'entreprendre un travail thérapeutique en famille. Car la mère de Victor ne va pas bien. Technicienne de laboratoire, elle est marginalisée dans son travail, souffre de dépression et voit un psychiatre depuis cinq ans. Son mari, maçon, rentre tard. Elle considère qu'il s'implique peu dans la vie de famille. Comment démêler cet imbroglio ? Qui va le plus mal, de Mme Da Silva ou de son fils ? L'enfant ne cherche-t-il pas à attirer l'attention sur la souffrance, silencieuse mais envahissante, de sa mère ? A ces questions, les thérapeutes familiaux dits systémiques considèrent que la personne désignée comme malade exprime un dysfonctionnement au sein du groupe familial. Le malade, à travers son symptôme, peut chercher à protéger un autre membre, plus vulnérable encore. L'action du psychothérapeute ne porte pas sur le sujet isolé mais sur l'ensemble d'un "système" aux relations perturbées. "Nous aidons les familles à se réorganiser de manière que le symptôme exprimé par l'un de leurs membres ne soit plus nécessaire à l'équilibre de l'ensemble", explique Didier Destal, chef de service à l'hôpital du Clos-Bénard. Au début, les époux Da Silva venaient accompagnés de leurs deux enfants. Depuis quelques séances, la thérapie s'est centrée sur le couple. Derrière une glace sans tain, Elida Romano, la psychologue qui dirige l'unité, supervise la thérapie. Elle observe les échanges et intervient en direct, si nécessaire, par l'entremise d'un téléphone qui la relie au thérapeute. Filmée et enregistrée, la séance sera visualisée par la suite pour formuler des hypothèses sur les interactions à l'oeuvre. Le couple s'installe. "Il y a un manque de communication entre nous. A la maison, ma femme ne me dit rien", déclare l'époux au thérapeute. "Depuis que tu as ta maladie, notre famille n'avance plus. Tu vois le même docteur depuis cinq ans et rien ne se passe", dit-il en se tournant vers sa femme. Derrière la glace sans tain, Elida Romano fait remarquer que pour la première fois le sujet de la dépression de l'épouse est abordé en séance par le mari, Ilario. Elle appelle le thérapeute pour qu'il approfondisse le sujet avec lui. D'abord sur la défensive, le mari se met peu à peu à l'écoute de Béatrice. "Il commence à comprendre qu'il a un rôle à jouer pour protéger un espace familial qui va permettre à sa femme d'être un peu plus sereine", analyse leur thérapeute, Eric Malerbes. Que retire le couple de ces séances ? "Ça a permis à ma femme de me dire des choses qu'elle n'osait pas me dire en face et que je ne voyais pas, des choses qui font un peu mal", explique le mari. De son côté, sa femme voit cette thérapie comme "une pause où l'on peut se dire ce qui ne va pas, alors qu'on ne l'aurait jamais fait". "Ilario et moi n'attendons pas du tout la même chose l'un de l'autre, et ça me rend malheureuse, poursuit-elle. Depuis peu, il essaie de se racheter mais j'ai du mal à lui pardonner. J'espère que ces séances nous permettront de trouver un apaisement qui puisse faire avancer notre couple sans le faire capoter." Parviendra-t-elle à sortir du rôle de victime dans lequel elle semble s'être installée ? C'est un des enjeux des prochaines séances. Apparues aux Etats-Unis dans les années 1950, les thérapies familiales se sont principalement inspirées de l'école de Palo Alto, un groupe de chercheurs officiant dans cette petite ville de la banlieue sud de San Francisco, autour de Gregory Bateson, un anthropologue, et de Milton Erickson, un psychiatre. "Certains praticiens américains avaient remarqué que l'amélioration de l'état de santé de tel ou tel membre de la famille pouvait parfois entraîner l'apparition d'un problème chez un autre de ses membres, ou, au contraire, des améliorations en chaîne. Ces données cliniques contradictoires ont amené les chercheurs à s'interroger sur les liens potentiels qui pouvaient exister entre la problématique d'un individu et celle de l'ensemble de la famille", explique Mony Elkaïm, neuropsychiatre et directeur de l'Institut d'études de la famille et des systèmes humains, à Bruxelles. "Le rôle du thérapeute n'est pas de décider à l'avance ce qui est bon pour la famille, mais de déclencher des crises créatives qui puissent lui permettre de trouver ses propres solutions", explique Robert Neuburger, thérapeute de couple et familial. Ces techniques se sont développées plus tardivement en France, au milieu des années 1970. Cette approche apparaît particulièrement efficace pour les adolescents suicidaires, ou souffrant d'addictions, de troubles alimentaires comme l'anorexie ou de troubles des conduites, mais aussi en cas de crise conjugale. A côté des thérapies familiales systémiques coexistent d'autres écoles de pensée. Les thérapies familiales psychanalytiques travaillent davantage sur les fantasmes et les rêves de chacun des membres de la famille. Elles utilisent le transfert (processus par lequel le patient fait inconsciemment du thérapeute l'objet de réactions affectives éprouvées par le passé) et le contre-transfert (ce que ressent le psy pour son patient et qui influe sur la dynamique de la cure). Les séances sont plus rapprochées et la thérapie plus longue. Martine Laronche
02/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/02/soigner-ses-maux-en-famille-chez-le-psy_1286756_3238.html
Les photos de Berlin que Don McCullin avait perdues pendant 40 ans
Des documents montrant la construction du Mur, en 1961, sont dévoilés dans la capitale allemande.
L'Anglais Don McCullin, 74 ans, est un photographe de guerre de légende, connu pour ses photos dures du Biafra ou du Vietnam. On ne savait pas que son premier reportage, réalisé à ses frais, l'avait conduit, en août 1961, à Berlin. Il y a réalisé des images qui témoignent de la présence des troupes occupantes et de la construction du mur qui divisa la ville en deux. Ces images, Don McCullin les croyait perdues. Elles ont été redécouvertes il y a cinq ans et sont exposées jusqu'au 28 février à Berlin dans le cadre d'une importante rétrospective intitulée "The Impossible Peace", consacrée au photographe anglais. La galerie berlinoise C/O a rassemblé 150 photos, en noir et blanc et en couleurs, d'un auteur qui "a été jusqu'à présent très peu exposé en Allemagne", explique Felix Hoffmann, le commissaire de l'exposition. Les images de la capitale allemande ont été retrouvées au moment où le Sunday Times Magazine (supplément du Sunday Times, le journal pour lequel McCullin a travaillé pendant plus de vingt ans), a numérisé toutes ses archives. Ces photos sont de format carré, celui que McCullin avait adopté au début de sa carrière, à la fin des années 1950, avant qu'il devienne un photographe de guerre, adoptant alors le format 24 × 36, plus maniable et adapté aux journaux. Parmi les sept clichés de Berlin exposés, trois documents ont été réalisés au Checkpoint Charlie, l'un des points de contrôle les plus connus entre l'est et l'ouest de la ville. Ils montrent des soldats américains aux fenêtres d'un immeuble, un char américain posté devant le même immeuble ou un soldat assis sur un trottoir, sa mitraillette pointée vers des civils. Une autre photo, prise à Berlin-Est, montre l'étendue des destructions de la cathédrale. Les autres images ont le Mur pour sujet. Posté côté ouest, McCullin montre, à travers des fils barbelés, des soldats est-allemands en train de surveiller la frontière entre les deux parties de la ville. En dessous des visages nerveux, on aperçoit une fraîche couche de ciment déposée sur des blocs de béton. Autre image, émouvante : les visages consternés des Berlinois face à la construction du Mur. "Je voulais absolument être là-bas. A Berlin, il se passait quelque chose et je devais être là. C'est exactement ce que j'ai toujours essayé de faire plus tard : être là", a raconté Don McCullin. Ses photos berlinoises sont prometteuses. Elles inaugurent ses nombreux reportages à l'étranger, pendant quatre décennies. Elles montrent surtout que le style de McCullin est en germe : attention portée à la victime, tension entre un grand sens de l'information et une émotion, impact graphique par le cadrage, tirages sombres. L'exposition, présentée dans l'ancienne poste impériale, dans le vieux centre de Berlin, témoigne aussi de l'énergie de McCullin à documenter les souffrances des victimes de guerre, d'épidémie ou de la pauvreté. "Quand il arrivait, le sang venait souvent juste d'être versé", souligne Felix Hoffmann. Comme à Chypre, en 1964, où il photographie le cadavre encore chaud d'un homme déposé dans l'entrée d'un immeuble. On a parfois le sentiment que les protagonistes redoublent de violence en présence de l'objectif. Au Congo, en 1964, des militaires semblent prendre plaisir à maltraiter un détenu. "Cette interaction entre le photographe et la violence n'est pas sans poser problème", remarque le commissaire. Quelques exemplaires du Sunday Times Magazine montrent comment ces photos ont pu être dramatisées ou au contraire édulcorées lors de leur mise en page. Sont également présentes les oeuvres moins convaincantes des dernières années : natures mortes, tribus éthiopiennes ou reportages sur les ruines antiques en Méditerranée. "Don McCullin - The Impossible Peace". C/O Berlin, Oranienburger Strasse 35-36, Berlin. Tous les jours, de 11 heures à 20 heures. De 5 € à 8 €. Jusqu'au 28 février. "Don McCullin - The Impossible Peace". C/O Berlin, Oranienburger Strasse 35-36, Berlin. Tous les jours, de 11 heures à 20 heures. De 5 € à 8 €. Jusqu'au 28 février. Cécile Calla
02/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/02/les-photos-de-berlin-que-don-mccullin-avait-perdues-pendant-40-ans_1286741_3246.html
Cahal Daly, cardinal irlandais
Il avait eu à faire face, pendant qu'il exerçait ses plus hautes fonctions, aux effets de la violence radicale de l'IRA.
Ancien primat catholique de toute l'Irlande, le cardinal Cahal Daly est mort, jeudi 31 décembre 2009, à Belfast, de problèmes cardiaques, à l'âge de 92 ans. Il avait eu à faire face, pendant qu'il exerçait ses plus hautes fonctions, aux effets de la violence radicale de l'Armée républicaine irlandaise (IRA). Déception, inquiétude, colère furent plus d'une fois le lot de ce prélat au cours de ces années. Ainsi, interrogé en 1992 sur la situation en Irlande du Nord, il déclarait : "Après vingt-deux ans de violence, force est de constater qu'aucun progrès, ni politique ni militaire, n'a été enregistré." Cette violence, il n'avait jamais cessé de la dénoncer. Et son soutien au processus de paix nord-irlandais fut sans faille. Cahal Daly a souvent été considéré comme le grand inspirateur, voire l'auteur d'un important discours prononcé par le pape Jean Paul II pendant son voyage en Irlande, en 1979. "A genoux, je vous supplie de vous détourner du chemin de la violence et de revenir sur les voies de la paix", avait imploré Jean Paul II, à Drogheda. Cahal Brendan Daly était né le 1er octobre 1917 à Loughguile (Irlande du Nord). Ordonné prêtre en 1941, ce philosophe, qui avait enseigné à l'université Queen's, à Belfast, avait été nommé évêque en 1967. Entre 1963 et 1965, il avait été expert en théologie lors du concile Vatican II. Evêque pendant vingt-trois ans en République d'Irlande (Ardagh), il était revenu en Ulster, à Down-and-Connor (Belfast), en 1982. En novembre 1990, Cahal Daly est nommé archevêque d'Armagh (Irlande du Nord), primat de toute l'Irlande. Il avait été créé cardinal, en mai 1991. Il avait pris sa retraite en 1996, exprimant une nouvelle fois à cette occasion son "plus grand regret" : constater que "le processus de paix reste d'une lenteur perverse et souffre autant de retours en arrière". Dans l'hommage rendu à son prédécesseur, l'actuel primat de toute l'Irlande, le cardinal Sean Brady, a déclaré que, "lorsqu'elle sera pleinement évaluée, sa contribution à l'histoire ecclésiastique et civile de l'Irlande sera jugée immense". 1eroctobre 1917 Naissance à Loughguile (Irlande du Nord) 1963-1965 Expert lors du concile Vatican II 1990 Archevêque d'Armagh, primat de toute l'Irlande 1991 Créé cardinal 31 décembre 2009 Mort à Belfast
02/01/2010
disparitions
https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2010/01/02/cahal-daly-cardinal-irlandais_1286762_3382.html
La renaissance de l'île des musées
L'île des musées désigne la partie nord de l'île de la Spree à Berlin.
L'île des musées désigne la partie nord de l'île de la Spree, qui inclut la cathédrale luthérienne. Le centre en était jadis occupé par le Palais Royal, un monument tardif et lourd qu'aucun dignitaire nazi ne voulut occuper. Endommagé par la guerre, il fut rasé en 1950 par le régime de la RDA, qui lui substitua un Palais de la République. Riche en amiante, pauvre en architecture mais resté cher au coeur des Berlinois de l'Est, ce nouveau palais a été détruit en 2008. Malgré de violentes controverses, le site devrait accueillir une reconstitution approximative du Palais, projet d'un Italien quasi inconnu, Franco Stella. Derrière des façades pastiche, l'intérieur accueillerait une sorte de centre façon Beaubourg. La Bau Akademie, dessinée par Schinkel, en face du château devrait, elle, être reconstruite à l'identique. Quant au sud de l'île, vieux quartier baptisé île des Pêcheurs, remplacé dans les années 1950 par une batterie de grandes barres d'habitation dans le style inimitable de la RDA, il est aujourd'hui relifté dans le goût de l'Allemagne de l'Ouest. F. E.
02/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/02/la-renaissance-de-l-ile-des-musees_1286740_3246.html
Le Neues Museum de Berlin rendu à la vie par David Chipperfield
L'architecte anglais a rénové avec succès le bâtiment qui abrite les collections d'antiquités de la ville.
Le 17 octobre 2009, quelques jours avant l'anniversaire de la chute du Mur, Berlin récupérait un des lieux les plus prestigieux de son "île des musées" : le Neues Museum, ou nouveau musée, resté ruiné et fermé depuis la guerre, et qui abrite des collections de la préhistoire et de l'antiquité. L'Anglais David Chipperfield l'a rendu à la vie, en le rénovant et en construisant à la fois. Ce grand architecte de notre temps, 56 ans, au style éclectique mais rigoureux, et qui a beaucoup construit en Europe, aux Etats-Unis ou en Chine, est réputé pour son respect de la culture du site et par ses interventions intelligentes dans des lieux de patrimoine. Berlin en est une nouvelle preuve : le Neues Museum est une réussite architecturale et pédagogique. Achevé en 1855 par l'architecte Friedrich August Stüler (1800- 1865), le Neues Museum avait été très endommagé par les bombardements alliés de la seconde guerre mondiale. Il resta à peu près en l'état jusqu'à ce que Berlin réunifiée n'entreprenne de restaurer, voire de reconstruire "à l'identique" le patrimoine du coeur de l'ancienne ville, situé pour l'essentiel dans la zone est. Friedrich Stüler avait été l'élève de Karl Friedrich Schinkel (1781- 1841), lui-même maître d'un néoclassicisme ouvert à la modernité, et qui reste comme le plus grand architecte de l'Allemagne. Schinkel fut le premier à construire, sur ce qui allait devenir l'île des musées, l'Altes Museum (l'ancien musée, 1823), consacré principalement à l'archéologie. Suivirent l'Alte Nationalgalerie, (1876), temple voué à la peinture, lui aussi dessiné par Stüler, et le Neues Museum, puis le Bode Museum (Ernst Eberhard, 1904), réceptacle de trois collections : médailles, sculptures, art byzantin. Enfin le Pergamonmuseum (Alfred Messel et Ludwig Hoffmann, 1930), où sont installés ou reconstitués quelques grandioses monuments helléniques ou assyriens d'Asie mineure, tels l'autel de Pergame, la porte de Milet et la porte d'Ishtar, rapportée de Babylone. L'état critique du Neues Museum a longtemps retardé sa restauration. David Chipperfield a été choisi à l'issue d'un concours en 1997. Douze années d'hésitations et de polémiques ont retardé le début de travaux difficiles. A partir de 2006, Chipperfield a dû se confronter à deux chantiers simultanés : rénover et construire. Il a d'abord préservé ou restauré ce qui restait du bâtiment du XIXe siècle, notamment les fresques "à l'antique", vieillies par les bombes et le feu, ou encore les charpentes métalliques de Stüler. Chipperfield s'est plié aux principes de la charte de Venise (1964), qui prévoit que toute intervention doit se distinguer du monument sur lequel elle s'applique et doit être réversible. D'où une intervention multiforme, très discrète pour une partie de la façade ouest, et, à l'intérieur, quelques morceaux de bravoure. La construction d'une structure autonome dans l'une des cours intérieures (dite cour égyptienne) conjugue toutes les vertus : laisser lisibles les restes de l'ancien musée, améliorer la lumière zénithale, et apporter une signature contemporaine juste et forte. L'escalier du grand vestibule d'entrée, jadis dominé par une copie des caryatides de l'Erechthéion, un des temples les plus subtils de l'Acropole, copie aujourd'hui déplacée, laisse plus dubitatif. La structure, notamment le garde-corps, en apparaît lourde, comparée à l'élégance générale du projet Chipperfield. Mais le reproche est minime. En même temps qu'un monument prestigieux, le public a retrouvé une collection d'antiquités, principalement égyptiennes. La pièce maîtresse en est le buste de Néfertiti - "la belle est venue" en égyptien. Dans la salle où il est exposé, ce buste de pierre peinte suscite une passion comparable à La Joconde. Trouvé en 1912, ce visage mince et anguleux de la femme d'Akhenaton (XIVe siècle avant J.-C.) fut montré pour la première fois en 1925, époque où les canons de la beauté féminine évoluaient précisément vers les beautés fatales et dures, genre Marlene en Impératrice rouge. Faire pour autant de ce buste, issu d'une période de rupture avec les traditions antérieures, un modèle éternel de la beauté égyptienne reviendrait à négliger la diversité et la spécificité de la collection du musée, où semblent se marquer les choix esthétiques des archéologues allemands. L'ensemble est émouvant, sans avoir rien d'étouffant. Pour parachever cette île de l'art, reste à terminer les travaux au Pergamon. Et à créer un hall d'accueil commun aux cinq musées, si proches les uns des autres. Cela tombe bien, Chipperfield en est chargé. Frédéric Edelmann
02/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/02/le-neues-museum-de-berlin-rendu-a-la-vie-par-david-chipperfield_1286739_3246.html
Dan O'Bannon, scénariste et réalisateur américain
Inventeur de l'extra-terrestre parasite et carnivore qui terrorise un vaisseau spatial dans "Alien", mais aussi réalisateur d'un excellent film de zombies, "Le Retour des morts-vivants".
Inventeur de l'extra-terrestre parasite et carnivore qui terrorise un vaisseau spatial dans Alien, mais aussi réalisateur d'un excellent film de zombies, Le Retour des morts-vivants, Dan O'Bannon est mort le 17 décembre 2009 à Santa Monica (Californie) de la maladie de Crohn, dont il souffrait depuis plusieurs années. Il avait 63 ans. Daniel O'Bannon est né en 1946 dans le Missouri. Il suit des études de cinéma à la University of Southern California, à Los Angeles, où il a pour condisciple John Carpenter. Avec le futur réalisateur de New York 1997, il écrit et conçoit un film de science-fiction bon marché, Dark Star. Dan O'Bannon en met au point les effets spéciaux. Le film sort en 1975. C'est un échec, mais il est remarqué par l'auteur et cinéaste Alejandro Jodorowsky qui prépare alors une adaptation de Dune, le classique de la science-fiction de Frank Herbert. Dan O'Bannon suit Jodorowsky à Paris où il rencontre les dessinateurs recrutés pour le projet, parmi lesquels le Suisse H.R. Giger. Le projet avorte à la veille du tournage et O'Bannon rentre à Los Angeles. George Lucas lui confie une petite partie des effets optiques du premier épisode de Star Wars. Dan O'Bannon écrit également une histoire mettant en scène une créature qui incube dans l'organisme humain avant de se développer en un monstre mangeur d'hommes. La réalisation du film est confiée à Ridley Scott et le dessin de la créature à Giger. HUMOUR SARDONIQUE Alien sort, en 1979, et rencontre un succès immédiat. Mais Dan O'Bannon se brouille avec les producteurs du film et ne participera pas aux nombreuses suites qui lui seront données. Il collabore à l'écriture du dessin animé Métal Hurlant (1981), à celle de Blue Thunder (1983), thriller de John Badham, et passe à la réalisation avec Le Retour des morts-vivants (1985). Suite du film de George Romero, La Nuit des morts-vivants, le long métrage de Dan O'Bannon traite le thème de l'invasion de la Terre (en l'occurrence Louisville, Kentucky) sur le mode comique, faisant galoper les zombies sur une bande-son punk, là où Romero les faisait bouger très lentement. Malgré le succès du film, sa carrière connaît un coup d'arrêt après l'échec de Lifeforce (1985), un film qui mélange vampires et space opera, qu'il a écrit pour Tobe Hooper. Il faudra attendre 1990 pour qu'il adapte Total Recall d'une nouvelle de Philip K. Dick. Réalisé par Paul Verhoeven, interprété par Arnold Schwarzenegger, ce grand spectacle est empreint de l'humour sardonique du scénariste. Dan O'Bannon est mort avant que commence le tournage d'un nouveau film de la série des Alien, dont il avait à maintes reprises souhaité la fin. Thomas Sotinel
02/01/2010
disparitions
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François Deslaugiers, architecte
Il est connu en particulier pour être l'auteur du centre des impôts à Nemours.
L'architecte François Deslaugiers est mort, le 18 décembre 2009, à Marseille, d'un cancer. Il était âgé de 75 ans. Il est connu en particulier pour être l'auteur du centre des impôts à Nemours, d'une partie des façades ainsi que des ascenseurs extérieurs de la Grande Arche à la Défense et du viaduc Le Corbusier à Lille... Il avait aussi, avec sa première femme, aujourd'hui décédée, la philosophe Christiane Deslaugiers, signé plusieurs textes théoriques. Né en 1934, à Alger, d'un père polytechnicien, François Deslaugiers avait rompu avec sa famille pour entrer à l'Ecole des beaux-arts en 1952, avant de travailler dans les ateliers de Guy Lagneau (1952), puis, son diplôme obtenu, dans celui de Louis Arretche (à partir de 1966). Fuir l'univers de Polytechnique vers celui de l'architecture peut difficilement passer aujourd'hui pour un motif de rupture familial. Quelques motifs plus sociaux et plus philosophiques durent sans doute s'en mêler. DÉPASSER LE CENTRE POMPIDOU Son oeuvre la plus connue est sans doute le centre des impôts à Nemours (1981), un grand "Meccano" de structures métalliques tramées, systématiques. François Deslaugiers ambitionnait de dépasser le modèle, à l'époque tout récent, du Centre Pompidou : lui et Christiane, se rappelle le critique François Chaslin, formulaient contre l'édifice de Piano et Rogers, qui avait été inauguré, au début de 1977, nombre de griefs : ils lui reprochaient ses limites et l'accusaient de ne déployer son "espace neutre, banalisé et sans divisions internes " qu'à l'intérieur d'une forme globale par ailleurs très définie. "Justement à Nemours, qu'ils venaient d'achever, poursuit François Chaslin, ils affirmaient être allés plus loin. La forme était "déstructurée"." Elle n'était plus que l'enveloppe provisoire, flexible, d'activités libres et changeantes et le fruit de la souplesse de positionnement des diverses parois. Le tout "fondé sur la rigueur d'invisibles lois techniques faites pour servir et non contingenter". On doit aussi à Deslaugiers les gares du funiculaire vitré de Montmartre (1991), les réserves du Musée des arts et métiers à Saint-Denis (1994), la nouvelle salle du Théâtre d'Orléans (1994) et le nouveau palais de justice de Nanterre (1996). François Deslaugiers fut toujours intransigeant, fidèle à cette pensée qu'il avait ainsi résumée pour Le Monde, en 1982 : "J'ai essayé de devenir ingénieur, alors que mes confrères, peu soucieux des "utilités", se contentent, en général, de réemployer des poncifs techniques élaborés avant eux et de plaquer une vague plus-value artistique sur un travail et des choix fondamentaux qu'ils ont depuis longtemps abandonnés aux entreprises et qu'ils se laissent imposer par elles." Il réalisera ainsi des aménagements au Musée des arts asiatiques de Nice, de Kenzo Tange (1998), et dans la chapelle du Musée des arts et métiers, à Paris, réhabilité par Andrea Bruno (2000), un parcours en passerelle dans le cadre de la rénovation par Rudy Ricciotti de l'abbaye de Montmajour, près d'Arles (2000). Et plusieurs ouvrages d'art : le viaduc Le Corbusier à Lille, porté par trois arcs débordants (1994), la passerelle des Bonnets rouges, sur la Vilaine, à Rennes (1994) et, plus tard, celle qui franchit les voies ferrées de la gare de Lille-Flandres (2002). Frédéric Edelmann
02/01/2010
disparitions
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Lourdes Cruz : la dame et son tueur fourbe
Le venin du cône géographe, un gastéropode des côtes indo-pacifiques, peut tuer un homme en quelques minutes. Pour la science, ce prédateur constitue une mine d'informations.
Elle a passé trente années de sa vie à étudier un tueur. "Et de la pire espèce !", dit-elle en souriant. Un tueur fourbe et d'une efficacité stupéfiante. Un tueur que 50 millions d'années d'évolution ont perfectionné, améliorant ses techniques et pouvoirs maléfiques. Un tueur qui, par son venin, plus puissant que ceux du cobra et du scorpion réunis, peut terrasser un homme en une poignée de minutes, un poisson en moins de deux secondes. Tous les pêcheurs des côtes indo-pacifiques, à défaut de le croiser, en ont entendu parler. Car ce prédateur carnivore, noctambule, agit normalement sous la mer. Il s'agit d'un escargot marin à la coquille somptueuse, recherchée par les collectionneurs de coquillages. Un gastéropode appelé cône, plus exactement cône géographe. "Une pure merveille, affirme Lourdes Cruz. Vous n'imaginez pas la mine d'informations qu'il recèle pour un chercheur. C'est un trésor." L'expérience, dans un minuscule aquarium de son laboratoire de l'Institut océanographique de Manille, aux Philippines, continue de la fasciner. A moins que ce ne soit le regard médusé des visiteurs. Le cône, immobile, semble assoupi au fond du bassin. Survient un petit poisson frétillant. Le cône oscille doucement. Une sorte de siphon fin et flexible sort d'une extrémité de sa coquille, que le poisson approche sans méfiance. Soudain, une deuxième trompe sort de sa bouche jusqu'alors cachée. Une trompe agile, lancée comme un harpon et à l'extrémité de laquelle se trouve une dent acérée qui pique le poisson et, telle une seringue, laisse passer un venin qui le paralyse instantanément. Proie, harpon et filin sont aussitôt aspirés et disparaissent sous la coquille. Ni vu ni connu. Du grand art. Avec les humains, l'attaque est un peu différente puisque le cône ne cherche pas alors à se nourrir mais à se défendre, ramassé le plus souvent par un pêcheur mal informé qui le glisse dans une poche ou un caleçon de bain. Effrayé et rétracté d'abord dans sa coquille, l'animal lance ensuite son harpon venimeux qui, en piquant l'épiderme, provoque immédiatement une vive douleur, un oedème important, et très vite, une paralysie des muscles respiratoires qui entraîne la mort. A quelle fréquence ? "Comment savoir, s'interroge la scientifique. Des histoires ont toujours circulé dans les villages de pêcheurs, sans que les morts causées par les cônes soient toutes répertoriées." Elle se rappelle en tout cas avoir accouru un jour, dans un hôpital de Manille, au chevet d'un homme transporté en urgence et placé à temps sous assistance respiratoire après une piqûre de cône. "Les médecins l'ont quasiment ressuscité, et il s'en est sorti, ce qui est rare. 70 % des victimes meurent en moins de deux heures." Dans un épisode de la série américaine "Hawaï police d'Etat", s'amuse Lourdes Cruz, l'arme d'un meurtre était un cône géographe. "C'était caricatural. Mais ce venin, c'est vrai, est d'une puissance prodigieuse. Cette efficacité nous a convaincus qu'étudier sa composition nous aiderait à mieux comprendre les circuits du corps humain. Nous étions loin d'imaginer à quel point." C'est devenu sa passion, son moteur, son obsession. Elle en a fait sa vie. Travaillant d'arrache-pied, entre l'université de l'Utah où exerce son collègue, ami et mentor, le professeur Baldomero Olivera, et l'université des Philippines de Diliman, où elle est professeur et dirige un laboratoire. Convaincue que le milieu marin possède les clés pour comprendre le fonctionnement du corps humain, des modèles pour élaborer des médicaments. Le prix L'Oréal-Unesco, qui vient de lui être décerné dans le cadre d'une fondation encourageant les femmes scientifiques, donnera, espère-t-elle, plus d'écho et de moyens au département sciences de l'université des Philippines traditionnellement mal doté et pourtant en pointe sur les recherches dans l'univers marin. "Ce pays n'accorde d'importance qu'à la politique, à la boxe et au show-business, s'énerve le professeur Gisela Conception, chercheuse également à l'Institut océanographique. C'est rageant. Nos recherches sur les animaux marins recèlent un potentiel fabuleux d'applications en matière de pharmacopée. Les cônes, mais aussi les vers, les éponges peuvent aider les hommes à vivre mieux et plus longtemps. Lourdes Cruz nous a ouvert la voie." La dame sourit, un peu embarrassée par la résonance de sa récente distinction, elle qui cumule pourtant de nombreux titres, élue à l'Académie des sciences et technologies des Philippines en 1986 et élevée au rang de "scientifique nationale" en 2008. Elle n'aime guère parler d'elle, baisse les yeux devant un compliment, cite plus volontiers élèves et collègues, et perd carrément la voix avant une interview pour un documentaire télévisé. Le père était chimiste, et enseigna jusqu'à l'âge de 82 ans. "Vous comprenez que je ne suis pas près de m'arrêter", prévient sa fille, aujourd'hui âgée de 67 ans. La mère était dentiste, mais renonça à exercer pour élever ses huit enfants. "Le fauteuil du patient et ses anciens instruments étaient entreposés dans le sous-sol de la maison. Vous imaginez combien nous avons mimé de séances d'arrachage de dents..." La maisonnée était visiblement très influencée par le métier des parents. "On voulait tous faire des expériences, raconte une soeur aînée, devenue professeur de piano. On pressait des plantes pour inventer des concoctions, on tentait de fabriquer des parfums avec des fleurs de jasmin, on testait un vernis pour les ongles, on fabriquait de la colle, on disséquait des insectes..." Lourdes Cruz, cinquième de la fratrie, se souvient d'une ambiance joyeuse. Et très pieuse. Chaque soir, le rosaire était récité en famille. Et les devoirs comptaient beaucoup. "Que puis-je donc vous transmettre de plus précieux ?, disait le père. Aucun bien ne vaut la connaissance." C'était valable pour les filles autant que pour les garçons. Les certificats de naissance ayant brûlé pendant la guerre, la future scientifique, impatiente, entre à 5 ans à l'école primaire, soit deux ans plus tôt que les autres enfants. Et très vite, la science la happe. Comme une évidence. A l'université, elle choisit la chimie. Entre à l'Institut international de recherche sur le riz. Puis s'envole pour les Etats-Unis, où elle passe un doctorat. Elle y prend goût à la recherche et le retour à Manille la laisse pantoise devant le manque de moyens, l'indigence des équipements, les pannes de courant et la bureaucratie. Mais la voilà intégrée dans une petite équipe de jeunes chercheurs réunie autour de Baldomero Olivera, charismatique et entreprenant, déjà connu pour ses travaux sur l'ADN, à cheval entre les Etats-Unis et les Philippines. Or, depuis son enfance, ce dernier collectionne les coquillages. Il entraîne Lourdes dans sa passion. La voilà qui, elle aussi, se met à les observer, les classer, les ramener au labo. La voilà qui écoute les pêcheurs et arpente les bords de mer, la nuit, une torche sur le front, à la recherche des fameux cônes géographes, les plus beaux. Elle sait qu'aucun laboratoire de recherche philippin ne pourra jamais concourir, faute de moyens, avec la plupart des labos étrangers. Alors elle décide, en accord avec Olivera qui, lui, fait le choix de s'installer aux Etats-Unis, d'étudier un produit qui, par sa disponibilité, procure déjà aux Philippines un avantage : les cônes et leur terrible venin. "Pourquoi est-il mortel ? Quelles zones affecte-t-il ? De quels composants est-il fait ? Comment les reproduire ? Comment les détourner ?... Je croyais en avoir pour deux ans. Trente ans plus tard, le champ de recherche paraît illimité." Car le venin s'est révélé beaucoup plus complexe et riche que prévu. Ce sont 100 à 200 composants qui concourent à son efficacité, en majorité des peptides, ou minuscules protéines, que Lourdes Cruz et son complice Olivera tâchent peu à peu d'isoler. "Pour 700 espèces différentes d'escargots marins dans le monde, cela implique plus de 100 000 peptides neuroactifs. Une mine d'or pour la pharmacopée !" De fait, des laboratoires se sont peu à peu intéressés à leurs travaux, comprenant l'intérêt de leurs applications thérapeutiques : traitement de la douleur, épilepsie, tuberculose, multiples scléroses, maladie d'Alzheimer... Le Prialt, autorisé aux Etats-Unis en 2004, est sans doute le produit le plus connu conçu à partir du venin, analgésique mille fois plus puissant que la morphine et sans effet d'accoutumance. Sans compter l'aide au diagnostic médical et à la compréhension du système neuromusculaire. Lourdes Cruz n'a cependant guère bénéficié des principaux brevets qui, pour certains, se sont révélés très lucratifs. "Les Philippines étaient mal organisées juridiquement, sourit-elle. Mais aucun regret. Seul comptait pour moi le bénéfice social de mes recherches." Trop de travail pour envisager des pauses ou compartimenter sa vie pour créer une famille. Tout pour la recherche et le passage d'un relais à ses étudiants qui parlent d'elle comme d'une mère et se passionnent à leur tour pour le plus beau des coquillages d'Asie. Depuis quelques années, elle s'investit aussi dans la communauté des Aytas, un peuple indigène, chasseur, nomade. Et elle compte utiliser les 100 000 dollars de son prix pour acheter un terrain près de chez eux, dans la région de Bataan, afin d'y installer son association et un laboratoire d'étude sur leur médecine traditionnelle. "Leur connaissance est bluffante, dit-elle. Valorisons-les. Faisons-en des partenaires. De même que notre avenir dépend de la sauvegarde de la biodiversité, la communauté humaine a tout à gagner à prendre en compte le savoir ancestral." Annick Cojean
02/01/2010
planete
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Abdurrahman Wahid, ancien président indonésien
"Ceux qui me jugent pas assez musulman doivent lire le Coran : l'islam est en faveur de l'inclusion et de la tolérance", répondait M. Wahid à ses détracteurs.
Plusieurs milliers de personnes ont assisté, jeudi 31 décembre, à Jombang (Java), aux funérailles de l'ancien président indonésien Abdurrahman Wahid, témoignant du respect qu'ils portaient à ce partisan d'un islam tolérant qui fut, de 1999 à 2001, à la tête du pays musulman le plus peuplé du monde. Connu sous le surnom de Gus Dur, cet intellectuel musulman, presque aveugle, avait été la grande figure de l'opposition au général Suharto chassé du pouvoir, en 1998, après trente-deux ans de dictature. Il lui avait succédé, en octobre, l'année suivante, ouvrant la voie à une ère de pluralisme et de démocratie dans son pays. Agé de 69 ans, Abdurrahman Wahid était en mauvaise santé depuis plusieurs années : diabétique, il avait été victime d'attaques cérébrales successives. Il est décédé à Jakarta le 30 décembre. INTELLECTUEL ET MÉLOMANE Né le 7 septembre 1940 dans une grande famille musulmane de Jombang qui avait combattu pour l'indépendance, cet intellectuel défenseur de la tolérance éthique et religieuse présida l'un des plus grands mouvements musulmans du pays : la Nahdlatul Ulama (NU) qui compte 40 millions de membres. Il avait été élu chef de l'Etat par le Parlement en 1999, l'emportant sur la candidate alors la mieux placée, Megawati Sukarnoputri. Mais il avait dû quitter le pouvoir en 2001, à la suite d'un vote de défiance de ce même Parlement sur fond d'allégations de corruption qui n'ont jamais été prouvées. Homme de grande culture, parlant plusieurs langues, mélomane, Abdurrahman Wahid était connu pour ses plaisanteries, ses discours improvisés et des déclarations parfois énigmatiques mais souvent non dénuées d'humour. Impulsif et parfois imprévisible, paraissant somnoler lors d'événements officiels, il a dirigé l'Indonésie au cours d'une période de transition démocratique marquée par une grave crise économique et des violences séparatistes et intercommunautaires, notamment à Aceh ou dans les îles Moluques. Le 25 décembre 2000, des attaques terroristes coordonnées dans des églises à Jakarta et dans des villes de province, attribuées à l'organisation Jemaah Islamiyah, avaient causé la mort de dix-huit personnes. Tout en luttant contre les extrémistes de tous bords, Abdurrahman Wahid a toujours cherché le dialogue avec les séparatistes. Une approche conciliante qui lui valut les critiques des militaires. Partisan de la tolérance religieuse, il répondait à ses adversaires : "Ceux qui me jugent pas assez musulman doivent lire le Coran : l'islam est en faveur de l'inclusion et de la tolérance." "Le président Abdurrahman Wahid était musulman mais il fut une bénédiction pour toutes les confessions", a déclaré au journal Jakarta Post l'archevêque de la capitale, Julius Darmaatmadja, dans un hommage au président défunt. DÉFENSEUR DE SALMAN RUSHDIE Abdurrahman Wahid avait été l'un des rares intellectuels indonésiens à défendre Salman Rushdie, auteur des Versets sataniques. Il s'était en outre attaqué à un tabou en Indonésie en appelant à l'établissement de relations diplomatiques avec Israël. Au cours de sa présidence, il s'était rendu au Timor-Oriental pour s'excuser auprès de la population des atrocités commises par son pays et il avait essayé sans succès de mettre en place une commission de paix. Il limogea, en revanche, son ministre chargé de la sécurité, le général Wiranto, qui avait commandé les troupes au Timor-Oriental au moment des massacres de 1999. Dans les dernières années de la dictature de Suharto, Abdurrahman Wahid ne ménageait pas ses critiques mais, en raison de sa position et du respect que lui portaient beaucoup d'Indonésiens dont témoigne l'émotion provoquée par sa mort, il avait bénéficié d'une certaine immunité. Malgré la détérioration de son état de santé, il était resté actif sur la scène politique au point de proposer en septembre 2007 de faire à nouveau campagne pour la présidence en 2009 si les chefs de son mouvement le lui demandaient. Sa proposition était restée sans suite. Philippe Pons (Tokyo, correspondant) et Philippe Pons
02/01/2010
disparitions
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Le Maroc mise sur le stockage d'énergie sous forme d'eau pour produire son électricité
Le pompage-turbinage, qui fait remonter l'eau vers des barrages, permet de lisser les variations de production de l'éolien et du solaire
A 200 kilomètres à l'est de Casablanca, au pied de l'Atlas, juste au-dessus de la bourgade d'Afourer, un dispositif hydraulique digne des Shadoks strie la montagne d'un filet clair. Deux réservoirs d'eau de 1,3 million de m3 sont reliés par un "pipeline". Entre les deux bassins, deux unités de production hydroélectrique forment le coeur du système. A certains moments, l'eau descend ; à d'autres, elle monte. Baptisé station de turbinage et pompage (STEP), ce système permet au Maroc de lisser les variations de production de l'éolien et du solaire et de répondre rapidement aux éventuelles pointes de consommation. Moins médiatisée que l'éolien et le solaire, l'énergie hydroélectrique se trouve pourtant une place de choix dans le développement des énergies renouvelables. Avec des dispositifs qui se démarquent des barrages classiques. Une STEP fonctionne autour d'un aller-retour. Lorsque le réseau a besoin d'électricité, l'eau est libérée du réservoir haut et dévale dans les tuyaux pour alimenter les turbines des unités de production électrique. La STEP d'Afourer peut ainsi produire 460 mégawatts (MW), soit l'équivalent d'une centrale à charbon. L'eau déversée dans le bassin inférieur est repompée vers le lac supérieur lorsque le besoin d'électricité, et son prix, sont moindres. En général, la nuit. Au total, le rendement d'une STEP - entre l'énergie produite et celle qui est consommée - est de l'ordre de 70 % à 80 %. La STEP d'Afourer, commandée au français Alstom, a été mise en place fin 2004. Abdellah Moati, le directeur de la production de l'Office national de l'électricité (ONE), souligne la gestion délicate de la demande en électricité de son pays et le nécessaire stockage d'énergie. "Les centrales thermiques classiques, au charbon, qui fournissent une très grande part de l'électricité du pays, fonctionnent de manière optimale lorsqu'elles sont à plein rendement, note-t-il. Le surplus de leur énergie peut être stocké et restitué par la STEP. Par ailleurs, en cas de pointe de la consommation, l'accroissement de la production d'électricité par des centrales à turbines à gaz représentant un coût élevé, il est plus rentable d'utiliser la STEP." L'équation économique de la STEP d'Afourer est améliorée par le fait que le pompage de l'eau vers le lac supérieur, pendant la nuit, se fait avec de l'électricité importée à coût très compétitif d'Espagne. Mais l'objectif de l'ONE est aussi la composition avec la STEP d'un portefeuille d'énergies équilibré. Le Maroc affiche l'objectif de produire en 2020 près de 20 % de son électricité grâce aux énergies renouvelables, explique Saïd Mouline, directeur général du Centre développement des énergies renouvelables. Or "l'association de la STEP et des énergies renouvelables offre plus de stabilité dans l'alimentation du réseau", note Adbdellah Saphar, qui supervise pour l'ONE l'exploitation des énergies renouvelables dans le sud du Maroc. Les STEP peuvent être déclenchées très rapidement, en quelques minutes. Et contrairement à l'hydroélectricité classique, où l'eau n'est pas récupérée, elles sont relativement protégées des risques de sécheresse, même si l'apparition de boues, due à l'assèchement des cours d'eau qui approvisionnent le bassin, peut parfois poser un problème. "Il y a un regain d'intérêt pour toutes les formes de stockage d'énergie et la STEP répond bien à ce besoin de stockage massif", analyse Cédric Philibert, expert au sein du département des énergies renouvelables de l'Agence internationale de l'énergie (AIE). L'eau offre un stockage d'énergie plus facile et plus long que les sels fondus ou l'hydrogène. Selon les estimations de l'AIE, près de 100 GW de STEP sont installées ou en cours de création dans le monde, et il existerait un potentiel pour multiplier par dix cette capacité. La France figure parmi les pays déjà conquis : dans l'Isère par exemple, EDF a associé une STEP au barrage de Grand'Maison. De l'autre côté de l'Atlantique, Steven Chu, le secrétaire à l'énergie de l'administration Obama, aime lui aussi souligner le rôle essentiel que peuvent jouer les systèmes de pompage-turbinage pour le stockage de l'énergie. Des projets à plus long terme envisagent la création de systèmes reliant des bassins de pompage terrestres, ou des atolls artificiels surélevés, et la mer. Au Maroc, convaincu des avantages de la STEP, l'ONE se prépare à en construire une deuxième près d'Agadir et une troisième au nord du pays. Bertrand d'Armagnac
02/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/02/le-maroc-mise-sur-le-stockage-d-energie-sous-forme-d-eau-pour-produire-son-electricite_1286705_3244.html
"Jean-Marie Charon : ""Partout un problème se pose pour financer une information de qualité"""
Le sociologue des médias revient sur les subventions accordées aux sites d'information en ligne.
Pour la première fois, les entreprises de presse sur Internet (Rue89, Mediapart...) vont pouvoir bénéficier d'aides de l'Etat (60 millions d'euros sur trois ans), au même titre que les journaux, à travers la mise en place du fonds d'aide au développement des services de presse en ligne (SPEL). Les sommes sont attribuées sur dossier, en fonction des projets présentés. Jean-Marie Charon, sociologue et chercheur au CNRS, spécialiste des médias revient sur les difficultés à financer la production d'une information de qualité. Pour la première fois, des sites d'information en ligne vont bénéficier d'aides à la presse, au même titre que les journaux. Qu'en pensez-vous ? Cette somme correspond à l'une des dispositions des Etats généraux de la presse en faveur de la presse en ligne. Il s'agit de favoriser l'évolution des médias d'information vers le Web, ainsi que la création d'un secteur de site "pure players" (uniquement sur le Web) d'information de qualité. Beaucoup vivent cette évolution comme un reniement des idéaux du Web, un retour aux défauts de la "vieille presse". Je ne sais pas où sont les reniements. Les agrégateurs du type Google vendent aux annonceurs des espaces d'information qu'ils n'ont pas produits. Partout un problème se pose pour financer une information de qualité, qui coûte chère à produire mais est nécessaire au débat démocratique. Aux Etats-Unis, ce sont des fondations qui commencent à intervenir pour financer le journalisme d'investigation. Je ne suis pas sûr que cela sera suffisant. En outre, cela ne correspond pas à nos traditions institutionnelles, en France et en Europe, où l'Etat est intervenu plus tôt sous forme d'aides diverses, comme le taux de TVA à 0 % en Grande-Bretagne et l'aide postale dans de nombreux pays. Faut-il aussi aider les blogueurs, comme le demandent certains ? Je suis pour étendre l'aide aux blogs de journalistes indépendants. La question sera alors celle des nouveaux journalistes. Sur quels critères les reconnaître sans avoir à passer par une évaluation du contenu ? Car il faut éviter que l'aide de l'Etat dépende de critères de contenus. C'est difficile, mais cela mérite d'être travaillé. Quel est le montant actuel des aides à la presse versées par l'Etat ? La réponse n'est pas simple s'agissant d'un dispositif à plusieurs volets : celui des aides directes votées chaque année par le Parlement et les aides indirectes comprenant les tarifs postaux préférentiels et des dispositifs fiscaux. En 2010, les aides directes traduisent le soutien exceptionnel découlant des Etats généraux de la presse. Il s'agit de 419,3 millions d'euros (+ 51 % ). L'aide postale s'élèvera à 270 millions, le taux de TVA préférentiel (2,1 %) représente une moins-value de 210 millions pour l'Etat. Un dispositif fiscal d'aide à l'investissement représente environ 5 millions d'euros. Soit au total environ 900 millions d'euros. Comment ces aides se justifient-elles dans l'histoire ? Elles tirent leur origine de la volonté des pouvoirs publics de défendre le pluralisme de la presse d'information. L'architecture du système actuel remonte à la Libération, même si des aides telles que l'aide postale sont très anciennes. Elles doivent permettre à une presse d'opinion d'être disponible facilement et à des coûts accessibles. Peut-on parler d'une presse sous perfusion ? Pourrait-elle survivre sans ces aides ? Les quotidiens, certainement pas. Nombre d'entre eux disparaîtraient instantanément si ces aides devaient disparaître. Pourquoi les patrons de presse refusent-ils souvent de rendre public le montant des aides ? La plupart des chiffres sont publics. Peut-être n'est-il pas simple, pour des dirigeants d'entreprise, dont certains vantent les vertus du libéralisme le plus pur, de reconnaître les aides dont ils profitent... La presse est-elle plus sous perfusion aujourd'hui que jadis ? Les dispositions découlant des Etats généraux n'ont pas beaucoup d'équivalent dans l'histoire, tout comme l'ampleur de la mutation à laquelle la presse doit faire face. Le gouvernement est dans son rôle en évitant qu'une part substantielle de la presse d'information politique s'effondre. Les aides signifient-elles une perte d'indépendance ? Elles sont fondées sur des critères techniques et non de contenu. Le gros défaut du système a sans doute été de ne pas avoir suffisamment incité les entreprises de presse à des évolutions éditoriales, techniques et commerciales dans les années 1970-1980. Nous payons cela au prix fort aujourd'hui. Propos recueillis par Xavier Ternisien
02/01/2010
actualite-medias
https://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2010/01/02/jean-marie-charon-partout-un-probleme-se-pose-pour-financer-une-information-de-qualite_1286729_3236.html
Les Pays-Bas, champions de la batellerie
Avec 35 % des marchandises qui entrent et sortent du pays via les voies navigables, les Pays-Bas sont les champions européens du transport par eau.
Avec 35 % des marchandises qui entrent et sortent du pays via les voies navigables, les Pays-Bas démontrent qu'ils restent les champions européens du transport par eau. Avec leurs voisins proches, deux tiers du transport s'opèrent par le réseau fluvial. Le royaume, qui a dompté l'eau pour assurer sa survie, est le territoire idéal pour ce mode d'acheminement. Il compte trois fleuves (Rhin, Meuse, Escaut), de nombreuses rivières et 36 canaux construits soit pour améliorer l'accès aux ports, soit pour relier entre eux les principaux cours d'eau. Mais il dispose également de 3 750 kilomètres de passes et de chenaux et de 450 kilomètres de voies navigables dans la mer des Wadden, qui s'étend de la mer du Nord au Danemark en passant par une zone d'estuaires allemande, et sur l'Ijsselmeer, un grand lac d'eau douce séparé des Wadden par une digue, l'Afsluitdijk. Cette situation a permis le développement d'une flotte fluviale de quelque 6 500 bateaux sur les 13 500 que compte l'Europe du Nord-Ouest. En comparaison, l'Allemagne possède 3 700 bateaux et la France 1 700 environ. Rotterdam, port le plus fréquenté jusqu'en 1986, moment où il a été supplanté par Singapour - détrôné par Shanghaï en 2005 - voit accoster chaque année 130 000 péniches. TROIS À SIX FOIS MOINS DE CO 2 Dans ses projets d'extension avec, notamment, la construction d'une deuxième plaine artificielle à l'aide de centaines de millions de mètres cubes de sable, le port de Rotterdam contribue à renforcer la supériorité néerlandaise sur le trafic fluvial en Europe et va accélérer les livraisons de marchandises à 100 millions de consommateurs. Soucieuses d'assurer "des choix responsables pour une croissance durable", les autorités néerlandaises rappellent que, par unité transportée, un bateau émet de trois à six fois moins de CO ² qu'un camion. Elles entendent désormais développer une méthode du "80-20", élaborée par deux professeurs de l'université technique d'Eindhoven. La démarche vise à réduire au maximum le recours aux camions et à développer les voies alternatives, la navigation fluviale et le cabotage, si possible en partenariat avec les Etats voisins. Les responsables néerlandais des transports estiment qu'à l'heure actuelle moins d'un quart de la capacité du Rhin est exploité, même si ce fleuve concentre des flux de marchandises comme aucun autre au monde : plus de 70 % de la navigation fluviale européenne passe par lui.
02/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/02/les-pays-bas-champions-de-la-batellerie_1286704_3244.html
Le canal Seine-Nord, clé de la renaissance du transport fluvial
La voie d'eau devrait entrer en service en 2015. Mais ce mode de transport écologique reste peu développé.
Le canal Seine-Nord Europe (SNE), qui permet de relier les voies fluviales françaises au réseau européen, devrait finalement voir le jour en 2015. Ce tronçon de 106 km, reliant la Seine à l'Escaut, pourrait éviter de mettre sur les routes 500 000 camions par an. Le canal Rhin-Rhône avait été abandonné en 1997 par le gouvernement Jospin : trop d'écluses, pas assez de financements, trop d'oppositions locales. Seine-Nord ne devrait pas connaître le même sort : l'appel à la concurrence a d'ores et déjà été lancé pour sélectionner un concessionnaire privé susceptible de financer la moitié du projet, d'un coût total de 4,2 milliards d'euros, tandis que l'Etat (900 millions), les collectivités locales (900 millions) et l'Europe (330 millions) réunissent l'autre moitié. Et les archéologues ont entamé les opérations de diagnostic préventif sur le parcours. Pour autant, le fluvial reste considéré comme le "parent pauvre" des modes de transport français. Il a certes augmenté de 30 % en dix ans (1997-2007) - mais il ne représente toujours que 3 % des modes de transport. Le livre blanc de la Commission européenne de 2001 le qualifiait de "sous-exploité" tout en en faisant un "élément clé" de l'intermodalité (utilisation de plusieurs modes de transport). Plus récemment, le Grenelle de l'environnement a relancé le débat, en préconisant un report ambitieux de la route vers le fleuve de 25 % à l'horizon 2020. En février 2009, le président de la République avait déclaré donner une "priorité pour le fluvial". Début novembre, les enjeux étaient rappelés lors d'un colloque organisé à Paris par Voies navigables de France (VNF), l'établissement public chargé de l'exploitation du domaine public fluvial national, et Entreprendre pour le fluvial (EPF), association créée en 2007 à son initiative pour relancer cette filière de transport de fret. Pour Christian Parent, président d'EPF, "le fleuve n'est pas saturé. Nous avons des réserves de capacités importantes en France et l'intérêt est majeur pour l'environnement". Le fluvial présente en effet des avantages tant écologiques (moins de consommation de carburant, moins de bruit, etc.) qu'économiques (coût de transport moindre, pas de retards dus aux embouteillages...). Chez Monoprix, on l'a bien compris. Selon Catherine Rivoallon, chef du département international de l'enseigne de distribution, le transport fluvial est un "axe stratégique de développement". Actuellement, 58 % du transport de marchandises pour l'enseigne se fait par bateau. Soit une économie de 4 % sur la facture transport. Pour convaincre d'autres acteurs économiques, VNF a mis au point un "écocalculateur des voies d'eau", qui permet de comparer les opérations fluviales et routières. C'est le premier du genre à intégrer les coûts externes (bruit, insécurité...). Toutefois, prévient Gérard Allard, de France Nature Environnement (FNE), il faudrait que l'écocalculateur soit validé par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) pour le rendre plus crédible. Mais c'est la question du financement qui est fondamentale. Si Alain Gest, président de VNF et député UMP de la Somme, pense que le canal SNE "s'inscrit dans l'histoire naturelle de l'intermodalité", Michel Rocard, ancien maire de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), capitale nationale de la batellerie, et créateur de VNF, rappelle que le canal SNE a "mauvaise réputation" auprès d'associations environnementales et que son financement "n'est pas bouclé". S'il est indéniable que le fluvial doit se développer, M. Allard confie qu'il "faut mener une politique des transports parallèles", et donc cohérente, pour que le projet soit durable. Par exemple, éviter de construire une nouvelle autoroute ou d'autoriser la circulation de "maxi-camions". Il s'agira aussi sans doute de mener de nouveau une réflexion sur le projet de paiement de la taxe carbone par les bateliers. En matière de financement, il faut mettre en place des facilités bancaires : allonger les durées de prêt pour les futurs transporteurs, par exemple. C'est dans ce cadre que "Fluvial initiative", un fonds national lancé par EPF et VNF en collaboration avec les investisseurs en juin 2009, a déjà financé quinze projets pour un total de 600 000 euros engagés. Les infrastructures et la flotte nationale doivent suivre. Puisque "le port est à la voie d'eau ce que la gare est au ferroviaire, les infrastructures doivent être d'une capacité suffisante et bien situées", estime Jean-François Dalaise, président du conseil d'administration du Port autonome de Paris. Quant à la flotte française, elle est "quatre fois moins productive et compétitive que la flotte fluviale européenne", affirme M. Dalaise. Il faut donc l'étendre et la moderniser, afin d'être capable de transporter plus en un même trajet. Si actuellement 65 % de la production neuve de bateaux vient des Pays-Bas, Christophe Michel, du groupe Touax, société spécialisée dans le transport de marchandises, pense que la France a "le talent pour construire", mais qu'elle ne l'exploite pas. Selon une étude pilotée par EPF et réalisée par Eurotrans, 200 entreprises devraient donc être créées pour parvenir aux objectifs de 2020. Carole Deflandre
02/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/02/le-canal-seine-nord-cle-de-la-renaissance-du-transport-fluvial_1286701_3244.html
Le groupe France Télévisions change de statut
France 3, la chaîne la plus touchée par la réforme de l'audiovisuel public, devra réorganiser son réseau régional.
C'est le deuxième acte pour la réforme de France Télévisions. Après la suppression des écrans publicitaires dès 20 heures appliquée au début de l'année 2009, le groupe public (France 2, France 3, France 4, France 5 et RFO), se transforme, le 4 janvier, en entreprise commune avec l'intégration dans sa holding d'une quarantaine de ses filiales. Ce changement de statut, qui a nécessité plusieurs mois de négociations houleuses avec les organisations syndicales, est dicté par la nouvelle loi sur l'audiovisuel public, votée par le Parlement le 9 mars 2009. Toute cette réorganisation devra être bouclée pour le 7 juin, date butoir légale pour la fin des négociations. La partie la plus visible de cet immense iceberg audiovisuel concerne France 3, qui devra réorganiser son réseau régional en regroupant les 24 régions actuelles en 4 "pôles de gouvernance" et en créant 24 Web-télévisions. Ce qui inquiète les salariés des bureaux régionaux. Une forme de résistance s'organise d'ailleurs avec l'aide de certains élus de tous bords politiques. D'autres changements importants interviennent. Ainsi, les différents responsables des unités des chaînes (fictions, documentaires, divertissements...) disparaissent pour laisser place à des coordinateurs. Ces derniers seront chargés de répartir les projets entre les chaîne, tout en préservant leurs identités propres. "Avant, lorsqu'un projet était refusé sur France 2, le producteur le présentait sur France 3, France 4 ou France 5. Désormais ce ne sera plus possible", explique-t-on à la direction de France Télévisions, qui se défend pour autant de mettre en place un "guichet unique" maintes fois dénoncé par la profession. Les 11 000 salariés du groupe public devraient être avertis par lettre du changement de statut de l'entreprise qui, selon la direction, est cadré par la loi et par le code du travail. Néanmoins, beaucoup de salariés craignent de brutales modifications de leurs affectations avec la mutualisation des moyens - notamment pour l'information - et le regroupement de plusieurs services. Un plan de départs volontaires, qui pourrait concerner près de 900 salariés de France Télévisions, a déjà été ouvert. "Nous allons nous battre pour préserver deux rédactions nationales avec leurs identités éditoriales", insiste Marc Chauvelot, délégué CGT des techniciens, en craignant la mise en place d'un "dézingage social". Dans le cadre d'un "accord de méthodologie" signé avec les syndicats, la direction de France Télévisions a informé régulièrement les comités d'entreprise (CE) ainsi que les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de chaque société, et a tenu douze comités centraux d'entreprises (CCE) pour faire aboutir le projet. Les syndicats, aidés par un cabinet d'experts, ont réalisé une synthèse des propositions de la direction regroupées dans un document de 57 pages, afin que chaque CE puisse les décrypter et se positionner pour donner son avis consultatif. Finalement, le 18 décembre 2009, sur fond de divisions syndicales, le CCE de France Télévisions a émis un avis négatif sur cette réorganisation du groupe public en entreprise commune. Qu'il soit positif ou négatif, un "avis rendu" valide néanmoins automatiquement la consultation, ce qui a entraîné une division syndicale. Avec dix élus, la CGT (majoritaire) a voté contre, alors que les neuf autres élus syndicaux (SNJ, CFDT, CFE-CGC et Sud) ont décidé de ne pas prendre part au vote, estimant "ne pas avoir été suffisamment informés" sur le projet. "Il risque d'y avoir des contentieux un peu partout, car de nombreux comités d'entreprise, de France 2 et de France 3, ont refusé de rendre un avis", affirme Carole Petit, déléguée du SNJ, qui n'exclut pas des "suites judiciaires". Pour justifier le vote négatif de son syndicat, Jean-François Téaldi, délégué CGT, estime que la réorganisation de France Télévisions "se fait sur le dos de France 3 et des régions". Selon lui, "ce vote n'est pas un chèque en blanc pour la direction de France Télévisions. Nous allons mobiliser les salariés dès la rentrée, et mettre l'enjeu public de France 3 au centre de la campagne pour les élections régionales". Patrick de Carolis, PDG de France Télévisions, s'est félicité, lui, "de la bonne qualité du dialogue social". Sur le plan financier, le groupe public a annoncé, lors d'un conseil d'administration tenu mi-décembre 2009, un déficit budgétaire deux fois moins important que prévu (à - 44,3 millions d'euros, contre - 98,9). Il a décidé que les priorités budgétaires pour 2010 seront axées autour du financement des oeuvres de création audiovisuelle et le lancement de la télévision numérique terrestre Outremer, ainsi que celui des Web-télévisions régionales. Le plan d'affaires, volet financier du contrat d'objectifs et de moyens 2009-2012 signé avec l'Etat, prévoit un équilibre budgétaire opérationnel en 2011 et un équilibre net en 2012. M. de Carolis, dont le mandat à la tête de France Télévisions s'achève le 25 août 2010, sera-t-il renouvelé à son poste pour profiter de ces bons résultats ? Pas sûr. La nomination du PDG de la holding publique, troisième acte de la loi sur l'audiovisuel public, appartient désormais au président de la République, Nicolas Sarkozy, qui devrait arrêter son choix après les élections régionales de mars. Dans un entretien publié mi-décembre par l'hebdomadaire Stratégies, Frédéric Mitterrand, ministre de la culture, a d'ores et déjà apporté son soutien à M. de Carolis, en déclarant qu'il "avait de sérieux atouts et demeurait une option". Daniel Psenny
02/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/02/le-groupe-france-televisions-change-de-statut_1286726_3234.html
La relaxe des employés de Blackwater suscite la colère des autorités irakiennes
Bagdad veut faire appel de la décision du juge fédéral américain.
Vendredi 1er janvier, le gouvernement irakien a entamé l'année 2010 sur une note amère, en promettant d'attaquer en justice la société de sécurité américaine Blackwater, dont cinq agents, accusés d'avoir tué au moins 14 civils innocents en 2007, avaient été relaxés la veille par un juge américain. Dénonçant une décision "injuste et inacceptable", le porte-parole du gouvernement irakien, Ali Dabbagh, a demandé au ministère américain de la justice de faire appel de la décision. "Nous allons utiliser tous les moyens possibles pour poursuivre les criminels de cette compagnie", a, selon l'AFP, affirmé Ali Dabbagh, indiquant que les ministères des affaires étrangères et de la justice avaient été saisis. "J'ai été vraiment stupéfaite de la décision" du juge américain, a pour sa part déclaré la ministre irakienne des droits de l'homme, Wejdane Mikhaïl. Le 16 septembre 2007, des mercenaires de Blackwater, qui escortaient un convoi du département d'Etat américain, avaient déclenché un déluge de feu sur une place très fréquentée de Bagdad, tuant au moins 14 personnes. La société de sécurité avait invoqué la légitime défense, mais plusieurs enquêtes, dont une du FBI, avaient établi que le convoi n'avait pas été attaqué. L'incident avait incarné les excès des entreprises de sécurité et de la principale d'entre elles, Blackwater, qui, selon un rapport d'un comité de la Chambre des représentants, opérait hors de tout contrôle et sans égard pour les pertes civiles. Le gouvernement irakien avait révoqué la licence de Blackwater, depuis renommée Xe, et avait mis fin à l'immunité à l'égard de toute poursuite en Irak dont bénéficiaient ces firmes, devenues indispensables à l'armée américaine. Cinq employés de Blackwater avaient été inculpés en décembre 2008 pour homicide volontaire, tentative d'homicide et usage illégal d'une mitrailleuse contre des civils. Jeudi 31 décembre 2009, le juge fédéral Ricardo Urbina a rejeté ces accusations, au prétexte que les procureurs avaient violé les droits de la défense, en utilisant des témoignages donnés par les accusés avec la promesse qu'ils ne seraient pas retenus contre eux. Le ministère de la justice n'a pas encore dit s'il comptait faire appel. Mais les victimes ont déjà réagi avec colère. "Il n'y a pas de justice", a déclaré à Associated Press Bura Sadoun Ismael, un Irakien blessé par deux balles et des éclats. "Je m'attendais à ce que le tribunal américain soit du côté des agents de sécurité de Blackwater qui ont commis un massacre", a-t-il ajouté. "Ne sommes-nous pas humains ?", s'est demandé, dans le New York Times Abdul Wahab Adul Khader, un employé de banque blessé à la main. "Pourquoi ont-ils le droit de tuer ? Notre sang ne vaut-il rien ? " Ali Khalaf, un policier qui avait récupéré à la pelle les restes calcinés de victimes dans leurs voitures, s'est interrogé : "Si cela était arrivé à des Américains, quel aurait été le résultat ?" Blackwater, alias Xe, n'est toutefois pas hors d'affaire. L'entreprise fait encore l'objet de poursuites en Virginie lancées par plusieurs Irakiens qui l'accusent d'homicide et de mauvais traitements. Selon le New York Times, un grand jury de Caroline du Nord enquête aussi sur l'entreprise, qui est par ailleurs accusée de trafic d'armes et de corruption de responsables irakiens. Philippe Bolopion et Philippe Bolopion
02/01/2010
proche-orient
https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/01/02/la-relaxe-des-employes-de-blackwater-suscite-la-colere-des-autorites-irakiennes_1286707_3218.html
Pakistan : attentat-suicide dans l'ouest du pays
Les talibans, pressés par l'armée pakistanaise, sont suspectés d'être à l'origine de l'attaque qui a fait plus de 90 morts.
Le sanctuaire des talibans pakistanais et de leurs alliés d'Al-Qaida, situé dans les zones tribales frontalières avec l'Afghanistan, au nord-ouest du Pakistan, est-il en train de se réduire ou n'a-t-il, au contraire, jamais été aussi fort ? La récente décision d'Islamabad, sous forte pression américaine, de s'y attaquer directement en envoyant l'armée dans cette région semi-autonome a, en tout cas, déclenché une violence sans prédécent. Plus de 90 personnes ont perdu la vie, vendredi 1er janvier, dans une attaque suicide menée dans le village de Shah Hasan Khel, du district de Bannu, voisin de l'agence tribale du Nord-Waziristan. Plus de 60 blessés étaient encore, samedi, dans un état critique et des personnes se trouvaient toujours sous les décombres de maisons qui se sont écroulées lors de l'explosion. Le nombre de morts pourrait encore s'alourdir. C'est l'un des attentats les plus meurtriers commis récemment au Pakistan. L'essentiel des victimes se compte parmi les trois cents spectateurs qui assistaient à un match de volley-ball. Selon le témoignage du chef de la police du district, Mohammad Ayoub Khan, le kamikaze a conduit son 4×4 noir au centre de l'aire de jeu avant de faire sauter une charge estimée à 250 kg d'explosifs. L'absence de moyens de secours et de personnels soignants dans cette région pauvre explique la lourdeur du bilan. Les habitants tentaient, la nuit tombée, de venir au secours des personnes blessées en éclairant les lieux avec des phares de voiture. Les familles cherchaient les corps de leurs parents, dont des femmes et des enfants. On dénombre également, parmi les personnes décédées, des membres des forces de sécurité, police des frontières et paramilitaires, qui assistaient au match. Des témoins ont assuré qu'un autre 4×4 suspect était présent sur les lieux avant de prendre la fuite. Selon les premiers éléments, cette sanglante attaque visait également les participants à une réunion d'un comité local antitalibans qui se tenait dans la mosquée située juste à côté du terrain de volley-ball. Ce "comité de paix" avait été formé il y a trois mois par des chefs tribaux locaux à l'instigation des autorités militaires d'Islamabad pour interdire l'accès du village et de ses environs aux talibans qui venaient tout juste d'en être chassés par l'armée pakistanaise. Depuis, selon les membres de ce comité, qui revendiquait plusieurs centaines de combattants prêts à faire le coup de feu pour défendre leur district, les talibans de Miranshah, au Nord-Waziristan, avaient multiplié les menaces à leur encontre de leur village. CHEFS LOCAUX ASSASSINÉS "De tels actes terroristes ne peuvent affaiblir la détermination du gouvernement à combattre la menace terroriste jusqu'à son élimination totale", a déclaré, vendredi, le premier ministre pakistanais, Yousouf Raza Gilani. L'opposition violente entre des chefs tribaux et le Mouvement des talibans du Pakistan (TTP) n'est pas nouvelle. En sept ans, depuis leur défaite à Kaboul, les talibans afghans et pakistanais alliés au réseau d'Al-Qaida ont fait leur ces zones tribales pakistanaises en tuant nombre de chefs locaux. Entre 2006 et 2009, près de 150 chefs de village ont ainsi été assassinés pour s'être opposés à leur emprise. Leurs corps sont souvent mutilés, voire décapités et exposés en public avec des pancartes mentionnant leur statut de "traîtres" ou "d'espions à la solde des Etats-Unis" pour que la peur s'installe dans les populations. Enfin, cette attaque contre le village de Shah Hassan Khel illustre peut-être les limites de l'offensive conduite, depuis octobre 2009, par l'armée pakistanaise contre le sanctuaire des "ennemis de l'intérieur" comme les qualifie désormais Islamabad, après avoir par le passé alterné les phases de négociation et de répression avec le TTP. Les communiqués triomphants des autorités militaires pakistanaises se sont succédé ces dernières semaines pour attester des succès obtenus contre les talibans. Faute de source indépendante, aucune vérification n'a pu, à ce jour, être réalisée. Selon les membres du "comité antitalibans" du village de Shah Hassan Khel, les talibans de cette zone n'avaient pas été tués mais avaient simplement fui vers Miranshah face aux hélicoptères de l'armée pakistanaise. Si leur sanctuaire s'est réduit, les insurgés talibans ont montré, par cette attaque meurtrière, que leur marge de manoeuvre et leur force d'action restaient intactes. Jacques Follorou
02/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/02/pakistan-attentat-suicide-dans-l-ouest-du-pays_1286706_3216.html
"En Italie, le témoignage de Pap Khouma, ""Black Italian"", lance un débat sur le racisme"
Naturalisé depuis 15 ans, l'écrivain raconte la méfiance de ses concitoyens.
"Je suis italien et j'ai la peau noire. Un "Black Italian", comme je me le suis entendu dire au contrôle des passeports de l'aéroport de Boston par deux Afro-Américaines de la sécurité. Mais avez-vous une idée de ce que cela signifie d'être italien et d'avoir la peau noire aujourd'hui en Italie ?" Pap Khouma, sénégalais d'origine, italien depuis quinze ans, libraire et écrivain, a su trouver les mots. Le récit de sa "vie à obstacles", publié dans le quotidien la Repubblica, a lancé le débat sur le racisme en Italie. Auteur de deux ouvrages, il a simplement raconté sa vie de tous les jours. Lorsqu'il s'est présenté dans un bureau de la mairie pour un certificat, on s'est arrêté à sa peau noire. "L'employée n'a même pas regardé la carte d'identité que je lui montrais et m'a demandé mon permis de séjour. Quand je lui ai dit que je n'en avais pas mais qu'il suffisait de lire ce qui était écrit sur la carte, "italien", elle est restée interloquée et a demandé de l'aide à deux collègues. Pour les trois, c'était, apparemment, un cas hors du commun." Lorsqu'il a emménagé dans son immeuble, son voisin l'a pris pour un vendeur à la sauvette et a voulu le mettre à la porte. Et les passants sont à deux doigts d'alerter la police lorsqu'il ouvre banalement la portière de sa voiture. Dans le tram, raconte-t-il, il se prépare chaque fois à être humilié. Mille petits gestes empreints de préjugés et de refus de l'autre. "Et le fait de savoir que la personne noire ou aux yeux bridés qu'ils ont devant eux est italienne n'arrange pas les choses. Au contraire. Cela pourrait être perçu comme une sorte de circonstance aggravante, une faute. 'Non seulement tu es noir mais en plus tu prétends être italien !'", lâche-t-il en riant. Sa lettre a délié les langues. D'autres témoignages accablants de "nouveaux" Italiens ont suivi. Selon le rapport annuel de Caritas, les immigrés en Italie sont aujourd'hui plus de 4 300 000, soit 7,2 % de la population. Beaucoup deviennent italiens au prix d'une longue procédure : 40 000 rien qu'en 2008, soit quatre fois plus qu'en 2000. Mais ils restent étrangers pour beaucoup de leurs concitoyens. Ministre pour l'égalité des chances, Mara Carfagna s'est dite choquée et a exhorté les victimes d'actes de racisme à les dénoncer. Le Bureau national contre les discriminations raciales (UNAR) vient d'ailleurs d'être renforcé. Un numéro vert est disponible. Jamil Ajouz, un "médiateur culturel" libanais influent du bureau, explique que, parmi les dizaines de coups de fil quotidiens, les cas les plus graves sont orientés vers une assistance juridique. "Beaucoup d'autres ont surtout besoin d'un soutien simplement moral. Comme c'est souvent le cas avec ces bars où on ne veut pas te servir parce que tu es noir ou que tu as les cheveux frisés ou bien où on te sert le café dans un verre en plastique", explique-t-il. Les Italiens ne semblent pas encore prêts à accepter ces citoyens venus d'ailleurs, disent les experts. Les normes existent, mais il faut un effort supplémentaire, surtout de la part des politiques et des représentants des médias. Mais pour le sociologue Emilio Reyneri, de l'université de Milan, les uns et les autres ne jouent pas toujours leur rôle. Du coup, dans la société, au contraire, "c'est le message négatif envers les immigrés qui passe ; que ce soit pour le comportement criminel des étrangers ou pour leur emploi au bas de l'échelle sociale. Au lieu de faire comprendre que l'immigration n'est pas un problème, que les immigrés ne finiront pas par partir, un jour, comme certains le pensent, les hommes politiques jettent de l'huile sur le feu". Le problème, explique le professeur, c'est qu'ailleurs en Europe, il n'existe pas un parti comme la Ligue du Nord, farouchement anti-immigrés et incontournable dans la coalition gouvernementale. Pap Khouma, ce jour-là, est venu rencontrer son éditeur. Celui-ci voit du bon dans le débat en cours et pense le moment venu de lui confier un livre-entretien avec Mario Balotelli. Cet Italien d'origine ghanéenne est l'un des plus doués parmi les jeunes footballeurs du championnat, mais dans les stades, il est accueilli aux cris d'"il n'y pas de nègres italiens !". Pour beaucoup, une seule chose pourra faire taire les racistes : que Mario Balotelli porte le maillot de la Squadra Azzurra lors de la Coupe du monde en Afrique du Sud, au mois de juin. Salvatore Aloïse
02/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/02/en-italie-le-temoignage-de-pap-khouma-black-italian-lance-un-debat-sur-le-racisme_1286715_3214.html
Dix raisons d'être (ou non) optimistes
Cessons de présenter nos voeux à nos proches comme un rite dépourvu de signification. Il y a au moins dix bonnes raisons d'être optimiste en ce début d'année.
M le mag Qui est vraiment Ricky Strauss, le patron de Disney+ ? Enquête Article réservé à nos abonnés De « Charlie » aux « gilets jaunes », la fierté perdue de la police nationale L'époque Article réservé à nos abonnés « Je me suis unie à lui et nous serons un couple jusqu’au bout » Les recettes du Monde La salade en trois déclinaisons : la recette de Thomas Grunberg
02/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/02/dix-raisons-d-etre-ou-non-optimistes_1286764_3232.html
Les libéraux-démocrates britanniques courtisés avant des législatives serrées
Donnés favoris face aux travaillistes, les conservateurs voient leur avance se réduire. Certes, la récession, l'usure du pouvoir et l'impopularité de l'actuel hôte du 10 Downing Street avantagent les tories. Reste que le parti de David Cameron souffre d'une cartographie électorale désavantageuse.
Des élections générales doivent se dérouler au Royaume-Uni d'ici juin. La date des élections est fixée par le premier ministre. Malgré la confortable avance de l'opposition conservatrice dans les sondages, les résultats du scrutin législatif pourraient déboucher sur une Chambre des communes sans majorité. Dans cette perspective, les libéraux-démocrates, la troisième force politique du pays, sont aujourd'hui courtisés par les deux grandes formations, le Parti conservateur, dirigé par David Cameron, et le Labour, au pouvoir depuis 1997, mené par le premier ministre, Gordon Brown. Les sondages restent favorables aux conservateurs. La dernière enquête YouGov publiée le 1er janvier par le Daily Telegraph, crédite les tories de 40 % des intentions de vote, contre 30 % aux travaillistes et 17 % aux libéraux-démocrates. Mais ces résultats ne donneraient aux favoris qu'une majorité de 22 sièges au Parlement de Westminster. Confirmée par d'autres enquêtes d'opinion, une telle issue empêcherait M. Cameron de gouverner comme il l'entend. Certes, la récession, l'usure du pouvoir et l'impopularité de l'actuel hôte du 10 Downing Street avantagent les tories. Reste que le parti de David Cameron souffre d'une cartographie électorale désavantageuse. En effet, dans le Nord, son bastion traditionnel, le Labour est en train de reprendre l'ascendant. Le profil élitiste du chef de la droite moulé au pensionnat huppé d'Eton et le souvenir des coupes claires des équipes Thatcher et Major, entre 1979 et 1997, dans les dépenses de l'Etat rebutent l'électorat des anciennes circonscriptions ouvrières. En accusant les conservateurs d'être "le parti des riches", proche des banquiers, Gordon Brown a marqué des points au nord de Birmingham. Dans le Sud, la chute des travaillistes profite essentiellement aux "lib-dem" dans les circonscriptions les plus disputées, comme le Sussex, le Hampshire ou le Dorset. S'ajoute un découpage électoral favorable au Labour. ATTACHÉS À L'ETAT-PROVIDENCE Sentant le danger, David Cameron a tendu la main, le 28 décembre 2009, au leader des centristes, Nick Clegg, en mettant en avant leurs valeurs communes : "Entre nous, il y a aujourd'hui moins de désaccords qu'autrefois." Mais plus proche du Labour que de la droite, le programme des libéraux-démocrates - ils se veulent proeuropéens, attachés à l'Etat-providence et hostiles aux baisses d'impôts - limite l'impact de cette ouverture. Pour dégager au final une majorité suffisante, les tories comptent sur deux facteurs de poids. Premièrement, les sujets de Sa Majesté gardent un mauvais souvenir des cohabitations gouvernementales. A l'exception du gouvernement d'union nationale dirigé par Winston Churchill pendant la seconde guerre mondiale, les deux expériences de cohabitation - conservateurs-Labour dans les années 1930 et pacte travailliste-libéraux entre 1974 et 1979 - ont été des échecs retentissants. Deuxièmement, le système électoral uninominal à un tour favorise les deux grands partis au détriment des petites formations. Nick Clegg a laissé entendre qu'il pourrait conclure un accord avec la formation arrivée en tête du scrutin. En échange de leur appui à un gouvernement minoritaire, les "lib-dem" exigeraient l'introduction d'une dose de proportionnelle. Marc Roche et Marc Roche
02/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/02/les-liberaux-democrates-britanniques-courtises-avant-des-legislatives-serrees_1286714_3214.html
Cybernétique de la crise
Le discours sur la récession économique masque le malaise d'une civilisation assujettie à la mondialisation marchande.
La crise - la chose et le mot - fait l'objet d'un traitement si particulier que j'aimerais en dire ici deux ou trois choses. Non pas en tant que littérateur soucieux du beau langage ; simplement, un écrivain est un homme politique, dans un monde où la langue subit des dévoiements radicaux. Le discours dominant de la crise vise, curieusement, à masquer la crise. Et si le mot de crise est employé de façon absolue, comme disent les rhéteurs, c'est que le discours de la crise prétend régner absolument sur nous. Cet emploi est trompeur, car il désigne seulement, le plus souvent, une partie de la crise globale : celle qui concerne l'économie. Et nous sommes censés admettre que l'économie est tout. Simultanément, cette notion envahit tous les domaines de la vie sociale : sports, entreprises, santé publique, etc. Ces deux pratiques se complètent : la crise, en général, c'est la crise économique ; simultanément, tout est en crise, mais de façon dispersée, si l'on peut dire. Se trouve ainsi escamotée la réalité : la crise est en fait totale et cohérente : elle concerne notre civilisation, ou plutôt cette société marchande mondialisée qui n'est pas une civilisation, mais prétend s'y substituer, un peu à la façon dont le mot de culture a fini par désigner à peu près n'importe quoi, un peu à la façon dont le Centre national de la littérature est devenu Centre national du livre (chacun ajoutera ici, dans son domaine de compétence, des exemples). Pour Littré, la crise concernait les maladies : on parlait de crise heureuse ou funeste. L'issue était la mort ou la guérison. Le discours de la crise, lui, a rompu depuis longtemps avec cette façon de dire, et de penser. Le mot désigne des mutations du système économique mondialisé : simples crises de croissance d'une économie qui étend toujours davantage son empire. La seule mesure vraiment significative du sommet de Pittsburgh, c'est le passage du G8 au G20. Le G20 représente 80 % du PIB, et deux tiers de la population mondiale. Faut-il s'en réjouir ? Les décisions seront plus difficiles à prendre (car on voit mal sur quoi le Brésil et l'Inde pourraient tomber d'accord) ; d'autre part, le G20 ne représente pas ces deux tiers de la population, mais les assujettit aux lois de l'économie : que beaucoup désirent cette servitude ne change rien à l'affaire. Quant au tiers restant, il est atteint dans sa survie même (l'Afrique, sorte de tiers-état, est représentée au G20 par un seul pays : l'Afrique du Sud). Et tous, inexorablement, subissent la pollution, les mutations économiques brutales, les mouvements spéculatifs erratiques, dans un monde où l'on annonce une reprise de la consommation comme une bonne nouvelle ; à court terme, oui, en un sens ; mais, structurellement, c'est une catastrophe. Comment un monde qui érige la concurrence en principe intangible peut-il engendrer autre chose que des crises ? Comment les dirigeants et les experts, qui tous partagent une foi entière en la rationalité de l'économie, peuvent-ils produire autre chose qu'une gestion de la crise (expression en elle-même aberrante) ? Le politique s'est dégradé, et l'on ne s'étonne pas de voir la notion élastique de gouvernance (anglicisme qui nous vient du business, et auquel je préfère le mot de cybernétique) se substituer à celle de gouvernement : la gouvernance, sorte de transitivité occupée à maintenir l'état des choses et sa scandaleuse nocivité pour le vivant, tout en feignant d'en corriger les effets, incontrôlés parce qu'incontrôlables. Le mot crise renvoie en grec à l'idée de décision : un état critique appelle des décisions, des choix véritables. Le discours de la crise singe tout cela, mais énonce que nous n'avons pas le choix, puisque c'est la crise. Combien de gouvernants souhaitent secrètement se voir imposer des mesures par le Fonds monétaire international (FMI) ? Ils peuvent alors les présenter comme une douloureuse nécessité. Cette cybernétique s'appuie sur la figure de l'expert (d'où le succès, en Italie, d'un ploutocrate parvenu à la tête du pays en se réclamant du monde de l'entreprise). Nous sommes invités à réfléchir aux "leçons de la crise", y compris dans les colonnes du Monde (dossier du 22 septembre). Mais cette expression présuppose que la crise est un phénomène rationnel ; à vrai dire, il s'agit d'écouter les leçons de la crise, et non pas d'en tirer ; chose désormais impossible dans l'économie mondialisée, comme nous le répètent les libéraux les plus cyniques. Dans ce dossier du Monde, par exemple, un seul économiste, Thomas Philippon - il est jeune, et cette franchise lui passera - note entre autres choses que "l'égalité devant la loi est bafouée par la présence d'entreprises tellement grosses que personne ne sait comment les liquider sans mettre en danger l'ensemble du système" ; mais il ne songe pas à changer le système en question. La crise est l'instrument rêvé de la cybernétique moderne : j'en prendrai deux exemples, à dessein hors de l'économie. Après les attentats du 11-Septembre, les Etats-Unis ont créé un ministère de la sécurité intérieure. Ce Department of Homeland Security est censé lutter contre le terrorisme, l'immigration, et préserver l'intégrité des frontières. Création extraordinaire, pour un pays dont l'identité s'est longtemps constituée contre un ennemi extérieur ; mais qui prolonge, en fait, la guerre froide : l'ennemi est à chercher désormais partout, à l'intérieur (affaires de Waco, d'Unabomber, d'Oklahoma City) comme à l'extérieur (attentats du World Trade Center de 1993 et de 2001). Et si l'ennemi est ubiquitaire, l'état de crise devient la norme. En témoigne un gadget merveilleux, que chacun peut consulter sur le site du ministère. C'est un baromètre de la sécurité, qui affiche des niveaux de danger : le vert indique un risque faible ; le bleu, un risque général, jusqu'au rouge (danger extrême). Je le consulte depuis des années et, à ma connaissance, il n'a jamais été au vert ; le 5 octobre, par exemple, le "niveau de menace" est "élevé". De toutes façons, le vert n'est guère rassurant, car voici ce que le ministère conseille de faire alors : "Elaborez un plan d'urgence pour votre famille ; partagez-le avec vos amis, testez-le ; créez un kit de fournitures d'urgence pour la maisonnée ; informez-vous en vous procurant la brochure." Se préparer, c'est le bon sens : préparez-vous maintenant "sur le site www.ready.gov ; envisagez de prendre des cours de premiers secours auprès de la Croix-Rouge américaine, etc.". Voilà donc une crise de sécurité qui dure depuis sept ans, dont on ne voit pas la fin, et dont il est évident que le ministère n'a pas intérêt à voir la fin, puisqu'elle serait aussi la sienne. Mais en quoi consiste, dans les faits, une gestion d'une crise ? Prenons l'exemple du récent "scandale" de l'écurie Renault en F1. Voilà un constructeur automobile pris en flagrant délit de tricherie caractérisée. Les experts prévoient des sanctions sévères. Cependant, la Fédération internationale ne peut guère renvoyer des circuits une entreprise qui contribue autant à sa prospérité que Renault (ce qui frappe dans cette crise-là, comme dans la crise économique, c'est le degré d'intrication des acteurs, et la dépendance des instances censées réguler avec ce qu'elles sont censées réguler). On propose alors au public un bouc émissaire : le directeur de l'écurie, Flavio Briatore, est exclu à vie par la Fédération (la discussion sur la culpabilité réelle de cet homme équivalant ici, en inutilité, aux polémiques sur les bonus des traders, rouages sans importance du système). Un Italien tricheur, avec la gueule de l'emploi : quelle aubaine pour tout le monde, et par exemple pour L'Equipe, journal spécialisé dans l'indignation vertueuse ! Puis le verdict tombe : "Le Conseil mondial du sport automobile a décidé de suspendre la disqualification de Renault F1 jusqu'à la fin de 2011." Renault doit donc veiller à ne pas tricher avant la fin de la prochaine saison... Il n'est pas certain que cette gestion de crise fonctionne tout à fait bien : certains commanditaires de l'écurie Renault renâclent, semble-t-il, à continuer à associer leur nom à une entreprise malhonnête (car, s'il est possible que Renault ait ignoré la fraude de Briatore, c'est bien ce créateur d'automobiles qui a bénéficié de la tricherie et du titre afférent de champion du monde). Cette idéologie de la crise est un symptôme parmi d'autres d'une crise de la notion même de civilisation. La solution la moins pessimiste serait que le système connaisse, non pas une crise de plus, mais un effondrement. Nous en sommes là, entre désespoir et rage. Quand je dis nous, c'est une façon de parler ; car la ploutocratie mondialisée, elle, est assurée pour l'instant d'une quasi-immunité. On apprend par exemple que le jour de la faillite de Lehman Brothers, des recruteurs sont venus s'installer dans le restaurant d'à côté pour réembaucher ses cadres ; les employés des usines délocalisées, eux, reçoivent une lettre leur offrant un emploi à l'autre bout de la Terre, et pour un salaire de misère. Pour la ploutocratie, la crise peut être douloureuse, mais elle est passagère ; pour les autres, c'est-à-dire pour quasiment toute la population mondiale, c'est un mode d'assujettissement permanent et une catastrophe qui continue de s'étendre. Stéphane Audeguy
02/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/02/cybernetique-de-la-crise_1286737_3232.html
"Michel Wieviorka : ""La société attend des individus qui savent réfléchir"""
Michel Wieviorka, directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) et président de l'Association internationale de sociologie, analyse la place qu'occupent dans le paysage universitaire les sciences humaines et sociales.
Dans une économie de la connaissance pilotée par la rentabilité immédiate, les sciences humaines et sociales (SHS) s'estiment mal-aimées. Alors que commencent ce mois-ci les inscriptions des lycéens dans l'enseignement supérieur, directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) et président de l'Association internationale de sociologie, Michel Wieviorka, analyse la place qu'occupent dans le paysage universitaire ces disciplines qui ont été très en pointe dans le mouvement d'opposition aux réformes universitaires du printemps 2009, et qui ont, à ses yeux, leur "utilité". Le passage de l'histoire-géographie au statut de matière facultative en terminale S est-il, à vos yeux, un signe du déclassement des humanités ? Le ministre de l'éducation pensait avoir pris toutes les garanties avant de faire ce choix. Apparemment, il s'est trompé. Cela va-t-il s'arrêter à l'histoire ? Le problème de la place relative des disciplines est posé sur un mode dramatique. La pétition des historiens a attiré l'attention sur ces enjeux, c'est bien, mais elle les a radicalisés, manquant de nuance. Les passions s'emballent, car en France, l'histoire est avant tout un récit national qui se sent menacé. Elle est au coeur de cette identité nationale qu'Eric Besson a jugé bon de mettre en débat, avec les résultats calamiteux que l'on observe. Quand le pouvoir ne met pas en scène une vision héroïque de l'Histoire, à fort tropisme nationaliste et néocolonialiste, il fait flotter un parfum populiste, anti-intellectualiste qui n'arrange pas les choses. Si l'on doit ouvrir un débat sur l'histoire, alors, parlons de son contenu, des changements dans ses conceptions, de sa place dans la société, de sa signification pour la nation, et pas seulement du nombre d'heures qui lui sont consacrées ici ou là. Pourquoi parle-t-on d'un déclin des sciences humaines et sociales (SHS) ? Le déclin apparaît si l'on considère la place de la recherche française à l'échelle de la planète : notre pays a cessé d'être un phare. Dans les années 1960 et 1970, chercheurs et étudiants venaient du monde entier pour assister aux séminaires de Jacques Lacan, Louis Althusser, Pierre Bourdieu, Alain Touraine, Roland Barthes, Michel Foucault, Emmanuel Le Roy-Ladurie, Jacques Le Goff, etc. Aujourd'hui, mon expérience de président de l'Association internationale de sociologie, ou à la présidence d'un panel de l'Union européenne qui attribue chaque année 1,5 million d'euros de bourses de recherche, m'amène à affirmer, malheureusement, que notre présence s'amenuise dans les congrès, les grandes institutions internationales, les programmes internationaux, mais aussi dans les références utilisées par les chercheurs. Les SHS suscitent moins de vocations... Nous avons du mal à cerner les métiers, les compétences, les débouchés qui correspondent à ces disciplines, d'où le sentiment de bien des étudiants et enseignants-chercheurs qu'elles ne sont pas valorisées comme elles devraient l'être. Ajoutez la crise de nos institutions de recherche, les critiques que suscite l'évaluation, et le fait qu'il se constitue un sous-prolétariat de jeunes docteurs : ce n'est pas un hasard si les SHS étaient au coeur du mouvement de contestation en 2009. Faut-il dissuader les étudiants d'entrer dans cette filière pour éviter le chômage ? Si le seul horizon est la recherche, les perspectives sont minces. Beaucoup se retrouvent avec un doctorat, à courir de petits boulots en petits contrats. Or on a besoin de personnes formées en sciences sociales partout ! Dans les syndicats, les ONG, les associations, le travail social, le système hospitalier, l'armée, l'édition, les médias, la publicité, etc. Je préfère dire aux jeunes : choisissez les études qui vous intéressent ! Qui sait ce que sera le marché de l'emploi dans cinq, dix ou vingt ans ? Les besoins du marché sont fluctuants. Choisir des études par goût est un moteur à conserver. La société attend moins des compétences fixes que des individus qui savent réfléchir. Ne dit-on pas que chacun risque de changer plusieurs fois de métier ? Plus que d'avoir un seul acquis, l'important est d'avoir appris à acquérir. Quant aux entreprises, elles gagneraient à recourir à nos disciplines. Prenez France Télécom, qui fait déjà appel aux sciences sociales sur tout ce qui touche aux réseaux ou à la communication : d'autres chercheurs auraient pu l'aider à comprendre plus tôt les tensions et les drames liés à son fonctionnement et à son mode d'organisation. Mais il y a aussi dans vos disciplines ceux qui s'insurgent contre l'utilitarisme... Ils ne sont pas les seuls. Il y a, schématiquement, trois conceptions de notre place dans la vie de la Cité. Les uns se posent en experts. Ils sont au service d'un chef d'entreprise, d'un acteur politique, d'un syndicat, d'une ONG... D'autres s'y refusent et se veulent exclusivement critiques, hypercritiques - une position radicale éloignée de toute attitude constructive, et dont les médias sont friands : ils aiment le soupçon, la dénonciation. Ces deux positionnements regroupent la majorité des points de vue. Mais une troisième conception, moins répandue et dans laquelle je me reconnais, plaide pour le fait que le chercheur produit des connaissances qui ont toujours une dimension critique, mais dont il admet qu'elles puissent être utiles. Valérie Pécresse a installé, en septembre 2009, un Conseil pour le développement des humanités et des sciences sociales. Certains ont parlé d'un asservissement de ces disciplines... J'ai fait partie de deux précédents conseils de ce genre, mis en place par Claude Allègre, puis par Roger-Gérard Schwartzenberg. Le vrai problème n'est pas le risque d'asservissement, mais celui de s'exprimer dans le vide. Or ce n'est pas une fatalité. Quant à la ministre de la recherche - je le dis alors que je ne suis pas de son bord politique -, elle a vis-à-vis de nos disciplines une attitude constructive. Produire des connaissances "utiles" n'équivaut-il pas à perdre son indépendance scientifique ? L'utilité, on ne sait pas d'avance où elle se trouve ! Mon ami Olivier Roy, quand nous étions jeunes chercheurs, disparaissait parfois pour plusieurs mois en Afghanistan, sac au dos, aux frais de la princesse - en l'occurrence le CNRS. Nous sommes bien contents aujourd'hui d'avoir cet éminent spécialiste de ce pays et de l'islam dans la région. Alors l'utilité... Il y a une quinzaine d'années, j'ai analysé pour la RATP les problèmes d'insécurité. J'avais carte blanche, personne ne savait à quoi ma recherche aboutirait. J'ai appris plus tard qu'elle avait contribué à la création de la carte ImaginR, destinée aux jeunes. Qui s'en plaint ? Ai-je été manipulé, ai-je perdu mon indépendance, ai-je perverti la sociologie ? Propos recueillis par Luc Cédelle
02/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/02/michel-wieviorka-la-societe-attend-des-individus-qui-savent-reflechir_1286720_3224.html
Capitalisme, suite et, peut-être, fin
S'il fallait une preuve de l'impopularité de la finance, "Le Débat" la fournit au-delà de toute attente.
S'il fallait une preuve de l'impopularité de la finance, Le Débat (novembre-décembre) la fournit au-delà de toute attente. Cette revue que dirige Marcel Gauchet, intellectuel habituellement pondéré, publie cinq articles sur "l'après-crise" que d'aucuns pourraient considérer comme autant de brûlots davantage à leur place dans Alternatives économiques que chez Gallimard. Trois sont inédits - celui de l'économiste et anthropologue Paul Jorion (bien connu des lecteurs du "Monde Economie") sur la "sortie du capitalisme", celui de l'économiste Jean-Luc Gréau "pour un nouveau système bancaire", et la réflexion très intéressante mais un peu décalée de Michel Volle, spécialiste d'histoire économique, sur les conséquences de l'informatisation sur la finance et même au-delà. Deux contributions sont des traductions : un fameux article, paru au printemps dans The Atlantic, de Simon Johnson, ancien responsable du Fonds monétaire international (FMI), intitulé "Coup d'Etat en douce" et, enfin, celui de Geoff Mulgan, un proche de Tony Blair, sur "après le capitalisme ". Point commun aux cinq auteurs : nul ne croit que la crise n'était que passagère. Au contraire, pour tous, elle remet peu ou prou en cause le fonctionnement du capitalisme ou plus exactement le système que nous croyions connaître et appelions le libéralisme. L'article de Simon Johnson, comparant le sort des banquiers américains et le destin des oligarques russes ou des grandes familles thaïlandaises, victimes du passage du Fonds monétaire international dans leur pays, est ravageur. Comme lui, Paul Jorion revient sur une des caractéristiques du plan Obama de sauvetage des banques : dans tous les cas de figure, l'administration a choisi l'option la plus avantageuse à Wall Street. Les deux auteurs estiment que le système bancaire ne doit sa survie qu'à l'intervention publique et qu'il est donc, de fait, nationalisé. Mais là où Johnson y voit un choix politique, Jorion estime qu'il n'y avait pas d'alternative. De même, ce dernier analyse de manière précise la réforme du bilan comptable des banques, une modification passée inaperçue durant le G20 de Londres mais déterminante pour le retour à bonne fortune du secteur. Avec Jean-Luc Gréau, le lecteur est invité à plonger dans la boîte à outils de ce franc-tireur qui constate, à juste titre, que les banques centrales ne sont plus les prêteurs en dernier ressort des banques commerciales mais les prêteurs en premier ressort, ce qui équivaut, dit-il, à une "étatisation de fait du système de crédit". On n'est pas obligé de le suivre quand il préconise de replacer les banques centrales sous la tutelle des Etats, mais sa proposition d'interdire les opérations effectuées par les banques pour leur propre compte et sa présentation des réponses que Maurice Allais apporterait à la crise sont très stimulantes. Qu'une des têtes chercheuses de Tony Blair nous annonce, pour s'en réjouir, la fin du capitalisme confirme que l'heure est grave ! "De même que l'idée monarchique est devenue marginale, de même le capitalisme perdra de son influence sur notre société et notre culture. De maître, il deviendra valet", pronostique-t-il, s'appuyant sur les succès de Wikipédia, des logiciels libres, des coopératives... Mêlant technique et prospective, ce dossier complète celui de la revue Esprit (en novembre), davantage consacré à la macroéconomie. Ceux qui jugent ces remises en cause du capitalisme excessives se plongeront dans Sociétal (1er trimestre) de l'Institut de l'entreprise dont le sujet est : "Après la crise, une nouvelle ère du libéralisme ?" Un angle audacieux par les temps qui courent. Débats Quel après-crise ? Numéro 157 Gallimard, 192 pages, 17 € Frédéric Lemaître
02/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/02/capitalisme-suite-et-peut-etre-fin_1286736_3232.html
Bonne année, les clowns !
Le "Dakar"un bilan carbone supérieur à 20 000 tonnes de CO2. Les sports de combat très violents sont interdits, n'est-ce pas ? Ne faudrait-il pas interdire les courses de voitures ?
Le chroniqueur ne cache pas avoir du mal à fixer son esprit. Non qu'il ait abusé de bulles de champagne. Mais la suavité de la trêve hivernale, après l'avoir élevé à des considérations pachamamesques, l'incline maintenant à sourire du spectacle de ses contemporains plutôt qu'à gémir de leurs incohérences. Tenez, ce bon M. Borloo, encore en train de parler de "révolution" à propos de la taxe carbone. Eh, ministre ! Plutôt que de parler de révolution, réduis les inégalités, supprime le bouclier fiscal, discute du revenu maximal admissible, et tu verras comme ta taxe carbone sera ensuite acclamée ! Pas d'écologie sans justice ! Voici une nouvelle du 3 décembre, encore fraîche : "Nantes préside la Task Force, composée de cinq villes des cinq continents, qui a le mandat pour représenter les collectivités locales dans les négociations internationales sur le climat." Si l'on sait que Jean-Marc Ayrault, le maire (PS) de Nantes, s'obstine à tenter de créer un nouvel aéroport sur plus de 1 000 hectares de champs au nord de sa ville, on comprend que la lutte contre le changement climatique a de beaux jours devant elle. La télévision du chroniqueur est en panne depuis belle lurette, mais il est impossible d'échapper au marronnier du 1er janvier : le Dakar. En fait, le "Dakar" a lieu en Amérique latine. Une réminiscence de l'Aéropostale, sans doute. L'association Agir pour l'environnement a calculé que ce rallye aurait un bilan carbone supérieur à 20 000 tonnes de CO2. Question bête, mais alors vraiment bête : les sports de combat très violents sont interdits, n'est-ce pas ? Ne faudrait-il pas interdire les courses de voitures ? Découvert que Vincent Courtillot, climato-sceptique, nourrit une grande estime pour Fred Singer, à qui il attribue le prix Nobel en tant que membre du GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat). Las. Une enquête du site Contreinfo montre que M. Singer n'est pas membre du GIEC, mais directeur du "Science and Environnement Policy Project", qui s'est mobilisé pour nier le lien entre tabagisme passif et cancer, la dangerosité de l'amiante, celle des pesticides, le trou de la couche d'ozone. Et le changement climatique... Ai écouté les voeux de Son Excellence Nicolas Sarkozy. "Son Excellence" est un titre honorifique régi par les conventions diplomatiques, traditionnellement utilisé pour désigner les chefs d'Etat, explique Wikipédia. Tout va bien, explique Son Excellence. Qui avait déclaré le 14 décembre, à propos du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) que "le CEA deviendra le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives". Ah ? Voyons... alternatives à quoi ? Et, hmm, voyons... Comment va-t-on dire ? C E A E A ? Ça sonne comme... chihuahua, ou... ouah ouah, ouah, ou... chabadabada. Oui, C E A chabadabada, tip, tip, tip, chabadabada. Bonne année, les clowns ! Courriel : [email protected] Hervé Kempf
02/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/02/bonne-annee-les-clowns_1286696_3232.html
Des élus socialistes réinventent une sécurité de gauche
Médiation, réponse policière graduée, implication des habitants des quartiers : sur le terrain, des maires innovent.
Discrètement, une politique de sécurité spécifique à la gauche s'élabore dans des communes dirigées par des élus socialistes. Le PS, qui peinait jusqu'ici à élaborer un discours global sur cette thématique chère à la droite, entend désormais s'appuyer sur l'expertise de ses élus locaux pour construire une politique crédible. Depuis dix ans, les responsabilités des maires en matière de sécurité n'ont cessé de croître : la loi de prévention de la délinquance du 5 mars 2007 leur a donné une fonction centrale dans le domaine de la prévention. Décryptage de quatre politiques locales "de gauche". Aulnay-sous-Bois et la "riposte graduée". Cette ville de Seine-Saint-Denis avait été l'une des plus touchées lors des émeutes de l'automne 2005. Elle avait connu de brutales montées de tension en 2006 et 2007 - jusqu'à la découverte d'engins explosifs visant les policiers et les pompiers. La mairie a mis en place un dispositif de "riposte graduée". D'abord des médiateurs immergés dans les quartiers, connaissant bien les jeunes, capables d'assurer un travail de prévention de long terme. En cas de tensions, la mairie peut les faire intervenir de manière groupée. "Si on est alertés sur des risques d'incidents, par nos relais dans les cités, on peut envoyer une dizaine de médiateurs. Par leur présence physique, ils désamorcent la plupart des affrontements", explique le maire, Gérard Ségura. Si les médiateurs ne suffisent pas, c'est la police municipale qui est envoyée. Et, enfin, seulement en cas d'échec des municipaux, la police nationale. "Notre idée, c'est que la police intervienne le moins possible", souligne le maire. Pour gérer ce dispositif, une "cellule de veille" a été mise en place pour assurer la coordination entre les différents intervenants et faire remonter l'information. "C'est la meilleure façon d'anticiper les problèmes et de les traiter à la racine." En 2008, les violences urbaines ont chuté de plus de 20 %. Mais l'équilibre reste instable : depuis quelques mois, avec la crise sociale, la mairie s'inquiète de voir des nouveaux "signes de tensions" avec des "jeunes touchés par un chômage endémique". Lyon et la "prévention situationnelle". Depuis plusieurs années, la municipalité socialiste assume une politique locale de sécurité. "C'est une valeur de gauche, notamment parce que les premières victimes sont les plus fragiles", argue Jean-Louis Touraine, premier adjoint du maire, Gérard Collomb. La majorité a fortement accru les effectifs de sa police municipale (400 personnes aujourd'hui). Elle développe aussi la vidéosurveillance (220 caméras prévues d'ici à 2014) mais en l'accompagnant de la mise en place d'un "collège éthique" chargé de conseiller les élus et de répondre aux réclamations des particuliers. "C'est notre méthode pour être efficaces sans être liberticides", résume M. Touraine. De façon plus originale, la municipalité s'est engagée dans ce que les spécialistes appellent la "prévention situationnelle", c'est-à-dire l'adaptation de l'urbanisme aux problèmes de sécurité. "On travaille sur l'éclairage, sur le choix de la végétation, sur les espaces publics mais aussi sur la mixité sociale et les flux de circulation pour anticiper les problèmes d'insécurité", note l'adjoint. Aubervilliers et les "citoyens référents". Deux cents habitants venus assister au conseil municipal, un record. La réunion exceptionnelle sur la "sécurité", les "préventions" et la "tranquillité publique", organisée le 19 novembre par Jacques Salvator, maire d'Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), a attiré la foule. "Je n'ai aucun tabou à aborder ce sujet. Le droit à la sûreté est un droit constitutionnel", affirme M. Salvator, qui a ravi la mairie aux communistes en 2007. L'équipe organise, une fois par an, des réunions sur la sécurité dans chaque quartier. Des élus effectuent régulièrement des maraudes nocturnes pour aller rencontrer les jeunes qui traînent dans les espaces publics. "On se fait insulter une fois, deux fois, trois fois. Mais après, on réussit à établir un dialogue", explique le maire. Surtout, des "citoyens référents", bénévoles, dotés d'une assurance et de téléphones portables, ont été désignés dans cinq quartiers pour alerter la municipalité des faits d'incivilité et de délinquance. Leur mission est de faire remonter l'information plus rapidement pour améliorer les délais de réponse. Ils permettent aussi un meilleur accompagnement des victimes. "Rien n'est plus terrible que l'impuissance publique. Dans des villes comme les nôtres, les habitants ne supportent plus qu'on leur dise que c'est la faute d'autrui, que c'est à cause du maire, du préfet ou du ministre que rien ne change." Toulouse et l'"office de la tranquillité". Ancien commissaire de police, Jean-Pierre Havrin avait popularisé le concept de "police de proximité" mis en oeuvre par le gouvernement Jospin entre 1997 et 2002. Cette approche avait été abandonnée par Nicolas Sarkozy, lequel avait limogé M. Havrin de son poste de directeur départemental de la sécurité publique. Devenu, en 2008, adjoint au maire socialiste de Toulouse, Pierre Cohen, l'ancien commissaire porte aujourd'hui un programme de "tranquillité publique". "Notre logique d'évaluation est totalement différente de celle défendue par Sarkozy, explique M. Havrin. On ne va pas compter le nombre de PV dressés chaque jour mais mesurer l'indice de satisfaction des habitants, ce qui n'a rien à voir." La police municipale (220 agents) a été décentralisée dans cinq quartiers. Chaque équipe de dix fonctionnaires est dotée d'un téléphone portable dont le numéro a été communiqué aux habitants pour qu'ils puissent la joindre n'importe quand. En complément, la mairie a créé un "office de la tranquillité" destiné à répondre, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, aux appels des habitants, notamment lorsqu'ils sont confrontés à des incivilités. "Aujourd'hui, le 17 est saturé et nos concitoyens ont pris l'habitude de ne plus avoir de réponse à leurs demandes après 17 heures", constate l'élu. Les appels sont pris en charge par des "régulateurs" qui agissent sur le même modèle que ceux des urgences médicales : soit en décidant d'une intervention immédiate de médiateurs ou de la police municipale ; soit en proposant une intervention différée lorsque l'urgence est moins marquée. "Sur ces questions, la crédibilité ne se gagne pas dans les discours mais dans les actes du quotidien", résume M. Havrin. Luc Bronner
02/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/02/des-elus-socialistes-reinventent-une-securite-de-gauche_1286719_3224.html
Alarme sociale
Même si la reprise attendue cette année est plus forte que prévu, l'ambition annoncée de "faire reculer le chômage et l'exclusion", aussi légitime soit-elle, pourrait bien se révéler chimérique.
voeux aux Français le 31 décembre 2009, l'agenda social, à la fois copieux et à hauts risques, de 2010. Le 15 janvier, il recevra les organisations syndicales et patronales pour fixer le calendrier et éclairer ses intentions. Un exercice de pure forme ? A ce stade, M. Sarkozy semble avancer prudemment. Même si la reprise attendue cette année est plus forte que prévu, l'ambition annoncée de "faire reculer le chômage et l'exclusion", aussi légitime soit-elle, pourrait bien se révéler chimérique. La progression du nombre de demandeurs d'emploi n'est pas en voie de s'arrêter. Le taux de chômage risque d'approcher les 10 % de la population active. La précarité, l'exclusion, et même la pauvreté ne régresseront pas, loin s'en faut. Le volontarisme et l'intention de redonner "un sens au beau mot de fraternité" ne suffiront pas à faire reculer des inégalités qui se creusaient avant même le début de la crise. Alarme sociale donc. Le chef de l'Etat en semble conscient. Il est primordial pour lui, dans un contexte politique tendu avec, en mars, les élections régionales, de regagner la confiance de partenaires sociaux auxquels il a rendu, le 31 décembre, un "hommage particulier" pour avoir "fait preuve d'un grand sens des responsabilités". En d'autres termes, il lui faut éviter de connaître en 2010 la crise sociale qu'il redoutait en 2009, et à laquelle il a échappé. Depuis la loi Fillon de 2003, qui a augmenté, y compris pour les fonctionnaires, le nombre d'années de cotisations requis pour une retraite à taux plein, un rendez-vous sur ce sujet est prévu en 2010. Problème : le financement de la réforme Fillon était fondé sur un retour au plein-emploi, qui n'est plus à l'horizon. Bernard Thibault a prévenu que "l'avenir des retraites sera au coeur de l'affrontement social en 2010". Le secrétaire général de la CGT y voit "le marqueur de la volonté de résistance des salariés". Favorable à un Grenelle des retraites, François Chérèque réclame une approche "globale". Le secrétaire général de la CFDT sera un partenaire beaucoup plus exigeant qu'en 2003. Là encore, M. Sarkozy se veut prudent, parlant de "consolider notre système de retraites", et non de le remettre à plat, et d'"assurer (sa) pérennité financière". Pour mener une réforme qui touche au coeur du pacte social, il devra montrer que le dialogue n'est pas, à ses yeux, une clause de style.
02/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/02/alarme-sociale_1286693_3232.html
Réveillon 2010 : toujours autant de voitures brûlées, malgré le satisfecit gouvernemental
Le nombre de voitures incendiées au cours de la nuit du réveillon s'est élevé à 1 137. C'est seulement dix de moins que l'an dernier.
Batailles de statistiques et de communication contre faits têtus, et parfois tragiques : les questions liées à l'ordre public et à la sécurité échappent rarement à cette dialectique. Lourd sujet de préoccupation pour les responsables de l'Etat et les élus locaux, elles donnent aussi matière à un affrontement politique permanent droite contre gauche, tantôt sur les faits, tantôt sur les méthodes. Les péripéties de la rue liées au réveillon de la Saint-Sylvestre n'ont pas échappé à la règle. Et le ministère de l'intérieur a semblé gagner, du moins dans un premier temps, ce combat de la communication. Vendredi 1er janvier, il a commencé par diffuser un chiffre sur les interpellations de la nuit, 405. Tout en notant qu'"aucun incident important n'a été constaté". Toute la journée, les messages apaisants sur une "nuit calme" se sont succédé. Sur la lancée, l'UMP a diffusé un communiqué d'Eric Ciotti, secrétaire national aux questions de sécurité, pour louer "l'efficacité des forces de l'ordre". Mais vers 18 heures, un nouveau communiqué officiel a indiqué que le nombre de voitures brûlées au cours de la nuit s'élevait à 1 137. Un tout petit reflux par rapport au record de 1 147 véhicules incendiés atteint au réveillon de 2008-2009. "Globalement, nous sommes soulagés. Il n'y a pas eu d'accidents graves, et il y a une rupture de la tendance à la hausse du nombre de voitures brûlées, déclare au Monde le ministre de l'intérieur Brice Hortefeux. La baisse est même très sensible dans l'agglomération parisienne." Selon le bilan "définitif" dressé en fin de journée vendredi, 198 voitures ont été détruites à Paris, en Seine-Saint-Denis, dans le Val-de-Marne et dans les Hauts-de-Seine contre 248 l'an dernier, soit une "diminution de plus de 20 %". "Les quelques troubles à l'ordre public qui se sont produits ont été maîtrisés très rapidement", souligne le ministère qui met l'accent sur le nombre total, revu à la hausse, de personnes interpellées, 549 contre 288 lors du réveillon 2009, et celui de 481 personnes placées en garde à vue (contre 219). Ces données concernent l'ensemble du territoire, sans préciser les circonstances de ces arrestations. Seize policiers et gendarmes ont été "légèrement blessés". Et les pompiers sont beaucoup moins intervenus, à 7 553 reprises contre plus de 12 000 fois en 2009. Il n'empêche, le nombre de voitures brûlées est resté stable, malgré le déploiement d'un dispositif impressionnant : 45 000 policiers et gendarmes (contre 35 000 en 2009) dont 8 000 pour l'agglomération parisienne. Du coup, Nicolas Sarkozy, qui recevait à l'Elysée les travailleurs de la nuit de la Saint-Sylvestre à 16 heures, vendredi, s'est abstenu de tout triomphalisme. "La nuit a été assez calme, ce qui ne veut pas dire que vous n'avez pas eu beaucoup de travail", a simplement commenté le chef de l'Etat. M. Sarkozy, qui a remercié M. Hortefeux, n'a pas évoqué un nombre de voitures brûlées à la baisse comme il l'avait prévu initialement. "IL Y A DES LEÇONS À TIRER" Si les chiffres parisiens - les seuls détaillés - régressent, cela signifie que ceux de province sont en hausse. "Il y a eu diffusion", concède M. Hortefeux. Selon des chiffres fournis au Monde par des services de police, le nombre de voitures brûlées est resté stable à Strasbourg, 70, tandis que celui des interpellations a bondi à 54, dont un mineur de 11 ans. A Toulouse, 40 véhicules incendiés ont été recensés (contre 35 en 2009) et une soixantaine dans l'agglomération de Nantes. Contrairement aux craintes, peu de départements ruraux ont été touchés. Cette évolution en ciseau fait l'affaire de la nouvelle police d'agglomération parisienne, mise en place en septembre sous l'autorité du préfet de police et dont "l'efficacité" a été soulignée par MM. Sarkozy et Hortefeux. "Il y a des leçons à tirer" affirme ce dernier, qui dit avoir été frappé par le profil des incendiaires. "Ce sont des gamins parfois isolés, dit-il, comme ce délinquant mineur interpellé tout seul à Asnières avec son bidon d'essence à la main." Unité SGP Police, premier syndicat de gardiens et gradés, a réagi à partir du bilan de 1 137 véhicules incendiés, jugé "provisoire". "Depuis maintenant plusieurs années, c'est un véritable dispositif d'exception qui doit être mis en place", a affirmé son secrétaire général, Nicolas Comte. Jacques Urvoas, secrétaire national du PS à la sécurité, s'en est pris de son côté aux "communiqués de victoire" de la majorité : "10 000 fonctionnaires de plus mobilisés cette nuit, un doublement des interpellations et des gardes à vue, et simplement dix voitures incendiées en moins !" "Ce constat est profondément inquiétant." Arnaud Leparmentier et Isabelle Mandraud
02/01/2010
a-la-une
https://www.lemonde.fr/a-la-une/article/2010/01/02/reveillon-2010-toujours-autant-de-voitures-brulees-malgre-le-satisfecit-gouvernemental_1286689_3208.html
TOUT CE QUE VOUS AVEZ VOULU SAVOIR SUR JOHNNY
FRANCE BLEU RÉUSSIT À SURPRENDRE AVEC UNE SAGA CONSACRÉE À L'ARTISTE
On est persuadé de tout connaître de sa carrière et de sa vie. Pourtant, grâce au travail méticuleux de Gilles Verlant, Jean-William Thoury et Antoine de Caunes, l'auditeur de France Bleu sera surpris de faire des découvertes sur Jean-Philippe Smet, alias Johnny, au fil de l'ambitieuse saga radiophonique intitulée "L'Odyssée Johnny Hallyday". Au total, pas moins de 130 épisodes de six minutes chacun, diffusés à partir du 4 janvier et jusqu'au 2 juillet sur les 41 radios locales de France Bleu. Soit 26 semaines avec Johnny ! Le 14 mars 1960 marque la sortie du premier 45-tours (composé de quatre titres) d'un certain Johnny Hallyday, qui n'a pas encore 17 ans. Avec Laisse les filles, le débutant blond au regard magnétique fait un carton, le premier d'une très longue série. Pour fêter ses 50 ans de carrière en se démarquant des tonnes d'émissions, de livres et d'articles déjà produites, il fallait adopter une démarche originale. Gilles Verlant, bible du rock et de la chanson, auteur d'une récente et splendide anthologie "Beatles" sur le réseau France Bleu, était l'homme de la situation. 130 CHANSONS POUR 50 ANS DE CARRIÈRE Depuis la mi-octobre 2009, le journaliste travaille en compagnie de Jean-William Thoury, ancien parolier et manager du groupe Bijou, pilier de Jukebox magazine et auteur de plusieurs ouvrages de référence sur "l'idole des jeunes". "A raison d'une vingtaine de chansons par an depuis le début de sa carrière, Johnny a interprété environ un millier de titres, dont une bonne centaine de tubes. Nous avons d'abord sélectionné 160 chansons, avant d'en retenir 130", souligne Gilles Verlant, ravi de retrouver sur ce projet son vieux compagnon, l'animateur, comédien et réalisateur Antoine de Caunes. Ce dernier prête sa voix à ce projet radio, après avoir tourné avec Johnny de nombreuses émissions, dont le légendaire documentaire Johnny à Nashville, diffusé dans "Les Enfants du rock" en 1984. Produite par l'Atelier de création du Grand-Ouest, réalisée par France Bleu Mayenne, cette série, dont nous n'avons pu écouter que les cinq premiers volets, confirme l'inventivité de la bande à Verlant : dans le premier épisode, il est question du premier tube de l'artiste, mais également d'une chanson interprétée à la fois par Johnny et par Dalida ! Dans le deuxième, nous sommes en 1957, et l'on évoque une séance de cinéma dans le quartier parisien de la Trinité. Johnny y découvre Elvis Presley dans Loving You. Choc et rock. Le troisième épisode transporte l'auditeur le 14 août 1966. Sylvie Vartan vient de donner un fils à Johnny. Dans le poste, Los Bravos chantent Black Is Black, que Johnny reprendra sur la scène de l'Olympia en 1967. Dans les épisodes suivants, Jerry Lee Lewis, Larry Williams, Tony Joe White et Joe Dassin seront de la fête. Ah que oui... "L'Odyssée Johnny Hallyday" sur France Bleu, du 4 janvier au 2 juillet (du lundi au vendredi à 20 h 30). A. Ct
02/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/02/tout-ce-que-vous-avez-voulu-savoir-sur-johnny_1286880_3238.html
CONVERSATIONS AVEC JULIETTE BINOCHE
DANS "A VOIX NUE ", JÉRÔME CLÉMENT S'ENTRETIENT AVEC UNE ARTISTE VOLONTAIRE ET INSPIRÉE
La discussion est passionnante mais aurait néanmoins gagné à être réduite de moitié. Car ce qu'exprime la comédienne Juliette Binoche (qui est aussi danseuse, peintre, réalisatrice...), dans les deux premiers volets de cette conversation fleuve avec le vice-pésident d'Arte et écrivain Jérôme Clément est enthousiasmant et intense. Mais cinq rendez-vous (du lundi au vendredi), selon le principe de l'émission "A voix nue", c'est peut-être trop. On n'aura qu'à prêter une oreille bienveillante lorsque, pendant le troisième épisode de cet entretien, la comédienne livre ses considérations sur les bienfaits de la médecine chinoise et de l'homéopathie en prévention de la grippe... On se montrera plus attentif dès qu'elle reviendra à sa réflexion première sur la création et sur son travail d'artiste. C'est quand elle évoque son approche personnelle des différentes disciplines artistiques que Juliette Binoche, 45 ans, se révèle la plus étonnante. A propos de sa vocation de comédienne et de ses débuts au cinéma, elle dit ainsi : "Cela part d'un feu, d'une intensité intérieure qui chez moi s'est exprimée par trop de volonté." En se souvenant du tournage du film Je vous salue, Marie (1985), de Jean-Luc Godard, elle raconte ainsi spontanément ses difficultés à communiquer avec le réalisateur. "J'avais trop envie de bien faire, et donc je l'énervais à cause de ça" , se souvient-elle, s'exprimant avec intelligence, sans jamais minauder. Une qualité personnelle qui semble d'ailleurs la caractériser. De cette série d'émissions, on retiendra également le beau poème d'Henri Michaux, Clown, lu par la comédienne comme un point d'orgue à cette conversation. "A voix nue : Juliette Binoche", du lundi 4 au vendredi 8 janvier, de 20 heures à 20 h 30 sur France Culture. Hél. D.
02/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/02/conversations-avec-juliette-binoche_1286881_3238.html
AUTOUR DE MILES
ORANGE CINÉ NOVO 20.40 SOIRÉE SPÉCIALE UN HOMMAGE AU COMPOSITEUR ET TROMPETTISTE
En 1987, le compositeur et trompettiste Miles Davis (1926-1991) est invité à la Maison Blanche. Une dame lui demande ce qu'il a fait de si important pour mériter cet honneur. Surtout pour un Nègre : "Rien, j'ai simplement changé le cours de la musique à cinq ou six reprises." Musicien afro-américain - il n'aimait pas le mot raciste de "jazz" -, Miles Davis tient dans le siècle un rang égal à celui d'Einstein, Picasso, Faulkner ou Louis Armstrong. Ou alors, parlons d'autre chose. Fut-il le meilleur trompettiste de son époque ? Certainement pas. Le plus novateur ? Ils le sont tous. Le plus emblématique ? On approche. Finissons-en avec trois usantes bêtises. Jamais Miles Davis n'a soufflé dans sa trompette sur le plateau de Jean-Pierre Foucault. À la triviale demande de Foucault (dont il était, pour Juliette Gréco, l'invité surprise), Miles a répondu sarcastiquement : "Non." Vanité ? Beaucoup plus simple : dignité. Deuzio : Miles est-il mort du sida ? Cela fit plaisir aux pervers de le croire, sur la foi d'un entrefilet dans un fanzine peu fiable. Et, le temps passant, on le recopie, par louche veulerie. La question n'est pas là. Miles, au cours d'une existence particulièrement existentielle, n'a sans doute pas manqué d'occasions de croiser le rétrovirus. Mais le cortège de maladies qui le suivaient partout suffit bien à rendre compte de sa mort qui rend triste. SÉRIEUSE OBSESSION MUSICALE Enfin, ceci : Miles jouait-il de dos ? C'est un peu comme si on prétendait que le chauffeur du bus conduit de dos. Miles était-il mal embouché et sa trompette, "bouchée". Non : il usait souvent et avec cette inimitable sculpture du son, de la sourdine "Hammond". Dans la vie, contrairement au rôle qu'il se donnait, Miles était l'être le plus grave, le plus délicat, aimant, précieux, cultivé. Seule obsession, il prenait la musique vraiment au sérieux. Pour avoir réalisé sa dernière interview fleuve en juin 1991, deux mois avant sa mort, Le Monde peut en témoigner. Orange Ciné Novo lui consacre une soirée, ce dimanche 10 janvier. En ouverture (à 20 h 40), un documentaire Autour de Miles, avec Vincent Bessières, le commissaire de la formidable exposition We Want Miles à la Cité de la musique à Paris (jusqu'au 17 janvier). Puis, à 21 h 10, Ascenseur pour l'échafaud de Louis Malle, coup de génie musical. A 22 h 40 : The Miles Davis Story, documentaire définitif de Mike Dibb. Et pour finir, deux concerts : Jimmy Cobb (27 octobre 2009) et celui, fabuleux, de Wayne Shorter (29 octobre). Juste pour changer d'idée sur le "jazz". Dernière chance. Francis Marmande
02/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/02/autour-de-miles_1286862_3238.html
M.I.A.M : LE COMBAT DES LASAGNES
M6 20.05 CUISINE CHAQUE SAMEDI, DES CORDONS BLEUS AMATEURS DÉFIENT LE CHEF CYRIL LIGNAC
Dans la langue de Cyril Lignac, M.I.A.M signifie "mon invitation à manger" : chaque samedi, le jeune cuisinier, mascotte culinaire de M6 ("Oui chef !", "Chef, la recette !", "Vive la cantine !" et "Le chef contre-attaque") invite des amateurs qui excellent dans la réalisation d'un plat à le défier en cuisine. A l'issue de l'émission, d'une durée de 26 minutes, trois téléspectateurs font une dégustation aveugle de chaque préparation. "Et on verra qui est le chef", assène, "avé" l'accent, le plus médiatique des maîtres queux actuels. M.I.A.M, ce sont aussi de brefs reportages (le parmesan et le chocolat pour le premier numéro) - où les marques sont clairement affichées ! - et des conseils d'achat prodigués par Gregory, vainqueur du "Dîner presque parfait", autre succès d'audience de M6. La première confrontation de la série oppose le natif de Rodez aux Chautemps (Astrid, Frank, Hélène et Ted) qui affirment être "les rois de la lasagne". Tandis que ces derniers optent pour une base bolognaise plombée d'ingrédients, notamment en fromages (parmesan, certes, mais aussi gorgonzola, cantal et emmental), leur challenger fait le choix de la légèreté et du végétal. Bien vu. Le jury (Anne, Catherine et Laetitia) ne s'y est pas trompé et plébiscite le choix de la simplicité adopté par Cyril Lignac. Si l'on imagine mal que le résultat puisse être différent, M.I.A.M, réalisée via Kitchen Factory, la société de production du cuisinier, pourrait, a minima, prodiguer quelques conseils aux perdants sur les défauts ou les faiblesses de leur préparation. Cela afin qu'eux-mêmes, et les éventuels téléspectateurs, cordons bleus à leurs heures, puissent en tirer profit. Jean-Jacques Larrochelle et Jean-Jacques Larrochelle
02/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/02/m-i-a-m-le-combat-des-lasagnes_1286861_3238.html
LE BLOGUEUR
ARTE 14.00 MAGAZINE UN NOUVEAU RENDEZ-VOUS D'INFORMATION HEBDOMADAIRE SUR L'EUROPE
Pour la nouvelle année, Arte lance deux nouvelles émissions sur l'Europe diffusées le week-end. "Le bloguEUr" (avec EU en lettres majuscules pour "Europe"), chaque samedi et "Yourope", le dimanche, remplacent le magazine hebdomadaire franco-allemand "Zoom Europa". Ces deux programmes, l'un conçu par la rédaction française, l'autre par la rédaction allemande, traiteront chaque semaine de thématiques proches qui touchent les pays de l'Union européenne. L'objectif est d'" offrir deux regards différents sur l'Europe" déclare Anthony Bellanger, présentateur du "bloguEUr". Journaliste à Courrier International, Anthony Bellanger a fait ses débuts à France Culture et assure aujourd'hui une chronique quotidienne sur i-Télé dans l'émission "Le Point sur l'info". Il est aussi régulièrement invité sur Europe 1 ou sur LCP-AN pour participer à des débats. "Le bloguEUr" n'est pas sa première collaboration avec Arte puisqu'il avait notamment participé à l'émission "Planète Presse" à l'occasion de la présidentielle de 2007. S'INTÉRESSER AUX PETITS ET GRANDS DÉBATS S'il traite de sujets d'actualité à travers le prisme d'Internet, "Le bloguEUr", produit par la Compagnie des phares et balises, n'est cependant pas tourné uniquement vers la politique. En effet, il s'agit de s'intéresser aux petits et grands débats qui concernent les 27 membres de l'Union européenne et de s'interroger sur diverses questions de société telles que : où la justice est-elle la plus indépendante, la presse la plus libre, l'ascenseur social le moins bloqué ? Quel pays reçoit le mieux les touristes, jouit de l'alimentation la plus saine ou accorde le plus d'intérêt à la sécurité routière ? ""Le bloguEUr" n'entre pas dans l'actualité chaude. On ne traite pas de front la politique en évoquant des sujets tels que l'identité nationale mais on effectue quelques enquêtes qui y sont liées plus ou moins. Une prochaine émission sera, par exemple, dédiée à la laïcité", précise Anthony Bellanger. Pour la première, ce samedi, "Le bloguEUr" s'intéressera à la violence scolaire, d'un point de vue européen. Comment l'Angleterre est-elle passée de la punition à coups de bâton au système de carton rouge ? Quelles sont les diverses méthodes utilisées en Europe pour lutter contre le "bullying", ces brimades infligées aux plus jeunes par leurs aînés ? Diverses informations seront sélectionnées sur le Web puis complétées par des interviews et des enquêtes de terrain.. Ma. Bo
02/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/02/le-blogueur_1286860_3238.html
NSA, L'AGENCE DE L'OMBRE
ARTE 22.35 DOCUMENTAIRE UNE ENQUÊTE SUR L'AGENCE NATIONALE DE SÉCURITÉ AMÉRICAINE
Les attentats du 11 septembre 2001 ont contraint le pouvoir américain à s'interroger sur l'efficacité de ses services de renseignements, et notamment l'Agence de sécurité américaine (NSA), appelée aussi "Agence qui n'existe pas" ou "Ne dites rien". Une structure sur laquelle enquête depuis longtemps le journaliste James Bamford, auteur du livre The Shadow Factory et réalisateur du documentaire du même nom que diffuse Arte, juste après le film de Sydney Pollack Les Trois Jours du condor (1975) dans le cadre d'une "Thema" intitulée "Méfiance : de la CIA à la NSA". NSA, l'agence de l'ombre revient sur les événements du 11-Septembre et la part de responsabilité de cette officine dans cette tragédie. Comment les membres d'Al-Qaïda ont-ils pu passer au travers des filets des services secrets américains ? Pourquoi la NSA n'a-t-elle pas communiqué au FBI certaines informations décisives concernant les terroristes ? James Bamford ne répond pas à toutes ces questions, mais son documentaire nous fait découvrir un univers qui s'apparente à une ville cachée. Derrière une végétation dense, protégée par des barrières électrifiées et des hommes en armes, la NSA compte plus de 35 000 employés, mathématiciens, linguistes et informaticiens disposant d'un budget hors normes et qui ont carte blanche depuis la tragédie new-yorkaise. Les opérations de surveillance, d'écoute et d'interception sont effectuées grâce à des technologies de pointe dont la description fait froid dans le dos. James Bamford et C. Scott Willis (Etats-Unis, 2008, 52 minutes). Ma. Bo.
02/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/02/nsa-l-agence-de-l-ombre_1286864_3238.html
JE VOUS ÉCRIS DE MON CAMION
PLANÈTE 18.20 DOCUMENTAIRE LE QUOTIDIEN D'UNE CONDUCTRICE DE POIDS LOURDS
Le camion est son bureau. Les routes de l'Amérique, son territoire. Canadienne et conductrice de poids lourd, Sandra effectue depuis dix ans, à bord de son 40-tonnes rutilant, le trajet Montréal-Los Angeles, soit 6 000 kilomètres en cinq jours. Chaque départ est, dit-elle, aussi difficile qu'un déménagement. Heureusement, durant toute sa traversée du continent, elle rédige, le soir, son carnet de voyage qu'elle publie sur son blog. Une façon de maintenir le lien avec ceux qu'elle aime. Les paysages, les villes et leurs gratte-ciel, des scènes de la vie quotidienne défilent. Elle les saisit, soucieuse de profiter de l'instant présent. "Mais je garde le cap comme un capitaine de bateau", confie-t-elle, sourire aux lèvres. Sa mer à elle, c'est ce ruban d'autoroute qu'elle suit jusqu'au prochain arrêt, toujours dans les mêmes drugstores. Sandra y retrouve des visages familiers. "Loin de chez nous, on est contents de se croiser, c'est comme si on se voyait au supermarché ou chez le boulanger." Et puis, il y a les rencontres. Sam, José... des conducteurs comme elle qui lui montrent leurs photos de famille, lui demandent où elle va, lui disent d'où ils viennent. Puis retour au volant. On se laisse porter, hypnotiser, comme Sandra, par la route qui défile. Jusqu'à parfois s'ennuyer un peu. Le lot des conducteurs. Jean-Pierre Armanet (France, 2009, 50 min). Véronique Cauhapé
02/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/02/je-vous-ecris-de-mon-camion_1286858_3238.html
ARGENTINE : L'ÉTERNEL ESPOIR ?
FRANCE 2 22.10 MAGAZINE "UN ŒIL SUR LA PLANÈTE" SE PENCHE SUR CE PAYS EN QUASI-FAILLITE
Trop rare, "Un oeil sur la planète", le magazine que la rédaction de France 2 concocte quatre fois par an sous la houlette de Patrick Boitet . Ce magazine qui délivre des nouvelles du monde a reçu le Prix franco-allemand du journalisme 2009 pour France : une arrogante solitude, diffusé fin 2008, et le prix du meilleur reportage au Festival international du film écologique de Bourges 2009 pour Australie : le pays de la chance ? Aujourd'hui, départ pour l'Argentine, le pays longtemps le plus riche et le plus développé d'Amérique latine : un "grenier du monde" auquel on prédisait un avenir comparable à celui du Canada ou de l'Australie, mais que les dictatures et le néocolonialisme financier à l' anglo-saxonne ont rendu exsangue. Jusqu'à plonger le pays dans la quasi-faillite à partir de 2001. Toutefois, sur les cinq reportages de ce 27e numéro d'"Un oeil sur la planète", présenté par Etienne Leenhardt et réalisé par Nicolas Maupied, pas de sujet montrant comment un Etat en arrive à se retrouver quasiment en cessation de paiement... Au moment où un ou deux pays au moins vivent sous cette menace, cela n'aurait peut-être pas été inutile. L'angle des reportages n'en concerne pas moins des aspects caractéristiques de l'Argentine : l'Etat et l'extrême pauvreté ; le culte pour les clubs de football (qui font aussi office de centres de loisirs, de mutuelles, etc.) ; la mémoire à vif de la dictature ; une expérience solaire sur l'Altiplano amérindien. Sans oublier la culture extensive du soja qui envahit le pays... et prépare les catastrophes de demain. Martine Delahaye
02/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/02/argentine-l-eternel-espoir_1286846_3238.html
SLUMDOG MILLIONAIRE
CANAL+ 20.50 FILM DU TAUDIS À LA RICHESSE EN QUINZE QUESTIONS : LE RÊVE INDIEN DE JAMAL
La vraie question à vingt millions de roupies (307 000 euros) est la suivante : que fait Jamal Malik sur le plateau de "Who Wants to Be a Millionaire ?", version indienne du jeu connu en France sous l'appellation "Qui veut gagner des millions ?" ? Sans appeler un ami ni demander au public, on a tendance à répondre que ce gamin, qui a grandi dans les bidonvilles de Bombay et sert aujourd'hui le thé aux employés d'un call center de cette ville devenue Mumbai, veut tout bêtement devenir riche. Mais Slumdog Millionaire a beau avoir été réalisé par un Britannique, Danny Boyle, le film emprunte une bonne part de ses ingrédients à son pays d'accueil, en l'occurrence au cinéma de Bollywood : l'amour, le crime, la gloire comptent autant que le lucre. Le triomphe de Jamal Malik sur le plateau de "Qui veut gagner des millions ?" est l'aboutissement d'un voyage de vingt ans dans les tréfonds de la société indienne, que le spectateur est invité à entreprendre. Adapté du roman à succès de Vikas Swarup, Les Fabuleuses Aventures d'un Indien malchanceux (éditions 10-18), le scénario de Simon Beaufoy fait correspondre une étape de la vie de Jamal, interprété par le Britannique Dev Patel, à chacune des questions que pose le Jean-Pierre Foucault indien - incarné avec une suavité maléfique par une vraie vedette de Bollywood, Anil Kapoor. Soupçonné de tricherie, le jeune homme est arrêté et subit un interrogatoire brutal qui le force à justifier chacune de ses réponses. UNE ÉNERGIE COMMUNICATIVE Si lui, le musulman, se souvient que Rama tient un arc dans sa main droite, c'est que sa mère est morte dans un pogrom mené par des fanatiques hindous. Il se souvient que les billets de 100 dollars sont à l'effigie de Benjamin Franklin, car c'est le profit qu'il a tiré d'une petite escroquerie montée du temps où il faisait le guide avec son frère Salim, aux abords du Taj Mahal. Et ainsi de suite. Il y a quelque chose de résolument dickensien dans cette histoire d'enfants livrés à tous les dangers, avec ses méchants abjects et ses anges gardiens inattendus. Mais c'est bien dans la vie quotidienne et le cinéma indiens que le film capte son irrépressible et communicative énergie. Danny Boyle pille sans scrupule la grammaire bollywoodienne, ses couleurs saturées, ses cadrages de guingois, ses paroxysmes permanents. Servi par la photographie numérique éclatante d'Anthony Dod Mantle, par une bande-son qui mêle le travail de l'un des compositeurs à succès des studios de Mumbai, A. R. Rahman et des titres de pop indienne, Slumdog Millionaire tient son rythme de bout en bout. Danny Boyle (Angleterre, 2009, 120 min). Avec Dev Patel, Anil Kappor, Irrfan Khan. Thomas Sotinel
02/01/2010
vous
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LA MORT DU JUGE D'INSTRUCTION
FRANCE 2 22.50 DOCUMENTAIRE PAROLES D'OPPOSANTS À L'ACTUELLE RÉFORME DU GOUVERNEMENT
C'est un an, jour pour jour, après l'annonce par Nicolas Sarkozy, le 7 janvier 2009, de la suppression du juge d'instruction, que France 2 diffuse ce documentaire qui s'interroge sur les raisons de la décision présidentielle. "La mort du juge d'instruction... Pour quelle justice ?" La réponse ne fait pas dans l'ambiguïté : une justice contrôlée par le pouvoir, qui essaie dans le même temps de dépénaliser le droit des affaires et de durcir le droit des mineurs. Jacques Cotta et Pascal Martin s'appuient en grande partie sur les travaux des Etats généraux de la justice, un groupe de personnalités du monde judiciaire inquiétés par les réformes du gouvernement. Ils donnent principalement la parole à des opposants à la réforme. C'est la limite du documentaire. Il y a des partisans de la suppression du juge d'instruction qui ne sont pas pour autant des apôtres du gouvernement. Le porte-parole du ministère de la justice, Guillaume Didier, tente de porter la contradiction, de même que Philippe Léger, président du groupe de réflexion sur la réforme de la procédure pénale, dont Nicolas Sarkozy a annoncé les conclusions deux mois avant qu'il rende sa copie... Mais le président n'avait pas prévu la résistance que susciterait son projet. Car le juge d'instruction n'est pas seulement Fabrice Burgaud, le juge du fiasco d'Outreau, ce sont aussi des figures comme Renaud van Ruymbeke ou Eva Joly dont les enquêtes ont gêné les pouvoirs. Ce documentaire est un témoignage supplémentaire de cette résistance. . Jacques Cotta et Pascal Martin (France, 2009, 52 minutes) Alain Salles et Alain Salles
02/01/2010
vous
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"""J'AIMERAIS TOURNER EN EUROPE"""
WILLIAM PETERSEN, LA VEDETTE DE LA SÉRIE AMÉRICAINE "LES EXPERTS", ÉVOQUE SES PROJETS
Après neuf ans de bons et loyaux services dans la police scientifique de Las Vegas, William Petersen, alias Gil Grissom des "Experts", a tiré sa révérence au cours de la neuvième saison. L'acteur américain s'est offert fin décembre une escapade parisienne, le temps d'évoquer ses projets futurs. Pourquoi avez-vous quitté "Les Experts" au bout de 192 épisodes ? Vous ne vouliez pas attendre le 200e ? J'ai travaillé pendant neuf ans sur cette série. Je ne pouvais rien faire d'autre, car elle m'occupait à plein temps. Quand j'ai eu l'opportunité de retourner au théâtre pour une pièce à Chicago, j'ai décidé de partir. J'étais arrivé à un moment où je ne pouvais rien apporter de plus et je ne voulais pas que "Les Experts" se transforme en un "soap opera" centré sur la vie privée de mon personnage. Avez-vous eu peur d'être enfermé dans ce rôle ? Quoi que je fasse, on me rappellera toujours le rôle de Grissom. C'est normal. Mais quand je joue au théâtre, le public change sa relation avec moi. Ils savent que je joue dans "Les Experts" mais après ils n'y pensent plus, ils se concentrent sur le personnage que j'interprète sur les planches. Aux Etats-Unis, les grosses séries enregistrent une baisse de leurs audiences. Est-ce dû à un manque de créativité ? Cela devient difficile de créer quelque chose de nouveau et de le maintenir à un haut niveau. Tout a été déjà fait. Peut-être aussi que le public commence a en avoir assez des séries "puzzle". Mais la télévision fonctionne par cycles. Quand j'étais petit, il y avait des westerns tous les soirs à l'antenne. Ensuite, il y a eu les séries policières comme "Deux flics à Miami", puis les séries médicales qui ont toujours fait partie de la télévision américaine. Quand "Les Experts" est arrivé, cela a créé l'événement, car le héros n'était ni un policier, ni un avocat, ni un médecin, mais un scientifique. Qui sait ce que sera le prochain cycle ? Mais il suffit que quelque chose marche pour que tout le monde veuille faire la même chose ! Quand on regarde "Mad Men" ou "Breaking Bad", on voit quand même qu'il est possible d'innover... Oui, mais il y a une très grande différence entre les séries diffusées sur les Network comme CBS et ABC et celles qui le sont sur le câble. Ces dernières n'ont pas à répondre aux attentes des publicitaires. Elles n'ont pas de problème de censure. C'est comme au football, parfois c'est plus drôle de voir un match de foot de seconde division que de première ! Comment analysez-vous le succès de la série rivale "NCIS" ? C'est intéressant, car "NCIS" n'a cessé de grimper. Ils ont construit leur audience petit à petit. C'est rare pour une série de réussir cela. Je suis toujours content quand une fiction fonctionne bien, car, pendant quelques années, il y avait tellement de télé-réalité, de jeux, de concours de chant que cela devenait difficile de programmer quelque chose de scénarisé avec des acteurs, des scénaristes... Alors quand je vois une fiction qui marche, je suis ravi ! Vous avez refusé de jouer dans l'épisode cross-over entre "Les Experts" et "Les Experts Miami". Vous regrettez la création de ces deux séries dérivées ? Ce que je n'aimais pas, c'est le timing. "Les Experts" arrivait au sommet des audiences et nous perdions nos auteurs pour les déclinaisons "Miami" et "New York". CBS avait raison de faire ces nouvelles séries dérivées. Je savais que ça allait marcher, mais j'étais un peu jaloux ! Chaque série possède sa couleur dominante, le bleu pour Las vegas, le jaune pour Miami et le vert pour New York. Est-ce intentionnel ? Oui. Quand la série a été créée, tout le monde, y compris Jerry Bruckheimer, savait l'importance qu'il y a d'avoir une belle image. Il fallait donner un style aux "Experts" pour que l'on reconnaisse immédiatement la série. Pour le choix des couleurs, "Las Vegas" se passe la nuit alors que "Miami" se déroule souvent le jour, dans une région où il y a beaucoup de soleil. De plus en plus de réalisateurs et d'acteurs du cinéma se lancent dans les séries. Est-ce une bonne chose pour la télévision ? Ce sont deux médias très différents. Des réalisateurs comme Steven Spielberg ou Martin Scorsese (qui tourne actuellement une série pour la chaîne HBO) ont l'habitude de travailler d'une certaine manière au cinéma, mais à la télévision il faut être capable de faire quelque chose que les gens ont envie de regarder dans leur salon... C'est une transition parfois difficile. Il ne faut pas oublier que l'ensemble des gens qui sont allés voir Les Infiltrés de Scorsese au cinéma, ne représente qu'une soirée des "Experts" ! Pour les acteurs qui viennent du cinéma, l'intérêt d'une série est de pouvoir développer et enrichir un personnage sur de nombreux épisodes. Même au théâtre vous ne pouvez pas faire ça. Savez-vous ce que sera votre prochain rôle ? Qu'importe que ce soit une comédie ou pas. J'aimerais travailler en Europe. A Hollywood aujourd'hui tout est une question de franchises : Superman, Spiderman, Ironman... Cela ne m'intéresse pas ! Quand je vois ce qui se passe en Italie, en France et en Angleterre, je trouve cela plus intéressant. Il y a des choses que l'on ne fait pas aux Etats-Unis. Mais je n'ai pas de pistes particulières. Je voudrais juste tenter une expérience inédite. Vous détenez les droits d'adaptation du livre "Clandestin" de James Ellroy , qu'allez vous en faire ? Je ne sais même plus si je les ai encore (rires). Ce qui est intéressant avec ce livre, c'est de voir comment l'homosexualité était tue à Los Angeles dans les années 1960, comment les hommes devaient faire semblant, se cacher. Je pensais qu'il y avait un film à faire avec ce livre. Aux Etats-Unis, cela aurait été un film indépendant. J'ai tenté de le faire pour la télévision mais cela s'est révélé compliqué. Propos recueillis par Guillaume Fraissard
02/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/02/j-aimerais-tourner-en-europe_1286844_3238.html
LE MONDE SELON MONSANTO
ARTE 22.25 DOCUMENTAIRE UNE ENQUÊTE IMPLACABLE SUR LA MULTINATIONALE AMÉRICAINE
Il y a des joyaux dans le film de Marie-Monique Robin. Tel ce document de 1987 où l'on voit George Bush père, alors vice-président des Etats-Unis, visiter les laboratoires de la célèbre multinationale américaine qui commercialise 90 % des organismes génétiquement modifiés (OGM) dans le monde. Les dirigeants de Monsanto se plaignent de la lenteur du ministère de l'agriculture à autoriser les premiers essais transgéniques. M. Bush répond en riant : "Appelez-moi si ça traîne, mon job, c'est la déréglementation." Un noeud du problème des OGM est là : règles et contrôles ont été délibérément assouplis pour permettre à cette nouvelle technologie de se diffuser. Si bien que les effets des plantes transgéniques sur la santé, l'environnement et l'économie paysanne ont été niés ou cachés. Le Monde selon Monsanto trouve là son moment le plus original, en détaillant comment les gouvernements américains successifs ont systématiquement favorisé les biotechnologies agricoles promues par la firme américaine, forçant la main de leur propre administration ou fermant les yeux sur les manipulations de données scientifiques. "DES PRESSIONS POUR NE PAS ÊTRE TROP EXIGEANT" Deux passages du film résument le processus. L'un est l'entretien avec James Maryanski, responsable de la biotechnologie à l'Agence de l'alimentation et des médicaments (FDA) entre 1985 et 2006. "En 1992, explique-t-il, le gouvernement a pris la décision de ne pas faire de nouvelle loi sur les OGM. " "Mais ce n'était pas sur la base de données scientifiques, interroge Marie-Monique Robin ; c'était une décision politique ?" "Oui, une décision politique", reconnaît Maryanski. L'autre interview forte est celle de Dan Glicksman, ministre de l'agriculture de 1995 à 2000, sous la présidence de Bill Clinton. "Si l'on n'était pas tête baissée pour les OGM, explique-t-il, on était considéré comme anti-science et anti-progrès. On aurait dû faire plus de tests. Mais les entreprises agro-industrielles ne le voulaient pas, parce qu'elles avaient fait d'énormes investissements pour développer ces produits." Quel aveu de la part d'un haut responsable ! Mais lui-même, comment s'est-il comporté ? "J'ai subi beaucoup de pressions pour ne pas être trop exigeant." Et, de fait, il ne l'a guère été. Si le film ne fait pas de révélation sur le dossier des OGM, il montre bien qu'avant d'être un dossier scientifique, la question des OGM renvoie à la démocratie - ou plus précisément, à la façon dont l'oligarchie, décideurs politiques et économiques, pervertit la démocratie - et au type d'agriculture, donc de société, que nous voulons. Un malaise, cependant, nous envahit à mesure que le film avance : pourquoi le documentaire ne donne-t-il pas la parole à la défense ? La réponse vient en conclusion : on entend une discussion avec un porte-parole de Monsanto qui explique qu'après réflexion il a été décidé de ne pas répondre à la journaliste. Tant pis pour la firme. Après tout, qui ne dit mot consent... Marie-Monique Robin (France, 2007, 108 minutes). Hervé Kempf
02/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/02/le-monde-selon-monsanto_1286848_3238.html
LES BOUGON
M6 20.40 SÉRIE LES ANTIHÉROS, PARESSEUX, PROFITEURS ET VOLEURS, SONT DE RETOUR
Ils reviennent et sont toujours aussi socialement incorrects ! Les Bougon, épouvantable famille française d'affreux, sales et méchants (sans oublier profiteurs et voleurs) sont de retour en "prime time" sur M6 avec deux épisodes (2 x 52 minutes), un peu plus d'un an après leurs premières apparitions. En octobre 2008, cette série née au Québec en 2004 et adaptée avec talent pour le marché français par deux maisons de production (GMT et Calt) avait séduit 3,3 millions de téléspectateurs, soit 13,6 % du public âgé de 4 ans et plus. Réputés pour leur gestion au cordeau, les responsables de M6 attendaient les premières audiences avant de donner leur feu vert pour programmer de nouveaux épisodes. L'examen ayant été passé avec un certain brio, "Les Bougon" reviennent, toujours aussi paresseux et plus que jamais prêts à gruger l'Etat, à profiter de manière illicite des aides sociales, à ignorer les factures et à voler la société. Si, par le plus grand des hasards, Nicolas Sarkozy, adepte de la France qui se lève tôt, tombait lors d'une soirée télé sur ces Bougon, il aurait sans doute du mal à s'en remettre... SÉRIE ORIGINALE AUX PERSONNAGES CRÉDIBLES Les raisons du succès populaire de cette série sont multiples. D'abord un ton inhabituel, irrespectueux mais assez décalé pour ne pas sombrer totalement dans la vulgarité. Ensuite, un ancrage assumé dans la réalité sociale de la France d'aujourd'hui qui permet, mine de rien, d'évoquer des sujets sensibles. Autre point fort : une qualité de production qui se voit à l'écran. L'alliance surprenante entre GMT, maison habituée aux téléfilms de facture plutôt classique (Les Misérables , "Julie Lescaut", Napoléon ou Jean Moulin) et Calt, spécialiste des fictions courtes et efficaces ("Caméra café", "Kaamelot") a donné naissance à un produit bien écrit, bien réalisé et bien joué. Sam Karmann, cinéaste de talent, a réalisé la plupart des épisodes, mais Michel Hassan, réalisateur de Mains propres, argent sale, programmé à 20 h 40 (suivi de Justice pour tous), fait également preuve de savoir-faire dans cet épisode qui pointe avec justesse les dérives du système bancaire. Le succès de cette série vraiment originale tient aussi, évidemment, au casting. De Patrick Bonnel (Paul Bougon, effroyable chef de famille) à Cathy Bodet (son épouvantable compagne) en passant par Olivier Broche (Mon Onc'), Virginie Guillou (Dodo, la fille totalement allumée), Jean-André Laville (Pépère), Nassereba Keita (Noa) et Vincent Debost (Bébé), ils sont tous crédibles. Et parfois même attachants. Alain Constant
02/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/02/les-bougon_1286854_3238.html
L'ÉROTISME SELON WAKAMATSU
BLAQ OUT ÉDITE DEUX COFFRETS DES PRINCIPAUX FILMS DU RÉALISATEUR JAPONAIS
Un couple fait l'amour sous une photo géante de Staline, un homme fouette une femme jusqu'à l'épuisement, une jeune fille urine, pour l'humilier, sur l'étudiant qui l'a regardée se faire violer sans intervenir, deux corps suicidés dessinent sur l'asphalte de l'autoroute deux idéogrammes tragiques. Les images fortes ne manquent pas dans le cinéma de Koji Wakamatsu. Né en 1936, il a signé de nombreux films à petits budgets, pour la plupart à composante érotique. Mais l'érotisme chez Wakamatsu n'est pas exploité uniquement pour sa capacité de stimulation du spectateur. Il s'articule avec une réflexion politique et psychologique aiguë et lyrique. Proche des mouvements d'extrême gauche nippons dès les années 1960, le cinéaste n'a pas eu d'autre ambition que d'utiliser le sexe pour articuler l'Histoire avec l'intime, et le politique avec la psyché individuelle. Pour s'interroger sur les mutations du Japon d'après-guerre. Le beau coffret proposé par Blaq Out contient quatre de ses films les plus importants. Solitude des grands ensembles, aliénation moderne, frustration sexuelle, impuissance, patriarcat déficient, illusions idéologiques y sont le déclencheur de situations extrêmes où les relations entre les hommes et les femmes ne semblent possibles qu'au travers de la violence et de l'humiliation. Les Secrets derrière le mur (1965), Quand L'embryon part braconner (1966), Les Anges violés (1967) et Va, va, vierge pour la deuxième fois (1970) sont des productions à faibles coûts, audacieuses, qui dépassent les conventions du genre érotique tout en en utilisant la rhétorique. C'est une forme inédite de beauté formelle qui frappe tout d'abord à la vision de ses films, tournés pourtant avec peu de moyens et dans lesquelles l'influence du cinéma de Jean-Luc Godard se révèle productive. Etrangement, l'écran large, point commun de ces quatre titres, est utilisé pour filmer des huis clos, des situations confinées dans l'espace restreint des appartements nippons. La conséquence de ce parti pris est un morcellement de l'écran, un découpage fétichiste des corps, une sensation d'abstraction née de la contrainte elle-même. Les quatre films sont chacun accompagnés d'une courte préface énoncée par des cinéastes (Damien Odoul, Marina de Van, Lucile Hadzihalilovic, Jean-Pierre Bouyxou), toutes brillantes, réussissant à couper l'herbe sous le pied de l'approche critique. Blaq Out édite également, en double DVD, United Red Army, le dernier titre en date du cinéaste, une oeuvre où l'ancien compagnon de route des activistes des années 1960 et 1970 décrit l'autodestruction sanglante à laquelle se sont livrés les militants de l'Armée rouge japonaise. . 1 coffret de 4 DVD et 1 coffret de 2 DVD, Editions Blaq Out Jean-François Rauger
02/01/2010
vous
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Intempéries : au moins 52 morts au Brésil
Au moins 52 personnes sont mortes depuis mercredi dans l'Etat de Rio, à la suite de trois jours de pluies diluviennes qui ont provoqué de nombreux glissements de terrain.
Au moins 52 personnes sont mortes depuis mercredi, dont 19 vendredi dans un hôtel de tourisme, dans l'Etat de Rio au Brésil, à la suite de trois jours de pluies diluviennes qui ont provoqué de nombreux glissements de terrain. Ce bilan devrait s'alourdir dans les prochaines heures en raison du nombre important de disparus. Jeudi, des glissements de terrain et l'effondrement d'habitations précaires avaient fait vingt morts, essentiellement dans Rio et sa proche région. Bien que la pluie ait cessé vendredi, les autorités ont placé Rio en état d'alerte par crainte de nouveaux glissements de terrain. Sur les pentes raides des collines de la ville se trouvent de nombreuses favelas. Vendredi à l'aube, un petit hôtel de luxe situé sur l'île touristique d'Ilha Grande, au sud de Rio, a été en partie enseveli sous une coulée de boue, faisant au moins 19 morts, ont annoncé les services de secours. Mais "d'après nos conversations avec les voisins, on pourrait atteindre le nombre de 40, malheureusement", a déclaré le commandant des pompiers à la radio CBN. "C'est une vision d'horreur (...) un amas de boue, de pierres et d'arbres recouvrent plusieurs maisons", avait déclaré auparavant à la même radio le vice-gouverneur de Rio qui est responsable des équipes de secours. "LES CHANCES DE RETROUVER DES SURVIVANTS SONT TRÈS FAIBLES" Selon M. Pezao, une partie de l'hôtel Sankay où se trouvaient une quarantaine de touristes – dont la nationalité n'est pas encore connue – a été ensevelie sous des tonnes de boue et de débris végétaux, mais d'autres maisons voisines louées pour les fêtes de fin d'année ont également été touchées. Une centaine de pompiers et de membres de la Défense civile locale participaient aux secours sur la plage de Bananal où se trouve l'hôtel. Les autorités n'ont pas d'informations précises sur le nombre de personnes qui pourraient être ensevelies, mais d'après le commandant des pompier, "les chances de retrouver des survivants sont très faibles". "Comme les maisons et l'hôtel se trouvent sous des tonnes de boue, le sauvetage est plus difficile. On ne peut pas utiliser d'équipements lourds pour ne pas courir le risque de nouveaux éboulements de terrain", souligne un communiqué des autorités. L'hôtel Sankay, ouvert en 1994, était complet pour le réveillon de fin d'année, de nombreux touristes brésiliens et étrangers ayant coutume de fêter le Nouvel An sur cette petite île sauvage et difficile d'accès, située au large de la ville d'Angra dos Reis, dans l'Etat de Rio. Les pompiers ont par ailleurs déclaré qu'au moins sept autres personnes avaient trouvé la mort au centre-ville d'Angra dos Reis, victimes également de glissements de terrain.
02/01/2010
ameriques
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